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Que sont les chaînons manquants ?

jeudi 19 janvier 2017, par Robert Paris

Que sont les chaînons manquants ?

Ce sont, au sein d’une évolution des espèces censée être continu, les espèces intermédiaires dont on ne trouve pas trace :

 Entre procaryotes et eucaryotes : voir ici

 Entre hippopotames et leurs ancêtres : voir ici

 Entre Australopithèque et Homo : voir ici

 Entre plantes et animaux : voir ici

 Entre oiseaux et dinosaures : voir ici

 Entre homme et singe : voir ici

voir aussi ici

Découverte du chaînon, prétexte à une manipulation

- Entre inerte et vivant : voir ici

Et, effectivement, on n’a pas trouvé de « chaînon » entre Néandertal et homo sapiens sapiens…. Pas plus qu’ « entre » le singe et l’homme…

Darwin écrivait dans « L’origine des espèces » :

« La géologie ne révèle assurément pas une série organique bien graduée, et c’est en cela, peut-être, que consiste l’objection la plus sérieuse qu’on puisse faire à la théorie. Je crois que l’explication se trouve dans l’extrême insuffisance des documents géologiques. »

Mais Stephen Jay Gould rajoutait :

« L’archive fossile avec ses transitions abruptes ne soutient en rien un changement graduel… Tous les paléontologistes savent que l’archive fossile contient précisément peu de formes transitoires ; les transitions entre les groupes majeurs sont caractéristiquement abruptes. »

Chaînon manquant ou forme transitionnelle ?

Les créationnistes tirent argument de son absence

Le chaînon manquant n’existe pas !

On l’a trouvé… ou il ne faut pas le chercher ?

On n’arrête pas de le trouver

Et encore ici

Une réponse

La recherche du chaînon manquant : inutile car l’évolution n’est pas continue et régulière

Le rôle de la violence dans la dynamique

Quelles révolutions de la matière ?

La réponse de Stephen Jay Gould : La théorie hiérarchique de l’évolution

La nouveauté apparaît, au sein du vivant, ponctuellement

Le changement brutal d’espèces

Le point de vue de Darwin

Evolution ou révolution des espèces

Les révolutions qui ont donné naissance aux mousses, aux plantes et aux arbres

L’espèce vivante, une catégorie dialectiquement contradictoire

Pour conclure

Jean Chaline dans « Quoi de neuf depuis Darwin » :

« A l’époque de Darwin, l’existence des chaînons manquants était considérée comme le corollaire incontournable de l’évolution graduelle. C’est pourquoi les paléontologues se sont livrés à la recherche de ces fameux chaînons manquants et la presse s’en fait encore souvent l’écho, sans savoir que le terme de chaînon manquant est lié à l’évolution graduelle et devenu désuet. »

Au fait, l’apparition d’espèces nouvelles est un mécanisme qui résiste toujours à notre compréhension

Rappelons ce que disait Darwin dans « L’Origine des espèces » :

« Il est, sans doute, très difficile de conjecturer même par quels degrés successifs ont passé beaucoup de conformations pour se perfectionner, surtout dans les groupes d’êtres organisés qui, ayant subi d’énormes extinctions, sont actuellement rompus et présentent de grandes lacunes ; mais nous remarquons dans la nature des gradations si étranges, que nous devons être très circonspects avant d’affirmer qu’un organe, où qu’un instinct, ou même que la conformation entière, ne peuvent pas avoir atteint leur état actuel en parcourant un grand nombre de phases intermédiaires. Il est, il faut le reconnaître, des cas particulièrement difficiles qui semblent contraires à la théorie de la sélection naturelle ; un des plus curieux est, sans contredit, l’existence, dans une même communauté de fourmis, de deux ou trois castes définies d’ouvrières ou de femelles stériles. J’ai cherché à faire comprendre comment on peut arriver à expliquer ce genre de difficultés. (…)

La théorie de la sélection naturelle impliquant l’existence antérieure d’une foule innombrable de formes intermédiaires, reliant les unes aux autres, par des nuances aussi délicates que le sont nos variétés actuelles, toutes les espèces de chaque groupe, on peut se demander pourquoi nous ne voyons pas autour de nous toutes ces formes intermédiaires, et pourquoi tous les êtres organisés ne sont pas confondus en un inextricable chaos. À l’égard des formes existantes, nous devons nous rappeler que nous n’avons aucune raison, sauf dans des cas fort rares, de nous attendre à rencontrer des formes intermédiaires les reliant directement les unes aux autres, mais seulement celles qui rattachent chacune d’elles à quelque forme supplantée et éteinte. Même sur une vaste surface, demeurée continue pendant une longue période, et dont le climat et les autres conditions d’existence changent insensiblement en passant d’un point habité par une espèce à un autre habité par une espèce étroitement alliée, nous n’avons pas lieu de nous attendre à rencontrer souvent des variétés intermédiaires dans les zones intermédiaires. Nous avons tout lieu de croire, en effet, que, dans un genre, quelques espèces seulement subissent des modifications, les autres s’éteignant sans laisser de postérité variable. Quant aux espèces qui se modifient, il y en a peu qui le fassent en même temps dans une même région, et toutes les modifications sont lentes à s’effectuer. J’ai démontré aussi que les variétés intermédiaires, qui ont probablement occupé d’abord les zones intermédiaires, ont dû être supplantées par les formes alliées existant de part et d’autre ; car ces dernières, étant les plus nombreuses, tendent pour cette raison même à se modifier et à se perfectionner plus rapidement que les espèces intermédiaires moins abondantes ; en sorte que celles-ci ont dû, à la longue, être exterminées et remplacées.

Si l’hypothèse de l’extermination d’un nombre infini de chaînons reliant les habitants actuels avec les habitants éteints du globe, et, à chaque période successive, reliant les espèces qui y ont vécu avec les formes plus anciennes, est fondée, pourquoi ne trouvons-nous pas, dans toutes les formations géologiques, une grande abondance de ces formes intermédiaires ? Pourquoi nos collections de restes fossiles ne fournissent-elles pas la preuve évidente de la gradation et des mutations des formes vivantes ? Bien que les recherches géologiques aient incontestablement révélé l’existence passée d’un grand nombre de chaînons qui ont déjà rapproché les unes des autres bien des formes de la vie, elles ne présentent cependant pas, entre les espèces actuelles et les espèces passées, toutes les gradations infinies et insensibles que réclame ma théorie, et c’est là, sans contredit, l’objection la plus sérieuse qu’on puisse lui opposer. Pourquoi voit-on encore des groupes entiers d’espèces alliées, qui semblent, apparence souvent trompeuse, il est vrai, surgir subitement dans les étages géologiques successifs ? Bien que nous sachions maintenant que les êtres organisés ont habité le globe dès une époque dont l’antiquité est incalculable, longtemps avant le dépôt des couches les plus anciennes du système cumbrien, pourquoi ne trouvons-nous pas sous ce dernier système de puissantes masses de sédiment renfermant les restes des ancêtres des fossiles cumbriens ? Car ma théorie implique que de semblables couches ont été déposées quelque part, lors de ces époques si reculées et si complètement ignorées de l’histoire du globe.

Je ne puis répondre à ces questions et résoudre ces difficultés qu’en supposant que les archives géologiques sont bien plus incomplètes que les géologues ne l’admettent généralement. Le nombre des spécimens que renferment tous nos musées n’est absolument rien auprès des innombrables générations d’espèces qui ont certainement existé. La forme souche de deux ou de plusieurs espèces ne serait pas plus directement intermédiaire dans tous ses caractères entre ses descendants modifiés, que le biset n’est directement intermédiaire par son jabot et par sa queue entre ses descendants, le pigeon grosse-gorge et le pigeon paon. Il nous serait impossible de reconnaître une espèce comme la forme souche d’une autre espèce modifiée, si attentivement que nous les examinions, à moins que nous ne possédions la plupart des chaînons intermédiaires, qu’en raison de l’imperfection des documents géologiques nous ne devons pas nous attendre à trouver en grand nombre. Si même on découvrait deux, trois ou même un plus grand nombre de ces formes intermédiaires, on les regarderait simplement comme des espèces nouvelles, si légères que pussent être leurs différences, surtout si on les rencontrait dans différents étages géologiques. On pourrait citer de nombreuses formes douteuses, qui ne sont probablement que des variétés ; mais qui nous assure qu’on découvrira dans l’avenir un assez grand nombre de formes fossiles intermédiaires, pour que les naturalistes soient à même de décider si ces variétés douteuses méritent oui ou non la qualification de variétés ? On n’a exploré géologiquement qu’une bien faible partie du globe. D’ailleurs, les êtres organisés appartenant à certaines classes peuvent seuls se conserver à l’état de fossiles, au moins en quantités un peu considérables. Beaucoup d’espèces une fois formées ne subissent jamais de modifications subséquentes, elles s’éteignent sans laisser de descendants ; les périodes pendant lesquelles d’autres espèces ont subi des modifications, bien qu’énormes, estimées en années, ont probablement été courtes, comparées à celles pendant lesquelles elles ont conservé une même forme. Ce sont les espèces dominantes et les plus répandues qui varient le plus et le plus souvent, et les variétés sont souvent locales ; or, ce sont là deux circonstances qui rendent fort peu probable la découverte de chaînons intermédiaires dans une forme quelconque. Les variétés locales ne se disséminent guère dans d’autres régions éloignées avant de s’être considérablement modifiées et perfectionnées ; quand elles ont émigré et qu’on les trouve dans une formation géologique, elles paraissent y avoir été subitement créées, et on les considère simplement comme des espèces nouvelles. La plupart des formations ont dû s’accumuler d’une manière intermittente, et leur durée a probablement été plus courte que la durée moyenne des formes spécifiques. Les formations successives sont, dans le plus grand nombre des cas, séparées les unes des autres par des lacunes correspondant à de longues périodes ; car des formations fossilifères assez épaisses pour résister aux dégradations futures n’ont pu, en règle générale, s’accumuler que là où d’abondants sédiments ont été déposés sur le fond d’une aire marine en voie d’affaissement. Pendant les périodes alternantes de soulèvement et de niveau stationnaire, le témoignage géologique est généralement nul. Pendant ces dernières périodes, il y a probablement plus de variabilité dans les formes de la vie, et, pendant les périodes d’affaissement, plus d’extinctions.

Quant à l’absence de riches couches fossilifères au-dessous de la formation cumbrienne, je ne puis que répéter l’hypothèse que j’ai déjà développée dans le neuvième chapitre, à savoir que, bien que nos continents et nos océans aient occupé depuis une énorme période leurs positions relatives actuelles, nous n’avons aucune raison d’affirmer qu’il en ait toujours été ainsi ; en conséquence, il se peut qu’il y ait au-dessous des grands océans des gisements beaucoup plus anciens qu’aucun de ceux que nous connaissons jusqu’à présent. Quant à l’objection soulevée par sir William Thompson, une des plus graves de toutes, que, depuis la consolidation de notre planète, le laps de temps écoulé a été insuffisant pour permettre la somme des changements organiques que l’on admet, je puis répondre que, d’abord, nous ne pouvons nullement préciser, mesurée en année, la rapidité des modifications de l’espèce, et, secondement, que beaucoup de savants sont disposés à admettre que nous ne connaissons pas assez la constitution de l’univers et de l’intérieur du globe pour raisonner avec certitude sur son âge.

Personne ne conteste l’imperfection des documents géologiques ; mais qu’ils soient incomplets au point que ma théorie l’exige, peu de gens en conviendront volontiers. Si nous considérons des périodes suffisamment longues, la géologie prouve clairement que toutes les espèces ont changé, et qu’elles ont changé comme le veut ma théorie, c’est-à-dire à la fois lentement et graduellement. Ce fait ressort avec évidence de ce que les restes fossiles que contiennent les formations consécutives sont invariablement beaucoup plus étroitement reliés les uns aux autres que ne le sont ceux des formations séparées par les plus grands intervalles.

Tel est le résumé des réponses que l’on peut faire et des explications que l’on peut donner aux objections et aux diverses difficultés qu’on peut soulever contre ma théorie, difficultés dont j’ai moi-même trop longtemps senti tout le poids pour douter de leur importance. Mais il faut noter avec soin que les objections les plus sérieuses se rattachent à des questions sur lesquelles notre ignorance est telle que nous n’en soupçonnons même pas l’étendue. Nous ne connaissons pas toutes les gradations possibles entre les organes les plus simples et les plus parfaits ; nous ne pouvons prétendre connaître tous les moyens divers de distribution qui ont pu agir pendant les longues périodes du passé, ni l’étendue de l’imperfection des documents géologiques. Si sérieuses que soient ces diverses objections, elles ne sont, à mon avis, cependant pas suffisantes pour renverser la théorie de la descendance avec modifications subséquentes. (…)

Comme la sélection naturelle n’agit qu’en accumulant des variations légères, successives et favorables, elle ne peut pas produire des modifications considérables ou subites ; elle ne peut agir qu’à pas lents et courts. Cette théorie rend facile à comprendre l’axiome : Natura non facit saltum, dont chaque nouvelle conquête de la science démontre chaque jour de plus en plus la vérité. Nous voyons encore comment, dans toute la nature, le même but général est atteint par une variété presque infinie de moyens ; car toute particularité, une fois acquise, est pour longtemps héréditaire, et des conformations déjà diversifiées de bien des manières différentes ont à s’adapter à un même but général. Nous voyons, en un mot, pourquoi la nature est prodigue de variétés, tout en étant avare d’innovations. Or, pourquoi cette loi existerait-elle si chaque espèce avait été indépendamment créée ? C’est ce que personne ne saurait expliquer.(…)

Nous serons, plus tard, obligés de reconnaître que la seule distinction à établir entre les espèces et les variétés bien tranchées consiste seulement en ce que l’on sait ou que l’on suppose que ces dernières sont actuellement reliées les unes aux autres par des gradations intermédiaires, tandis que les espèces ont dû l’être autrefois. En conséquence, sans négliger de prendre en considération l’existence présente de degrés intermédiaires entre deux formes quelconques, nous serons conduits à peser avec plus de soin l’étendue réelle des différences qui les séparent, et à leur attribuer une plus grande valeur. Il est fort possible que des formes, aujourd’hui reconnues comme de simples variétés, soient plus tard jugées dignes d’un nom spécifique ; dans ce cas, le langage scientifique et le langage ordinaire se trouveront d’accord. Bref, nous aurons à traiter l’espèce de la même manière que les naturalistes traitent actuellement les genres, c’est-à-dire comme de simples combinaisons artificielles, inventées pour une plus grande commodité. Cette perspective n’est peut-être pas consolante, mais nous serons au moins débarrassés des vaines recherches auxquelles donne lieu l’explication absolue, encore non trouvée et introuvable, du terme espèce. (…)

La noble science de la géologie laisse à désirer par suite de l’extrême pauvreté de ses archives. La croûte terrestre, avec ses restes enfouis, ne doit pas être considérée comme un musée bien rempli, mais comme une maigre collection faite au hasard et à de rares intervalles. On reconnaîtra que l’accumulation de chaque grande formation fossilifère a dû dépendre d’un concours exceptionnel de conditions favorables, et que les lacunes qui correspondent aux intervalles écoulés entre les dépôts des étages successifs ont eu une durée énorme. Mais nous pourrons évaluer leur durée avec quelque certitude en comparant les formes organiques qui ont précédé ces lacunes et celles qui les ont suivies. Il faut être très prudent quand il s’agit d’établir une corrélation de stricte contemporanéité d’après la seule succession générale des formes de la vie, entre deux formations qui ne renferment pas un grand nombre d’espèces identiques. Comme la production et l’extinction des espèces sont la conséquence de causes toujours existantes et agissant lentement, et non pas d’actes miraculeux de création ; comme la plus importante des causes des changements organiques est presque indépendante de toute modification, même subite, dans les conditions physiques, car cette cause n’est autre que les rapports mutuels d’organisme à organisme, le perfectionnement de l’un entraînant le perfectionnement ou l’extermination des autres, il en résulte que la somme des modifications organiques appréciables chez les fossiles de formations consécutives peut probablement servir de mesure relative, mais non absolue, du laps de temps écoulé entre le dépôt de chacune d’elles. Toutefois, comme un certain nombre d’espèces réunies en masse pourraient se perpétuer sans changement pendant de longues périodes, tandis que, pendant le même temps, plusieurs de ces espèces venant à émigrer vers de nouvelles régions ont pu se modifier par suite de leur concurrence avec d’autres formes étrangères, nous ne devons pas reposer une confiance trop absolue dans les changements organiques comme mesure du temps écoulé. »

Continuité et discontinuité dans « L’Origine des espèces » de Darwin

Le vivant, c’est la continuité ou la discontinuité ?

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