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La chanson antimilitariste, ça existe encore ?

mardi 22 mai 2018, par Robert Paris

C’qu’ell’ en a bu, du beau sang, cette terre !

Sang d’ouvriers et sang de paysans,

Car les bandits qui sont cause des guerres,

N’en meur’nt jamais, on n’tue qu’les innocents !

La Butt’ Roug’ c’est son nom, l’baptêm’ s’fit un matin

Où tous ceux qui montaient roulaient dans le ravin...

Aujourd’hui y’a des vign’s, il y pouss’ du raisin

Qui boira ce vin-là, boira l’sang des copains !

La chanson antimilitariste, ça existe encore ?

De nos jours, la guerre est partout et l’antimilitarisme ne semble nulle part. On n’imagine même pas un syndicat antimilitariste ! On n’imagine même pas une manifestation antimilitariste ! On n’imagine même pas… une chanson antimilitariste, un poème antimilitariste, un homme politique antimilitariste révolutionnaire communiste, antipatriote, antinationaliste, antiguerre, et tout !!! Un « guerre à la guerre et guerre au capitalisme », ce n’est pas dans l’air du temps ?!!! Voire. L’avenir n’est pas écrit !

Le Déserteur par Boris Vian

Monsieur le président

Je vous fais une lettre

Que vous lirez peut-être

Si vous avez le temps.

Je viens de recevoir

Mes papiers militaires

Pour partir à la guerre

Avant mercredi soir.

Monsieur le président

Je ne veux pas la faire

Je ne suis pas sur terre

Pour tuer de pauvres gens.

C’est pas pour vous fâcher,

Il faut que je vous dise,

Ma décision est prise,

Je m’en vais déserter.

Depuis que je suis né,

J’ai vu mourir mon père,

J’ai vu partir mes frères

Et pleurer mes enfants.

Ma mère a tant souffert

Qu’elle est dedans sa tombe

Et se moque des bombes

Et se moque des vers.

Quand j’étais prisonnier,

On m’a volé ma femme,

On m’a volé mon âme,

Et tout mon cher passé.

Demain de bon matin

Je fermerai ma porte

Au nez des années mortes,

J’irai sur les chemins.

Je mendierai ma vie

Sur les routes de France,

De Bretagne en Provence

Et je crierai aux gens :

« Refusez d’obéir,

Refusez de la faire,

N’allez pas à la guerre,

Refusez de partir. »

S’il faut donner son sang,

Allez donner le vôtre,

Vous êtes bon apôtre

Monsieur le président.

Si vous me poursuivez,

Prévenez vos gendarmes

Que j’emporte des armes

Et que je sais tirer"

Parachutiste par Maxime Le Forestier

Tu avais juste dix-huit ans

Quand on t’a mis un béret rouge,

Quand on t’a dit : "Rentre dedans

Tout ce qui bouge."

C’est pas exprès qu’ t’étais fasciste,

Parachutiste.

Alors, de combat en combat,

S’est formée ton intelligence.

Tu sais qu’il n’y a ici-bas

Que deux engeances :

Les gens bien et les terroristes,

Parachutiste

Puis on t’a donné des galons,

Héros de toutes les défaites

Pour toutes les bonnes actions

Que tu as faites.

Tu torturais en spécialiste,

Parachutiste.

Alors sont venus les honneurs,

Les décorations, les médailles

Pour chaque balle au fond d’un coeur,

Pour chaque entaille,

Pour chaque croix noire sur ta liste,

Parachutiste

Mais, malheureusement pour toi,

Bientôt se finira ta guerre :

Plus de tueries, plus de combats.

Que vas-tu faire ?

C’est fini le travail d’artiste,

Parachutiste.

C’est plus qu’un travail de nana

D’ commander à ceux qui savent lire,

Surtout qu’ t’as appris avec moi

Ce que veut dire

Le mot " antimilitariste ",

Parachutiste.

T’ as rien perdu de ton talent,

Tu rates pas une embuscade

Mais comme on n’ tire pas vraiment,

Tu trouves ça fade.

C’est pt’êt pour ça qu’ t’ as les yeux tristes,

Parachutiste.

Mais si t’ es vraiment trop gêné

D’être payé à ne rien faire,

Tu peux toujours te recycler

Chez tes p’tits frères.

J’ crois qu’on engage dans la Police,

Parachutiste.

Le dormeur du val par Arthur Rimbaud

C’est un trou de verdure où chante une rivière,

Accrochant follement aux herbes des haillons

D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,

Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,

Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,

Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,

Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme

Sourirait un enfant malade, il fait un somme :

Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;

Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Ne joue pas au soldats, Léo Lelièvre - Paul Dalbret

1er couplet

A mon petit garçon pour le jour de sa fête

J’ai dit : Viens avec moi acheter un joujou

Au bazar tu verras pantins et marionnettes

Un beau chemin de fer, mais l’enfant tout à coup

Répondit : Je voudrais un fusil, un beau casque

Un sabre avec un sac comme en ont les soldats

Alors tout ahuri, par ce désir fantasque

J’ai dit : Non mon petit, non tu n’auras pas ça.

Refrain :

Ne joues pas au soldat mon cher petit bonhomme

Les sabres et les fusils ne sont pas des jouets

Plus tard tu en auras quand tu seras un homme

Je n’veux pas voir ces choses entre tes doigts fluets

Ces joujoux là vois tu, rappellent trop la guerre

Les chagrins et les deuils que l’on voit ici bas

Ils ont trop fait pleurer les cœurs des pauvres mères

Dont les enfants sont morts en jouant aux soldats

2ème couplet

N’as tu pas remarqué lorsque tes camarades

Font la petite guerre, comme ils deviennent méchants

Ne pensant qu’à frapper, ils rêvent d’embuscades

Leur grand sabre de bois les rend presque arrogants

Pour ceux là rien n’existe, ils en font à leur guise

Les grammaires, les calculs ne les intéressent pas

Quand vient le mardi gras, les parents les déguisent

En zouave, en cuirassiers, des galons pleins les bras

Refrain

3ème couplet

Faut il que les parents n’aient rien dans les méninges

Les soirs de carnaval pour déguiser encor

Leurs enfants en poilus comme des petits singes

Qui seraient habillés dans la veste d’un mort

La capote horizon est le dernier emblème

Le linceul dans lequel nos fils dorment là-bas

Au moins respectez les, les soirs de mi-carême

En ne déguisez pas vos enfants en soldats

4ème couplet

Pense à nos grands savants, ces héros anonymes

Passant leur existence à sauver des humains

Ceux qui se sacrifient dans un rêve sublime

Pour adoucir la vie de leurs contemporains

Curie, Péan, Pasteur tous ces rois de la science

Ont autant de mérite que nos plus grands guerriers

Ils ont chassé la mort qui rôdait sur l’enfance

Ils ne pensent qu’à guérir et non pas à tuer

Refrain

Il faut que les enfants dans leur jeunesse apprennent

A chérir leur pays, à défendr’ leur honneur

Mais n’leur inculquez pas des sentiments de haine

La guerre et les combats devraient leur faire horreur

Au nom de nos héros, morts en pleine jeunesse

Pour que ce drame affreux ne recommence pas

Et pour que la bonté sur ce monde renaisse

Il ne faut plus jamais s’amuser aux soldats

Gloire au 17ième par Gaston Montéhus

Légitime était votre colère,

Le refus était en grande foi.

On ne doit pas tuer ses père et mère,

Pour les grands qui sont au pouvoir.

Soldats, votre conscience est nette,

On ne se tue pas entre français ;

Refusant de rougir vos baïonnettes

Petits soldats, oui, vous avez bien fait.

Refrain

Salut, salut à vous,

Braves soldats du 17e !

Salut, braves pioupious,

Chacun vous admire et vous aime !

Salut, salut à vous,

A votre geste magnifique !

Vous auriez, en tirant sur nous,

Assassiné la République.

Chanson syndicale, 12 juillet 1908

Non, plus de ces combats sanglants

De ces ignobles boucheries

Pour le bonheur de nos enfants,

Il faut supprimer les patries.

Chanson de Craonne par les soldats morts-vivants de la première boucherie mondiale

Quand au bout d’huit jours, le r’pos terminé,

On va r’prendre les tranchées,

Notre place est si utile

Que sans nous on prend la pile.

Mais c’est bien fini, on en a assez,

Personn’ ne veut plus marcher,

Et le cœur bien gros, comm’ dans un sanglot

On dit adieu aux civ’lots.

Même sans tambour, même sans trompette,

On s’en va là haut en baissant la tête.

Refrain

Adieu la vie, adieu l’amour,

Adieu toutes les femmes.

C’est bien fini, c’est pour toujours,

De cette guerre infâme.

C’est à Craonne, sur le plateau,

Qu’on doit laisser sa peau

Car nous sommes tous condamnés

C’est nous les sacrifiés !

C’est malheureux d’voir sur les grands boul’vards

Tous ces gros qui font leur foire ;

Si pour eux la vie est rose,

Pour nous c’est pas la mêm’ chose.

Au lieu de s’cacher, tous ces embusqués,

F’raient mieux d’monter aux tranchées

Pour défendr’ leurs biens, car nous n’avons rien,

Nous autr’s, les pauvr’s purotins.

Tous les camarades sont enterrés là,

Pour défendr’ les biens de ces messieurs-là.

au Refrain

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrance,

Pourtant on a l’espérance

Que ce soir viendra la r’lève

Que nous attendons sans trêve.

Soudain, dans la nuit et dans le silence,

On voit quelqu’un qui s’avance,

C’est un officier de chasseurs à pied,

Qui vient pour nous remplacer.

Doucement dans l’ombre, sous la pluie qui tombe

Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes.

Refrain

Ceux qu’ont l’pognon, ceux-là r’viendront,

Car c’est pour eux qu’on crève.

Mais c’est fini, car les trouffions

Vont tous se mettre en grève.

Ce s’ra votre tour, messieurs les gros,

De monter sur l’plateau,

Car si vous voulez la guerre,

Payez-la de votre peau !

Giroflé Girofla de Rosa Holt

Que tu as la maison douce

Giroflée Girofla

L’herbe y croît, les fleurs y poussent

Le printemps est là.

Dans la nuit qui devient rousse

Giroflée Girofla

L’avion la brûlera.

Que tu as de beaux champs d’orge

Giroflée Girofla

Ton grenier de fruits regorge

L’abondance est là.

Entends-tu souffler la forge

Giroflée Girofla

L’ canon les fauchera.

Que tu as de belles filles

Giroflée Girofla

Dans leurs yeux où la joie brille

L’amour descendra.

Dans la plaine on se fusille

Giroflée Girofla

L’ soldat les violera.

Que tes fils sont forts et tendres

Giroflée Girofla

Ca fait plaisir d’ les entendre

A qui chantera.

Dans huit jours on va t’ les prendre

Giroflée Girofla

L’ corbeau les mangera.

Tant qu’y aura des militaires

Soit ton fils soit le mien

Y n’ pourra y avoir sur terre

Pas grand-chose de bien.

On te tuera pour te faire taire

Par derrière comme un chien

Et tout ça pour rien.

L’avenir, par Victor Hugo

Batailles ! ô drapeaux, ô linceuls ! noirs lambeaux !

Ouverture hâtive et sombre des tombeaux !

Dieu puissant ! quand la mort sera-t-elle tuée ?

Ô sainte paix !

La guerre est la prostituée ;

Elle est la concubine infâme du hasard.

Attila sans génie et Tamerlan sans art

Sont ses amants ; elle a pour eux des préférences ;

Elle traîne au charnier toutes nos espérances,

Egorge nos printemps, foule aux pieds nos souhaits,

Et comme elle est la haine, ô ciel bleu, je la hais !

J’espère en toi, marcheur qui viens dans les ténèbres,

Avenir !

A tous les enfants, par Boris Vian

A tous les enfants qui sont partis le sac à dos

Par un brumeux matin d’avril

Je voudrais faire un monument

A tous les enfants

Qui ont pleuré le sac au dos

Les yeux baissés sur leurs chagrins

Je voudrais faire un monument

Pas de pierre, pas de béton

Ni de bronze qui devient vert

Sous la morsure aiguë du temps

Un monument de leur souffrance

Un monument de leur terreur

Aussi de leur étonnement

Voilà le monde parfumé,

Plein de rires, plein d’oiseaux bleus

Soudain griffé d’un coup de feu

Un monde neuf où sur un corps

qui va tomber

Grandit une tache de sang

Mais à tous ceux qui sont restés

Les pieds au chaud, sous leur bureau

En calculant le rendement

De la guerre qu’ils ont voulue

A tous les gras tous les cocus

Qui ventripotent dans la vie

Et comptent et comptent leurs écus

A tous ceux-là je dresserai

Le monument qui leur convient

Avec la schlague, avec le fouet

Avec mes pieds avec mes poings

Avec des mots qui colleront

Sur leurs faux-plis sur leurs bajoues

Des larmes de honte et de boue.

Chanson de Craonne

Quelques chansons antimilitaristes

Guerre à la guerre, paix aux chaumières !

Chansons antimilitaristes contre la guerre de 1914-1918

Le départ du conscrit

Brassens, l’antimilitariste en poésie

L’antimilitariste, une espèce en voie de disparition ?

L’antimilitarisme est révolutionnaire

Eh oui ! Il existe encore des résolutions antimilitaristes, comme celle d’Evry de 2017 !!!

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