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Voltaire était-il vraiment une des « Lumières » ?

lundi 19 septembre 2016, par Robert Paris

Victor Hugo, Choses vues :

« M. de Voltaire voulait que ses servantes crussent en Dieu. Un jour à Ferney il avait à dîner sept ou huit philosophes. Quatre ou cinq belles Suissesses servaient à table. Entre la poire et le fromage le marquis d’Argout se prit à nier l’âme et le baron d’Holbach à nier Dieu. — Assez, messieurs ! dit Voltaire, si Dieu n’est pas, la femme existe. Et, se tournant vers les servantes : — Fermez les oreilles et montrez les talons. »

Voltaire était-il vraiment une des « Lumières » ?

Il est plus que courant de citer Voltaire comme l’une des plus grandes lumières du « siècle des Lumières », en oubliant les plus grands esprits de l’époque comme Denis Diderot, Galilée, Leibniz, Spinoza, Helvétius, D’Alembert ou Francis Bacon…

Pourtant, il n’était ni l’ennemi de la royauté, ni celui de la féodalité, ni celui des religions, ni celui de l’oppression des peuples, ni l’adversaire du racisme, de la haine des noirs, des juifs, ni du colonialisme, ni de l’esclavagisme, ni de la corruption, ni du mensonge, ni de l’espionnage, ni de la guerre et on en passe

En tant qu’écrivain, ce n’est ni un grand historien, ni un grand poète, ni un grand philosophe, ce n’est qu’un grand satiriste.

Pour bien des gens, Voltaire serait le symbole de la république, de la démocratie, de la lutte contre la réaction, de la lutte contre les dictatures, de la lutte contre l’obscurantisme, de la lutte contre le fanatisme. Il est considéré comme le défenseur de la justice pour défendre les opprimés, étaient pourchassés en France. Et l’image mythique est celle d’un Voltaire toujours à deux doigts d’être embastillé par la royauté pour ses attaques radicales.

La réalité est très loin du mythe. Si Voltaire a fait l’éloge des protestants d’Angleterre, il n’était pas le défenseur de ceux de France. Il a été bien plus pourchassé par la royauté française parce qu’agent double (de la France et de la Prusse), il avait livré des secrets militaires au roi de Prusse que parce qu’il attaquait dangereusement la royauté dans ses écrits. Voltaire n’a jamais soutenu le radicalisme d’un Diderot ni sur le plan philosophique, ni sur le plan politique.

Contrairement à plusieurs des philosophes des Lumières, Voltaire n’est pas athée : il est déiste. Cela signifie qu’il croit qu’il existe un dieu-horloger, qui a créé le monde.

« Voltaire n’aima pas assez le peuple. […] sa pitié n’eut jamais rien d’actif et qui vînt d’un sentiment démocratique ; c’était une pitié de grand seigneur mêlé de hauteur et de mépris. […] En revanche, on sait jusqu’où il fit descendre, à l’égard des grands, l’humilité de ses hommages ; dans quelles puériles jouissances la faveur des cours retint sa vanité captive, et combien il aimait à se parer du titre de gentilhomme de la chambre. […] Calculées ou sincères , de semblables adulations étaient sans dignité ; et Voltaire ne se serait jamais abaissé jusque-là, s’il avait eu ce généreux orgueil qui se puise dans le sentiment de l’égalité. Mais né d’ailleurs avec une nature souple, il se trouva, dès son entrée dans la vie active, égaré parmi les Vendôme, les Richelieu, les Conti, les La Fare, les Chaulieu ; et dans ce cercle, où l’art du courtisan s’apprenait à l’école du bon goût, il perdit tout ce qui constitue les fiers caractères et les âmes viriles. […] Voltaire n’était pas fait, on le voit, pour chercher dans une révolution politique et sociale le salut du peuple. Changer hardiment, profondément, les conditions matérielles de l’État et de la société, il n’y songeait même pas. »

Histoire de la révolution française, Louis Blanc

Certes, Voltaire se dit opposé au fanatisme et favorable à la tolérance, mais l’exemple de celle-ci est l’Angleterre protestante qui combattu dans le sang ses catholiques et qu’il décrit ainsi au chapitre IV du Traité sur la tolérance :

« Si la tolérance est dangereuse, et chez quels peuples elle est permise. Je ne dis pas que tous ceux qui ne sont point de la religion du prince doivent partager les places et les honneurs de ceux qui sont de la religion dominante. En Angleterre, les catholiques, regardé comme attachés au parti du prétendant, ne peuvent parvenir aux emplois : ils payent même double taxe ; mais ils jouissent d’ailleurs de tous les droits des citoyens. »

En France, Voltaire ne revendique même pas qu’on supprime les lois et édits antiprotestants :

« Nous savons que plusieurs chefs de famille, qui ont élevé de grandes fortunes dans les pays étrangers, sont prêts à retourner dans leur patrie ; ils ne demandent que la protection de la loi naturelle, la validité de leurs mariages, la certitude de l’état de leurs enfants, le droit d’hériter de leurs pères, la franchise de leurs personnes ; point de temples publics, point de droit aux charges municipales, aux dignités : les catholiques n’en ont ni à Londres ni en plusieurs autres pays.Il ne s’agit plus de donner des privilèges immenses, des places de sûreté à une faction, mais de laisser vivre un peuple paisible, d’adoucir des édits autrefois peut-être nécessaires, et qui ne le sont plus.Ce n’est pas à nous d’indiquer au ministère ce qu’il peut faire ; il suffit de l’implorer pour des infortunés. »

Voltaire, Traité sur la tolérance

Qui était vraiment Voltaire ?

Nous allons nous contenter de citer quelques unes des « pensées », atroces et abominables, de Voltaire et le lecteur jugera par lui-même ce qu’il faut en penser :

« Il n’est pas étonnant qu’en tout pays l’homme se soit rendu le maître de la femme, tout étant fondé sur la force. Il a d’ordinaire beaucoup de supériorité par celle du corps et même de l’esprit. On a vu des femmes très savantes comme il en fut de guerrières ; mais il n’y en a jamais eu d’inventrices. »

Voltaire, (Dictionnaire philosophique)

"Dire que les Égyptiens, les Perses, les Grecs furent instruits par les juifs, c’est dire que les Romains apprirent les arts des Bas-Bretons."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Les femmes ressemblent aux girouettes, elles se fixent quand elles se rouillent."

Voltaire (Le Sottisier, paru post-mortem en 1883)

"Il n’est permis qu’à un aveugle de douter que les Blancs, les nègres, les albinos, les Hottentots, les Chinois, les Américains ne soient des races entièrement différentes."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Les Blancs sont supérieurs à ces Nègres, comme les Nègres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux huîtres."

Voltaire (Traité de métaphysique)

"Nous n’achetons des esclaves domestiques que chez les Nègres ; on nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que l’acheteur. Ce négoce démontre notre supériorité ; celui qui se donne un maître était né pour en avoir."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Il n’y a point de voyageur instruit qui, en passant par Leyde, n’ait vu une partie du reticulum mucosum d’un Nègre disséqué par le célèbre Ruysch. Tout le reste de cette membrane fut transporté par Pierre-le-Grand dans le cabinet des raretés, à Petersbourg. Cette membrane est noire, et c’est elle qui communique aux Nègres cette noirceur inhérente qu’ils ne perdent que dans les maladies qui peuvent déchirer ce tissu, et permettre à la graisse, échappée de ses cellules, de faire des tâches blanches sous la peau. Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d’hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu’ils ne doivent point cette différence à leur climat, c’est que des nègres et des négresses transportés dans les pays les plus froids y produisent toujours des animaux de leur espèce, et que les mulâtres ne sont qu’une race bâtarde d’un noir et d’une blanche, ou d’un blanc et d’une noire. Les Albinos sont, à la vérité, une nation très petite et très rare ; ils habitent au milieu de l’Afrique : leur faiblesse ne leur permet guère de s’écarter des cavernes où ils demeurent ; Cependant les Nègres en attrapent quelquefois, et nous les achetons d’eux par curiosité. Prétendre que ce sont des Nègres nains, dont une espèce de lèpre a blanchi la peau, c’est comme si l’on disait que les noirs eux-mêmes sont des blancs que la lèpre a noircis. Un Albinos ne ressemble pas plus à un Nègre de Guinée qu’à un Anglais ou à un Espagnol. Leur blancheur n’est pas la nôtre : rien d’incarnat, nul mélange de blanc et de brun ; c’est une couleur de linge ou plutôt de cire blanchie ; leurs cheveux, leurs sourcils, sont de la plus belle et de la plus douce soie ; leurs yeux ne ressemblent en rien à ceux des autres hommes, mais ils approchent beaucoup des yeux de perdrix. Ils ressemblent aux Lappons par la taille, à aucune nation par la tête, puisqu’ils ont une autre chevelure, d’autres yeux, d’autres oreilles ; et ils n’ont d’homme que la stature du corps, avec la faculté de la parole et de la pensée dans un degré très éloigné du nôtre. Tels sont ceux que j’ai vus et examinés. "

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Les Samoïèdes, les Lappons, les habitants du nord de la Sibérie, ceux du Kamshatka, sont encore moins avancés que les peuples de l’Amérique. La plupart des Nègres, tous les Cafres, sont plongés dans la même stupidité, et y croupiront longtemps."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"La même providence qui a produit l’éléphant, le rhinocéros et les Nègres, a fait naître dans un autre monde des orignaux, des condors, des animaux a qui on a cru longtemps le nombril sur le dos, et des hommes d’un caractère qui n’est pas le notre."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

" Les blancs et les nègres, et les rouges, et les Lappons, et les Samoïèdes, et les Albinos, ne viennent certainement pas du même sol. La différence entre toutes ces espèces est aussi marquée qu’entre un lévrier et un barbet."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Si nous lisions l’histoire des Juifs écrite par un auteur d’une autre nation, nous aurions peine à croire qu’il y ait eu en effet un peuple fugitif d’Egypte qui soit venu par ordre exprès de Dieu immoler sept ou huit petites nations qu’il ne connaissait pas ; égorger sans miséricorde les femmes, les vieillards et les enfants à la mamelle, et ne réserver que les petites filles ; que ce peuple saint ait été puni de son Dieu quand il avait été assez criminel pour épargner un seul homme dévoué à l’anathème. Nous ne croirions pas qu’un peuple si abominable (les Juifs) eut pu exister sur la terre. Mais comme cette nation elle-même nous rapporte tous ses faits dans ses livres saints, il faut la croire."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Toujours superstitieuse, toujours avide du bien d’autrui, toujours barbare, rampante dans le malheur, et insolente dans la prospérité, voilà ce que furent les Juifs aux yeux des Grecs et des Romains qui purent lire leurs livres."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Si Dieu avait exaucé toutes les prières de son peuple, il ne serait restés que des Juifs sur la terre ; car ils détestaient toutes les nations, ils en étaient détestés ; et, en demandant sans cesse que Dieu exterminât tous ceux qu’ils haïssaient, ils semblaient demander la ruine de la terre entière."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

" N’est-il pas clair (humainement parlant, en ne considérant que les causes secondes) que si les Juifs, qui espéraient la conquête du monde, ont été presque toujours asservis, ce fut leur faute ? Et si les Romains dominèrent, ne le méritèrent-ils pas par leur courage et par leur prudence ? Je demande très humblement pardon aux Romains de les comparer un moment avec les Juifs."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Si ces Ismaélites [les Arabes] ressemblaient aux Juifs par l’enthousiasme et la soif du pillage, ils étaient prodigieusement supérieurs par le courage, par la grandeur d’âme, par la magnanimité : leur histoire, ou vraie ou fabuleuse, avant Mahomet, est remplie d’exemples d’amitié, tels que la Grèce en inventa dans les fables de Pilade et d’Oreste, de Thésée et de Pirithous. L’histoire des Barmécides n’est qu’une suite de générosités inouïes qui élèvent l’âme. Ces traits caractérisent une nation. On ne voit au contraire, dans toutes les annales du peuple hébreu, aucune action généreuse. Ils ne connaissent ni l’hospitalité, ni la libéralité, ni la clémence. Leur souverain bonheur est d’exercer l’usure avec les étrangers ; et cet esprit d’usure, principe de toute lâcheté, est tellement enracinée dans leurs coeurs, que c’est l’objet continuel des figures qu’ils emploient dans l’espèce d’éloquence qui leur est propre. Leur gloire est de mettre à feu et à sang les petits villages dont ils peuvent s’emparer. Ils égorgent les vieillards et les enfants ; ils ne réservent que les filles nubiles ; ils assassinent leurs maîtres quand ils sont esclaves ; ils ne savent jamais pardonner quand ils sont vainqueurs : ils sont ennemis du genre humain. Nulle politesse, nulle science, nul art perfectionné dans aucun temps, chez cette nation atroce."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

" Lorsque, vers la fin du quinzième siècle, on voulut rechercher la source de la misère espagnole, on trouva que les Juifs avaient attiré à eux tout l’argent du pays par le commerce et par l’usure. On comptait en Espagne plus de cent cinquante mille hommes de cette nation étrangère si odieuse et si nécessaire. (...) Les Juifs seuls sont en horreur à tous les peuples chez lesquels ils sont admis (...). On feignait de s’alarmer que la vanité que tiraient les Juifs d’être établis sur les côtes méridionales de ce royaume long-temps avant les chrétiens : il est vrai qu’ils avaient passé en Andalousie de temps immémorial ; ils enveloppaient cette vérité de fables ridicules, telles qu’en a toujours débité ce peuple, chez qui les gens de bon sens ne s’appliquent qu’au négoce, et où le rabbinisme est abandonné à ceux qui ne peuvent mieux faire. Les rabbins espagnols avaient beaucoup écrit pour prouver qu’une colonie de Juifs avait fleuri sur les côtes du temps de Salomon, et que l’ancienne Bétique payait un tribut à ce troisième roi de Palestine ; il est très vraisemblable que les Phéniciens, en découvrant l’Andalousie, et en y fondant des colonies, y avaient établi des Juifs qui servirent de courtiers, comme ils en ont servi partout ; mais de tout temps les Juifs ont défiguré la vérité par des fables absurdes. Ils mirent en œuvre de fausses médailles, de fausses inscriptions ; cette espèce de fourberie, jointe aux autres plus essentielles qu’on leur reprochait, ne contribua pas peu à leur disgrâce."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

" Ils ont même été sur le point d’obtenir le droit de bourgeoisie en Angleterre vers l’an 1750 et l’acte du parlement allait déjà passer en leur faveur. Mais enfin le cri de la nation, et l’excès du ridicule jeté sur cette entreprise la fit échouer. Il courut cent pasquinades représentant mylord Aaron et mylord Judas séants dans la chambre des pairs. On rit, et les Juifs se contentèrent d’être riches et libres ; (...) Vous êtes frappés de cette haine et de ce mépris que toutes les nations ont toujours eus pour les Juifs. C’est la suite inévitable de leur législation : Il fallait, ou qu’ils subjugassent tout, ou qu’ils fussent écrasés. Il leur fut ordonné d’avoir les nations en horreur, et de se croire souillés s’ils avaient mangé dans un plat qui eût appartenu à un homme d’une autre loi. Ils appelaient les nations vingt à trente bourgades leurs voisines qu’ils voulaient exterminer, et ils crurent qu’il fallait n’avoir rien de commun avec elles. Quand leurs yeux furent un peu ouverts par d’autre nations victorieuses qui leur apprirent que le monde était plus grand qu’ils ne croyaient, ils se trouvèrent, par leur loi même, ennemis naturels de ces nations, et enfin du genre humain. Leur politique absurde subsista quand elle devait changer ; leur superstition augmenta avec leurs malheurs : leurs vainqueurs étaient incirconcis ; il ne parut pas plus permis à un Juif de manger dans un plat qui avait servi à un Romain que dans le plat d’un Amorrhéen ; ils gardèrent tous leurs usages, qui sont précisément le contraire des usages sociables. Ils furent donc avec raison traités comme une nation opposée en tout aux autres ; les servant par avarice, les détestant par fanatisme, se faisant de l’usure un devoir sacré. Et ce sont nos pères ! "

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

" Il y avait alors une petite nation, aussi vagabonde, aussi méprisée que les Juifs, et adonnée à une autre espèce de rapine ; c’était un ramas de gens inconnus, qu’on nommait Bohèmes en France, et ailleurs Egyptiens, Giptes ou Gipsis, ou Syriens (...). Cette race a commencé à disparaître de la face de la terre depuis que, dans nos derniers temps, les hommes ont été désinfatués des sortilèges, des talismans, des prédictions et des possessions."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

" Nous n’achetons des esclaves domestiques que chez les Nègres ; on nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que l’acheteur. Ce négoce démontre notre supériorité ; celui qui se donne un maître était né pour en avoir."

Voltaire (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, 1753)

"Je me félicite avec vous de l’heureux succès du navire le Congo, arrivé si à propos sur la côte d’Afrique pour soustraire à la mort tant de malheureux nègres... Je me réjouis d’avoir fait une bonne affaire en même temps qu’une bonne action."

Voltaire (Lettre à Michaud de Nantes, son associé dans l’armement du Congo)

"Il y a une tragédie anglaise qui commence par ces mots : mets de l’argent dans ta poche et moque-toi du reste. Celà n’est pas tragique, mais celà est fort sensé"

Voltaire (lettre de Voltaire au P. de Menoux, 11 juillet 1960).

« Descendu sur ce petit amas de boue, et n’ayant pas plus de notion de l’homme que l’homme n’en a des habitants de Mars ou de Jupiter, je débarque vers les côtes de l’Océan, dans le pays de la Cafrerie, et d’abord je me mets à chercher un homme. Je vois des singes, des éléphants, des nègres, qui semblent tous avoir quelque lueur d’une raison imparfaite. Les uns et les autres ont un langage que je n’entends point, et toutes leurs actions paraissent se rapporter également à une certaine fin. Si je jugeais des choses par le premier effet qu’elles font sur moi, j’aurais du penchant à croire d’abord que de tous ces êtres c’est l’éléphant qui est l’animal raisonnable. Mais, pour ne rien décider trop légèrement, je prends des petits de ces différentes bêtes ; j’examine un enfant nègre de six mois, un petit éléphant, un petit singe, un petit lion, un petit chien : je vois, à n’en pouvoir douter, que ces jeunes animaux ont incomparablement plus de force et d’adresse ; qu’ils ont plus d’idées, plus de passions, plus de mémoire, que le petit nègre ; qu’ils expriment bien plus sensiblement tous leurs désirs ; mais, au bout de quelque temps, le petit nègre a tout autant d’idées qu’eux tous. Je m’aperçois même que ces animaux nègres ont entre eux un langage bien mieux articulé encore, et bien plus variable que celui des autres bêtes. J’ai eu le temps d’apprendre ce langage, et enfin, à force de considérer le petit degré de supériorité qu’ils ont à la longue sur les singes et sur les éléphants, j’ai hasardé de juger qu’en effet c’est là l’homme ; et je me suis fait à moi-même cette définition : L’homme est un animal noir qui a de la laine sur la tête, marchant sur deux pattes, presque aussi adroit qu’un singe, moins fort que les autres animaux de sa taille, ayant un peu plus d’idées qu’eux, et plus de facilité pour les exprimer ; sujet d’ailleurs à toutes les mêmes nécessités ; naissant, vivant, et mourant tout comme eux. Après avoir passé quelque temps parmi cette espèce, je passe dans les régions maritimes des Indes orientales. Je suis surpris de ce que je vois : les éléphants, les lions, les singes, les perroquets, n’y sont pas tout à fait les mêmes que dans la Cafrerie, mais l’homme y paraît absolument différent ; ils sont d’un beau jaune, n’ont point de laine ; leur tête est couverte de grands crins noirs. Ils paraissent avoir sur toutes les choses des idées contraires à celles des nègres. Je suis donc forcé de changer ma définition et de ranger la nature humaine sous deux espèces la jaune avec des crins, et la noire avec de la laine. Mais à Batavia, Goa, et Surate, qui sont les rendez-vous de toutes les nations, je vois un grande multitude d’Européens, qui sont blancs et qui n’ont ni crins ni laine, mais des cheveux blonds fort déliés avec de la barbe au menton, On m’y montre aussi beaucoup d’Américains qui n’ont point de barbe : voilà ma définition et mes espèces d’hommes bien augmentées. Je rencontre à Goa une espèce encore plus singulière que toutes celles-ci : c’est un homme vêtu d’une longue soutane noire, et qui se dit fait pour instruire les autres. Tous ces différents hommes, me dit-il, que vous voyez sont tous nés d’un même père ; et de là il me conte une longue histoire. Mais ce que me dit cet animal me paraît fort suspect. Je m’informe si un nègre et une négresse, à la laine noire et au nez épaté, font quelquefois des enfants blancs, portant cheveux blonds, et ayant un nez aquilin et des yeux bleus ; si des nations sans barbe sont sorties des peuples barbus, et si les blancs et les blanches n’ont jamais produit des peuples jaunes. On me répond que non ; que les nègres transplantés, par exemple en Allemagne, ne font que des nègres, à moins que les Allemands ne se chargent de changer l’espèce, et ainsi du reste. On m’ajoute que jamais homme un peu instruit n’a avancé que les espèces non mélangées dégénérassent, et qu’il n’y a guère que l’abbé Dubos qui ait dit cette sottise dans un livre intitulé Réflexions sur la peinture et sur la poésie, etc. Il me semble alors que je suis assez bien fondé à croire qu’il en est des hommes comme des arbres ; que les poiriers, les sapins, les chênes et les abricotiers, ne viennent point d’un même arbre, et que les blancs barbus, les nègres portant laine, les jaunes portant crins, et les hommes sans barbe, ne viennent pas du même homme. (...) Je me suppose donc arrivé en Afrique, et entouré de nègres, de Hottentots, et d’autres animaux. Je remarque d’abord que les organes de la vie sont les mêmes chez eux tous ; les opérations de leurs corps partent toutes des mêmes principes de vie ; ils ont tous à mes yeux mêmes désirs, mêmes passions, mêmes besoins ; ils les expriment tous, chacun dans leurs langues. La langue que j’entends la première est celle des animaux, cela ne peut être autrement ; les sons par lesquels ils s’expriment ne semblent point arbitraires, ce sont des caractères vivants de leurs passions ; ces signes portent l’empreinte de ce qu’ils expriment : le cri d’un chien qui demande à manger, joint à toutes ses attitudes, a une relation sensible à son objet ; je le distingue incontinent des cris et des mouvements par lesquels il flatte un autre animal, de ceux avec lesquels il chasse, et de ceux par lesquels il se plaint ; je discerne encore si sa plainte exprime l’anxiété de la solitude, ou la douleur d’une blessure, ou les impatiences de l’amour. Ainsi, avec un peu d’attention, j’entends le langage de tous les animaux ; ils n’ont aucun sentiment qu’ils n’expriment : peut-être n’en est-il pas de même de leurs idées ; mais comme il paraît que la nature ne leur a donné que peu d’idées, il me semble aussi qu’il était naturel qu’ils eussent un langage borné, proportionné à leurs perceptions. Que rencontré-je de différent dans les animaux nègres ? Que puis-je y voir, sinon quelques idées et quelques combinaisons de plus dans leur tête, exprimées par un langage différemment articulé ? Plus j’examine tous ces êtres, plus je dois soupçonner que ce sont des espèces différentes d’un même genre. Cette admirable faculté de retenir des idées leur est commune à tous ; ils ont tous des songes et des images faibles, pendant le sommeil, des idées qu’ils ont reçues en veillant ; leur faculté sentante et pensante croît avec leurs organes, et s’affaiblit avec eux, périt avec eux. Que l’on verse le sang d’un singe et d’un nègre, il y aura bientôt dans l’un et dans l’autre un degré d’épuisement qui les mettra hors d’état de me reconnaître ; bientôt après leurs sens extérieurs n’agissent plus, et enfin ils meurent. (...) Enfin je vois des hommes qui me paraissent supérieurs à ces nègres, comme ces nègres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux huîtres et aux autres animaux de cette espèce. »

Voltaire, (Traité de Métaphysique, 1734)

"J’ai vu, il n’y a pas longtemps, à Paris un petit animal blanc comme du lait, avec un muffle taillé comme celui des Lapons, ayant, comme les nègres, de la laine frisée sur la tête, mais une laine beaucoup plus fine, et qui est de la blancheur la plus éclatante ; ses cils et ses sourcils sont de cette même laine, mais non frisée ; ses paupières, d’une longueur qui ne leur permet pas en s’élevant de découvrir toute l’orbite de l’oeil, lequel est un rond parfait.(...). Cet animal s’appelle un homme, parce qu’il a le don de la parole, de la mémoire, un peu de ce qu’on appelle raison, et une espèce de visage. La race de ces hommes habite au milieu de l’Afrique : les Espagnols les appellent Albinos (...). Cette espèce est méprisée des nègres, plus que les nègres ne le sont de nous. Voici enfin une nouvelle richesse de la nature, une espèce qui ne ressemble pas tant à la nôtre que les barbets aux lévriers. Il y a encore probablement quelque autre espèce vers les terres australes. Voilà le genre humain plus favorisé qu’on n’a cru d’abord. Il eût été bien triste qu’il y eût tant d’espèces de singes, et une seule d’hommes. C’est seulement grand dommage qu’un animal aussi parfait soit si peu diversifié, et que nous ne comptions encore que cinq ou six espèces absolument différentes, tandis qu’il y a parmi les chiens une diversité si belle. »

Voltaire (Relation touchant un Maure blanc amené d’Afrique à Paris, 1744).

Extraits de Voltaire, (Dictionnaire philosophique, 1769) :

Article "Abraham" :

"Il est évident que tous les royaumes de l’Asie étaient très florissants avant que la horde vagabonde des Arabes appelés Juifs possédât un petit coin de terre en propre, avant qu’elle eût une ville, des lois et une religion fixe. Lors donc qu’on voit un rite, une ancienne opinion établie en Égypte ou en Asie, et chez les Juifs, il est bien naturel de penser que le petit peuple nouveau, ignorant, grossier, toujours privé des arts, a copié, comme il a pu, la nation antique, florissante et industrieuse."

Article "Anthropophage" :

"Pourquoi les Juifs n’auraient-ils pas été anthropophages ? C’eût été la seule chose qui eût manqué au peuple de Dieu pour être le plus abominable peuple de la terre."

Article « Juifs » :

"Vous ne trouverez en eux qu’un peuple ignorant et barbare, qui joint depuis longtemps la plus sordide avarice à la plus détestable superstition et à la plus invincible haine pour tous les peuples qui les tolèrent et qui les enrichissent. Il ne faut pourtant pas les brûler."

Article « Job » :

"Leur profession fut le brigandage et le courtage ; ils ne furent écrivains que par hasard."

Article « Tolérance » :

"Le peuple juif était, je l’avoue, un peuple bien barbare. Il égorgeait sans pitié tous les habitants d’un malheureux petit pays sur lequel il n’avait pas plus de droit qu’il n’en a sur Paris et sur Londres."

Voltaire, dans sa lettre à M. de Brenles du 27 décembre 1758, se vante de posséder un droit de haute justice. Ce droit permet au seigneur féodal de juger et prononcer toutes les peines sur son domaine, y compris la peine de mort. Le philosophe en parle à propos d’un certain Grasset, avec qui il devait être en conflit :

"Il ne me reste plus que de le prier à diner dans un de mes castels et de le faire pendre au fruit. J’ai heureusement haute justice chez moi, et si M. Grasset veut être pendu, il faut qu’il ait la bonté de faire chez moi un petit voyage."

Dans une lettre à Thibouville du 28 mai 1760, il revient sur son droit de haute justice, en particulier de mettre quiconque au pilori.

" On me reproche d’être comte de Ferney. Que ces Jean f... là viennent donc dans la terre de Ferney, je les mettrai au pilori. "

Dans sa lettre à d’Argental du 29 janvier 1764, Voltaire se préoccupe des impôts féodaux, les dîmes, qu’il prélève dans ses domaines :

"Je crois que l’affaire des Calas sera finie avant celle des dîmes de Ferney. Les tragédies, les histoires et les contes n’empêchent pas qu’on songe à ces dîmes, attendu qu’un homme de lettres ne doit pas être un sot qui abandonne ses affaires pour barbouiller des choses inutiles."

Dans sa lettre à d’Argental du 1er février 1764, Voltaire se vante d’avoir droit de mainmorte, coutume liée au servage et qui avait heureusement disparu un peu partout. La mainmorte fut officiellement abolie en 1790 par un décret de Louis XVI.

"Je remercie tendrement mes anges de toutes leurs bontés ; c’est à eux que je dois celles de M. le duc de Praslin, qui me conservera mes dîmes en dépit du concile de Latran... Figurez-vous quel plaisir ce sera pour un aveugle d’avoir entre les Alpes et le mont Jura une terre grande comme la main, ne payant rien au roi ni à l’église, et ayant d’ailleurs le droit de mainmorte sur plusieurs petites possessions."

Source : http://www.contreculture.org/AG%20Voltaire.html

D’autres écrits un peu plus intéressants de Voltaire

Messages

  • Voltaire, en tant que Lumière, combattait quand même la superstition et l’absence de liberté ainsi que les inquisitions ?

  • Oui mais il défendait la nécessité politique et sociale, pour l’ordre établi, de la religion comme de la famille et de l’Etat :

    « Les athées sont partout, mais aucun gouvernement ne le fut par principe, et ne le sera jamais : ce n’est pas l’intérêt ni des royaumes, ni des républiques, ni des familles ; il faut un frein aux hommes. »

    Lire ici

  • en quoi Voltaire aurait un point de vue philosophiquement déiste ?

  • Note de Voltaire, 1756 :

    « La chaîne universelle n’est point, comme on l’a dit, une gradation suivie qui lie tous les êtres. Il y a probablement une distance immense entre l’homme et la brute, entre l’homme et les substances supérieures ; il y a l’infini entre Dieu et toutes les substances. Les globes qui roulent autour de notre soleil n’ont rien de ces gradations insensibles, ni dans leur grosseur, ni dans leurs distances, ni dans leurs satellites.

    Pope dit que l’homme ne peut savoir pourquoi les lunes de Jupiter sont moins grandes que Jupiter : il se trompe en cela ; c’est une erreur pardonnable qui a pu échapper à son beau génie. Il n’y a point de mathématicien qui n’eût fait voir au lord Bolingbroke et à M. Pope que si Jupiter était plus petit que ses satellites, ils ne pourraient pas tourner autour de lui ; mais il n’y a point de mathématicien qui pût découvrir une gradation suivie dans les corps du système solaire.

    Il n’est pas vrai que, si on ôtait un atome du monde, le monde ne pourrait subsister ; et c’est ce que M. de Crousaz, savant géomètre, remarqua très bien dans son livre contre M. Pope. Il paraît qu’il avait raison en ce point, quoique sur d’autres il ait été invinciblement réfuté par MM. Warburton et Silhouette.

    Cette chaîne des événements a été admise et très ingénieusement défendue par le grand philosophe Leibnitz ; elle mérite d’être éclaircie. Tous les corps, tous les événements, dépendent d’autres corps et d’autres événements. Cela est vrai ; mais tous les corps ne sont pas nécessaires à l’ordre et à la conservation de l’univers, et tous les événements ne sont pas essentiels à la série des événements. Une goutte d’eau, un grain de sable de plus ou de moins ne peuvent rien changer à la constitution générale. La nature n’est asservie ni à aucune quantité précise, ni à aucune forme précise. Nulle planète ne se meut dans une courbe absolument régulière ; nul être connu n’est d’une figure précisément mathématique ; nulle quantité précise n’est requise pour nulle opération : la nature n’agit jamais rigoureusement. Ainsi on n’a aucune raison d’assurer qu’un atome de moins sur la terre serait la cause de la destruction de la terre.

    Il en est de même des événements : chacun d’eux a sa cause dans l’événement qui précède ; c’est une chose dont aucun philosophe n’a jamais douté. Si on n’avait pas fait l’opération césarienne à la mère de César, César n’aurait pas détruit la république, il n’eût pas adopté Octave, et Octave n’eût pas laissé l’empire à Tibère. Maximilien épouse l’héritière de la Bourgogne et des Pays-Bas, et ce mariage devient la source de deux cents ans de guerre. Mais que César ait craché à droite ou à gauche, que l’héritière de Bourgogne ait arrangé sa coiffure d’une manière ou d’une autre, cela n’a certainement rien changé au système général.

    Il y a donc des événements qui ont des effets, et d’autres qui n’en ont pas. Il en est de leur chaîne comme d’un arbre généalogique ; on y voit des branches qui s’éteignent à la première génération, et d’autres qui continuent la race. Plusieurs événements restent sans filiation, C’est ainsi que dans toute machine il y a des effets nécessaires au mouvement, et d’autres effets indifférents, qui sont la suite des premiers, et qui ne produisent rien. Les roues d’un carrosse servent à le faire marcher ; mais qu’elles fassent voler un peu plus ou un peu moins de poussière, le voyage se fait également. Tel est donc l’ordre général du monde que les chaînons de la chaîne ne seraient point dérangés par un peu plus ou un peu moins de matière, par un peu plus ou un peu moins d’irrégularité.

    La chaîne n’est pas dans un plein absolu ; il est démontré que les corps célestes font leurs révolutions dans l’espace non résistant. Tout l’espace n’est pas rempli. Il n’y a donc pas une suite de corps depuis un atome jusqu’à la plus reculée des étoiles ; il peut donc y avoir des intervalles immenses entre les êtres sensibles, comme entre les insensibles. On ne peut donc assurer que l’homme soit nécessairement placé dans un des chaînons attachés l’un à l’autre par une suite non interrompue. Tout est enchaîné ne veut dire autre chose sinon que tout est arrangé. Dieu est la cause et le maître de cet arrangement. Le Jupiter d’Homère était l’esclave des destins ; mais dans une philosophie plus épurée Dieu est le maître des destins. Voyez Clarke, Traité de l’existence de Dieu. »

  • Voltaire, pourfendeur du cléricalisme, défendait pourtant l’existence de dieu. Critiquant ainsi « Le système de na nature » écrit par d’Holbach, il écrit à un correspondant :

    « J’ai été très fâché qu’on ait poussé trop loin la philosophie. Ce maudit livre du « Système de la nature » est un pêché contre nature. Je vous sais bon gré de réprouver l’athéisme et d’aimer mon vers :

    « Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer. » (Voltaire, Epitre à l’auteur du livre des trois imposteurs) »

    Voltaire à un autre correspondant :

    « Je pense qu’il est toujours très bon de soutenir la doctrine de l’existence d’un Dieu rémunérateur et vengeur : la société a besoin de cette opinion. » (Lettre de Voltaire au duc de Richelieu)

    Grimm lui réplique dans sa « Correspondance littéraire » :

    « Le patriarche ne veut pas se départir de son « rémunérateur-vengeur », il le croit nécessaire au bon ordre. »

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