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« Je ne mange pas de ce pain là », Benjamin Péret, 1936
dimanche 15 avril 2018, par
« Je ne mange pas de ce pain là », Benjamin Péret, 1936
POUR QUE M. THIERS NE CRÈVE PAS TOUT A FAIT
Ventre de merde pieds de cochon
tête vénéneuse
C’est moi Monsieur Thiers
J’ai libéré le territoire
planté des oignons à Versailles
et peigné Paris à coups de mitrailleuse
Grâce à moi ON a pu mettre
du sang dans SON vin
Ca vaut mieux que de l’eau
et ça coûte moins cher
Les perles de ma femme sont des yeux de fédérés
et mes couilles de papier mâché
je les dégueule tous les matins
Si j’ai des renvois de nougât
c’est parce que Gallifet me gratte les fesses
et si mon ventre s’allonge
c’est parce que j’ai fait danser
l’anse du panier de
la république
LE TOUR DE FRANCE CYCLISTE
Que nos oreilles soient des lampions ou des poissons crevés
nous courons
Les pédales s’usent comme des cors de chasse et nous courons
Les boyaux crèvent comme des mouches et nous courons
Les guidons se dressent comme des parapluies et nous courons
Les rayons se multiplient comme des lapins et nous courons
C’est que la France s’étale comme un étron céleste
et nous courons tout autour pour chasser les mouches
Bayonne Marseille Strasbourg ne sont que des crapauds crevés
d’où s’exhale une puanteur sacrée que dissipe notre passage
Les pieds des uns garnissent les salades
et les yeux des autres la pointe des seins de leur maîtresse
et l’on part
L’édredon de la nuit s’est assis sur la selle
et les puces voltigent tout autour comme des poissons dans
l’aquarium de leur tête
Les bornes kilométriques leur lancent des flèches de curare
et les poteaux indicateurs sont des ours
qui croissent à tort et à travers comme des flics
Ah si les rayons étaient des jets d’eau
chacun figurerait le bassin des Tuileries
ou la double bosse du chameau
Mais voici que dieu a craché sur la route
et traînant sa sottise comme un parapluie
a tracé des ornières jonchées de crucifix
Malheur au coureur imprudent qui s’y engage comme un cheval
sous un tunnel
Jésus sort de sa croix et plante son CŒUR dans les boyaux de
la bécane
on entend un bénissez-nous seigneur
et il tombe comme une souris dans l’huile du mat
et les mille bénédictions de la bouse de vache ne le jauniront
plus
LOUIS XVI S’EN VA A LA GUILLOTINE
Pue pue pue
Qu’est-ce qui pue
C’est Louis XVI l’oeuf mal couvé
et sa tête tombe dans le panier
sa tête pourrie
parce qu’il fait froid le 21 janvier
Il pleut du sang de la neige
et toutes sortes de saletés
qui jaillissent de sa vieille carcasse
de chien crevé au fond d’une lessiveuse
au milieu du linge sale
qui a eu le temps de pourrir
comme la fleur de lis des poubelles
que les vaches refusent de brouter
parce qu’elle répand une odeur de dieu
dieu le père des boues
qui a donné à Louis XVI
le droit divin de crever
comme un chien dans une lessiveuse
LE CARDINAL MERCIER EST MORT
Tous les curés, on les pendra
(LA CARMAGNOLE.)
Issu de la sueur des mains sales
le cardinal Mercier grandissait comme les vers qui détruisirent
la croix
En son CŒUR dormait une énorme punaise
qui plus tard
engendra ces hosties au parfum de poussière
qu’il déposait sur des langues grasses
Un jour dieu comme une vieille tache d’huile
apparut à ses yeux semblable à un anus
et Mercier depuis lors découvre la vierge dans tous les égouts
Ton père faisait le coup de feu à Bruxelles
et tu décrottais la vierge à Malines
Cardinal Mercier à cheval sur un agent
je t’ai vu l’autre jour semblable à une poubelle
débordante d’hosties
Cardinal Mercier tu sens dieu comme l’étable le fumier
et comme le fumier Jésus
Chacun dans son CŒUR a une divine colique qui sommeille
la tienne s’est éveillée au son de l’harmonium
du Dies irae et de la Brabançonne
Enfin la guerre que tu souhaitais vint comme ton messie
et ta bénédiction emprunta la trajectoire des obus
tandis que ton eau bénite explosait comme la mélinite
C’est ainsi que tu devins un asthmatique
vêtu de rouge comme un veau écorché
c’est ainsi que tes cheveux ont rempli les ostensoirs
de la Belgique
Cardinal Mercier tu n’es qu’une hostie que les porcs ont
mangée
mais les porcs en sont morts
et tu leur survécus
grâce à l’ endurance et au patriotisme
que tu prêchais dans l’abattoir
Mais maintenant que tu es crevé
si le monde a moins d’ulcères
les hosties gardent leur goût de cadavre
NUNGESSER UND COLI SIND VERRECKT
Ils partirent
et des drapeaux tricolores sortirent de tous les anus
Dans l’égout du ciel français
ils étaient à leur aise mieux que des crapauds
mais quand ils eurent dépassé leur crachat
les requins vinrent à leur rencontre
et les rejoignirent quelque part entre deux vagues
surmontées d’un chapeau haut-de-forme
comme des croque-morts patriotiques
Mais ils étaient déjà pourris
et dans leurs yeux les vers simulaient des points d’interrogation
Les vagues crachèrent de dégoût à leur approche
et dans un hoquet les avalèrent
Trempez vieux croûtons dans le grand urinoir
Quel salace maniaque oserait de ses doigts qui s’effritent
toucher votre triste pourriture
Vous êtes crevés Nungesser et Coli
Pourtant la guerre injuste vous avait manqués
et ceux que vous assassinâtes s’avancent vers vous
Ils ont des yeux de coupe-tête et des mains de garrot
mais ils sourient de se savoir vengés
Aujourd’hui les beaux monstres de la mer
viennent flairer l’éponge de vos corps et disent
Pouah c’est du Français puant l’eau bénite
laissons-les aux curés de leur pays
Avec leurs crânes ils feront des calices
et leurs os serviront de chandeliers
Quant à nous nous aurons des banquiers soufflés
des généraux couverts de vomissures
et de sombres bourriques de tous les pays
LE POUVOIR TEMPOREL DU PAPE
La sueur noire des porcs
accoucha d’un pou blanc
Gras visqueux il grandit
Comme il était italien
il entreprit sa pauvre marche sur Rome
et un jour arriva au cul sale du Vatican
Ce n’était plus qu’un morpion au milieu de christs pourris
et de vierges violées par ses ancêtres
Des vierges putains qui soulagèrent leur ventre
dans la tinette du bénitier
vous naquîtes
viandes d’église suifs de confessionnal
pourritures eucharistiques
et dans le nombril de chacun de vous noir violet ou rouge
se gonfle le pou blanc
le frère de celui qui las de vomir dans son Vatican
veut désormais contaminer les voisins
avec l’encens de son ventre galeux
Et les voisins sont satisfaits
Ils s’assemblent sur son passage
déchets de légumes dans les halles vides
Et voilà l’Italie fasciste
LA CONVERSION DE GIDE
Monsieur le camarade Gide
entre cul et chemise chante la Jeune Garde
et se dit qu’il est temps d’exhiber son ventre comme un
drapeau rouge
Communiste
Un peu beaucoup passionnément
pas du tout
répondent les couilles de l’enfant de CŒUR qu’il épile
Tel une tomate agitée par le vent
Monsieur le camarade Gide fait un foutu drapeau rouge
dont aucune salade ne voudrait
un drapeau rouge qui cache une croix
trempée dans le vitriol
et bien française comme pas un chien de concierge
qui se mord la queue en entendant hoqueter la Marseillaise
qui fait accoucher
Monsieur le camarade Gide
Oui Monsieur le camarade Gide
La faucille et le marteau vous les aurez
la faucille dans le ventre
et le marteau vous le mangerez
JEANNE D’ARC
Les petits oiseaux n’ont pas de roulettes
mais Jésus a les pieds gelés
confia un jour à Jeanne d’Arc
une bouse de vache auréolée de mouches
voisine d’un vieux bout de bois pourri
que les crapauds s’exerçaient à franchir en sautant
Et chacun au passage se nommait
Saint Jean Saint Paul Saint Louis Sainte Thérèse Saint Trouduc
Alors Jeanne comprit qu’elle était en face de Dieu
et avala la bouse comme une relique
Aussitôt Dieu se cristallisa sous forme d’hémorroïdes
et tous les chiens de Domrémy lui léchèrent le derrière
Mais Jeanne savait que Dieu l’habitait
et lui disait chaque soir
Je suis ici par la volonté du pape
et je n’en sortirai que par la force des pets
Soudain dieu cracha si loin que Jeanne put donner des coups
de pied
dans le derrière de l’horizon
Dieu et l’horizon crièrent
Le roi Charles VII chasse les punaises sous l’escalier
mais chaque punaise écrasée engendre deux mille poux
et les poux du roi sont aussi ceux de Jeanne
Sa peau se tend comme un tambour pour recevoir plus de
poux
Elle fait aussi le signe de la croix sur les poubelles
afin que les poux qui s’y cachent la suivent
comme un chien une piste
celle qui mène au roi
Le roi s’est enfui poursuivi par les porcs
que les curés couvrent d’eau bénite
Ils la boivent et se sanctifient
Les porcs vont à Jérusalem une croix à la main
Ils veulent sucer les os du Christ comme un chewing-gum
et le roi fuit
Jeanne le rejoint dans une vespasienne
et ils s’aiment comme l’urine aime l’ardoise humide
Un jour à Reims une pomme pourrie tombe sur la tête du roi
Jeanne lui en fait une couronne
bénie par quatorze archevêques au putrescible regard
Une burette vengeresse frappe Jeanne et la voici blessée
le roi dévore ses seins et ses pieds
Qui ont l’écœurante saveur des légumes avariés
et la voici guérie
Cependant les Anglais élevaient leurs poux en France
et les poux anglais battaient les poux français
Un jour un vêtement de poux anglais couvre le corps de
Jeanne
et la voici prisonnière
Pendant longtemps elle mangea des poux
espérant leur ressembler
mais elle resta toujours une punaise craquant sous le pas des
ânes
une écœurante punaise si sale et si molle
Qu’on dut un soir huileux comme le Christ
la brûler pour réchauffer les poux
Sainte Jeanne d’Arc patronne des punaises priez pour les
Français
LE CONGRÈS EUCHARISTIQUE DE CHICAGO
Lorsque les cloportes rencontrent les cafards
et que les beefsteaks secrètent leurs hosties
tous les crachats se réunissent dans le même égout et disent
Jésus viens avec nous
et toutes les biques du monde répandent leurs crottes dans
l’égout
et s’ouvre le congrès eucharistique
et chacun d’accourir vers les divins excréments et les crachats
sacrés
C’est que dieu constipé depuis vingt siècles n’a plus de
boueux messie pour féconder les terrestres latrines
et les prêtres ne vendangaient plus que leur propre crottin
C’est alors que leur sueur murmura
Vous êtes du cambouis et je suis dieu
Pour me recevoir vous tendrez vos vastes battoirs
Lorsque vos oreilles et votre nez se rempliront de boue
vous me verrez sous la forme d’un putois pourri
Alors tous les poux nègres se retrouvèrent sur la même fesse
et dirent dieu est grand
dieu est plus grand que notre fesse
Nous avons fait l’hostie et il nous a fait crapauds
pour que nous puissions tout le jour croasser le dies irae
Cependant la poussière des césars pénétraient dans leurs
naseaux
et ces ruminants galeux beuglaient
Judas a vendu dieu comme des frites
et ses os ont gratté les sabots des pur-sang
Ah qui nous donnera un dieu rafraîchi comme un crâne sortant
de chez le coiffeur
un dieu plus sale et plus nu que la boue
Le nôtre lavé par les rivières
n’est plus qu’un absurde et livide galet
PREMIER EMPIRE
Quand le tabac français sortit du nez de Bonaparte
ce n’était encore que le petit caporal
et cependant du fumier
qui s’échappa des tonneaux de vidange
en abandonnant sur le sol
un petit Vive l’empereur qui se sentait de loin
Le pape s’en léchait les babines
Il est vrai qu’il s’appelait Pie VII
LA MORT DE LA MÈRE COGNACQ
À l’âge où les enfants roulés dans le sable
tels des escalopes panées
cherchent le chemin du centre de la terre
la mère Cognacq les seins lourds du lait
que sa mère lui avait légué
ramassait ses aiguilles brisées pour fabriquer des canons
Un jour le canon de ses rêves fut fondu
puis vendu aux ennemis
par le père Cognacq
En souvenir de cet événement la Samaritaine fut ouverte
Et chaque matin en s’y rendant
la mère Cognacq ramassait le crottin de ses chevaux
pour les pissenlits de son époux
Hélas elle est crevée la mère Cognacq
elle est crevée comme la France
De sa panse verte comme un pâturage
s’échappent les familles nombreuses
qui pour chaque enfant
recevaient une pelle à feu
Plus de mère Cognacq
plus d’enfants venant après dix-huit autres
à Pâques ou à Noël
pisser dans la marmite familiale
Elle est crevée la mère Cognacq
dansons dansons en rond
sur sa tombe surmontée d’un étron
LE PACTE DES QUATRE
Quatre pouilleux dansaient devant un beefsteak
Et à mesure qu’ils dansaient leurs poux tombaient par terre
Je suis français dit l’un
léger et vif comme un flic assommant un ouvrier
et si j’ai le sang bleu et un mal blanc c’est parce que mon nez
est rouge
Je suis anglais dit le second
et depuis que la livre baisse je sens mes pieds s’étaler comme
un vieux brie
Je suis italien dit le troisième
heureusement que j’ai le pape comme nouille
depuis que le macaroni fait des tubes de mitrailleuses
Je suis allemand dit le dernier
Fasciste répondit l’écho des latrines
Et sous chacun de ces messieurs
un peu d’urine s’écoulait
dessinant pour l’Allemand une carte sans l’asticot du corridor
pour l’Italien un horizon de faisceaux graisseux
pour le Français la rive gauche du Rhin
pour l’Anglais un Mississipi de livres sterling
Merde dit le Français qui mangea le nez de l’Italien
cependant que l’Allemand crachait dans l’oreille de l’Anglais
et bientôt on ne vit plus qu’un petit tas de généraux
auréolés de mouches
qui tournoyaient autour des quatre drapeaux
plantés dans leurs fesses
LA LOI PAUL BONCOUR
Partez chiens crevés pour amuser les troupes
et vous araignées pour empoisonner les ennemis
Le communiqué du jour rédigé par des singes tabétiques
annonce
le 22e corps d’armée de punaises
a pénétré dans les lignes ennemies sans coup férir
À la prochaine guerre
les nonnes garderont les tranchées pour le plaisir des rengagés
et pour se faire trouer l’hostie à coup de balai
Et les enfants au biberon
pisseront du pétrole enflammé sur les bivouacs ennemis
Pour avoir hoqueté dans ses langes
un héros de trois mois aura les mains coupées
et la légion d’honneur tatouée sur les fesses
Tout le monde fera la guerre
hommes femmes enfants vieillards chiens chats cochons
puces hannetons tomates ablettes perdrix et rats crevés
tout le monde
Des escadrons de chevaux sauvages
d’une ruade chasseront les canons de l’adversaire
Et quelque part la ligne de feu sera gardée par des putois
dont l’odeur conduite par un vent propice
asphyxiera des régiments entiers
mieux qu’un pet épiscopal
Alors les hommes qui écrasent les sénateurs comme une crotte
de chien
se regardant dans les yeux
riront comme les montagnes
obligeront les curés à tuer les derniers généraux avec leurs
croix
et à coups de drapeaux
massacreront les curés comme un amen
LA SOCIÉTÉ DES NATIONS
Or en ce temps-là les pissotières marchant au pas cadencé
se retrouvaient à Genève
La plus vieille et la plus sale disait
je suis la France
et cette autre dont l’ardoise était couverte d’excréments
je suis l’Allemagne
Une troisième que recouvraient les hosties avalées par les papes
hurlait dans un bec Auer
L’Italie c’est moi
Et la pissotière anglaise était pleine de débris de bibles
d’autres espagnole avec des fragments de cigares
grecque portée par des changeurs accroupis
et d’autres encore tendues de beefsteaks saignants
Toutes se réunissaient à Genève au bord de la tinette du lac
À tout instant des généraux y puisaient à pleins seaux
un liquide gluant comme leur gloire
qu’ils versaient dans la pissotière de leur pays
et chacune criait
Je ne suis donc pas crevée
LA BAISSE DU FRANC
Franc petit franc qu’as-tu fait de tes os
Qu’en aurais-tu fait sinon le poker dice
qui projette ces mots sur le papier
Jadis curé pansu tu officiais dans les couloirs des bordels
distribuant l’hostie à de maigres putains
dont les yeux reflétaient ta double effigie
Jadis encore tes vastes bajoues
insultaient les boucs squelettiques
qui répandant alentour leur gauloise et chrétienne puanteur
te suivaient comme l’ombre d’un soleil
Soleil disons lampion
car jamais tu n’éclairas que des rues barrées
où l’on remplaçait des pavés par des tessons de bouteilles
Mais aujourd’hui que lombric sectionné par de multiples pelles
tu t’efforces en vain d’échapper aux poissons
tu voudrais bien redevenir général des jésuites
mais les jésuites sont crevés comme des rats
et de leur ventre suintent des francs mous
et leur eucharistique pourriture emplit tous les calices
quand les derniers survivants implorent dieu
pour que l’hostie devienne franc
Hélas dieu pauvre franc usé
gît parmi les crottins de ses prêtres
Ci-gît le franc betterave sans sucre
LA STABILISATION DU FRANC
Si les oreilles des vaches frémissent
c’est qu’on chante la Marseillaise
Allons enfants de la tinette
morver dans l’oreille de Poincaré
Les macaronis attardés dans sa barbe
ont beau murmurer
C’est moi le nouveau franc
À bas le vieillard qui m’a fait bouillir
Comme un carton à la foire
l’œil dans le vase de nuit
Poincaré se répète
J’ai bien mérité de la tinette
Vive l’union des bourriques
Vive la vacherie nationale
BRIAND CREVÉ
Enfin ce sperme mal bouilli jaillit du bordel maternel
un rameau d’olivier dans le cul
Terrine d’eaux grasses
coiffant le chou-fleur socialiste
qui se frottait les fesses
sur le drapeau français
en pétant
La France est le roi des animaux
le pays des capotes anglaises
Vive la France
et les chiens décorés
du sang des 1 500 000 morts
qui enrichirent des ventres ballonnés
Voilà Monsieur Briand
CHŒUR DES PACIFIQUES COLOMBES MERDEUSES
Enfin il est mort d’avoir léché la merde qui nous recouvre
O merde bénie que n’étais-tu plus grasse et plus sale
pour étouffer plutôt ce sinistre Briand
Colombes pour les sots
nous ne sommes que des vautours
et pissons sabres et goupillons
Les canons de M. Briand ont défoncé notre pauvre petit cul
CHŒUR DES ANGES SODOMISÉS
Jamais nous ne lui pardonnerons de les avoir oubliés là
pour désarmer la France
CHŒUR DES CURETONS
Maintenant qu’il est crevé nous pouvons dire
qu’il était notre frère comme le porc et le rat pesteux
Comme nous il se vautrait dans l’ordure et le fumier
et maintenant qu’il est crevé
nous lui rendons cette ordure avec notre bénédiction
Seigneur bénissez-nous avec le balai des cabinets
comme nous l’avons béni avec du poisson pourri
BRIAND
Certes j’ai bien mérité cet hommage
POINCARÉ
Et moi plus encore
car si tu trembles devant tes cadavres
les miens se réjouissent
Vivent les grands cimetières avec les croix de bois
et vive la prochaine guerre
avec ses ventres ouverts et ses corps écharpés
BRIAND
J’ai bien mérité cet hommage
et la puante patrie reconnaissante
peut être fière de ma charogne
qui n’a pas de sang sur les mains
CHŒUR DES OUVRIERS TRAHIS
Dommage qu’il soit mort trop tôt
notre guillotine n’aurait jamais si bien fonctionné
Heureusement qu’il nous reste des banquiers des généraux
des députés des évêques
PEAU DE TIGRE
Hélas le tigre des latrines
n’est plus que le paillasson de l’endroit
Faisons erreur mes amis
le paillasson vaut les w. c. qu’il régentait
mais notre merde vaut mieux que lui
Il est mort
le suif séché par les lampions
de la victoire de la grippe espagnole
Vieil animal oublié dans une cave
rien ne lui manquait
pas même l’haleine fétide des résidus de goupillon
et des habitués de caserne
Les trois couleurs au bout du nez
tendu par un fil de fer barbelé
il affirmait qu’il remontait le moral des troupes
Il est crevé
Asticots Jusqu’au bout
Dévorez cette charogne
et que ses os soient les sifflets de la révolution
LA MORT HÉROIQUE DU LIEUTENANT CONDAMINE DE LA TOUR
Depuis sept siècles Condamine de la Tour
les bras en aiguilles de pendule
marquant neuf heures un quart
debout sur son bouc tricolore
commandait ses quatorze homards
Dans sa cervelle percée les brises chantaient
Descendras-tu cochon de vendu
Mais du ciel noir comme le front de ses pères
aucune langouste ne venait secourir ses homards
Seul parfois le bref éclat d’un ongle
l’avertissait que les marmites changeaient de sexe
et que les laitues perdant leurs oreilles
accouraient lui demander le secret de ses poils
Soudain dans l’air barbu
un clou s’enfonça avec un bruit de ténèbres
un clou bleu et vert comme un matin de printemps
2 437 punaises sortirent de son nez
4 628 lampions pénétrèrent dans ses oreilles
Il cria
Moi Condamine de la Tour je cherche des massacres
des enfants dans des souliers de nuages
et le soldat inconnu dans le placard
Mais Jésus a jeté le soldat inconnu dans sa poubelle
et les porcs l’ont mangé
et les Alsaciens ont mangé les porcs
C’est ainsi que tu as grandi Condamine de la Tour
que tu as grandi comme un porc
et le nombril du soldat inconnu est devenu le tien
Mais aujourd’hui Jésus a mis ses pieds sales dans ta gidouille
qui lui sert de sabot
les deux pieds dans le même sabot
C’est pour cela qu’on l’a fait dieu
et que ses curés ont des chaussures
semblables à leur visage
Pourris Condamine de la Tour
Avec tes yeux le pape fera deux hosties
pour ton sergent marocain
et ta queue deviendra son bâton de maréchal
Pourris Condamine de la Tour
Pourris ordure sans os
VIE DE L’ASSASSIN FOCH
Un jour d’une mare de purin une bulle monta
et creva
À l’odeur le père reconnut
Ce sera un fameux assassin
Morveux crasseux le cloporte grandit
et commença à parler de Revanche
Revanche de quoi Du fumier paternel
ou de la vache qui fit le fumier
À six ans il pétait dans un clairon
À huit ans deux crottes galonnaient ses manches
Un jour d’une mare de purin une bulle monta
À dix ans il commandait aux poux de sa tête
et les démangeaisons faisaient dire à ses parents
Il a du génie
À quinze ans un âne le violait
et ça faisait un beau couple
Il en naquit une paire de bottes avec des éperons
dans laquelle il disparut comme une chaussette sale
Ce n’est rien dit le père
son bâton de maréchal est sorti de la tinette
C’est le métier qui veut cela
Le métier était beau et l’ouvrier à sa hauteur
Sur son passage des geysers de vomissements jaillissaient
et l’éclaboussaient
Il eut tout ce qu’on fait de mieux dans le genre
des dégueulis bilieux de médaille militaire
et la vinasse nauséabonde de la légion d’honneur
qui peu à peu s’agrandit
Ce mou de veau soufflé s’étalait
et faisait dire aux passants pendant la guerre
C’est un brave Il porte ses poumons sur sa poitrine
Tout alla bien jusqu’au jour où sa femme recueillit
le chat de la concierge
On avait beau faire
le chat se précipitait sur le mou de veau
dès qu’il apparaissait
et finalement c’était fatal il l’avala
Sans mou de veau Foch n’était plus Foch
et comme un boucher il creva d’une blessure de cadavre
HYMNE DES ANCIENS COMBATTANTS PATRIOTES
Regardez, comme je suis beau
J’ai chassé la taupe dans les Ardennes
pêché la sardine sur la côte belge
Je suis un ancien combattant
Si la Marne se jette dans la Seine
c’est parce que j’ai gagné la Marne
S’il y a du vin en Champagne
c’est parce que j’y ai pissé
J’ai jeté ma crosse en l’air
mais les tauben m’ont craché sur la gueule
c’est comme ça que j’ai été décoré
Vive la république
J’ai reçu des pattes de lapin dans le cul
j’ai été aveuglé par des crottes de bique
asphyxié par le fumier de mon cheval
alors on m’a donné la croix d’honneur
Mais maintenant je ne suis plus militaire
les grenades me pètent au nez
et les citrons éclatent dans ma main
Et pourtant je suis un ancien combattant
Pour rappeler mon ruban
je me suis peint le nez en rouge
et j’ai du persil dans le nez
pour la croix de guerre
Je suis un ancien combattant
regardez comme je suis beau
ÉPITAPHE SUR UN MONUMENT AUX MORTS DE LA GUERRE
Le général nous a dit
le doigt dans le trou du cul
L’ennemi
est par là Allez
C’était pour la patrie
Nous sommes partis
le doigt dans le trou du cul
La patrie nous l’avons rencontrée
le doigt dans le trou du cul
La maquerelle nous a dit
le doigt dans le trou du cul
Mourez ou
sauvez-moi
le doigt dans le trou du cul
Nous avons rencontré le kaiser
le doigt dans le trou du cul
Hindenburg Reischoffen Bismarck
le doigt dans le trou du cul
le grand-duc X Abdul-Amid Sarajevo
le doigt dans le trou du cul
des mains coupées
le doigt dans le trou du cul
Ils nous ont cassé les tibias
le doigt dans le trou du cul
dévoré l’estomac
le doigt dans le trou du cul
percé les couilles avec des allumettes
le doigt dans le trou du cul
et puis tout doucement
nous sommes crevés
le doigt dans le trou du cul
Priez pour nous
le doigt dans le trou du cul
PETITE CHANSON DES MUTILÉS
Prête-moi ton bras
pour remplacer ma jambe
Les rats me l’ont mangée
à Verdun bis)
à Verdun
J’ai mangé beaucoup de rats
mais ils ne m’ont pas rendu ma jambe
c’est pour cela qu’on m’a donné la croix de guerre
et une jambe de bois bis )
et une jambe de bois
MACIA DÉSOSSÉ
Le vieux piment mangé par les mites
est mort
comme une coquille d’escargot
dans la vase
en criant
La Catalogne est perdue
Perdue pour toi dépouille d’asticot
cendre de mite
vase sèche
limace imprimée dans le charbon
Mais la Catalogne qui rôtit
les curés et les nones
après les avoir mariés
comme Carrier
fera
des notes de musique avec tes os
des grains de sel à mettre sur la queue des oies
avec tes yeux
et de tes couilles
un attrape-mouches perfectionné
Tes paroles historiques feront tourner la mayonnaise
et avorter les femmes
qui auraient pu
malgré elles
accoucher de bébés la bombe à la main
Crève encore pourri dont les pissenlits ne veulent pas
crève
que ta poussière noie les écrits
de ceux qui diront du mal de ce poème
LA PESTE TRICOLORE
Issu d’un vomissement dans un pot de chambre bleu
Chiappe la vieille chique sucée et ressucée
se rabougrit en séchant
Déjà tout enfant il empestait le gendarme
que les bandits de son dépotoir tuent comme un cafard sous
une fesse
et les autres le traitaient de chien galeux
Plus tard
plus rabougri encore
il fermenta longuement
dans la fosse où l’on fait les flics
qui deviendront un si beau jeu de massacre
Enfin un jour
qu’on vidait dans la préfecture
la répugnante poubelle du ministère de l’intérieur
la tête enfouie dans un vieux soulier d’inspecteur
dont la puanteur l’émerveillait
on découvrit Chiappe entre deux trognons de choux pourris
et l’on fit de lui le chef des assassins
car
fumier professionnel
dont le sex-appeal enivre les mouches et les égouts
il ne pouvait que haïr le balai qui le nettoiera
la barricade de balais qui écrasaient les crânes des chiens
noirs
pour venger Sacco et Vanzetti
Pour lui tout était bon
l’ordure qui vient de droite
comme les déjections de la gauche
tout pourvu qu’il restât à la tête de ses maquereaux ivres
avec sa puante femelle
nageant dans les latrines des gardiens de la matraque
Je serai dans la rue
dit-il le jour où il fut craché
avec tous les rats pesteux qui envahiront la place de la Concorde
et je répandrai l’épidémie
Ah que la grenade et la mitraille
n’ont-elles supprimé des milliers de ces gonocoques
Ah que n’a-t-on rôti dans un kiosque incendié
le sanglant avorton qui l’avait fait flamber
LA GUERRE ITALO-ABYSSINE
Mes nouilles ou les gaz qu’elles dégagent
en forme de croix gammée
ordonnait au roi des rois du pain noir
l’égout du Vatican à plaque de César
cependant que l’Anglais une lampe à pétrole dans chaque
main
disait Écoute-moi Regarde comme je suis gras
et jouait de la flûte pour les vipères de la S.D.N.
La plus grasse à face d’Auvergnat
approuvait l’Anglais de la tête
tout en caressant les nouilles avec sa queue
Et les nouilles frétillaient comme la queue d’un fox-terrier
qui flaire un étron
Et les nouilles commencèrent à farcir le pain noir
avec des mitrailleuses
qui se préparent à chanter l’Internationale
dans le ventre des officiers
À bas les sanctions beuglent les crachats fascistes dédaignés
des chiens
Vivent les sanctions braillent les butors de la steppe
qu’écoute le prétexte aux futurs monuments aux morts
du prochain massacre
en murmurant
Je ne veux ni pétrole ni nouilles mais un peu de pâté de porc
6 FÉVRIER
Vive le 6 février
grogne le jus de chique
vêtu en étron fleurdelysé
Que c’était beau
Les autobus flambaient comme les hérétiques d’autrefois
et les yeux des chevaux
arrachés par nos cannes-gillettes
frappaient les flics si répugnants et si graisseux
qu’on aurait dit des croix de feu
Vive le 6 février
J’ai failli incendier le ministère de la marine
comme un kiosque à journaux
Dommage que les pissotières ne brûlent pas
Vive le 6 février
Des conseillers municipaux abrutis par leur écharpe tricolore
pour rallier les poux et les punaises
faisaient couler leur sang sous les matraques
qui leur conviennent moins bien que le poteau d’exécution
Vive le 6 février
Des curés jaunes verts pourris
caressaient les fesses des adolescents
en chantant la Marseillaise et des cantiques
en tirant sur leurs frères flics
Vive le 6 février
et vive le 7
J’ai hurlé pendant deux jours
À mort Cachin A mort Blum
et j’ai volé tout ce que j’ai pu dans les magasins
dont je brisais les vitres
J’ai même volé une poupée que j’enverrai à Maurras
pour qu’il essaie de la violer
en criant À bas les voleurs
6 DÉCEMBRE
L’odeur de vieilles tripes qui régnait à la Chambre
provoquait dans les tribunes grouillantes d’asticots
des Nous vivons une journée historique
à faire frétiller les cimetières
Journée historique flairaient les chiens sur les trottoirs
d’alentour
Journée historique beuglait la chasse d’eau
en emportant les idées de révolte des Blum et des Thorez
Soudain un mou de veau auréolé de mouches
suant des patriotismes
comme un général devant le monument de ses morts
un mou de veau
se leva
et le président grogna
M. Ybarnégaray peut vomir
On vit alors s’échappant du cancer de sa langue
voltiger les bananes pourries qu’écrasaient les oranges sures
de ses yeux
Et les rinçures du pavillon de la boucherie
qui débordaient de ce fétide évier
réjouissaient les narines des assistants dont on ferait un si
bon engrais
et qui sentaient dans leur nombril crasseux
en forme de tête de mort molle
germer la pomme de terre gelée d’un drapeau tricolore
Rien dans nos mains sanglantes disait-il
après avoir tâté son poignard à sa ceinture
Rien dans nos poches sinon la sueur du peuple
Et il montrait ses mains où l’on lisait sur un fond de sang
coagulé
sur l’une Limoges etc.
et sur l’autre de Wendel etc.
Nous sommes des anges merdeux crachés par dieu
pour le noël de la réconciliation française
Jamais nous n’avons eu d’armes
Licenciez vos bandits nous cacherons nos assassins
Et Blum se leva pour le baiser pourri sur la bouche pourrie
bousculé par Thorez pressé de l’imiter
cependant que dehors ceux qui les entretiennent se lamentaient
Encore une fois nous sommes trahis