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Que signifie le nombre d’Avogadro et pourquoi cela été un argument majeur en faveur de l’atomisme ou discontinuité de la matière

samedi 15 septembre 2018, par Robert Paris

Que signifie le nombre d’Avogadro et pourquoi cela été un argument majeur en faveur de l’atomisme ou discontinuité de la matière

Le nombre d’Avogadro n’indique pas seulement une manière de mesurer la quantité de matière mais il affirme l’existence d’entités discontinues qui fondent toute matière, quel que soit le type d’atomes et de molécules concernés et sont une affirmation d’une propriété universelle de la matière puisque c’est le même nombre qui caractérise les divers atomes et molécules. C’était donc une affirmation très osée à une époque où l’existence des molécules était peu admise en chimie et encore moins en physique…

Le nombre d’Avogadro indique la grande quantité de molécules dans un volume donné et la dimension et la petitesse l’occupation d’espace d’une molécule.

Bernard Diu dans « Les atomes existent-ils » :

« Le célèbre nombre d’Avogadro N vaut environ six fois dix puissance 23, c’est-à-dire un six suivi de 23 zéros ! Ce nombre est celui des molécules qui contiennent une certaine quantité macroscopique d’un corps pur quelconque : par exemple, c’est le nombre de molécules qui occupent dix-huit grammes d’eau. Pour ce qui nous occupe ici, il suffira de savoir qu’un échantillon macroscopique d’un corps englobe un nombre fabuleux de molécules. Précisons ce point, qui va s’avérer capital. Dans une pièce ordinaire d’un appartement ordinaire, chaque millimètre cube d’air renferme trois fois dix puissance seize molécules (soit un nombre constitué d’un chiffre trois suivi de seize zéros)… Imaginons que nous voulions repérer dans l’espace toutes ces molécules par leur position et leur vitesse (avec trois coordonnées chacune), il faudrait connaître deux suivi de dix-sept zéros nombres. C’est totalement exclu. Songez qu’un ordinateur qui écrivait quarante nombres par ligne et une ligne par centimètre devrait utiliser cinquante milliards de kilomètres de papier pour répertorier un seul état instantané ! »

Le nombre d’Avogadro donne un ordre de grandeur de la molécule.

Bernard Diu, dans « Traité de Physique » :

« Les dimensions d’un atome sont de l’ordre d’un angström soit dix puissance moins dix-sept mètres. C’est déjà fort petit… Dix-huit grammes d’eau comprennent 6 fois dix puissance vingt-trois (nombre d’Avogadro) molécules et leur volume est dix-huit centimètres-cube (la masse volumique de l’eau est très voisine d’un gramme par centimètre-cube). Une division toute simple accorde à chaque molécule en moyenne un espace de 3 fois dix puissance moins vingt-trois centimètres-cube. »

Le nombre d’Avogadro est NA = 6,02214129 fois 10 puissance 23 molécules pour une mole, soit 602.214.129.000.000.000.000.000 molécules pour une seule mole, soit plus de six cent mille milliards de milliards de molécules !!!

Cela signifie que, quel que soit le corps pur considéré, dans un gaz il y a toujours le même nombre de molécules dans une quantité donnée de matière et on prend pour unité de matière « une mole ».

Une mole contient donc toujours le nombre d’Avogadro en nombre d’atomes mais pèse bien sûr différemment suivant les types de molécules.

Qu’est-ce qu’une mole ?

Plutôt que « mole », on trouvera aussi dans le texte l’ancien terme des chimistes de « molécule-gramme » pour désigner la masse moléculaire (ou masse molaire). Le nom de « mole » date de 1897.

Notons aussi que la définition du nombre d’Avogadro comme étant le nombre d’atomes dans 12 grammes de Carbone 12, cet atome état choisi désormais par convention, ne date que de 1971. Mais, dans la définition du principe d’Avogadro, la remarque d’Avogadro n’implique aucune particularité du Carbone 12 et s’applique à tous les « gaz parfaits »

L’hypothèse avancée par Amedeo Avogadro en 1811, affirmait que, « Deux gaz dans les mêmes conditions de température et de pression contiennent sous le même volume le même nombre de molécules ».

Avogadro écrit en 1811 :

« L’hypothèse qui se présente la première à cet égard, et qui paraît même la seule admissible, est de supposer que le nombre de molécules intégrantes dans les gaz est toujours le même à volume égal ou est toujours proportionnel aux volumes. »

MM. Doucet commentent :

« Si maintenant on envisage le volume molaire qui, dans le système des chimistes actuellement en usage est celui de 32 g d’oxygène dans les conditions normales, c’est-à-dire 22414 cm², on arrive à une définition simple du nombre d’Avogadro : c’est le nombre de molécules contenues dans le volume molaire d’un gaz parfait.
Cette définition s’applique aux corps composés gazeux.
Si l’on admet que le nombre de molécules ne change pas par liquéfaction puis solidification, on peut dire d’une façon générale : le nombre d’Avagadro NA est le nombre de molécules contenues dans la masse molaire d’un corps quelconque. Nous écrirons : 1 Mole = NA molécules. »

source

Friedrich-Albert Lange, dans « Histoire du matérialisme, et critique de son importance à notre époque » :

« Avogadro trouva (1811) que l’on ne pouvait s’expliquer l’uniformité avec laquelle tous les gaz se comportaient sous la même pression, à la même température et dans les combinaisons chimiques, qu’en admettant que le nombre des plus petites parties, dans un volume égal de gaz divers, était le même, à température et pression égales. Mais pour rendre cette hypothèse incontestable, il dut non-seulement admettre pour des gaz combinés une réunion de plusieurs atomes dans les plus petites portions de la masse, mais encore regarder, du moins en partie, les portions infiniment petites des gaz comme des groupes de plusieurs atomes. De la sorte, les molécules remplacèrent les atomes sous plusieurs rapports ; seulement elles n’étaient pas simples, mais composées d’atomes. Les plus petites portions d’un corps déterminé chimiquement étaient appelées molécules, tandis qu’on donnait le nom d’atomes aux plus petites parcelles de la matière en général. Ce n’est que dans des combinaisons et décompositions chimiques que les atomes se montrent pour ainsi dire individuellement ; ils changent de place et se groupent en molécules de compositions différentes. »

source

Dans une lettre du 30 avril 1814 à Berthollet, Ampère émet, sans le savoir, à peu près la même hypothèse qu’Avogadro :

« Lorsqu’un corps solide devient gazeux, les molécules qui constituent le gaz ne sont plus en interaction, à température constante, leur nombre est proportionnel au volume du gaz. »

En fait, les scientifiques sont encore divisés : la matière est-elle vraiment discontinue et composée de molécules, ils n’en sont pas sûrs du tout…

La loi d’Avogadro est la plus ancienne de ces lois physico-chimiques qui reposent sur l’hypothèse explicite que les molécules sont des choses réelles. Le retard avec lequel cette loi a été acceptée par les chimistes indique clairement leur résistance généralisée à l’idée de réalité moléculaire.

Le nombre N d’Avogadro est le nombre des molécules contenues dans une molécule-gramme d’un corps pur quelconque.

Qu’est-ce qu’une « molécule-gramme » ? Cela dépend du nombre d’atomes contenus dans la valeur en grammes du « nombre de masse » d’un corps simple. Le nombre de masse de l’hydrogène est un, celui de l’oxygène est six. Une molécule-gramme d’hydrogène, c’est deux grammes puisque la molécule contient deux atomes. Une molécule-gramme d’oxygène est 32 puisque le nombre de masse est 16 et qu’il y a deux atomes d’oxygène. Ainsi de suite, la vapeur d’eau correspond à 18 molécules-grammes.

Résultat : quelque soit la nature du gaz, une molécule-gramme de n’importe quel gaz dans les mêmes conditions de température et de pression occupe toujours le même volume.

Cette idée fut admise par les scientifiques lors du sommet de Karlsruhe de 1860.

Dmitri Ivanovitch Mendeleev, trente ans plus tard, que « La loi d’Avogadro a reçu par le biais du congrès un développement plus large, et bientôt après a conquis tous les esprits. »

En 1869, voici comment cette découverte était rapportée :

« Un chimiste italien, Amedeo Avogadro, ne tarda point à formuler la conception générale qui embrasse à la fois la loi de Dalton et celle de Gay-Lussac. Ses vues sont exposées dans un mémoire qu’il publia en 1811. L’idée synthétique d’Avogadro consiste à regarder tous les gaz simples comme renfermant le même nombre d’atomes sous le même volume ; dans les composés, les atomes s’unissent quelquefois deux à deux, et dans ce cas la combinaison a lieu par volumes égaux ; quelquefois ce sont deux ou trois atomes de l’un des composants qui se portent sur un seul atome de l’autre, et cette circonstance détermine le rapport des volumes : ainsi une relation étroite se trouvait établie entre la densité et le poids atomique des gaz.
La théorie d’Avogadro eut peu de retentissement, soit qu’il n’eût pas comme chimiste un renom suffisant, soit qu’il eût compromis son hypothèse en voulant lui donner prématurément. une trop grande extension et notamment en l’étendant aux corps solides. Elle fut reprise en 1814 par Ampère, et elle obtint sous ce nouveau patronage un peu plus de succès sans arriver cependant tout de suite à un assentiment universel ; de graves difficultés qu’elle laissait subsister ou qu’elle tranchait trop facilement devaient pendant longtemps encore contribuer à l’obscurcir. »

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Paul Langevin écrivait en 1904 :

« Cette hypothèse d’Avogadro et d’Ampère tellement singulière qu’on évite aujourd’hui bien souvent d’en parler malgré son importance essentielle… »

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En 1908, c’est Jean Perrin qui devait découvrir la valeur précise du nombre d’Avogadro :

« J’ai, en effet, obtenu, pour le « Nombre d’Avogadro » N, suivant les émulsions, des valeurs qui se placent entre 65.1022 et 72.1022. Mes mesures les plus sûres donnent 68.1022. Pour l’émulsion correspondante, l’élévation qui doublait la raréfaction était d’environ 6 microns, soit 1 milliard de fois plus faible que celle (6 kilomètres) qui double la raréfaction dans l’air à 0°.
Pour comprendre à quel point est significative la concordance avec le nombre 60.1022 obtenu (sans précision) par la théorie cinétique, il faut songer qu’avant l’expérience on n’eût certainement pas osé affirmer que la chute de concentration ne serait pas négligeable sur la faible hauteur de quelques microns, ce qui eût donné pour N une valeur beaucoup plus petite, et que par contre on n’eût pas davantage osé affirmer que les grains ne se ressembleraient pas tous au voisinage immédiat du fond, ce qui eût indiqué pour N une valeur beaucoup plus grande.
En ce qui regarde la précision de cette détermination de N, ce sera celle des expériences ; aujourd’hui de quelques centièmes, elle atteindra le millième quand on le voudra. Il n’en est pas de même pour la valeur que tire actuellement de la viscosité des gaz la théorie cinétique ; ici le perfectionnement des mesures ne diminuera pas l’incertitude qui tient aux hypothèses simplificatrices introduites pour faciliter les calculs. »

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Perrin utilisait pour faire sa mesure l’article d’Einstein sur le mouvement brownien, lui-même déjà une manifestation du mouvement des molécules. Dans sa thèse doctorale d’avril 1905, Einstein se proposait déjà de déterminer les dimensions des molécules et le nombre d’Avogadro à partir des propriétés de viscosité et de diffusion de l’eau sucrée. Puis le 11 mai 1905, Einstein publiait dans Annalen der Physik un article visant donner une interprétation stochastique de la diffusion des particules en suspension et d’en déduire une manière d’atteindre la connaissance du nombre d’Avogadro.

Voici un exposé de la démarche d’Einstein

Jacobus Henricus van ’t Hoff dans « La Chimie physique et ses applications » :

« La loi d’Avogadro exprime que si dans un volume égal, on introduit une quantité d’un autre gaz, telle qu’à la même température elle exerce la même pression, les deux volumes contiendront le même nombre de molécules. »

Jean Perrin dans « Mouvement brownien et grandeurs moléculaires » :

« En résumé, la théorie moléculaire cinétique du mouvement brownien se vérifie de façon rigoureuse et conduit ; soit par l’étude de la distribution des grains, soit par l’étude de leur agitation, à la même valeur précise de la constante d’Avogadro, invariant essentiel de la structure de la matière. »

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Jean Perrin dans « Mouvement brownien et réalité moléculaire » :

« Les atomes. La constante d’Avogadro. - Dès lors, comme on sait, on est conduit à admettre l’existence d’atomes par diverses considérations de Chimie et particulièrement par l’étude des substitutions. Quand par exemple on dissout du calcium dans l’eau, on chasse seulement la moitié de l’hydrogène qu’elle contient. L’hydrogène de cette eau, et, par suite, l’hydrogène de chaque molécule, se compose donc de deux parties distinctes. Aucune expérience ne conduisant à en distinguer davantage, il est raisonnable de penser que ces deux parties sont insécables par tous les moyens chimiques, ou, d’un mot, que ce sont des atomes. D’autre part, toute masse d’eau, et par suite toute molécule d’eau, pèse 9 fois autant que l’hydrogène qu’elle contient ; la molécule d’eau, qui contient 2 atomes d’hydrogène, pèse donc 18 fois plus que l’atome d’hydrogène. De semblable manière, on établirait, par exemple, que la molécule de méthane pèse 16 fois plus que ce même atome d’hydrogène. On peut atteindre ainsi, par voie purement chimique, en passant par la notion d’atome, le rapport 16/18 du poids de la molécule de méthane au poids de la molécule d’eau. Or, on arrive précisément à ce même rapport si l’on compare les masses de méthane et de vapeur d’eau qui occupent le même volume à l’état gazeux dans les mêmes conditions de température et de pression. Il faut donc que ces deux masses, qui ont même rapport que les molécules des deux sortes, contiennent l’une et l’autre autant de molécules. Ce résultat se généralise pour les divers gaz, en sorte que nous retrouvons, de façon expérimentale, la proposition célèbre énoncée sous forme d’hypothèse par Avogadro, il y a environ un siècle, et reprise un peu plus tard par Ampère : « Deux gaz quelconques, pris aux mêmes conditions de température et de pression, contiennent sous le même volume le même nombre de molécules. » Il est devenu habituel d’appeler molécule-gramme d’un corps la masse de ce corps qui, à l’état gazeux, occupe le même volume que 2 g d’hydrogène amenés à la même température et à la même pression. L’énoncé d’Avogadro équivaut alors au suivant :
Deux molécules-gramme quelconques contiennent le même nombre de molécules.
Ce nombre invariable N est une constante universelle qu’il semble juste d’appeler constante d’Avogadro. Si l’on connaissait cette constante, ou connaîtrait la masse d’une molécule quelconque ; on connaîtrait même la masse d’un atome quelconque, puisque nous pouvons savoir, par les divers moyens qui conduisent aux formules chimiques, combien il y a d’atomes de chaque sorte dans chaque molécule. Le poids de la molécule d’eau, par exemple, est 18/N, celui de la molécule d’oxygène est 32/N , et ainsi pour chaque molécule. De même, le poids de l’atome d’oxygène, obtenu en divisant par N l’atome-gramme d’oxygène, est 16/N, celui de l’atome d’hydrogène est (1,008)/N, et ainsi pour chaque atome. »

source

Paul Langevin dans « La notion de corpuscule et d’atomes » :

« Nous avons vu que la connaissance du nombre d’Avogadro N permet de calculer les dimensions des atomes, c’est-à-dire de la région occupée à l’intérieur de ceux-ci par les électrons ; on trouve ainsi pour les atomes supposés sphériques des rayons de l’ordre de 10 puissance moins 8 cm, et ce résultat est confirmé par diverses évaluations concordantes, en particulier par celles que fournit la diffraction des rayons de Röntgen dans les cristaux. L’extrême rareté des chocs exceptionnels capables de dévier notablement les particules alpha montre que la région où se trouve la plus grande partie de la masse de l’atome doit être beaucoup plus petite que l’atome lui-même. Du fait que les chocs exceptionnels sont cent millions de fois moins fréquents que les chocs ionisants, on déduit, en prenant la racine carrée de ce rapport pour tenir compte de ce que la section traversée est proportionnelle au carré du rayon, que le rayon de la région où se trouve concentrée la masse de l’atome est 10.000 fois plus petit que le rayon de l’atome lui-même, c’est-à-dire que les dimensions de ce noyau de l’atome sont de l’ordre de 10 puissance moins douze cm. »

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