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Editorial 24-01-2010 - Les Haïtiens clament : "de l’aide, des soins, pas des militaires !"

dimanche 24 janvier 2010, par Robert Paris

LA VOIX DES TRAVAILLEURS

« Travailleurs de tous les pays unissez-vous »

Karl Marx

Lire sur Haïti

Comment le peuple travailleur d’Haïti voit les troupes d’occupation

Le rôle de la Minustah, le film

Les Haïtiens manifestent et clament : "de l’aide, des soins, pas des militaires !"

Les grandes puissances les occupent militairement au lieu de s’occuper des victimes

Si les télés, les radios et les journaux nous montrent de l’aide qui parvient à Haïti, les Haïtiens, eux, ne semblent pas l’avoir reçue, dans leur grande majorité. Par contre, c’est sans délai que des forces armées considérables (des dizaines de milliers de soldats) venues des USA, de France et du reste du monde ont débarqué en Haïti, suite au tremblement de terre qui a frappé la capitale, Port-au-Prince. Par contre, la nourriture, les sauveteurs et les soins ne sont pas encore parvenus aux Haïtiens.

Malgré un discours médiatique voulant faire croire à une intervention humanitaire, la tâche essentielle qui leur est assignée est le rétablissement de l’ordre. Elles sont équipées pour la répression et non pour le sauvetage. Des unités US de combat parachutistes, les fameux bérets noirs, occupent le pays aux côtés des Marines. Les équipes de sauveteurs liées à des ONG, un avion-hôpital et des secouristes avec chiens ont été bloquées par la priorité donnée à l’envoi des militaires. Les forces armées sont des centaines de fois supérieures en nombre aux sauveteurs. Des navires de guerre US sont à proximité d’Haïti pour intervenir en cas d’insurrection générale. Aucune force gouvernementale, aucune armée n’a participé aux sauvetages de première urgence réalisés à mains nues par la population elle-même. Les Haïtiens clament : « de l’aide, des soins, pas des militaires ! »

Si les forces armées du monde se sont empressées d’intervenir, c’est pour éviter que le vide du pouvoir, causé par le tremblement de terre qui a mis à bas les bâtiments de l’Etat et des forces armées d’occupation étrangères, et, plus encore, la perte de crédibilité du pouvoir ne se transforme en tremblement de terre... social. Et ces forces cachent leur peur du peuple d’Haïti derrière la crainte de prétendus pillages, mais, quand on crève de faim, se servir dans les magasins, c’est simplement vital, ce n’est pas un crime ! Les vrais bandits, ce sont les grandes puissances qui n’ont cessé de soutenir des dictatures en Haïti et les escadrons de la mort, macoutes ou autres. Et les armées étrangères occupant le pays depuis 2004, cette prétendue « force de paix » qui prétendait défendre la sécurité des civils, n’ont fait qu’attaquer violemment la population des quartiers pauvres et des bidonvilles, comme lors des émeutes de la faim en 2008. Les troupes étrangères n’ont rien fait contre les bandes armées de la classe dirigeante, contre la misère et l’exploitation. Rien face aux cyclones. Celui qui a détruit Gonaïves, la ville la plus révolutionnaire du pays, a laissé le peuple englué dans la boue sans que cette fameuse communauté internationale ne bouge le petit doigt.

L’humanitaire des grandes puissances laisse pantois : le ministère de l’intérieur français a momentanément suspendu les reconduites à la frontière des Haïtiens en « situation irrégulière » sans les régulariser. La Banque Mondiale a reporté de cinq ans le paiement de la dette alors que, selon ses propres spécialistes, Haïti ne sera pas reconstruit avant dix ans !

Le véritable but des interventions armées étrangères est de désamorcer la révolte sociale qui a débuté en 1986, lorsque le peuple haïtien s’est débarrassé de la dictature des Duvalier que soutenaient les pays occidentaux. Oui, le peuple travailleur d’Haïti a vécu une révolution, en s’attaquant aux barbares « tontons macoutes » et en renversant la dictature de « Bébé Doc » Duvalier. Le pouvoir a été durablement ébranlé. Ce n’est que récemment que les grandes puissances occupant Haïti ont permis à l’armée haïtienne de retourner dans ses quartiers généraux. L’échec de cette révolution haïtienne provenait du fait que les partis et organisations qui en avaient pris la tête, loin de souhaiter la prise de pouvoir par les opprimés, ne visaient qu’à faire rentrer le peuple dans le rang. Jamais ils n’ont averti le peuple contre l’armée de Duvalier. Jamais ils n’ont appelé le peuple à se lier aux petits soldats et ces derniers à ne plus obéir à leur hiérarchie. Tous les efforts des dirigeants syndicalistes, religieux, sociaux-démocrates et staliniens, ainsi que d’Aristide, ont été de réconcilier le peuple avec l’armée et les classes dirigeantes.

Quant aux travailleurs d’ici, loin de marcher dans la propagande humanitaire hypocrite des grandes puissances, ils devraient souhaiter au peuple haïtien ce que ses oppresseurs craignent le plus : que le peuple se libère et que l’île révolutionnaire renaisse de ses cendres ! L’île où les esclaves se sont libérés en battant l’Angleterre et la France, n’a pas besoin de troupes étrangères d’occupation, même si ces brigands se disent animés des meilleures intentions du monde ! Ces puissances-là n’ont jamais eu la moindre intention humanitaire et pacifique !

Les grandes puissances veulent seulement démanteler les villes, enfermer la population travailleuse dans des camps militairement surveillés, faire travailler la population à du déblaiement et faire partir les autres en exode. Ils veulent seulement écraser l’ile révolutionnaire. Ne soyons pas dupes du matraquage médiatique et politique.

Messages

  • Le pape Benoît XVI a appelé au calme dans les rues de Haïti samedi pour que les troupes puissent occuper calmement l’île. C’est le goupillon qui vient au secours du sabre !

  • Le Figaro du 16-01-2010 :

    Manifestation des habitants

    Une barricade formée de pneus en feu, de débris et d’au moins quatre cadavres bloquait aujourd’hui une route à la sortie de Port-au-Prince, où des habitants manifestaient pour exiger le retrait de piles de cadavres en décomposition.

    "Ils ont déjà emporté quelques corps, mais il y en a plus, beaucoup plus", dénonçait Charles Weber, un prêtre vaudou âgé de 53 ans, présent parmi la trentaine de personnes entourant la barricade sur la route de Carrefour (sud-ouest de la capitale).
    Alors qu’il parlait, un car de la police nationale haïtienne était contraint de faire un rapide demi-tour par les manifestants.

    TF1 News :

    La police est intervenue vendredi pour disperser des dizaines de manifestants affamés qui s’étaient réunis pour réclamer des vivres et de l’eau devant le quartier général de la police, où le président René Préval et son gouvernement ont trouvé refuge. "Nous avons faim, nous avons soif, nous n’en pouvons plus. Nous voulons de la nourriture, nous voulons de l’eau. A bas Préval, vive Obama", scandaient les manifestants. Préval, dont le palais présidentiel et la maison se sont écroulés lors du séisme du 12 janvier qui pourrait avoir fait jusqu’à 200.000 morts, a déclaré que son gouvernement et la communauté internationale faisaient tout leur possible pour apporter l’aide nécessaire aux centaines de milliers de personnes dans le besoin. "Nous ne restons pas assis à ne rien faire. Je sais quelle est l’ampleur du problème et à quel point les gens souffrent", a-t-il dit.

    L’illustration de ces problèmes logistiques est quotidienne. Vendredi, un millier de rescapés ont pris d’assaut un camion de la 82e aéroportée lors d’une distribution de nourriture et d’eau. Débordés, les soldats américains se sont retirés précipitamment après avoir distribué 600 rations, repartant avec 250 repas.

    La Minustah, dont le contingent a été porté à 12.651 militaires et policiers par le Conseil de sécurité depuis le tremblement de terre, a elle pour mission d’aider les autorités haïtiennes à maintenir un "environnement sûr et stable".

    Le Point :

    La police était intervenue la veille pour disperser des dizaines de manifestants affamés qui s’étaient réunis pour réclamer des vivres et de l’eau devant le quartier général de la police, où le chef de l’Etat et son gouvernement ont trouvé refuge.

    Europe 1 :

    Europe1 - ‎17 janv. 2010‎

    Les manifestants avaient bloqué l’une des routes d’accès à la capitale avec une barricades formée de pneus en feu et d’au moins quatre cadavres.

  • Romandie News

    Haïti : tirs et gaz lacrymogènes lors d’une distribution d’aide

    PORT AU PRINCE - Les troupes des Nations unies ont procédé samedi à Port-au-Prince à des tirs d’avertissement et lancé des gaz lacrymogènes après qu’une distribution d’aide à des centaines d’Haïtiens eut dégénéré, a constaté un photographe de l’AFP.

    La distribution de nourriture, d’huile de soja, d’eau et de radios sur un ancien aéroport militaire avait débuté dans le calme, avec deux longues files d’habitants attendant leur tour. La plupart n’avait encore vu aucune aide depuis le séisme qui a détruit leur domicile le 12 janvier.

    De petites échauffourées ont opposé certains d’entre eux. Puis la situation a dégénéré et la foule s’est précipitée vers l’aide qui lui était destinée. Les Casques bleus brésiliens ont alors fait usage de leurs armes, procédant à des tirs d’avertissement et lançant des gaz lacrymogènes.

    Il était difficile de déterminer si la distribution de cette aide du Programme alimentaire mondial (PAM) et de la Mission de stabilisation de l’ONU en Haïti (Minustah) a pu s’achever.

  • Les forces d’occupation n’ont rien fait pour lutter contre la misère, la dégradation des infrastructures et la déforestation massive qui ont amplifié les effets d’une série de catastrophes naturelles – de violents cyclones en 2004 et 2008 et maintenant le séisme.

    Au lieu de cela, elles se sont contentées de faire la police au milieu d’une catastrophe sociale et ont commis les crimes habituels et caractéristiques de toutes les forces de police. Selon Ban Beeton, dans un article de la NACLA sur les Amériques, « la mission de stabilisation de l’ONU en Haiti (MINUSTAH), qui a commencé en juin 2004, a été marquée pratiquement dés le premier jour par des scandales de meurtres, de viols et autres violences commises par ses troupes. »

  • La vérité froide et cynique c’est que ce téléthon post-séisme, cette ignoble course au « secourisme » permet surtout aux grandes industries de se positionner pour obtenir des parts de marchés pour la reconstruction en faisant financer l’opération marketing du secourisme par les téléspectateurs dont on monnaye la sensibilité. Et que ce séisme va permettre encore un peu plus aux grandes puissances de coloniser économiquement Haïti. Alors que cela ne devrait pas être aux organisations privées mais aux gouvernements, à l’UE, à l’ONU d’apporter l’ensemble de l’aide internationale, solidaire, et sans alourdir la dette déjà démesurée d’un pays dont on a déjà refusé l’annulation en 2003.

    La question, enfin, est de se demander combien de temps encore nos politiciens et nos médias croient-ils pouvoir encore nous mépriser à un tel point qu’ils se permettent aujourd’hui de monnayer notre humanité ? Eteignons pour un temps nos postes de télévisions. Cessons de lire nos « grands » journaux. Et réfléchissons sur ce qu’est le pire fléau qu’ai eu à affronter Haïti depuis son indépendance. Fermons les yeux, et entendons ces mots d’Alphonse de Lamartine lorsqu’il écrivait sur Toussaint Louverture en 1850 : « Je suis de la couleur de ceux qu’on persécute ! »

  • Le Devoir de Montréal a publié de nouveau une chronique de l’écrivain haïtien Georges Anglade, mort lors du séisme et Courrier International l’a reprise. Sa conclusion résumait son sentiment sur ce qu’il convenait de faire (et de ne pas refaire) après les émeutes de la faim de 2007 et 2008 : « des solutions radicales qui sortent des petits ajustements quotidiens pour contraindre aux changements de fond, aux indispensables ruptures d’orientation. Et puis après ? Nous savons que nous entrons dans une crise totale, capitale. Mais nous n’avons aucune idée de comment ni de quand nous nous en sortirons. Ni dans quel état. ».

  • Certes, l’engagement américain, présenté comme humanitaire, a été le plus rapide. Mais on sait que l’humanitaire est un pavillon qui peut flotter sur toutes sortes de marchandises. Des émeutes révèlent qu’en réalité les Haïtiens tardent à être secourus, ou du moins que les secours sont sélectifs. On peut s’attendre à des émeutes qui seraient réprimées grâce à un impressionnant déploiement militaire.

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