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Le peuple travailleur du Yémen ne veut plus de la dictature sociale et politique

vendredi 11 mars 2011, par Robert Paris, Tiekoura Levi Hamed

1ère partie

2ème partie

3ème partie

4ème partie

5ème partie

6ème partie

L’opposition yéménite s’est déclarée dimanche déterminée à évincer le président Ali Abdallah Saleh, et le régime, qui refuse de céder, a accusé Al-Qaïda de trois attaques ayant coûté la vie à six militaires.

La veille, le président Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, avait rejeté une proposition de l’opposition prévoyant qu’il quitte ses fonctions avant la fin de l’année, alors que son mandat expire en 2013.

Dimanche, un porte-parole de l’opposition, Mohammad al-Sabri, a estimé que le refus du président, dont les appuis politiques se réduisent, signifiait pour lui qu’il n’y avait plus qu’une issue, "le départ".

Une foule nombreuse a poursuivi dimanche un sit-in devant l’université de Sanaa, entamé depuis le 20 février pour obtenir la chute du régime.

A Ibb, 200 km plus au sud, des manifestants ont été attaqués par des partisans du régime, et 61 d’entre eux ont été blessés, essentiellement à coups de couteaux, de pierres et de matraques, a annoncé un militant de l’opposition.

Des centaines de personnes favorables au Congrès populaire général (CPG), le parti au pouvoir, ont attaqué les manifestants sans que les forces de sécurité n’interviennent, a précisé Abdoulkarim Mohammed Ali, un organisateur local de la contestation.

La détérioration de la situation dans le pays a incité le Département d’état américain, qui suit avec inquiétude la situation au Yémen -un pays pauvre de la péninsule arabique où Al-Qaïda est active- à conseiller à ses ressortissants à quitter le pays.

Une note de conseil aux voyageurs autorise aussi le personnel non essentiel de l’ambassade américaine à partir.

Samedi, Londres a déconseillé à ses ressortissants de se rendre au Yémen, en proie à "des violences croissantes", et appelé les Britanniques présents dans ce pays à partir si leur présence n’est pas indispensable.

Trois incidents séparés attribués à la mouvance d’Oussama ben Laden ont fait six morts dans trois régions du pays.

Dans la province de Maareb (170 km à l’est de Sanaa), un des fiefs d’Al-Qaïda, quatre membres de la garde républicaine (unité d’élite) ont été tués par des inconnus qui ont ouvert le feu sur leur camion, a indiqué un responsable local, selon qui "cette attaque ressemble à celles menées par le passé par Al-Qaïda".

Dans le sud du pays, un colonel des services de renseignement, Abdel Hamid al-Charaabi, "a été tué par deux membres d’Al-Qaïda" qui circulaient à moto à Zinjibar, chef-lieu de la province d’Abyane, selon un responsable local.

Dans la province sudiste du Hadramout, un deuxième colonel, Chayef al-Chouaïbi, a été abattu par des membres présumés d’al-Qaïda, circulant eux aussi sur une motocyclette, ont indiqué des témoins.

Dans le même temps, l’opposition a appelé "tout le peuple à intensifier les sit-in et les manifestations dans toutes les régions, afin (que le chef de l’Etat) n’ait plus qu’une seule option, le départ", selon le porte-parole de l’opposition parlementaire, Mohammad al-Sabri.

Le président yéménite, au pouvoir depuis 32 ans, avait rejeté samedi une proposition de l’opposition, à travers une médiation de dignitaires religieux pour son départ avant la fin de l’année.

La position du président "signifie sa mort politique, et la rue est à présent notre unique recours", selon le porte-parole qui a annoncé la "fin du dialogue indirect à travers les dignitaires religieux".

Le régime yéménite est contesté depuis fin janvier avec des manifestations à Sanaa, Taëz, Aden et dans le reste du pays. Selon Amnesty International, au moins 27 personnes ont été tuées lors de ces manifestations.

Le président Ali Abdallah Saleh, fin manoeuvrier, aime à dire de lui-même qu’il sait "danser avec les têtes de serpent" (l’expression dont Victoria Clark a fait le sous-titre de son livre sur le Yémen). Il a en effet survécu à la chute de son allié Saddam Hussein en Irak, à la reprise de la guerre avec le sud en 1994 : il s’est allié aux radicaux islamiques mais a néanmoins obtenu la protection de Washington tout en imposant son pouvoir aux confédérations tribales, et a ainsi réussi à se maintenir 32 ans au pouvoir à la tête de ce pays éminement instable.

Un brève épisode de guerre entre le nord et le sud en 1994 aboutit à l’élimination de l’ancien parti du gauche du Yémen du Sud et au renforcement de l’autoritarisme du régime, mais ne met pas fin aux tensions avec la partie méridionale qui s’estime discriminée par les dirigeants du Nord.

Le taux de chômage des jeunes, déjà important dans tout le pays, y serait par exemple encore plus élevé (40% des jeunes de 20 à 24 ans). Le Financial Times rapporte que pour certains observateurs, le danger posé par les séparatistes du sud est plus grave que celui que représente Al Qaïda.

La rébellion "houthiste" dans le nord du pays s’enracine dans la religion zaïdite, une branche de l’islam chiite. Les Houthistes, avec à leur tête Abdelmalek Al-Houthi, assurent vouloir préserver leur identité religieuse menacée par un wahhabisme en pleine expansion.

Le zaïdisme est très présent sur les hauts plateaux yéménites, en particulier dans la régions de Saada (ou Sa’dah), aux confins de l’Arabie saoudite. Cette région, qui fut l’un des derniers bastions royalistes lors de la guerre civile dans les années 60, a longtemps été laissée à l’écart des politiques de développement selon Pierre Bernin ("Les guerres cachées du Yémen"). Par ailleurs, comme toujours au Yémen, le conflit religieux s’articule avec les solidarités tribales.

Le gouvernement accuse la rébellion de vouloir rétablir l’imamat zaïdite qui régnait sur le Yémen du nord avant le coup d’état militaire de 1962, mais aussi d’être soutenus par l’Iran. Depuis 2004, le conflit aurait fait plus de 10 000 morts et entraîné le déplacement de plusieurs dizaines de milliers de civils (300 000 selon l’ONU).

Le gouvernement et la rébellion ont signé, le 12 février, un cessez-le-feu qui offre un espoir -certes relatif - de répit pour la région (un précédent cessez-le feu en 2007, négocié grâce à une médiation du Qatar avait fait long feu). La rébellion houthiste s’est depuis associée au mouvement de protestation en proclamant son soutien, le 21 février, aux manifestants de Sanna et du reste du pays.
suite à venir...

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