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Le cerveau

lundi 28 janvier 2008, par Robert Paris

D’où vient l’intelligence humaine ?

Cerveau et chaos, le film

Le cerveau, Jean-Pierre Changeux, le film

Les signaux neuronaux

Is there Deterministic Chaos in the Brain Function (in english)

Ilya Prigogine et Isabelle Stengers, dans « Entre le temps et l’éternité » :

« Des séries de données extraites de mesures de l’activité du cerveau par électro-encéphalogramme ont été étudiées. A l’état de sommeil profond, l’activité du cerveau aurait les traits du chaos déterministe et serait caractérisée par un attracteur fractal à cinq variables indépendantes. En revanche, à l’état de veille, aucun attracteur ne peut être repéré : lorsqu’elle participe d’un régime d’existence ouvert sur l’environnement, l’activité cérébrale semble ne plus pouvoir être représentée comme un système dynamiquement auto-engendré. Enfin, au cours de crises d’épilepsie, un attracteur fractal peut à nouveau être repéré, mais dans un espace qui pourrait être défini par deux variables indépendantes seulement. L’épilepsie, loin d’être assimilable à un comportement irrégulier, se caractériserait au contraire par une « régularité » trop grande de l’activité cérébrale… »

La dimension de l’attracteur étrange du cerveau (EEG) est élevée et, si elle diminue, c’est la maladie (exemple : l’épilepsie)

"On a montré, in vitro, que des neurones isolés de calamar géant ou des petits réseaux isolés de cochon d’inde ou de certains crustacés présentent une dynamique chaotique. (...) Henri Korn et Philippe Faure ont confirmé l’existence (du chaos déterministe) en étudiant l’activité synaptique de neurones de poissons. (...) Même si l’activité des neurones isolés est chaotique, la dynamique du champ moyen peut être régulière : le chaos au niveau neuronal n’implique pas le chaos à grande échelle. Ainsi, le comportement dynamique du cerveau résulte d’une dynamique interne riche, complexe et à plusieurs échelles."

Hughes Berry et Bruno Cessac

dans "Du chaos dans les neurones"

L’activité spontanée constante du cerveau qui consomme 20% de l’énergie du corps servirait à équilibrer dynamiquement les neurones excitateurs et inhibiteurs, ce serait aussi une façon d’ajuster sans arrêt ses estimations et de se projeter dans le futur. Cela prouve que ces systèmes sont toujours prêts à interagir. Alors, ils ne serviraient pas seulement à répondre, mais aussi à anticiper nos besoins en fonction d’expériences passées.

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LE NEURONE

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Le premier élément du cerveau est sa cellule vivante, le neurone. Chacun sait qu’elle est parcourue par l’influx nerveux qui est certainement relié à nos sentiments, à nos images, aux informations reçues par le cerveau sur l’état intérieur et extérieur du corps et aux informations que le cerveau envoie, ordres moteurs ou associations d’images. Et on aimerait bien savoir comment. Nous allons donc commencer par chercher où réside la non-linéarité du fonctionnement du neurone. Nous le ferons à la fois en scrutant le fonctionnement électrique, biochimique et également en examinant la structure du neurone, sa forme, son mode de constitution, son évolution adaptative. Puis nous verrons que cette structure est inséparable d’une autre qu’est la synapse, la petite vésicule qui sert de lien entre deux neurones et transforme des réactions biochimiques en transmissions électriques. Là encore nous ferons appel aux notions de non-linéarité. La transmission électrique ne se passe pas à un seul niveau de structure mais en concerne plusieurs : non seulement la synapse et le neurone mais des niveaux au dessus comme les circuits neuronaux et les interactions entre zones et des niveaux en dessous comme les neurotransmetteurs. Nous allons examiner ce cerveau hiérarchique et constater que cette hiérarchie se fonde sur une échelle de temps des diverses interactions. Le lien entre hiérarchie et rythmologie apparaît.

Il est donc question de trouver dans le fonctionnement du cerveau de nombreuses horloges ou pace-makers, les fameux batteurs de rythmes. Nous les trouverons dans les mécanismes de rétroaction. Encore un terme dont il est nécessaire de préciser l’emploi dans la théorie du chaos. Rétroaction ne signifie pas action en arrière dans le temps mais action couplée à une réaction qui intervient sur la source, soit de manière positive dite excitatrice soit de manière négative dite inhibitrice. Dans les régulations du corps qui sont contrôlées par le cerveau nous trouvons maints exemples de ces rétroactions. Prenons en un : un jeune cyclomotoriste qui a été renversé par une voiture ne s’est aperçu qu’une fois retourné chez lui qu’il avait perdu son bras. En effet, pendant un certain temps un neurotransmetteur, l’endorphine, bloquait le passage du neurotransmetteur excitateur censé déclencher l’information sur la douleur.

Ces rétroactions, nous allons les trouver à tous les niveaux, depuis les gènes jusqu’aux relations entre zones du cerveau. Elles ont un même type de mécanisme, une boucle formée par un processus et un autre en sens inverse et qui définit un rythme quasi-périodique mais auto-régulé et interactif. C’est cette interactivité qui est fondamentale puisque ces pace-makers peuvent se coupler. Quand ils se couplent à trois batteurs ayant des fréquences autonomes suffisamment différentes, ils déterminent un rythme commun chaotique. Derrière l’apparent désordre se cache un ordre permettant un grand nombre de rythmes différents et capable de sauter brutalement d’un rythme à l’autre. Cette dynamique permet de représenter un très grand nombre d’états différents.

Par contre, si trois batteurs ont des fréquences dont les rapports sont simples, par exemple des fréquences doubles les unes des autres, ils peuvent se synchroniser et définir un rythme commun quasi-périodique, c’est-à-dire ayant une régularité visible même si elle n’est pas strictement périodique.

La théorie du chaos cardiaque a étudié des interactions entre trois batteurs de rythme et montré qu’il n’y a pas simplement 1+1+1 mais une nouvelle structure constituée par la boucle de réactions. Des propriétés nouvelles apparaissent qui n’existaient pas au niveau inférieur et en particulier une nouvelle échelle de temps. Le cerveau est tout entier basé sur la rythmologie. Tout le fonctionnement cérébral peut être interprété comme des couplages à trois pace-makers comme c’est le cas pour le mécanisme cardiaque. Des couplages à trois fondent le rythme circadien qui indique à notre corps la mesure de 24 heures aussi bien que des rythmes beaucoup plus rapides d’une seconde et même moins. Nous montrerons également des cycles à trois batteurs réglant des fonctions sensorielles, motrices, hormonales, et également les sentiments de plaisir ou de peur ou encore la mémoire et la conscience.

L’objectif de la partie suivante sera d’expliciter ce qui semble être la loi du fonctionnement du cerveau. La question sera : comment ce message apparemment désordonné peut être compris par le cerveau et traduit en informations, en ordres ou en idées. En effet, le message que capte l’électroencéphalogramme sur la surface du crâne apparaît très désordonné et ne semble porteur d’aucune information cohérente. Pourtant nous savons que le cerveau se sert justement de ce message pour ses transmissions, ses informations comme ses ordres et ses raisonnements. Le désordre du message, loin de nuire à la précision des ordres, la facilite. Quant à la règle de base du fonctionnement, elle semble être la suivante : plus le message est destiné à un grand nombre de niveaux de la structure, plus il a un degré élevé de désordre, ce qui équivaut à un grand nombre de paramètres. Plus le message est diffusé dans une zone importante plus la dimension chaotique du message grandit. Un message porteur d’information part d’une source localisée comme par exemple un récepteur sensoriel. C’est un message assez régulier donc la dimension basse du message électrique correspond à l’occupation d’un petit niveau de structure. Il va être diffusé à un nombre plus important de niveaux en perdant d’autant en régularité donc en augmentant sa dimension chaotique. Cela revient à dire que le nombre de paramètres grandit. Un message très régulier ne peut pas occuper une zone importante. C’est ce qui permet au cerveau de ne jamais être bloqué. Il passe un grand nombre d’informations et d’ordres en même temps dans ses circuits. Le cerveau est un appareil multitâches et il accomplit simultanément de nombreuses fonctions. Si une information transitait trop longtemps dans une zone importante, elle bloquerait les autres ordres et informations qui doivent y passer et toutes nos fonctions pourraient en être affectées. Le cerveau ne pourrait plus gérer les informations même élémentaires. C’est la crise d’épilepsie. C’est ce que veulent dire les scientifiques comme Goldberger qui ont lancé la formule : « le chaos c’est la santé ». En effet, si un message trop régulier, trop périodique passe dans les circuits, il va pouvoir interagir avec de nombreux rythmes et donc passer dans une zone importante sans avoir perdu de sa régularité. Il viole la loi que nous avons indiquée précédemment. Le mécanisme d’auto-régulation par déstructuration ne fonctionne plus. Cette interprétation de la crise d’épilepsie a eu tout récemment un succès important puisque l’on a montré qu’elle permettait de la prévoir et également ouvrait la voie pour une thérapie.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est nécessaire d’expliciter la notion d’horloge chaotique. On trouve dans le commerce ce type d’objet de curiosité qui s’agite en tous sens sans jamais s’arrêter. Il s’agit d’un pendule qui oscille au dessus d’un socle en bois à l’intérieur duquel on a disposé plus de trois aimants. Dès qu’il y a trois aimants, le mouvement est extrêmement agité en permanence sans jamais s’arrêter ni finir par se stabiliser et se régulariser. Pourtant les forces de gravitation et du magnétisme auxquelles obéit le pendule sont bien connues et formulables par des lois mathématiques. Des lois et cependant un apparent désordre, il s’agit bien du chaos déterministe. On peut faire partir le pendule deux fois de suite quasiment du même point et en peu de temps les deux suites de mouvements divergent complètement. Le mouvement est imprédictible. Il est sensible aux conditions initiales. C’est une horloge chaotique. Parler d’horloge peut sembler curieux quand on voit cette agitation. Eh oui, malgré ce désordre apparent il y a des rythmes et donc une mesure du temps. Cet ordre ne ressemble pas au tic tac de la bonne vieille horloge. Et pourtant l’horloge chaotique a une très grande précision. Notre cerveau en est un exemple. Il contient divers rythmes et peut mesurer des temps aussi bien par rapport à un rythme de 24 heures que par rapport à un rythme d’un millième de seconde. Le cerveau dans son ensemble ayant plus de dix niveaux de référence est donc l’une des horloges biologiques les plus précises au monde ! Et en couplant ces rythmes de base, le cerveau est capable de constituer des milliards de milliards de rythmes représentant autant d’états qui sont les images mentales pour les formes, les mouvements, les couleurs, les sentiments ou les idées.

Le chaos déterministe de l’influx nerveux

Quittons donc le pendule chaotique pour parler du cerveau. On sait depuis longtemps que le cerveau est parcouru par des courants électriques et on a pu les capter sur la surface du crâne. L’électroencéphalogramme témoigne d’une agitation d’autant plus étonnante du potentiel électrique qu’il s’agit de celui d’une personne endormie. Les huit lignes représentent les mesures prises en huit points différents de la surface du crâne. Le désordre du message est évident. L’explication qui en a été donnée pendant longtemps est la suivante : l’absence de régularité proviendrait d’un trop grand nombre de paramètres. En effet, les neurones qui sont l’élément de base des circuits électriques sont au nombre d’environ cent milliards et les circuits qu’ils constituent sont encore des millions de fois plus nombreux, sans parler du nombre d’états possibles de chacun d’eux. Une autre interprétation de cette agitation a consisté à dire que le désordre proviendrait du bruit des circuits, c’est-à-dire du hasard. Mais, dans une conception comme dans l’autre, on ne parvient pas à comprendre ce que fait le cerveau pour traduire ce message en ordres et informations précis. En fait, il suffit de trois paramètres pour avoir un phénomène d’apparence désordonnée. Et, pour le cerveau, il n’y aurait pas des milliers ni des millions mais seulement une dizaine de paramètres du fonctionnement cérébral.

Commençons par étudier la cellule vivante qui est adaptée à cette fonction de transmission de l’influx électrique, le neurone. Examinons une photo de neurones, un schéma du fonctionnement de la cellule nerveuse et une coupe du réseau neuronal d’une zone du cerveau. Dans le neurone, le courant va toujours dans le même sens : du corps du neurone et des branches, les dendrites, vers l’axone qui envoie le courant à un autre neurone. Quand le neurone a été découvert en 1871, on a développé une conception linéaire de son fonctionnement selon laquelle il ne serait qu’un simple additionneur des impulsions électriques reçues et qu’il se contenterait de transmettre quand le total des potentiels reçus dépasse un certain seuil. Mais d’abord le neurone n’est pas un simple élément de circuit électrique qui se contenterait de transmettre les messages électriques qu’il reçoit. En 1952, les chercheurs Hodgkin et Huxley ont expliqué le mécanisme qui permet au neurone d’être un émetteur et récepteur d’influx électrique autonome, c’est à dire un oscillateur. Ce n’est donc pas un simple élément de circuit mais une source d’impulsions régulières. C’est une horloge. Et la question se pose alors : quel est le type de cette horloge, périodique ou chaotique ?

Ce qui fait que le neurone émet du courant électrique, c’est que le milieu dans lequel il baigne n’est pas au même potentiel électrique que l’intérieur de la cellule. Si cette différence de potentiel est maintenue, le neurone est au repos. Dans ce cas, la membrane est imperméable aux mouvements d’ions sodium qui changeraient sa polarité. Mais si cet équilibre est déstabilisé, si la différence de potentiel diminue, la membrane va s’ouvrir par un canal qui laisse passer sélectivement les ions sodium. Ce passage est brutal. Une grande quantité d’ions passent d’un seul coup et ce mouvement représente donc un courant électrique, une décharge. L’onde de dépolarisation du neurone se propage alors très rapidement dans son corps puis tout au long de l’axone. C’est la rafale électrique du neurone. Elle se produit au coup par coup et très rapidement en environ un millième de seconde. Soulignons qu’elle se produit quand le neurone n’est pas dans un état d’équilibre. C’est toujours le même stimulus qui se propage. L’amplitude ne varie pas. Par contre, ce qui peut changer c’est le temps qui sépare deux rafales, c’est-à-dire la fréquence de l’influx. Le courant neuronal est donc en modulation de fréquence et non en modulation d’amplitude. De manière autonome, sans être excité de l’extérieur, un neurone a son propre rythme d’émission de rafales. Il est déterminé par un autre mécanisme plus lent, de l’ordre de la seconde. Il s’agit cette fois des ions calcium et potassium qui ont un mouvement d’entrée et de sortie de la membrane. Et c’est ce mouvement cyclique qui détermine la fréquence des émissions de rafales. Ce mécanisme de trois ions qui entrent et sortent du neurone produit des émissions électriques avec une certaine rythmicité causée par le fait que les canaux, qui s’ouvrent sélectivement dans la membrane aux ions calcium et potassium, rétroagissent. Le canal du calcium est sensible au potentiel créé par les ions potassium et inversement. Cela fait que l’ouverture d’un canal provoque la fermeture de l’autre. Des mécanismes de rétroaction de ce type qui sont producteurs d’un rythme, nous allons en décrire de nombreux au fur et à mesure que nous allons parcourir les diverses réactions qui régulent les mécanismes cérébraux. C’est un pace-maker.

Jean Pierre Changeux écrit ainsi dans son ouvrage « L’homme neuronal » : « chaque rafale se greffe sur un système générateur d’oscillations ou pace-maker qui fait fluctuer lentement le potentiel de la membrane ». Ce cycle est-il périodique ou chaotique ? Voilà ce que répond Changeux. « Le mécanisme échange en permanence de l’énergie avec le monde extérieur. Les oscillations ne se font jamais près de l’équilibre. Il faut que le système soit hors équilibre mais dans un état stable, qu’il constitue en somme une structure dissipative. » Et Changeux fait alors référence au théoricien du chaos, Prigogine : qui a montré que dans ce type de systèmes : « des relations non-linéaires existent par couplage entre les réactions à la suite d’une rétroaction entre le produit final d’une chaîne de réactions et la réaction d’entrée. Le déclenchement explosif de l’influx nerveux satisfait évidemment à cette condition de non-linéarité. » En effet, le physicien-chimiste Ilya Prigogine a étudié des mécanismes de réactions chimiques rétroactives couplées et montré qu’elles étaient des horloges chaotiques, c’est-à-dire une structure stable fondée sur une dynamique loin de l’équilibre. C’était une révolution puisqu’on trouvait des systèmes dans lesquels la stabilité pouvait se faire par un gain en terme de structure. C’était contraire aux lois de la thermodynamique selon lesquelles un système abandonné à lui-même ne peut que perdre des niveaux d’organisation. Prigogine a montré que cette apparente contradiction n’en était pas une : les systèmes chaotiques ne sont pas des systèmes fermés. Au contraire ce sont des systèmes dissipatifs c’est-à-dire qu’ils fonctionnent en perdant de l’énergie et se maintiennent parce qu’ils en reçoivent de l’extérieur. Et c’est justement ce qui se produit pour le neurone comme le souligne Changeux. Tous les neurones, qui ont des formes et des fonctions multiples suivant la zone du cerveau ou du système nerveux à laquelle ils appartiennent, fonctionnent sur ce même modèle découvert par Hodgkin et Huxley. Ces deux chercheurs ont même réussi à écrire les équations différentielles du neurone, c’est-à-dire les équations qui contiennent les paramètres et leur vitesse d’évolution. Il s’agit d’équations non linéaires. De telles équations ne peuvent être résolues car on ne peut en tirer la valeur d’un paramètre en fonction du temps. Dès qu’on a de plus de trois facteurs et de trois corps, il ne s’agit plus de fonctions linéaires et le mathématicien et physicien Poincaré a montré l’impossibilité de la résolution des équations différentielles. C’est ce que l’on appelle le problème des trois corps. En 1980, les théoriciens du chaos Guttman, Lewis et Rinzel sont parvenus à montrer qu’une fonction chaotique est un modèle tout à fait correct pour la solution de l’équation du neurone. C’est un exemple très réussi d’utilisation des modélisations chaotiques pour passer au travers de la difficulté : l’impossibilité de résoudre les équations différentielles non-linéaires. Nous verrons plus loin que la structure stable du neurone fondée sur la dynamique loin de l’équilibre a même été visualisée par une courbe qui est la signature du chaos et que l’on appelle l’attracteur étrange. Le neurone est donc un émetteur spontané d’impulsions dont la rythmicité est de type chaotique. Mais il est également récepteur d’impulsions. Comment fonctionnent ces relations entre neurones ? L’influx parcourt le neurone puis l’axone et arrive à son bout à une vésicule appelée la synapse. C’est la synapse qui est proche du neurone voisin et va se charger de lui transmettre l’influx. La transmission est-elle linéaire ou à nouveau chaotique ? Tout cela semble bien un mécanisme linéaire et pourtant ce n’est pas le cas. Ce que l’on remarque d’abord c’est que la synapse ne transmet pas directement l’influx électrique reçu. Elle transforme cet influx en production de molécules : les neurotransmetteurs qui vont ensuite eux-mêmes provoquer le déclenchement d’un influx électrique. Nous avons là un processus qui non seulement est une rupture de continuité dans le circuit électrique entre deux neurones mais en plus ce mécanisme de transmission biochimique de la synapse fonctionne à un rythme différent de celui de l’influx électrique. Quand la synapse produit suffisamment de neurotransmetteurs, ils en sortent pour se fixer sur des récepteurs dans la membrane du neurone cible. Les neurotransmetteurs agissent sur les canaux ioniques du neurone cible, canaux qu’ils peuvent ouvrir, déclenchant ainsi un changement de potentiel et donc un influx électrique dans le neurone cible. A la base de ce mécanisme nous trouvons à nouveau une rétroaction. En effet si certains neurotransmetteurs comme l’adrénaline sont excitateurs et provoquent une ouverture des canaux, d’autres comme le GABA sont inhibiteurs et provoquent leur fermeture. De plus, comme pour les canaux ioniques, c’est encore un processus sélectif : certains neurones ont des récepteurs pour tel ou tel neurotransmetteur. Et les neurones ont aussi entre eux un processus de rétroaction : les neurones réceptifs à la dopamine rétroagissent sur les neurones réceptifs à l’acétylcholine. Enfin, un autre mécanisme de rétroaction se produit dans le récepteur, c’est celui qui va détruire le neurotransmetteur une fois qu’il a atteint sa cible. Remarquons que tout le mécanisme met en jeu en même temps plusieurs niveaux et à chaque niveau des mécanismes de régulation fondés sur des rétroactions entre les neurotransmetteurs, les canaux, les récepteurs, les synapses et les neurones. Ces rétroactions fondent des rythmes mais qui sont sur des échelles de temps différentes et qui sont couplés par des enchaînements rythmiques de réactions.

Le neurone adaptable et fractal

Dans le fonctionnement du neurone, il faut signaler un rythme encore différent des précédents, c’est celui du métabolisme interne du neurone. En effet, l’ion calcium ne se contente pas en entrant et en sortant de modifier le potentiel. Il joue un rôle fondamental, en pénétrant le noyau du neurone, pour la stimulation des gènes qu’il contient. Nous savons que les gènes peuvent produire des enzymes et synthétiser des protéines. Mais cette production est elle aussi régulée par rétroaction car il y a des gènes qui bloquent ce processus. L’ion calcium sert à activer les gènes désactivés. Cela permet au neurone de fabriquer les protéines de la membrane, des récepteurs ou des canaux. Ce processus a son propre rythme. Il ne s’agit plus de millième, de dixième de seconde ni de seconde mais de plusieurs dizaines de minutes. C’est un processus important pour la rythmologie mais également pour la constitution du neurone qui peut ainsi évoluer et s’adapter en développant ses canaux, ses branchements dendritiques ou ses récepteurs en fonction du message électrique reçu. Un neurone n’est pas une structure faite une fois pour toutes. Il se modifie et s’adapte en fonction de son utilisation c’est-à-dire des multiples circuits électriques auxquels il participe. Le nombre et l’arborescence de dendrites mais également le nombre de synapses vont évoluer en fonction de la quantité de messages et de la quantité de cibles. Les cellules du cerveau sont bien plus évolutives qu’on ne le croyait. On sait maintenant que les neurones ne sont pas un capital acquis auquel on ne peut plus toucher. On a montré récemment qu’il y a fabrication de nouveaux neurones chez l’adulte, par exemple dans l’hippocampe. Inversement les épines dendritiques d’un neurone qui n’est plus parcouru par des décharges électriques s’atrophient. Un neurone qui ne reçoit plus de messages électriques meurt et coupe ainsi toute une série de circuits électriques. Une zone entière peut être déconnectée. Le système nerveux est capable de se réparer lui-même dans de nombreux cas quitte à modifier les circuits, quitte d’ailleurs à prendre des neurones d’autres zones et à modifier leurs fonctions en cas de lésion d’une zone. Quand ce mode de réparation n’entre pas en fonction, c’est parce qu’il a lui aussi son mode de régulation, avec des mécanismes d’excitation et d’inhibition. Si le neurone est parcouru par de nombreux courants, il peut multiplier ses dendrites, c’est à dire l’arborescence avec de multiples branches, sous-branches, brindilles et sous-brindilles qui s’étendent de tous les côtés. D’autre part au cours de l’évolution de l’enfant, les arborescences dendritiques non seulement croissent mais multiplient leurs subdivisions en niveaux à mesure que les fonctions cérébrales croissent et se complexifient. Il y a un lien entre degré de l’arborescence et de la fonction. C’est ce que montre la comparaison du développement du neurone du rat au cours de sa croissance. On peut également comparer des neurones d’animaux ayant un développement dendritique d’autant plus important qu’ils ont un mécanisme cérébral plus développé. D’autre part, les neurones n’ont pas le même nombre de niveaux d’arborisation suivant les zones du cerveau où on les trouve, c’est-à-dire suivant le niveau de leurs fonctions. Les neurones qui ont le développement dendritique le plus important, comme les neurones de Purkinje, sont ceux qui ont le plus grand nombre de connexions avec de nombreuses zones. On peut mesurer le degré de cette arborescence en terme de fractales. Comme dans un arbre que si on zoom sur une partie de l’arborescence, on en trouve une autre similaire. Les dendrites sont fractales et chaque type de neurone a un niveau de structuration appelé sa dimension fractale, déterminée par le nombre de sous-structures autosimilaires. A quoi sert cette structure fractale du neurone dans sa fonction d’émetteur-récepteur ? Pour y répondre, il faut d’abord préciser que les divers niveaux des branches et sous-branches par lesquels il reçoit les influx venus des neurones voisins n’ont pas la même efficacité dans la transmission d’influx au corps de la cellule. Il y a donc hiérarchisation du niveau de transmission. Et en modifiant la hiérarchie du niveau dendritique où arrivent les messages électriques, le neurone peut jouer un rôle de modulation. La modification du niveau de réception dendritique des messages des neurones voisins est une transformation non-linéaire du message électrique avec un facteur non pas additif mais de puissance, soit dans le sens de l’amplification soit dans celui de la réduction. Le réseau neuronal n’est donc pas un simple circuit électrique qui se contente de porter les messages envoyés. Les mécanismes nerveux ont une capacité spontanée d’adaptabilité. Un circuit qui est fréquemment utilisé est plus efficace. L’arc réflexe qui permet d’ôter sa main d’une plaque brûlante avant même que le cerveau soit informé de la brûlure est de 250 millièmes de secondes mais se réduit à 50 millièmes de secondes si on s’entraîne. Les circuits neuronaux fréquemment utilisés peuvent augmenter leur efficacité. On peut s’entraîner à sauter à la perche simplement en réfléchissant aux divers mouvements qui se succèdent dans cet exercice. On active en partie les mêmes circuits en évoquant un mouvement qu’en le réalisant. Il y a également des évolutions permettant de réduire le nombre de circuits ayant un rôle identique. C’est ce que fait le cerveau pendant l’enfance. Il diminue ce qu’on appelle les redondances, c’est-à-dire qu’il peut supprimer de lui-même des circuits inutiles et qui se répètent. Le réseau neuronal est un système souple et adaptable, capable de se transformer et de s’auto-éduquer en fonction de ce qui lui arrive. Il est donc individualisé. Le bagage génétique de base ne suffit pas à dire ce qui va se produire ensuite. L’exercice d’une fonction va la favoriser, la rendre plus efficace en poussant à sélectionner pour elle les circuits les plus rapides et les circuits annexes pour la réguler finement. Et il en va de même pour l’évolution d’une espèce que pour l’évolution d’un individu. L’évolution va améliorer les circuits qui sont très utilisés. Il y a aura un circuit de base sensoriel par exemple qui va se coupler à un deuxième circuit secondaire plus lent mais plus précis puis se coupler à un autre circuit de régulation encore plus fin. Le caractère fractal du neurone a une autre importance encore plus grande pour son fonctionnement. C’est ce qu’on appelle la propriété de parallélisme. Les diverses dendrites constituent des courants parallèles entrant dans la cellule. Or les mécanismes d’ouverture et de fermeture des canaux qui déterminent les courants sont fondés sur la rythmicité. Le neurone est un appareil naturel de mesure des décalages de temps d’arrivée entre les courants venant de circuits parallèles. Le neurone est donc sensible au déphasage entre deux messages réinjectés quasi simultanément. Prenons un exemple de mécanisme utilisant ce principe. Il s’agit d’un des mécanismes naturels les plus précis : le système auditif de la chouette. Une étude sur les neurones est exposée dans « La Recherche » de juin 98 par Rémy Lestienne, directeur de recherche de l’Institut de neurosciences de l’université Paris VI. Il examine le mode de fonctionnement auditif de la chouette, un animal qui a des performances acoustiques exceptionnelles. La chouette est capable de déceler une différence de cheminement du son entre les deux oreilles de trois millionièmes de seconde en comparant les deux messages électriques parallèles et en mesurant le déphasage entre eux. Les neurones ne se contentent pas d’additionner les messages électriques pour les transmettre quand la somme dépasse un seuil, mais ils reçoivent deux messages venant des deux oreilles simultanément et les transmettent quand ils sont en phase. Le neurone est un appareil de mesure ultra précis des déphasages entre deux bouts de messages qui sont seulement décalés dans le temps. C’est dû à son système d’ouverture et de fermeture des entrées de la membrane qui est sensible aux différences de rythmes d’arrivée des impulsions. Cela suppose de comparer les messages passés dans deux circuits. Or le neurone n’est jamais relié à un seul circuit de transmission électrique porteur d’information. Au contraire, il effectue toujours la comparaison entre des messages lancés par une source neuronale sur des voies parallèles et revenus à leur point de départ, c’est-à-dire après un cycle. Cette idée est extrêmement importante car elle donne un rôle prépondérant aux mécanismes en forme de réinjection appelés feedback. Ce sont des réactions qui reviennent finalement à la source du message pour relancer à nouveau le mécanisme ou au contraire pour le bloquer. Et ce sont des phénomènes non-linéaires. Les informations ne s’additionnent pas, contrairement aux courants dans un fil électrique. Elles peuvent se multiplier comme dans la boucle de l’effet Larsen constituée par le micro et le haut parleur où le son est amplifié à chaque fois qu’il parcourt un cycle. Le message revient au point de départ où il réagit de nouveau avec la source.

Dans ce type de fonctionnement, l’apparence désordonnée est un avantage. La mesure d’un déphasage entre deux messages décalés dans le temps est beaucoup plus précise entre deux messages chaotiques comme ceux du dessous, qu’entre deux messages presque périodiques comme ceux du dessus. Le maximum de précision du déphasage dans le cas périodique est le temps d’une période. Ce temps peut être bien plus court pour un message désordonné qui a des vibrations à plusieurs échelles. Notre sens des distances, des volumes et des trois dimensions de l’espace vient d’un mécanisme identique à celui de la chouette mais nous n’utilisons pas nos deux oreilles pour mesurer des déphasages. Ce sont nos deux yeux qui servent à effectuer les comparaisons. Nos yeux sont en relation avec des centres cérébraux avec lesquels ils échangent en permanence des impulsions électriques. La vision provoque des modifications de ces messages. C’est certaines zones du cerveau qui effectuent la comparaison en mesurant les déphasages. Comme le neurone, les zones sont fondées sur des mécanismes d’auto-régulation dynamiques, sensibles aux conditions extérieures et pas sur une régulation figée, avec une périodicité fixée d’avance par l’héritage génétique. L’enfant qui naît ne sait pas encore bien mesurer les distances et les profondeurs des volumes parce que ses mécanismes chaotiques ne se sont pas encore couplés avec précision.

De la même manière, l’enfant apprendra également à distinguer les éléments d’un paysage, les formes, les couleurs, les mouvements. Chacun de ces éléments est envoyé sur des circuits parallèles puis recomposé au niveau du cerveau, celui-ci filtrant les informations qui ne sont pas cohérentes. Sans cet apprentissage du cerveau nos yeux, nos oreilles, notre toucher ne peuvent nous donner les indications indispensables sur le monde extérieur et notre motricité ne peut pas non plus agir avec la précision voulue. Et, n’hésitons pas à le répéter, apprendre c’est multiplier les expériences de couplage entre des pace-makers dont le rythme n’est pas fixé mais fondé sur des mécanismes de rétroaction.

Cerveau hiérarchique et boucles de rétroaction

Nous avons longuement expliqué le caractère chaotique du fonctionnement du neurone dû à une rétroaction entre ses canaux ioniques. On pourrait en faire de même aux échelons inférieurs comme supérieurs de la structure. On trouve cinq niveaux différents mais dans le fonctionnement global du cerveau on peut distinguer une dizaine de niveaux, chacun étant fondé physiologiquement par les interactions entre les niveaux précédents. Au niveau un, ce sont les gènes qui sont responsables de la production des enzymes, en la favorisant ou en la bloquant. Les enzymes, qui constituent le niveau deux, sont responsables de la formation des protéines. Celles-ci sont le niveau trois de la structure et elles permettent de constituer la membrane, les récepteurs, et les canaux ioniques de la cellule nerveuse. C’est le niveau quatre. Au niveau cinq on trouve les synapses puis au niveau six les neurones, au niveau sept les circuits neuronaux. Ceux-ci constituent, par leurs liens entremêlés, une véritable cartographie qu’Edelman appelle les cartes neuronales. Au niveau neuf, ce sont les pace-makers de zone constitués par ce qu’Edelman appelle les courants réentrants entre cartes neuronales. Puis on trouve les interactions en forme de boucle entre trois zones qui déterminent le niveau dix ; ce sont les fonctions élémentaires du cerveau. Enfin au niveau onze les fonctions supérieures qui sont fondées sur des couplages entre trois boucles. Il ne s’agit ici bien sûr que d’une image schématique pour visualiser le caractère de ce fonctionnement et le nombre onze de niveaux est plutôt un ordre de grandeur qu’une valeur établie. Mais on le retrouvera lors de la mesure de la dimension du message électrique qui parcourt ces niveaux.

La conception développée ici se fonde sur ce caractère hiérarchique du cerveau qui suppose que chaque niveau n’est pas réductible au niveau inférieur et que les propriétés d’un niveau ne s’y retrouvent pas. Le niveau inférieur n’est pas non plus simplement sous les ordres du supérieur même si le terme de hiérarchique peut prêter à confusion. Ainsi les activités supérieures conscientes et associatives du cortex ne sont qu’un niveau, très important, mais qui ne pilote pas l’ensemble. Le cerveau conscient ne se dit pas : « j’envoie telle décharge à telle synapse pour penser à cette chaise » ni « lançons les gènes inhibiteurs pour arrêter de produire telles protéines », bien entendu ! Bien des circuits ne passent pas par ce niveau conscient. Et ce n’est pas seulement des actes réflexes. On connaît ainsi l’exemple des images subliminales trop rapidement vues pour être analysées par notre conscience, mais que d’autres circuits de notre cerveau ont cependant visualisées. Aucun niveau n’est donc fondamental ni chef d’orchestre. Tous interagissent et il faut toujours trois zones ou trois corps pour réaliser une fonction et représenter un état mental. Ce n’est jamais un seul niveau mais trois au moins qui sont concernés dans le passage d’un message. La dimension trois est un minimum sauf en cas de maladie comme nous le verrons. Le neuroscientifique Antonio Damasio écrit dans « Le sentiment même de soi » : « Rodolfo Lilnàs s’est servi de cette série de découvertes pour suggérer que la conscience, aussi bien dans l’état de veille que dans celui du sommeil paradoxal est le produit d’une formation en boucle impliquant à la fois le cortex cérébral, le thalamus et la formation réticulaire du tronc cérébral. Une telle boucle suppose que le thalamus et la formation réticulaire possèdent des neurones susceptibles d’émettre spontanément des signaux électriques. (…) Au cours des phases conscientes, la formation réticulaire produit continuellement un barrage de signaux en direction du thalamus et du cortex cérébral suscitant par la même la mise en place de certains schémas géométriques de cohérence corticale. »

L’effort extrêmement intéressant et important de Jean-Pierre Changeux dans « L’homme neuronal », à permis de souligner combien le mécanisme électrique et biochimique du fonctionnement neuronal est à la base de tout le fonctionnement du cerveau, ce qui est maintenant incontestable. Mais Changeux ne s’en contente pas. Pour combattre les thèses dualistes comme celles de John Eccles, thèse du clivage entre le cerveau spirituel et le cerveau matériel, Changeux conçoit « l’homme neuronal » c’est-à-dire ramène tous les niveaux à un seul, celui du neurone, affirmant ainsi : « l’identité entre états mentaux et états physiologiques ou physico-chimiques du cerveau s’impose en toute légitimité. » Il se revendique d’ailleurs courageusement de ce réductionnisme neuronal : « tout comportement mobilise des ensembles définis de cellules nerveuses et c’est à leur niveau que doit être recherchée l’explication des conduites et des comportements. (...) Rien ne s’oppose plus à ce que les conduites de l’homme soient décrites en termes d’activités neuronales ». Si le réductionnisme consiste à dire que toute l’explication doit être recherchée dans un élément fondamental du substrat biochimique, on trouve une conception diamétralement opposée à ce point de vue et connue sous le nom de structuralisme que l’on pourrait schématiquement représenter par l’idée : « le substrat ne compte pas, tout est dans la structure ». Ce sont les travaux mathématiques de René Thom sur la théorie des catastrophes puis ses travaux en psychophysiologie et les travaux de Christopher Zeeman sur les neurones et les changements brusques dans les images cérébrales. Dans cette conception, toute la structure est mathématique et non physiologique. Cette vision structuraliste a eu le mérite de considérer les êtres vivants comme un tout et non comme une somme d’éléments. Pour le structuralisme, seul compte le mode d’organisation et non les éléments réels physico-chimiques qui sont employés. Dans son ouvrage intitulé « Stabilité structurelle et morphogenèse » René Thom écrit : « les formes sont indépendantes des propriétés spéciales de leurs substrats et de la nature des forces agissantes ». La théorie du chaos cérébral peut être considérée comme intermédiaire entre la conception réductionniste de Jean-Pierre Changeux et la conception structuraliste de René Thom et même comme une synthèse des deux. Elle souligne l’importance de la notion de structure et également que l’on ne peut tout ramener à un seul niveau. Le message cérébral occupe plusieurs niveaux et change sans cesse de dimension. C’est même la base de son mode de fonctionnement. Les niveaux de la structure ne sont pas indépendants les uns des autres, ni indépendants du message qui les parcourt. Il y a des rétroactions entre les gènes, entre les neurotransmetteurs, entre les canaux ioniques, entre les synapses, entre les neurones, entre les circuits neuronaux, entre les cartes neuronales et enfin entre les boucles qui relient les zones. Certains mécanismes sont excitateurs et d’autres inhibiteurs et ils fonctionnent couplés. Un exemple de rétroaction bien connu est celui du système nerveux sympathique couplé au système parasympathique. Le système sympathique est activateur, grâce à l’adrénaline qui est une molécule de liaison entre neurones ou neurotransmetteurs. Le système parasympathique libère à ses terminaisons nerveuses un neurotransmetteur ayant un effet inhibiteur, l’acétylcholine. Il freine ainsi l’action du sympathique, provoquant le ralentissement du cœur, la constriction des bronches, le rétrécissement de la pupille, et bloque la sécrétion de l’estomac. On trouve encore une boucle de rétroaction entre les neurones réceptifs à l’acétylcholine et les neurones réceptifs à un autre neurotransmetteur, la dopamine. Il y a aussi les multiples rétroactions qui constituent une zone comme le bulbe olfactif. Chaque niveau de la structure a sa propre mesure du temps fondée sur de telles rétroactions et qui n’est pas strictement périodique mais sensible aux modifications extérieures. Ainsi, le bulbe olfactif est soumis aux impulsions électriques transmises par les capteurs du nez et donc sensible aux odeurs. La respiration est également fondée sur une rétroaction avec deux centres, un pour l’inspiration et un autre pour l’expiration.

Neurosciences

Passons maintenant aux neurosciences et à la notion d’auto-organisation et d’émergence dans les fonctions cognitives. L’hypothèse exposée par Francisco Varela dans cet ouvrage est celle d’événements mentaux fondés sur des ensembles neuronaux appelés assemblées cellulaires constitués de cellules appartenant à des zones diverses et ces cellules sont reliées par un point commun : le maintien transitoire en phase des diverses émissions neuronales des neurones ainsi connectés dans l’assemblée cellulaire. Un des points essentiels de cette conception est la relation réciproque entre les neurones d’une même assemblée cellulaire. C’est elle qui permet le contrôle réciproque au plan temporel c’est-à-dire le contrôle de la synchronisation des phases des émissions neuronales. Varela explique ainsi que cette modélisation du système cognitif se démarque dorénavant de celle du cerveau conçu comme une machine informatique : « Une assemblée cellulaire peut être activée à partir de n’importe quel sous ensemble. Un des principaux constats des neurosciences modernes est que les régions du cerveau sont en effet interconnectées de manière réciproque. Le terme réciproque est crucial ici. Ainsi, quelque soit le type de mécanisme neuronal impliqué dans des tâches cognitives spécifiques, ce sont nécessairement de larges régions du cerveau, séparées géographiquement, qui se trouvent concernées par ces tâches. Par ailleurs, on ne peut pas considérer que ces régions distinctes soient organisées selon un ordre séquentiel, comme si une activité cognitive pouvait naître de la convergence graduelle de différentes modalités sensorielles au niveau d’aires multimodales ou associatives, pour impliquer ensuite les aires frontales supérieures responsables de la décision et de la planification active des comportements. Cette conception séquentielle traditionnelle nous vient de l’époque où dominait la métaphore de l’informatique dont une des idées clé était que le flux d’information allait dans une direction montante (de la périphérie vers l’unité centrale de traitement. A l’opposé, nous mettons ici l’accent sur l’importance primordiale des propriétés de réseaux à connexions réciproques au sein desquels le caractère séquentiel est remplacé par un processus de contrôle temporel : la synchronisation des réseaux. » Varela remarque trois niveaux distincts d’émergence permettant de construire et de faire fonctionner les assemblées cellulaires : • la formation des neurones et des circuits activés entre eux lors de la construction du cerveau • la structuration par apprentissage des niveaux de connexions synaptiques entre les neurones, les neurones synchrones renforçant leur liaison synaptique • la mise en place d’un temps rapide d’activation de l’assemblée pour atteindre une cohérence sans être submergé par les messages voisins.

Varela postule qu’une assemblée spécifique correspond à un acte cognitif. Il pense également que la désignation d’une assemblée particulière provient d’un processus de synchronisation de message par des assemblées concurrentes. Pour qu’un processus de perception cognitive soit réalisé il faut que l’assemblée ait eu le temps d’être parcourue par plusieurs cycles. C’est ce que l’on appelle la synchronisation par verrouillage de phase et cela dure seulement une fraction de seconde (essentiellement grâce à des ondes gamma). C’est ainsi que chaque processus cognitif individuel surgirait d’un processus d’émergence d’une assemblée de neurones. Cela constituerait une espèce de conscience primaire qui serait la base des événements mentaux-cognitifs qui seraient beaucoup moins synchronisés et cohérents. Cette base serait donc constituée de phénomènes de synchronisation transitoires et peu durables.

Les autres phénomènes cognitifs seraient fondés sur cet espace constitué d’assemblées activées de façon cohérente. Varela expose en conclusion les diverses remarques fondamentales sur les états mentaux : « 1°) Les espaces mentaux ont lieu dans un espace unitaire. Par exemple, il n’y a pas de fragmentation dans le vécu expérientiel de différentes modalités sensorielles, ni de rupture entre les sensations, les souvenirs et le tonus corporel 2°) Les états mentaux son transitoires dans le sens qu’aucun état ne perdure au-delà d’une certaine limite. Inversement, l’expérience d’un état mental requiert une durée minimale. L’état mental a donc un caractère fini, d’une durée à la fois incompressible et non-extensible 3°) L’état mental est toujours lié au corps, à un champ particulier de sensation 4°) L’état mental peut être déclenché par un événement endogène. Il peut également arriver qu’un même état mental ait des conséquences perceptuelles et comportementales différentes. Le type d’événements neuraux sous-jacents à un état mental doit rester distinct et être facile à distinguer d’autres types d ‘événements neuraux de telle sorte que cette double relation reste valide. »

L’émergence de structure constituée par la relation entre trois pace-makers

Toutes ces rétroactions sont des pace-makers qui fondent des rythmes quasi-périodiques. Ces pace-makers peuvent eux-mêmes se coupler par trois pour donner une horloge chaotique. Le rythme qui en résultera dépend des rapports des trois rythmes entre eux. S’ils sont dans des rapports simples, c’est à dire des nombres comme un demi ou deux tiers, les batteurs peuvent se synchroniser et donner un rythme quasi-périodique. S’ils ont des rapports qui ne sont pas de ce type, cela donne le chaos avec cette apparence de désordre qui correspond à de multiples rythmes sans cesse changeants, comme c’était le cas pour le pendule chaotique. En interagissant de manière permanente, ils fondent un niveau supérieur. On dira que l’on a une structure émergente car chaque niveau est lié au précédent mais fonctionne avec des paramètres différents et sur un mode différent. Il y a similarité entre le fonctionnement des différents niveaux. Le même schéma a été trouvé par le psychologue canadien Hebb pour les interactions entre événements mentaux convient aussi aux circuits neuronaux et aux interactions entre zones du cerveau. Il y a seulement changement d’échelle de niveau physiologique et d’échelle du temps. C’est une propriété d’autosimilarité. C’est ce qui explique qu’un même message électrique puisse être porteur de signification à différentes échelles comme nous le verrons plus loin. C’est là que se situe l’aspect purement structurel du fonctionnement qui ne dépend pas du type de mécanisme électrique ou biochimique mais seulement de sa rythmicité liée à celle des niveaux supérieurs ou inférieurs. Un exemple simple est celui l’interaction entre trois pace-makers du système olfactif. L’odeur est perçue grâce à l’interaction entre bulbe, noyau antérieur et cortex olfactif. L’électroencéphalogramme indique comment cette boucle intègre au message de base quasi-périodique (fondé sur la rétroaction inspiration/expiration) l’information du stimulus de l’odeur indiqué sur la courbe du milieu qui est celle du récepteur nasal. Comment trois pace-makers peuvent-ils fonder une structure nouvelle, dite émergente ? Donnons deux exemples connus que sont le rythme cardiaque et, en dessous, le modèle de Lorenz pour la météorologie. Dans ces deux cas, on trouve l’attracteur c’est-à-dire de la courbe obtenue en prenant régulièrement les valeurs des paramètres reliées aux valeurs qu’elles vont prendre un bref instant plus tard, mais sans faire figurer le temps comme paramètre. Remarquons que la courbe n’est pas du hasard. Plus on prend de points et plus cette courbe se complète. Elle est dans un domaine limité, ne remplit pas tout l’espace. Les diverses manières de reboucler correspondent à différents rythmes et on retrouve que le chaos déterministe à trois paramètres permet de représenter un nombre considérable d’états. L’exemple qui a servi à Prigogine est celui de la réaction chimique constituée de deux rétroactions couplées qui fondent des structures changeantes et dynamiques. Dans ce mouvement chaotique, la trajectoire ne donne aucune indication sur la loi. L’attracteur étrange de la réaction chimique est figuré juste en dessous et montre qu’il y a bien un ordre. L’attracteur est une notion complexe très importante dans la théorie du chaos. Un attracteur est un point ou une courbe telle que si on s’en éloigne un peu, on y est ramené nécessairement par l’évolution spontanée de la dynamique du phénomène. C’est une notion que l’on connaît bien en géographie avec les bassins d’attraction. En effet, dans un relief il y a des bassins d’attraction pour un fleuve ou pour un glacier. Il est formé des zones où la tendance est de rejoindre l’attracteur qu’est le fleuve ou le glacier. Pour un pendule périodique, le point correspondant à la verticale est un point attracteur. Pour un pendule chaotique, il y a un très grand nombre de points attracteurs qui appartiennent à un graphique appelé l’attracteur étrange et qui est un peu la signature du chaos. L’attracteur du pendule chaotique est compliqué mais on voit qu’il est structuré et que ce n’est pas du hasard. Si on fait un agrandissement d’une zone on trouve une figure similaire ; l’attracteur étrange est fractal. Le neurone est lui aussi une horloge chaotique. Sur l’attracteur étrange de l’axone géant du calmar, on voit nettement que le rythme n’est pas figé et que la presque périodicité est fondée sur des rebouclages comme pour les autres attracteurs chaotiques. Dans une courbe chaotique nous n’avons pas un état mais de multiples états possibles capables d’être évoqués puis brutalement changés. Le chaos est riche en information. Pour le cerveau, chaque état mental est l’un des attracteurs de la courbe. Il compare par similitude et non par identité. S’il se trouve dans le bassin d’un attracteur, il déclenchera un mécanisme de reconnaissance. La vision d’un objet de couleur verte sélectionne un état proche du bassin qui a déjà été utilisé pour un objet de couleur proche. On voit apparaître le lien entre le chaos et le mécanisme de reconnaissance et de mémorisation. Montrons d’abord que les rythmes du cerveau sont chaotiques, c’est-à-dire fondés sur la capacité d’une boucle à trois pace-makers de constituer des rythmes adaptatifs s’auto-éduquant. En effet les rythmes du chaos ne sont pas pré-programmés contrairement à l’ordinateur mais le résultat d’une auto-régulation qui s’obtient progressivement. L’enfant ne naît pas avec son rythme cardiaque adulte, pas plus qu’avec son futur rythme du sommeil. C’est la capacité des rythmes chaotiques de se coupler qui va les fonder. Et ils sont sensibles aux conditions initiales ce qui leur permet de se coupler avec d’autres rythmes, d’être régulés en fonction de la situation, de l’effort du corps, de la température, de la luminosité, etc ... C’est le cas de notre rythme circadien, de 24 heures, qui est un rythme autonome interne et ne nécessite pas la vue du soleil et l’alternance jour-nuit, comme le montrent les expériences avec des spéléologues. Ces derniers subissent des variations de la période de 24 heures liées aussi à la température mais maintiennent en gros le rythme. Et pourtant ce n’est pas dû à l’héritage génétique puisque le fœtus a un rythme ultradien de 90 minutes et pas un rythme circadien. Notre rythme circadien, qui a une grande importance tant pour ce qui est du sommeil que pour les sécrétions diverses, est un mécanisme que l’individu acquiert par couplage de trois pace-makers : deux dans le cerveau et un au dessus des reins. Il s’agit de trois glandes endocrines, c’est-à-dire responsables de la sécrétion d’hormones. Ce sont le noyau suprachiasmatique de l’hypothalamus, la glande pinéale et sa production de mélatonine et enfin la glande cortico-surrénale. Loin d’être une exception, le rythme circadien n’est qu’un exemple de tous les mécanismes de production d’hormones, tous liés à des boucles à trois corps : l’hypothalamus, l’hypophyse et la glande endocrine. Un autre pace-maker chaotique du cerveau est responsable de la corrélation visuelle et serait fondé sur une liaison entre le thalamus et les quatrièmes et sixièmes couches du cortex. C’est encore une fois trois zones constituant un message unique par interaction. La vision va actionner d’autres cycles interactifs à trois corps comme le filtrage affectif et émotionnel des images, un circuit comprenant l’amygdale, les neurones cholinergiques de la base et le cortex. Les interactions fonctionnelles et sensorielles fonctionnent sur le même modèle, cette fois avec interaction de l’hypothalamus, du système réticulaire activateur et de l’activité sensorielle concernée, par exemple l’odorat. La machine à trois temps que constitue la vigilance, le sommeil et le rêve est basée sur la liaison entre le bulbe, la formation réticulée et les noyaux du mésencéphale. Et ce cycle de base est lui-même relié à d’autres cycles à trois corps. Ainsi ce que l’on appelle le système réticulé activateur ascendant, terme barbare sous lequel on entend le système responsable de l’activation de l’éveil, est formé par l’interaction de trois zones : la formation réticulée, le thalamus et le cortex. Et c’est cet ensemble qui donne le « la », si l’on peut dire, de la transmission de base des neurones du cerveau éveillé au repos, le rythme alpha.

Le rythme alpha est d’environ 10 herz (soit dix cycles par seconde) fréquence autour de laquelle il y a un intervalle relativement vide d’événements électriques entourant un pic très net et intense. Cette étroite bande de fréquence serait le signal électrique émis par un système d’horlogerie dans le cerveau qui serait en rapport direct avec la limite inférieure de notre temps de réaction de l’ordre de 0,1 seconde. Holubar parle de pace-maker du cerveau car les personnes qui ont un rythme alpha lent ont une activité mentale ralentie.

Le second rythme est le rythme du sommeil paradoxal ou rythme béta dont l’origine est le tronc cérébral et qui envoie des messages au thalamus et au cortex occipital. C’est une activité électrique de fréquence environ 20 herz caractérisée notamment par des pointes de grande amplitude. Jean Louis Valatx, directeur de recherche à l’Inserm a montré en juin 94 qu’on peut le considérer comme un pace-maker du cerveau. C’est même le premier car c’est celui du foetus et il contrôle même 90% de la vie du foetus. Le sommeil paradoxal est caractérisé par des mouvements des yeux, une respiration irrégulière, l’érection pénienne et un électrocardiogramme voisin de l’éveil. Ce cycle serait le porteur de la mémorisation de l’espèce. En effet, le foetus commandé par ce seul rythme serait capable de toutes les mimiques faciales humaines qui ne seraient donc pas le résultat de l’apprentissage social, du moins chez l’homme. On l’a même appelé le pace-maker onirogène car il serait indispensable aux comportements oniriques.

Le troisième, le rythme gamma, qui correspond à une fréquence entre 35 et 75 herz, est considéré par Crick et Koch comme la base électrique du processus de la conscience et serait relié à la boucle hypothalamus, cortex neuro-végétatif et tronc cérébral.

On trouve encore le rythme téta à environ 6 herz et le rythme delta à environ 3 herz. Tous ces rythmes ne sont pas des rythmes régulièrement périodiques qui seraient seulement agités par le bruit des circuits mais des rythmes chaotiques, c’est-à-dire fondés sur la dynamique hors de l’équilibre. Ce sont des rythmes fondés sur le « bruit » des circuits. C’est l’ordre issu du désordre. L’attracteur étrange du rythme alpha, visualisé en trois dimensions et présenté sous différents angles, montre que le rebouclage ne se fait pas exactement. Le fait qu’il soit en trois dimensions au moins est fondamental pour cela. En dessous de trois dimensions, les courbes se recouperaient et on atteindrait la périodicité comme dans le cas de l’épilepsie.


Message et structure : Le désordre produit l’ordre et inversement

Du point de vue de la théorie du chaos déterministe il ne s’agit ni de désordre ni de hasard, ni encore d’une complexité due à un trop grand nombre de paramètres mais d’une dynamique auto-structurée, dans laquelle l’auto-organisation a mis en évidence un petit nombre de paramètres : moins de onze et pour une seule tâche moins de sept et souvent trois. On est loin des milliards de milliards de facteurs de la thèse du désordre lié au hasard ! C’est en s’appuyant sur un message électrique désordonné que le cerveau parvient à connaître précisément la réalité changeante du monde extérieur et l’état changeant lui aussi de notre corps, au point de donner des ordres précis que ce soit pour agir vers l’extérieur ou encore pour modifier l’équilibre intérieur du corps. Sa précision et sa rapidité impressionnantes s’expliquent paradoxalement par le fait que le signal de base est chaotique. Et même ce message suffisamment désordonné est une condition indispensable à la santé. S’il devient trop ordonné on a soit le diagramme plat, c’est-à-dire le coma ou la mort, soit un message périodique et c’est l’épilepsie. Le paradoxe est donc le suivant : la transmission d’ordre nécessite que le cerveau entretienne sans cesse le désordre. Examinons maintenant la relation entre les rafales brutales émises par le neurone et ce message électrique complexe qui parcourt le cerveau et active divers circuits. L’une des particularités du neurone est de hiérarchiser le message reçu grâce à sa structure fractale. Un même message chaotique peut être porteur de signification à bien des niveaux auto-similaires les uns par rapport aux autres comme le sont les niveaux hiérarchiques du cerveau. Le message neuronal qui est au dessus a été mathématiquement transformé en ne conservant qu’une partie des fréquences puis chaque morceau est agrandit aux lignes du dessous. Chaque agrandissement est similaire au message dont il est issu. Le nombre moyen de niveaux d’autosimilarité du message est équivalent au nombre de paramètres du système au cours d’un processus et peut être calculé par la théorie mathématique du chaos déterministe. C’est ce que l’on appelle la dimension de corrélation. Comment un tel message d’apparence désordonnée peut-il se traduire en informations, en image, en ordres, telle est la principale question bien entendu et la théorie du chaos n’a pas fini d’en donner la réponse. Cependant, il y a bien des éléments d’explication. Un travail récent de Francisco Varela à l’hôpital de la Pitié Salpétrière mérite d’être cité. Il date de début 1999 et a été publié en février par la revue Nature. Varela s’inspire des mathématiques du chaos pour étudier les ondes gamma entre 30 et 80 herz. Il a couplé cette étude avec une expérience de reconnaissance des formes. Les figures déformées qui y sont indiquées sont présentées jusqu’à ce que la personne reconnaisse une image. Au moment où les sujets sont conscients de l’avoir reconnu, ils appuient sur un bouton. Varela montre que cela coïncide avec le moment où le message gamma est déstructuré brutalement et envoyé à d’autres zones. Tant que la forme n’est pas reconnue, le cortex préfrontal a la capacité, unique dans le cerveau, de conserver l’information. Notons que ce temps de maintien du message avant déstructuration est une propriété essentielle qui diffère selon les animaux et les capacités de mémorisation et de conscience des animaux sont d’autant plus importantes que le temps de conservation du message structuré est plus long. Cette expérience n’a pas seulement l’intérêt de prouver le lien entre messages électriques et images mentales. Bien d’autres expériences, par exemple la tomographie qui permet de visualiser les zones impliquées par un processus mental, s’en étaient déjà chargées et on avait même pu montrer l’identité entre les tâches de zones impliquées par la vision des objets et celles concernées par l’évocation mentale des mêmes objets. Ou encore par l’acte et la pensée de celui-ci. Mais de plus cette expérience permet de dévoiler une partie du mécanisme du cerveau encore inconnue. En effet, elle souligne d’une part le fonctionnement par comparaison entre des circuits parallèles pour la reconnaissance utilisant la méthode par similitude qui est celle des bassins d’attraction. D’autre part elle révèle son mode de régulation par déstructuration du message après envoi à d’autres zones. Un message électrique porteur d’une information part d’une source et est envoyé dans les étages de la structure. Son degré de désordre augmente en même temps. En utilisant un terme de la théorie du chaos, nous dirons que sa dimension de corrélation augmente. L’irrégularité du message de base est non seulement porteuse des informations mais de plus cette base chaotique permet aux neurones de filtrer les informations cohérentes. Au contraire si le message de base devient trop régulier, il va correspondre en terme de fréquences à de nombreuses possibilités de passage des entrées neuronales. Si une impulsion électrique trop régulière se propage, elle va parvenir à passer dans de nombreux circuits et occuper toute une zone du cerveau. Tous les autres ordres qui devraient y passer vont être bloqués. Le cerveau ne peut plus commander même les ordres les plus simples de régulation du corps ou les ordres moteurs. Et c’est la crise d’épilepsie.

La théorie au service de la thérapie : l’épilepsie Dans son ouvrage intitulé « Entre le temps et l’éternité » Prigogine écrivait : « l’épilepsie, loin d’être assimilable à un comportement irrégulier se caractériserait au contraire par une « régularité » trop grande de l’activité cérébrale. » En 1991, Duke, spécialiste à l’institut d’Etat de Floride pour les recherches informatiques sur le message cérébral écrit ainsi : « plus il y a de chaos dans le message cérébral, meilleur c’est. » L’épilepsie est une affection du système nerveux qui entraîne des décharges cohérentes importantes dans toute une zone du cerveau et provoque des mouvements convulsifs et une perte de connaissance de une ou deux minutes. Comme le soupçonnait Prigogine, on sait aujourd’hui que l’épilepsie n’est pas une maladie due à une lésion ou à une dégradation physique du matériau cérébral mais à une perte de rythmicité chaotique du fait d’une trop grande régularité du message cérébral. Trop de régularité, c’est aussi ce qu’expliquait Lambert dans la « Revue de morphopsychologie » de janvier 1999 : « Il convient de ne pas faire passer une troupe au pas cadencé sur un pont car la répétition régulière de chocs synchronisés entraîne une entrée en résonance des structures de l’ouvrage qui peut aller jusqu’à la rupture. Analogiquement, on peut penser que la crise d’épilepsie consiste en une sorte d’entrée en résonance (de synchronisation) de l’activité cérébrale naturellement chaotique ». En effet, tout récemment un travail de l’équipe du CNRS et de l’hôpital de la Salpétrière de 1998 a montré que le fonctionnement normal du cerveau était chaotique et que l’épilepsie pouvait être détectée par l’apparition d’un rythme régulier et soignée par des impulsions électriques permettant de revenir au fonctionnement normal chaotique fondé sur un apparent désordre. Dans la comparaison entre un rythme normal et un rythme cérébral d’un épileptique, on réalise la comparaison des deux attracteurs étranges. Elle montre que celui de l’épileptique s’approche du rythme périodique et en dessous vous les rythmes représentés par le graphique dans le temps. On a comparé des rythmes connus de l’éveil et du sommeil comme les rythmes alpha et bèta. Là aussi, il est visible que celui de l’épileptique est beaucoup plus régulier. Cette étude a montré que l’on pouvait utiliser le modèle mathématique du chaos pour soigner les malades atteints d’épilepsie. La revue « Nature » a publié en octobre 98 le compte rendu des travaux de l’un des responsables de cette recherche, Jacques Martinerie, qui, après avoir réussi à exhiber les courbes caractéristiques des indicateurs non-linéaires du cerveau, explique que la route vers la crise est synonyme d’évolution vers la régularité. Les différents enregistrements indiqués en dessous montrent les étapes de la crise, depuis un rythme normal au dessus, puis un rythme trop régulier précédant la crise et qui est suivi d’un rythme trop agité. Dans l’électroencéphalogramme, on voit un message régulier qui occupe toute une zone du cerveau. Cette étude donne une nouvelle interprétation d’un fait que l’on connaissait : le sentiment de détente qui précède la crise d’épilepsie et dans lequel le malade a, quelques minutes avant la crise, une hallucination visuelle en même temps que le sentiment de sentir une odeur curieuse. C’est ce que l’on a appelé l’aura et dont les épileptiques disent qu’elle donne un curieux sentiment de bien être. Le message de l’épileptique montrait une baisse brutale de sa dimension de corrélation descendait bien en dessous de la normale. Cette baisse de dimension est synonyme d’une trop grande régularité avec un nombre moyen de paramètres du système descendant au dessous de trois. L’étude n’est pas seulement une interprétation ou une explication mais offre une voie pour la thérapie. En effet le calcul des caractéristiques des graphiques permet de prévoir quelques minutes à l’avance l’arrivée de la crise et, du coup, de l’éviter en envoyant artificiellement une décharge qui déstructure ce message régulier. C’est donc une découverte très importante pour soigner l’épilepsie. Jusque là on était souvent désarmé dans cette grave maladie au point qu’il arrivait qu’on soit contraint de débrancher les deux hémisphères cérébraux ! C’est dire toute l’importance de cette découverte.

Conclusion

La thèse est donc celle-ci : le cerveau est un mécanisme d’horlogerie comme le pensaient les matérialistes du Siècle des Lumières, à ceci près que les horloges ne sont nullement de simples tic tac sans variation ni évolution, ne sont pas des mécanismes sans histoire c’est-à-dire prédictibles et réversibles. Les horloges chaotiques sont capables de s’auto-réguler mais aussi d’apprendre et d’évoluer et de constituer tout un échafaudage de rythmes adaptatifs. Cette évolution a lieu au cours de la vie d’un individu mais aussi à l’échelle de l’évolution des espèces. Ce qui le permet c’est cette propriété des fonctions chaotiques à la fois d’être sensibles aux conditions initiales tout en étant structurellement stables. C’est donc surtout au physicien Erwin Schrödinger que la recherche semble donner raison, lui qui écrivait dans son passionnant ouvrage de 1967 « Qu’est-ce que la vie ? » : « La vie est fondée sur des mécanismes d’horlogerie capables de fonctionner dynamiquement » et Schrödinger rajoutait qu’une horloge qui est soumise à des lois dynamiques est capable non seulement de ne pas perdre en structuration mais même d’augmenter spontanément son niveau d’organisation. « L’évolution animale a été aussi l’évolution vers le cerveau puis vers le cerveau humain. Le cerveau a non seulement grossi comme le montre l’évolution des grands singes puis des hominoïdes puis des hominidés puis des hommes. Mais surtout il s’est complexifié. Chacune des fonctions simples s’est accouplée à une fonction supérieure puis s’est accouplée à des systèmes de régulation de la fonction. Quand nous marchons, quand nous regardons un paysage, quand nous parlons, nous actionnons des circuits de notre cerveau. Nous actionnons d’abord des circuits grossiers qui ont une capacité faible de résolution puis ceux-ci en actionnent d’autres qui affinent le processus. Avec cette amélioration de la précision des fonctions nous avons successivement développé des centres de régulation à plusieurs niveaux et nous conservons en partie en nous ces étapes de l’évolution animale. »

Messages

  • Qu’est-ce k le cerveau ?
    Qu’est-ce k la perception ?
    Qu’est-ce k l’entendement ?
    Qu’est-ce k la conscience ?
    Y’a t’il une rélation entre elle ?

    • Le cerveau est le système nerveux central des animaux possédant une centralisation des transmissions nerveuses.

      La perception nerveuse est une transmission entre les cellules nerveuses d’électricité et de molécules chimiques.

      L’entendement est la capacité à intégrer les faits dans des concepts abstraits.

      par exemple, la forêt est une réalité mais la capcité à penser à quelque chose quand tu lis le mot forêt est l’entendement.

      Entendement signifie donc compréhension des exposés abstraits qu’ils soient écrits ou parlés, ou même gestuels.

      La conscience est le fait que ta personne voit, entend, comprend et sait qu’elle voit, entend, comprend. On dit qu’elle en a conscience.

      Il y a bien entendu des relations entre toutes ces notions.

      Sans notre cerveau pas question d’entendement ni de concscience.

      Par contre la perception existe au niveau tactile, auditif, sensible en général.

  • Le cerveau est composé de neurones qui ressemblent à des arbustes dont les branches ne cesseraient de se ramifier pour établir des liens avec d’autres arbustes.
    Cette dynamique est possible par les mécanismes internes de développement du neurone et de ses axones, sorte de brin principal entouré d’une membrane, elle même composée de "briques" qui s’emboitent en fonction des liaisons possibles neuronales.

    Je mets une vidéo en lien qui montre l’action du mercure sur l’assemblage de ces fameuses "briques".

    vidéo cliquez ici

  • La turbulente dynamique de la matière grise

    Comment le cerveau se développe-t-il ? Jusqu’à quel âge ? Appliquée à l’enfant et à l’adolescent, l’imagerie par résonance magnétique révèle une maturation qui, loin d’être uniforme, s’effectue par vagues successives selon les zones du cerveau.

    Qui dit développement, dit dynamique, mouvement, changement. Le développement du cerveau humain n’échappe pas à la règle. Le ballet cellulaire débute très tôt chez l’embryon. Dès le deuxième mois de grossesse, les cellules précurseurs des neurones prolifèrent de façon intensive dans une zone particulière du cerveau rudimentaire, puis migrent jusqu’à leur emplacement définitif. Arrivées là, elles commencent à se différencier, et émettent des prolongements en direction les unes des autres (celles qui n’établiront pas de contacts mourront). À partir du sixième mois, les connexions entre neurones survivants se multiplient, et de nouvelles synapses se forment en abondance. Dans le même temps, les axones commencent à être recouverts d’une substance lipidique appelée myéline. Synthétisée par des cellules nommées oligodendrocytes, la myéline augmente la vitesse de conduction de l’influx nerveux le long de l’axone.

    Vient la naissance, qui n’interrompt en rien ces processus. Le cerveau du nouveau-né - riche de 100 milliards de neurones environ - continue à grandir, sous le contrôle de certains gènes, mais aussi sous l’influence des stimulations externes, bien plus nombreuses que celles que recevait le foetus. Les dendrites des neurones prolifèrent, les synapses se multiplient. Mais ce foisonnement cède peu à peu la place à un processus d’élagage : certaines connexions sont conservées et renforcées, d’autres, éliminées, tandis que la myélinisation se poursuit. Le tout aboutit à la sélection d’un réseau de connexions certes privilégié, mais pas statique (il est continûment remanié au cours de la vie de l’individu).

    C’est en examinant sous le microscope des cerveaux provenant de spécimens autopsiés que l’Américain Peter Huttenlocher a pour la première fois, il y a vingt-cinq ans, mis en évidence cette succession d’étapes. Il devait également dresser un second constat : elle ne se déroule pas partout en même temps. Par exemple, dans le cortex visuel, le maximum de connexions advient aux alentours du quatrième mois après la naissance. Commence alors l’élagage, qui se poursuit jusqu’à l’âge préscolaire, où le nombre de connexions est alors grosso modo celui qu’aura l’adulte. Mais dans le cortex préfrontal médian, une aire du cerveau impliquée dans des fonctions cognitives supérieures, le maximum survient vers 3-4 ans seulement, et l’élagage n’est pas notable avant le milieu - voire la fin - de l’adolescence

  • Du chaos dans les neurones

    Si, dans le cerveau, le hasard et le chaos jouent un grand rôle à l’échelle microscopique, un ordre statistique se manifeste à l’échelle des réseaux de neurones.

    Au cours de l’histoire, le cerveau a été comparé à un moteur, à une horloge, un automate, un ordinateur, une « machine » inactive en l’absence d’informations à traiter, et s’enclenchant à l’arrivée d’une information, etc. En réalité, il est surtout constitué de neurones communiquant notamment au moyen d’impulsions électriques. L’évolution dans le temps de ces impulsions forme un code complexe, support du traitement de l’information.

    La neurobiologie dispose d’outils pour enregistrer la dynamique de cette activité électrique, à diverses échelles spatiales et temporelles. Petit à petit, on a découvert que, quelle que soit l’échelle à laquelle on l’observe, l’activité cérébrale évolue dans le temps et selon sa localisation dans le cerveau. Qui plus est, les dynamiques spatiales et temporelles des activités électriques enregistrées sont très irrégulières, et le cerveau est capable de passer d’un type d’activité électrique à un autre, très différent. Ces dynamiques complexes et leurs changements seraient associés au traitement de l’information par le cerveau.

    Longtemps, on a pensé que l’activité cérébrale était nulle en l’absence de stimulus externe. Or il n’en est rien, puisqu’elle persiste même en l’absence d’« entrée » sensorielle. Imaginons que l’on jette un caillou dans une mare, puis un autre et encore un autre, etc. Les ondes circulaires créées par chaque caillou interagissent avec les précédentes. Il en résulte un motif spatial et temporel dépendant des interactions préexistantes et des nouvelles.

    De même, lorsqu’une information nouvelle arrive dans le cerveau, elle modifie la dynamique de fond préexistante, et c’est sans doute cette interaction d’un stimulus et de cette dynamique qui permet au cerveau de répondre au stimulus de façon adaptée et reproductible. Cette conception est fondée sur des dynamiques spatio-temporelles complexes,...

  • Le chaos déterministe qui est présent sous différentes formes au sein du cerveau est source d’imprédictibilité.

    Le fonctionnement du cerveau est donc régi par des lois qui laisseraient place à une certaine liberté ou plutôt à une multiplicité des possibles avenirs qui vérifieraient tous les lois du cerveau et plus généralement les lois de la nature.

    Le choix d’un possible se produit-il à chaque instant ? Plus précisément, est-ce que pour chaque acte, chaque micro-acte produit par un homme, des milliers d’autres auraient été réellement possible ? Bien sûr, pas au hasard mais bien dans tous les cas soumis à des lois déterministes.

    • En fait, ce qui me semble c’est que les lois ne déterminent que les possibles. Le chaos déterministe suppose à chaque instant plusieurs possibles, un très grand nombre qui, à notre échelle, ressemble à un infini. Car il convient de voir que ce chaos provient de l’interaction d’échelle avec à chaque transition entre les échelles un mélange de hasard et de lois. Aucun domaine n’existe à une seule échelle. Chaque loi n’intervient qu’à une échelle. Jamais une loi n’intervient seule en réalité mais on arrive à négliger les petits facteurs, sauf que de temps en temps les petits facteurs agissent à grande échelle (sensibilité aux conditions initiales oblige).

      Pour le cerveau, ce ne sont pas nos actes qui sont à la base de son fonctionnement mais notre corps. Les neurones qui se sont conservés sont ceux qui recevaient des impulsions électriques de notre corps. Ils faisaient partie de circuits neuronaux connectés à une partie ou plusieurs de notre corps. Les influx exprimaient à leur manière des changements dans notre corps. La "compréhension" des influx par les neurones provient non d’une traduction comme dans un langage mais de cet historique des interactions corps-cerveau. Ces interactions ayant eu lieu au hasard des changements et mouvements, ils ressemblent à de l’agitation comme on le constate en "lisant" le message électrique nerveux.

      Ou trouve-t-on la liberté ? Pas spécialement dans le cerveau. En fait, on la trouve en un sens partout dans la matière.

      Prenons un exemple. On fabrique dix centrales nucléaires exactement sur le même modèle et on y travaille exactement sur les mêmes produits, avec les mêmes protocoles et les mêmes formations des personnels, les mêmes fournisseurs de matériels ; les mêmes politiques, etc...

      Eh bien, il n’arrivera pas la même chose aux dix centrales. Il y a une sensibilité à des actes de niveau hiérarchique inférieur. Une des dix centrales peut parfaitement avoir un accident de niveau très élevé et pas les autres. C’est une forme de "la liberté". C’est aussi dû au chaos déterministe... de la matière !

  • Pour le cerveau quelles sont ces échelles hiérarchiques ? Cela va du quanta qui circule d’une particule à une autre jusqu’à l’organe et à l’organisme entier (cerveau-corps). Les échanges sont quantiques or les quanta exhibent déjà des interactions avec saut et contradiction (physique quantique) et une interaction ordre-désordre. En effet, le quanta est une transition matière-vide quantique. Ensuite, on a les neurones, les chaines neuronales, les cartes neuronales, les zones, les liaisons inter-zones, les liaisons entre hémisphères, les liaisons corps-cerveau, etc...

    Le chaos déterministe, mélange d’ordre et de désordre, provient du fait qu’on ne peut jamais négliger les transitions entre niveaux, transitions régies par du désordre. Il est déterministe parce qu’on ne peut jamais négliger les lois sur lesquelles reposent les niveaux hiérarchiques, niveaux qui ne sont pas simplement existants mais émergents...

    • Est-ce donc qu’à chaque instant, il apparaît des possibles, comme tu le demandais au départ ? En fait, cela supposerait que les structures existent d’avance. Par exemple, les réseaux neuronaux, les cartes neuronales ou les liaisons inter-zones. Alors que ces niveaux hiérarchiques, comme dans toute matière, ne sont que des structures qui émergent et disparaissent à chaque instant. De même qu’une particule apparaît ou disparaît à chaque instant au sein du vide quantique.

    • Merci pour toutes ces explications, même si il me faudra un peu de temps pour tout intégrer et bien visualiser.

      La vie se réinvente donc en permanence et à aucun moment aucun futur n’est acté d’avance ?

  • Merci pour toutes ces explications, même si il me faudra un peu de temps pour tout intégrer et bien visualiser.

    Tu dis :
    "Est-ce donc qu’à chaque instant, il apparaît des possibles, comme tu le demandais au départ ? En fait, cela supposerait que les structures existent d’avance. Par exemple, les réseaux neuronaux, les cartes neuronales ou les liaisons inter-zones. Alors que ces niveaux hiérarchiques, comme dans toute matière, ne sont que des structures qui émergent et disparaissent à chaque instant. De même qu’une particule apparaît ou disparaît à chaque instant au sein du vide quantique."

    La vie se réinvente donc en permanence et à aucun moment aucun futur n’est acté d’avance ?

    Par exemple, si je discute avec un ami, la réaction que je vais avoir à une de ces paroles aurait-elle pu être différente ? Une "infinité" de futurs peuvent ils être réellement possible ?

    J’espère que je n’investis pas le mystique et que ces questions sont pertinentes.

    Je te remercie de ta réponse.

  • Une "infinité" de futurs peuvent ils être réellement possible ?

    Personnellement, il me semble que oui.

    Je maîtrise mal ces questions, mais il me semble que dans la vie quotidienne, nous pouvons trouver des exemples.

    Lorsque une parole m’énerve, je peux laisser libre court à mon énervement et mon impulsivité, ou bien essayer de ne rien montrer de cet énervement.

    Bien entendu, si j’ai pris l’habitude de laisser mes impulsivités l’emporter à chaque occasion d’énervement, je serais plus enclin à recommencer lorsqu’une source d’énervement sera en ma présence.

    Cependant dans l’énervement, il y a plusieurs possibilités : ne rien dire, parler calmement, crier, donner une claque ou boxer la source d’énervement... et j’en oublie.

    Là, il y a un choix que l’individu fait parmi des possibles. Lorsque la situation se présente, le choix est fait en quelques secondes pour déterminer la réaction à telle ou telle situation. En ce sens les possibles sont multiples, et le futur me parait toujours contingent en même temps que déterminé : par des choix et des éléments extérieurs : certains de ces éléments, je peux en avoir conscience, mais souvent, beaucoup m’échappent... c’est ainsi que les futurs sont toujours indéterminés, et que les possibles sont multiples.

    J’espère, si du moins je n’ai pas permis l’avancée de la discussion, n’avoir pas fait stagné ou reculé celle-ci... (mais au fait, reculer ou avancer selon quels critères ?)

    Merci à toi sylvain de ces questions, qui à mon sens n’ont rien de mystique, mais sont profondément philosophiques.

    • Aucune question n’est mystique mais certaines réponses le sont. Par exemple, celles qui postulent d’avance qu’il y a autre chose que la transformation de la matière, un esprit qui n’aurait rien à voir avec la matière...

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