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Le zèbre sans rayures est-il noir ou blanc ? Au fait, pourquoi a-t-il ces rayures ?

dimanche 20 août 2017, par Robert Paris

Certains affirment que ses rayures permettraient au zèbre de se protéger de ses prédateurs ou des insectes par un effet hypnotique ou en empêchant d’individualiser un animal dans un troupeau.

Mais le zèbre est-il noir à rayures blanches ou blanc à rayures noires ?

Pas si bêtes, hein, mes rayures !!!

Sans rayures, est-il blanc ?

Est-il noir ?

Est-il marron ?

Pas tout peint ?

Pas besoin de le repeindre !!!

Noir sur blanc ou blanc sur noir ?

Adulte à rayures et enfant blanc ?

Adulte à rayures et enfant à rayures ?

Ou adulte à rayures et enfant marron ?

Ou marron tirant ensuite vers les rayures ?

Le zèbre sans rayures est-il noir ou blanc ? Au fait, pourquoi a-t-il ces rayures ?

Qui est le zèbre ?

Origine du zèbre

Le mystère des rayures du zèbre

De nombreuses théories

Les rayures ne sont pas noires sur fond blanc, mais bien au contraire, blanches sur fond noir.

Le zèbre sans rayures du parc d’Etosha

Une hypothèse non vérifiée : les rayures des zèbres éloignent les taons ?!

Pourquoi les zèbres ont des rayures ?

Les rayures du zèbre ne gênent pas vraiment ses prédateurs

Les rayures ne protègent pas

Comment l’évolution repeint les êtres vivants

Passionné de biologie, le mathématicien Turing appliquera ses talents de mathématicien à la morphogenèse, ou comment les animaux et végétaux développent certains modèles de formes, comme les rayures du zèbre ou les taches d’une vache. Le mode d’intervention dans le développement se ferait selon les lois de diffusion oscillante, du même type que la réaction chimique de rétroaction appelée BZ. Cette diffusion possède des effets de seuil qui sont discrets, c’est-à-dire que c’est une succession de points sans continuité entre eux. On arrive là au modèle de Turing. Ce dernier, dans un article fondamental, démontrait en 1952 les bases chimiques de la morphogenèse. Quelques produits activateurs et inhibiteurs peuvent produire des différences de concentration dans l’espace. Qu’est-ce que l’inhibition ?

C’est un système de concentration/diffusion. Cette thèse fait intervenir des événements du type bifurcation au sein d’un système auto-organisé. Une diversification va se produire et s’organiser collectivement par zones. Ces structures spatiales sont appelées des structures de Turing. Ce modèle mathématique explique notamment les différentes sortes de motifs des pelages d’animaux.

Lire ici

Turing avait montré que les colorations obéissent à un activateur et un inhibiteur

Le système à réaction-diffusion de Turing qui pilote la coloration

Pourquoi les zèbres ont des rayures ?

Dès l’origine de la théorie de l’évolution, Charles Darwin et Alfred Russel Wallace (qui a développé une théorie de la sélection naturelle en même temps que le célèbre naturaliste), bataillaient à ce propos. A la fin du XIXe siècle, Wallace voyait dans les zébrures, pourtant si visibles à la lumière du soleil, un élément de camouflage sophistiqué :
« C’est le soir ou à la lumière de la lune, lorsqu’ils vont boire, que [les zèbres] sont particulièrement exposés aux attaques… Dans la pénombre, ils ne sont pas si voyants, leurs rayures blanches et noires se mêlant si bien en gris qu’il devient difficile de les voir, même de très près, » écrivait Wallace dans Darwinism.
Darwin, lui, ne voyait pas l’intérêt d’un camouflage à rayures dans les vastes plaines du sud de l’Afrique, où l’herbe est trop basse et les arbres trop rares pour que le zèbre puisse s’y fondre.

Plus tard, certains scientifiques ont proposé une explication à la présence de la rayure par sa capacité à réguler la température du corps zébré sous le soleil. D’autres ont évoqué la difficulté qu’auraient les prédateurs à isoler visuellement un zèbre dans un troupeau compact de rayures, et donc à se choisir une proie. Enfin la théorie du code-barre mérite d’être mentionnée : selon ses défenseurs, les rayures permettraient aux zèbres de se différencier les uns des autres, un peu comme nos empreintes génétiques, en plus voyant.

Il semblerait que les rayures jouent un rôle dans la protection des maladies véhiculées par certains insectes volants (taons, mouches tsé-tsé, mouches plates). Pour s’en protéger, le zèbre aurait développé davantage de rayures, de manière à déstabiliser ces insectes que tant de stries rebutent et qui, statistiquement piquent davantage une peau unie qu’une peau rayée.
Mais le facteur le plus corrélé au nombre de rayures est la température de la zone d’habitat. Les rayures auraient donc un rôle de protection thermique.

Ceux qui cherchent pourquoi la nature fait ceci ou cela en y voyant un but trouveront de multiples réponses à cette question, mais elles risquent fort d’être fausses car la nature n’agit pas avec un but. La girafe n’a pas le cou long "pour" attraper ceci ou cela. En revanche, tel ou tel attribut a pu être conservé, ou plutôt l’espèce le possédant a pu être préservée du fait d’un avantage sélectif. Mais quel est cet avantage des rayures ? La réponse est loin d’être évidente et les possibilités nombreuses (éviter les mouches tsé-tsé ou les lions, par exemple). Et de plus nombre d’animaux de la savane n’ont pas de rayures et ... ont très bien survécu. La question que pose la science est plutôt : comment cela a-t-il pu se produire, ce qui est très différent. D’abord, il faut savoir que la réaction biochimique qui fabrique le pelage peut être inhibée, d’où les rayures ou les tâches sur le pelage de certains animaux. La mouche n’est capable que de distinguer les animaux formant dans le paysage une tache de couleur à peu près uniforme. La couleur du zèbre l’empêche ainsi d’être vu. Cependant le zèbre n’a pas des rayures POUR se protéger. Il a sans doute sélectionné les membres de son espèce qui ont des rayures parce que les autres ont été éliminés. Les rayures sont des inhibitions de la couleur.

La preuve fondamentale sur la couleur du zèbre sans rayures est là : au stade fœtal, les raies blanches sont absentes, et à la naissance il est foncé sans rayures blanches, ce qui indique que le zèbre est noir à rayures blanches, et non l’inverse. Donc les rayures proviennent de l’inhibition du noir. Les raies blanches se forment par inhibition de la production de mélanine, un pigment qui colore la peau, les cheveux… Elles sont très peu larges au départ et grandissent avec l’animal.

La raison de l’existence de rayures plutôt que de leur absence est sans doute sélective. Mais on ignore encore quel phénomène (chaleur, agresseur ou autre) a été l’origine de cette sélection.

Voilà la naissance d’un zèbre :

Regardez vous-mêmes le zèbre naît marron foncé et quelques minutes après les rayures se réalisent sur le corps, le visage viendra plus tard

Motifs de Turing et morphogenèse chimique

Portfolio

Messages

  • Stephen Jay Gould dans « Quand les poules auront des dents » :

    « Le zèbre est-il un animal blanc avec des raies noires ou un animal noir avec des raies blanches ? J’ai appris jadis que le ventre blanc du zèbre avait tranché en faveur de raies noires sur un torse blanc. Mais pour illustrer une fois de plus que les « faits » sont indissociables de leur contexte culturel, j’ai récemment découvert que la plupart des peuples africains estiment que les zèbres sont des animaux noirs avec des raies blanches… Les trois espèces de zèbres existantes ne constituent peut-être pas un groupe des plus étroitement apparentés – les raies ont pu apparaître à diverses reprises au cours de l’évolution, ou bien elles représentent un dessin ancestral qui figurait chez les aïeux communs aux vrais chevaux et aux zèbres… J.BL. Bard, un embryologiste d’Edimbourg, s’est récemment penché sur les raies des zèbres dans le contexte plus élargi de modèles rendant compte des couleurs chez tous les mammifères. Il a décelé une unité de développement sous les divers dessins de zèbres et a même proposé, inter alia, une réponse au grand problème du noir et du blanc, qui penche en faveur de la thèse africaine… L’hypothèse de Bard, qui propose « une unité sous-jacente aux différentes modalités de rayures chez les zèbres », reprend l’idée de D’Arcy Thompson, à savoir un motif de base subissant des étirements et des déformations diverses du fait des forces variées à l’œuvre durant la croissance embryonnaire. Ces forces variées apparaissent parce que le motif de base se développe à des moments différents de l’embryogenèse chez les trois espèces. Bard combine ainsi la notion de coordonnées transformées et l’idée qu’une évolution importante peut procéder par des changements intervenant dans la chronologie du développement… Les trois espèces de zèbres diffèrent à la fois par le nombre et par la configuration des bandes. Dans l’hypothèse de Bard, ces variations complexes apparaissent seulement parce que le même motif de base – des raies parallèles régulièrement espacées – est mis en place durant la cinquième semaine du développement embryonnaire chez une des espèces, pendant la quatrième chez une autre, et pendant la troisième semaine chez la troisième. Etant donné que l’embryon subit des transformations de forme complexe au cours de ces semaines, le dessin de base subit des étirements et des déformations multiples, qui entraînent toutes ces importantes différences de rayures à l’âge adulte… Le zèbre de Grevy (equus grevyi) a des raies nombreuses, fines, élémentaires et parallèles dans ses régions postérieures. Selon le modèle de Bard, ses raies ont dû se former quand la partie postérieure de l’embryon était relativement développée. Plus la partie en question est développée, plus elle reçoit de raies, puisque celles-ci présentent au départ un même format et un même espacement… Le zèbre de montagne, Equus zebra, ressemble beaucoup à E. grevyi, jusqu’au niveau de l’arrière-train où trois larges raies remplacent les nombreuses raies fines du zèbre de Grevy. Des raies larges chez l’adulte indiquent que celles-ci se sont formées au départ sur un petit fragment d’embryon (où ne pouvaient figurer que peu de raies) et que ce fragment s’est ensuite développé rapidement (les raies s’élargissant en même temps que la région en question). Si un embryon forme des raies pendant la quatrième semaine, juste avant le développement ultérieur qui donne suffisamment de place aux nombreuses raies fines du zèbre de Grevy, il mettra en place le dessin caractéristique du zèbre de montagne pendant la suite de son développement embryonnaire. Le zèbre de Burchell, Equus burchelli, ne présente lui aussi que quelques larges raies sur l’arrière-train. Mais, alors que le zèbre de montagne a des raies fines sur la plus grande partie de son dos et des raies larges sur l’arrière-train seulement, les riaes larges du zèbre de Burchell partent du milieu du ventre et s’étendent sur tout l’arrière-train. Ce motif indique que les raies ont commencé à se déformer au cours de la troisième semaine du développement embryonnaire. A ce stade primitif, l’embryon présente un dos court et compact, qui se développe par la suite vers l’arrière en formant une large courbe connexe, tandis que le ventre reste plus court. Une raie qui, au départ, allait verticalement du ventre à la colonne vertébrale sera ainsi tirée vers l’arrière, tandis que la surface supérieure de l’embryon se développera moins. Une raie adulte, soumise à une déformation de ce genre pendant sa vie embryonnaire, sera large et ira du ventre jusqu’à l’arrière-train – comme celle chez le zèbre de Burchell. Bard explique ainsi que les différences existant entre les raies postérieures des trois espèces, en tant que résultat de la déformation d’un même motif initial intervenant à des moments différents du développement embryonnaire normal. Hypothèse que vient étayer de façon frappante une autre donnée : le nombre de raies lui-même. Rappelez-vous que Bard estime que les raies, lorsqu’elles se forment, ont le même format et le même espacement. Donc plus l’embryon est grand quand les raies se forment, plus ces raies sont nombreuses. Le zèbre de Grevy, dont les raies se forment probablement alors qu’il est un embryon de cinq semaines mesurant environ trente-deux centimètres, présente quelques quatre-vingt raies à l’âge adulte – soit des raies de 0,4 millimètres. Le zèbre de montagne, avec un embryon de quatre semaines mesurant environ de quatorze à dix-neuf millimètres, compte environ quarante-trois raies – soit de nouveau 0,4 millimètres par raie. Le zèbre de Burchell a de vingt-cinq à trente raies ; si elles se forment chez un embryon de trois semaines mesurant environ onze centimètres de long, nous obtenons la même valeur de 0,4 millimètres environ par raie… Darwin consacra une partie du chapitre 5 de son « Origine des espèces » à un répertoire exhaustif de l’apparition occasionnelle des raies chez d’autres chevaux. L’âne, constatait-il, présente souvent sur les pattes, « des raies transversales très distinctes, semblables à celles qui se trouvent sur les pattes du zèbre ». Les vrais chevaux ont souvent une raie dorsale, et certains ont aussi des raies transversales sur les jambes. Darwin observa un poney gallois portant trois raies parallèles sur chaque épaule. Et il nota que les hybrides (n’ayant pas de parents zèbres) sont souvent très fortement rayés – exemple d’une observation courante et pourtant mystérieuse, à savoir que les hybrides présentent souvent des réminiscences ancestrales qui n’existent chez aucun des parents… Au fait, c’est quoi, un zèbre ? J’ai émis l’hypothèse que les zèbres ne forment peut-être pas un groupe étroitement apparenté, mais un ensemble de chevaux différents qui ont indépendamment mis en place des raies lors de leur apparition, ou qui les ont héritées d’un ancêtre commun (alors que les ânes et les vrais chevaux les ont perdues)… Enfin, Bard propose une solution au dilemme primordial en affirmant que, tout compte fait, les zèbres sont des animaux noirs avec des raies blanches. Le ventre blanc, souligne-t-il, est un argument faible : beaucoup de mammifères entièrement colorés ont le dessous du corps blanc. L’apparition de la couleur peut, d’une façon générale, être inhibée dans cette région du corps pour des raisons encore inconnues. Les couleurs des mammifères ne sont pas apposées sur un fond blanc. Le problème essentiel peut donc être formulé autrement : les raies résultent-elles d’une inhibition de la mélanine ou d’un dépôt de celle-ci ? Dans le premier cas, les zèbres sont noirs ; dans le second, ils sont blancs avec des raies noires… Bard a découvert un zèbre anormal dont les « raies » sont des lignes de points et de taches discontinues plutôt que des raies cohérentes de couleur. Les points et les tâches sont blancs sur fond noir. « On ne peut comprendre ce motif, écrit Bard, qu’en admettant que les raies blanches ne se sont pas correctement formées et que ce « manque » de couleur apparaît comme noir. Le rôle du mécanisme responsable des raies est donc d’inhiber la formation du pigment naturel plutôt que de la stimuler. » Autrement dit, le zèbre est un animal noir à raies blanches. »

  • Les propositions de raisons pour lesquelles le zèbre est rayé sont multiples :

    les rayures font un camouflage « disruptif » : un groupe de zèbre qui bouge fonctionnerait comme une illusion d’optique, et troublerait la perception des prédateurs, notamment en ce qui concerne les contours des individus qui sont effectivement difficiles à discerner lorsqu’ils sont les uns contre les autres.

    les rayures servent de camouflage dans les hautes herbes (hypothèse proposée dès 1867 par Alfred Wallace Russel -fondateur de la biogéographie et co-auteur de la théorie de l’évolution- en personne !)

    les rayures font un camouflage efficace la nuit, en particulier sur des prédateurs qui voient en noir et blanc.

    les rayures au niveau du cou forment une zone de reconnaissance pour se faire toiletter par les autres membres du groupe.

    les rayures facilitent la dissipation de chaleur : l’alternance de noir et de blanc pourrait former des microtourbillons d’air, qui rafraîchiraient l’animal. (ils sont fous ces biologistes)

    les rayures permettent aux individus d’un groupe de se reconnaître les uns des autres.

    les rayures rendent les zèbres plus gros que ce qu’ils ne sont, ce qui complique la tâche des prédateurs pour les « viser » correctement lorsqu’ils leur courent après.

    les rayures perturbent les mouches tsé-tsé lorsqu’elles veulent atterrir sur l’animal.

    etc, etc...

    Mais, en fait, le zèbre n’est pas rayé pour faire un quelconque effet, vu que rien n’est fait "pour" dans la nature mais parce que c’est simplement faisable biologiquement et qu’éventuellement la sélection l’a favorisé.

  • Darwin dans son « Origine des espèces » :

    « Examinons maintenant les effets des croisements entre les différentes espèces du genre cheval. Rollin affirme que le mulet ordinaire, produit de l’âne et du cheval, est particulièrement sujet à avoir les jambes rayées ; selon M. Gosse, neuf mulets sur dix se trouvent dans ce cas, dans certaines parties des Etats-Unis. J’ai vu une fois un mulet dont les jambes étaient rayées au point qu’on aurait pu le prendre pour un hybride du zèbre ; M. W.-C. Martin, dans son excellent Traité sur le cheval, a représenté un mulet semblable. J’ai vu quatre dessins coloriés représentant des hybrides entre l’âne et le zèbre ; or, les jambes sont beaucoup plus rayées que le reste du corps ; l’un d’eux, en outre, porte une double raie sur l’épaule. Chez le fameux hybride obtenu par lord Morton, du croisement d’une jument alezane avec un quagga, l’hybride, et même les poulains purs que la même jument donna subséquemment avec un cheval arabe noir, avaient sur les jambes des raies encore plus prononcées qu’elles ne le sont chez le quagga pur. Enfin, et c’est là un des cas les plus remarquables, le docteur Gray a représenté un hybride (il m’apprend que depuis il a eu l’occasion d’en voir un second exemple) provenant du croisement d’un âne et d’une hémione ; bien que l’âne n’ait qu’accidentellement des raies sur les jambes et qu’elles fassent défaut, ainsi que la raie sur l’épaule, chez l’hémione, cet hybride avait, outre des raies sur les quatre jambes, trois courtes raies sur l’épaule, semblables à celles du poney isabelle du Devonshire et du poney isabelle du pays de Galles que nous avons décrits ; il avait, en outre, quelques marques zébrées sur les côtés de la face. J’étais si convaincu, relativement, à ce dernier fait, que pas une de ces raies ne peut provenir de ce qu’on appelle ordinairement le hasard, que le fait seul de l’apparition de ces zébrures de la face, chez l’hybride de l’âne et de l’hémione, m’engagea à demander au colonel Poole si de pareils caractères n’existaient pas chez la race de Kattywar, si éminemment sujette à présenter des raies, question à laquelle, comme nous l’avons vu, il m’a répondu affirmativement.

    Or, quelle conclusion devons-nous tirer de ces divers faits ? Nous voyons plusieurs espèces distinctes du genre cheval qui, par de simples variations, présentent des raies sur les jambes, comme le zèbre, ou sur les épaules, comme l’âne. Cette tendance augmente chez le cheval dès que paraît la robe isabelle, nuance qui se rapproche de la coloration générale des autres espèces du genre. Aucun changement de forme, aucun autre caractère nouveau n’accompagne l’apparition des raies. Cette même tendance à devenir rayé se manifeste plus fortement chez les hybrides provenant de l’union des espèces les plus distinctes. Or, revenons à l’exemple des différentes races de pigeons : elles descendent toutes d’un pigeon (en y comprenant deux ou trois sous-espèces ou races géographiques) ayant une couleur bleuâtre et portant, en outre, certaines raies et certaines marques ; quand une race quelconque de pigeons revêt, par une simple variation, la nuance bleuâtre, ces raies et ces autres marques reparaissent invariablement, mais sans qu’il se produise aucun autre changement de forme ou de caractère. Quand on croise les races les plus anciennes et les plus constantes, affectant différentes couleurs, on remarque une forte tendance à la réapparition, chez l’hybride, de la teinte bleuâtre, des raies et des marques. J’ai dit que l’hypothèse la plus probable pour expliquer la réapparition de caractères très anciens est qu’il y a chez les jeunes de chaque génération successive une tendance à revêtir un caractère depuis longtemps perdu, et que cette tendance l’emporte quelquefois en raison de causes inconnues. Or, nous venons de voir que, chez plusieurs espèces du genre cheval, les raies sont plus prononcées ou reparaissent plus ordinairement chez le jeune que chez l’adulte. Que l’on appelle espèces ces races de pigeons, dont plusieurs sont constantes depuis des siècles, et l’on obtient un cas exactement parallèle à celui des espèces du genre cheval ! Quant à moi, remontant par la pensée à quelques millions de générations en arrière, j’entrevois un animal rayé comme le zèbre, mais peut-être d’une construction très différente sous d’autres rapports, ancêtre commun de notre cheval domestique (que ce dernier descende ou non de plusieurs souches sauvages), de l’âne, de l’hémione, du quagga et du zèbre.

    Quiconque admet que chaque espèce du genre cheval a fait l’objet d’une création indépendante est disposé à admettre, je présume, que chaque espèce a été créée avec une tendance à la variation, tant à l’état sauvage qu’à l’état domestique, de façon à pouvoir revêtir accidentellement les raies caractéristiques des autres espèces du genre ; il doit admettre aussi que chaque espèce a été créée avec une autre tendance très prononcée, à savoir que, croisée avec des espèces habitant les points du globe les plus éloignés, elle produit des hybrides ressemblant par leurs raies, non à leurs parents, mais à d’autres espèces du genre. Admettre semblable hypothèse c’est vouloir substituer à une cause réelle une cause imaginaire, ou tout au moins inconnue ; c’est vouloir, en un mot, faire de l’œuvre divine une dérision et une déception. Quant à moi, j’aimerais tout autant admettre, avec les cosmogonistes ignorants d’il y a quelques siècles, que les coquilles fossiles n’ont jamais vécu, mais qu’elles ont été créées en pierre pour imiter celles qui vivent sur le rivage de la mer. »

  • Ce qui est certain c’est que l’embryon est uni et foncé et que les rayures se développent ensuite par inhibition de la mélanine. Elles sont très peu larges au départ et grandissent avec l’animal.

    Pourquoi des rayures ; elles intriguent les zoologistes qui ont fait diverses études et qui étudient actuellement l’ADN du zèbre, pour savoir ce qui provoque cette différenciation.

    Une hypothèse a longtemps été retenue : les rayures sont un camouflage pour mieux se confondre avec la nature ; les rayures gagnent en densité au fur et à mesure qu’on se rapproche de l’équateur. Un phénomène curieux, quand un troupeau de zèbres s’enfuit, les rayures différentes qui se mêlent en déplacement provoquent un effet stroboscopique et on ne distingue plus bien les endroits précis où se trouvent les silhouettes, ce qui trompent les lionnes en chasse.

    Mais il ne semble pas que ce soit la seule raison et l’équipe de Brenda Larison de l’université de Californie, à Los Angeles, a recensé vingt-neuf facteurs environnementaux pouvant avoir une incidence sur la formation des rayures qui ont été comparés aux données statistiques de chaque population, de manière à détecter d’éventuelles corrélations.

    Il semblerait que les rayures jouent un rôle dans la protection des maladies véhiculées par certains insectes volants (taons, mouches tsé-tsé, mouches plates). Pour s’en protéger, le zèbre aurait développé davantage de rayures, de manière à déstabiliser ces insectes que tant de stries rebutent et qui, statistiquement piquent davantage une peau unie qu’une peau rayée.

    Mais le facteur le plus corrélé au nombre de rayures est la température de la zone d’habitat. Les rayures auraient donc un rôle de protection thermique.

  • Stephen Jay Gould dans « Quand les poules auront des dents » (article « Une trilogie du zèbre ») :

    « Les trois espèces de zèbres (Equus grevyi ou zèbre de Grévy, Equus zebra ou zèbre de montage et Equus burchelli ou zèbre de Burchell) diffèrent à la fois par le nombre et par la configuration des bandes. Dans l’hypothèse de J.B.L. Bard, embryologiste d’Edimbourg, ces variations complexes apparaissent seulement parce que le même motif de base – des raies parallèles régulièrement espacées – est mis en place durant la cinquième semaine du développement embryonnaire chez une des espèces, pendant la quatrième semaine chez une autre, et pendant la troisième semaine chez la troisième espèce. Etant donné que l’embryon subit des transformations de forme complexes au cours de ces semaines, le dessin de base subit des étirements et des déformations multiples, qui entraînent toutes ces importantes différences de rayures à l’âge adulte. (…) Le zèbre de Grevy a des raies nombreuses, fines, élémentaires et parallèles dans ses régions postérieures… Le zèbre de montagne ressemble beaucoup à celui de Grevy, jusqu’au niveau de l’arrière-train où trois larges raies remplacent les nombreuses raies fines de celui de Grevy… Le zèbre de Burchell ne présente, lui aussi que quelques larges raies sur l’arrière-train. Mais, alors que le zèbre de montagne a des raies fines sur la plus grande partie de son dos et des raies larges sur l’arrière-train seulement, les raies larges du zèbre de Burchell partent du milieu du ventre et s’étendent sur tout l’arrière-train. Ce motif indique que les raies ont commencé à se déformer au cours de la troisième semaine du développement embryonnaire. (…) Les raies résultent-elles d’une inhibition de la mélanine ou d’un dépôt de celle-ci ? Dans le premier cas, les zèbres sont noirs ; dans le second, ils sont blancs avec des raies noires… Bard a découvert un zèbre anormal dont les « raies » sont des lignes de points et de taches discontinues plutôt que des raies cohérentes de couleur. Les points et les taches sont blancs sur fond noir. « On ne peut comprendre ce motif, écrit Bard, qu’en admettant que les raies blanches ne se sont pas correctement formées et que ce « manque » de couleur apparaît comme noir. Le rôle du mécanisme responsable des raies est donc d’inhiber la formation du pigment naturel plutôt que de la stimuler. » Autrement dit, le zèbre est un animal noir à raies blanches. »

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