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Début juin 2008, révoltes sociales en Egypte, en Algérie, en Tunisie et au Maroc... ainsi qu’en Indonésie

samedi 7 juin 2008, par Robert Paris

Les émeutes de Séfrou au Maroc, le film

Extraits de presse :

Des émeutes ont éclaté durant le week-end au Maroc et en Tunisie entre les forces de l’ordre et des jeunes. Elles ont fait 44 blessés à Sidi Ifni, à 900 km au sud-ouest de Rabat, au Maroc ainsi qu’un mort et plusieurs blessés à Redeyef, à 350 km au sud-ouest de Tunis. Elus locaux et associations mettent en cause le chômage endémique des jeunes comme élément déclencheur des violences. Au Maroc, le taux de chômage atteint 9,7 % en 2007, et quatre demandeurs d’emploi sur dix ont moins de 25 ans, tandis qu’en Tunisie, il est de 14,1 %. Un problème qui touche aussi l’Algérie. « Le chômage des jeunes est le dénominateur commun aux trois pays, où des manifestations se déroulent périodiquement », commentait-on hier au Centre marocain des droits humains.

TUNISIE

6 juin 2008


La révolte du bassin minier de Gafsa, en Tunisie

Depuis le début de l’année, le bassin minier de Gafsa, en Tunisie, est en état d’ébullition sociale. Dans cette région d’exploitation du phosphate, la Compagnie des Phosphates de Gafsa règne en maître absolu. Elle est appuyée par le régime despotique et corrompu de Ben Ali. Outre la pollution liée aux activités d’extraction et de traitement, la pauvreté et le chômage de masse ont déclenché un vaste mouvement de protestation.
Les travailleurs et les jeunes du bassin minier se mobilisent pour leur dignité, pour des emplois, pour de meilleures conditions de logement, de santé et d’éducation. Ils dénoncent un régime de spoliation, de pillage économique et social. Les grèves se sont multipliées. Les enseignants, certaines branches de la fonction publique et même des petits commerçants se sont mobilisés.
Le mouvement prend diverses formes. Par exemple, dans plusieurs villes du bassin, de jeunes chômeurs et des veuves de travailleurs victimes d’accidents du travail à la Compagnie des Phosphates organisent des « sit-in », sous des tentes, devant des bâtiments officiels. Le régime de Ben Ali a violemment réprimé ce mouvement, de peur que Redeyef ne devienne le symbole de la colère des jeunes et des travailleurs à travers tout le pays, et que le mouvement ne fasse tache d’huile. Des centaines d’interpellations ont eu lieu depuis le début de l’année. Les forces de l’ordre harcèlent et brutalisent quotidiennement la population mobilisée. La ville est pratiquement en état de siège. Ainsi vont les choses dans le pays où, selon Sarkozy, « l’espace des libertés progresse » !
La région de Gafsa est connue pour ses traditions militantes et révolutionnaires. Cette année marque le trentième anniversaire de la grève qui, du temps de Bourguiba, a commencé dans le bassin minier de Redeyef, s’est étendue aux travailleurs et à la jeunesse de toute la région de Gafsa, pour finalement déboucher sur une grève générale d’ampleur nationale. A l’époque, la répression brutale de ce mouvement a fait des centaines de morts. Des milliers de travailleurs et syndicalistes ont été condamnés à de lourdes peines de prison.

Le soi-disant « miracle économique »

Le régime de Ben Ali se vante du « miracle économique » en Tunisie. Mais à qui profite cette croissance qui repose essentiellement sur le tourisme de masse ? Aux capitalistes qui dominent l’industrie touristique et en accaparent tous les bénéfices. D’immenses fortunes s’accumulent grâce à la spéculation immobilière, pendant que la masse de la population languit dans le chômage et la misère. Alors que les entreprises françaises, espagnoles et allemandes se délocalisent vers la Tunisie pour profiter d’une main d’œuvre sous-payée et surexploitée, d’autres entreprises jettent leurs salariés à la rue et quittent la Tunisie pour trouver ailleurs des ouvriers encore moins chers. Autre conséquence du « miracle » Ben Ali : des centaines de jeunes tentent de fuir le pays par la mer, sur des embarquements de fortune. Beaucoup finissent par se noyer.
Le 7 mai, Redeyef, une ville de 30 000 habitants, était encerclée par la police. Selon des témoins, plusieurs centaines d’habitants – hommes, femmes et enfants – munis du strict nécessaire ont tenté de quitter la ville avec l’intention de l’abandonner aux forces de l’ordre. Ils en ont été dissuadés par les animateurs du comité de grève, et ont finalement décidé de rester sur place et poursuivre la lutte. Effectivement, une « évacuation en masse » de ce genre n’aurait pas été un moyen de lutte efficace. Quoi qu’il en soit, cet épisode illustre l’énorme gouffre qui s’est ouvert entre le peuple et les autorités. Il témoigne aussi de l’exaspération d’une population face au comportement des dirigeants syndicaux « officiels », notoirement corrompus et complètement à la solde du régime. Main dans la main avec ce dernier, ces « dirigeants » syndicaux se sont efforcés d’isoler et de démoraliser les grévistes et la population en révolte.
Deux jours plus tard, le 9 mai, Taher Saidi, 44 ans, a été grièvement blessé lors d’une intervention des forces de l’ordre dans la ville de Om Larais (35 000 habitants). Il est décédé le 19 mai à l’hôpital régional de Gafsa.
L’incident qui a provoqué les événements du 7 mai est la mort d’un jeune chômeur qui, la veille, avait été électrocuté à l’intérieur d’un local électrique, suite à une intervention particulièrement brutale des forces de l’ordre contre une manifestation de jeunes chômeurs. Ils protestaient contre les résultats pour le moins opaques – entachés de clientélisme – du concours d’entrée à la Compagnie des Phosphates de Gafsa, laquelle s’était engagée à recruter des jeunes chômeurs de la région, en janvier. Un groupe a décidé d’occuper le générateur électrique – hors tension – alimentant les ateliers de l’entreprise. Une brigade de police armée de gaz lacrymogènes a entrepris de faire évacuer le générateur. Le courant a été rétabli et plusieurs jeunes manifestants ont été électrocutés. Les secours ne sont intervenus que plusieurs heures après l’accident. Le jeune qui a trouvé la mort avait 26 ans. Il s’appelait Hichem Ben Jeddou El Aleimi. Un autre, Ahmed Ben Salah Fajraoui, 21 ans, a été grièvement blessé.
Par ailleurs, le régime de Ben Ali a procédé à l’arrestation de plusieurs militants, dont les étudiants Nejib Znaïdia et Jihed Ben Ali, mais aussi les chômeurs Houcine Ben Soltane, Abid Tababi, Ismail Hlaimi et Atef Ben Salehn. Ils attendent d’être jugés au tribunal le 29 mai.
Les étudiants et les chômeurs incarcérés, comme l’ensemble des habitants du bassin minier de Gafsa, ont besoin de notre solidarité. Cependant, de simples déclarations de solidarité ne suffisent pas. Face au mur de silence médiatique qui entoure les événements du bassin minier de Gafsa.

Répression sanglante

La répression du mouvement du bassin minier prend une tournure d’une extrême gravité. Depuis ce matin, à Redeyef, de violentes confrontations ont lieu entre les manifestants et les forces de police. Un énorme dispositif policier a envahi la ville tirant à balles réelles sur les jeunes et saccageant maisons et boutiques.

Le bilan est très grave, Hafnaoui ben Ridha Belhafnaoui, jeune de 18 ans, a été mortellement touché par balles, on dénombre plusieurs autres blessés par balles.

En donnant l’ordre de tirer sur les manifestants pour tuer, le régime dictatorial de Ben Ali a décidé d’en découdre avec le mouvement du bassin minier de Gafsa. Il cherche à en finir, quelque soit le prix, avec ce mouvement social dont la principale revendication est le droit au travail et à des conditions de vie dignes. Ce mouvement qui dure depuis le 5 janvier 2008 n’a cessé de s’amplifier et de s’étendre ces derniers jours aux villes et aux régions voisines du sud ouest tunisien, c’est ce que craint le régime tunisien.

Le comité de soutien à la population du bassin minier de Gafsa dénonce cette répression criminelle du régime tunisien. Il appelle les militants et les organisations politiques, syndicales et associatives à manifester leur solidarité avec la population du sud ouest tunisien et à se joindre au rassemblement qu’il organise demain à 14h00 à la fontaine des innocents à Paris.

Communiqué de presse - Comité de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa

Tunis le 6 juin 2008
A Redeyef
Balles réelles, un mort et des dizaines de blessés
Mort du jeune Hafnaoui Ben Ridha Hafnaoui Maghzaoui
((Traduit de l’arabe, l’original fait foi AW Hani))

Les événements du bassin minier (de Gafsa) ont pris une tournure inquiétante. Les forces de police ont tiré, à balles réelles, contre les manifestants dans la ville de Redeyef, dans la matinée de ce vendredi 6 juin 2008, faisant un mort , le jeune Hafnaoui Ben Ridha Hafnaoui Maghzaoui, âgé de 22 ans, ainsi que 26 blessés, parmi eux :
Bouali Khlayfi, Khaled Rahhali, Mohamed Achiri, Nizar Amaydi, Mohamed Tahar Ben Othman, Houcine Ben Mohamed, Ben Ali Degueche, Tarek Boudhiaf, Sami Karami, Mustapha Lachkham, Hachem Berrezg, Khaled Touati, Nidhal Amaydi, Houcine Aouled Amor, Habib Tabbabi, Chokri Ben Ahmed, Helmi Marzouki, Tarek Jeridi, Kamel Ben Mohamed et Ahmed Ahmadi Baccouch qui a été transporté à l’hôpital régional de Gafsa des suites de ses blessures par deux balles dans le dos.
Monsieur Ridha Hafnaoui Maghzaoui, le père de la victime, nous a affirmé que l’assassinat de son fils a eu lieu près de son domicile au vu et au su des citoyens, avant que le corps ne soit transporté par les manifestants au domicile puis é l’hôpital local de Redeyef, où le père a pu reconnaître le corps dans la morgue dudit hôpital.
La ville de Redeyef a vécu un état de terreur hier soir par des actes de barbarie perpétrés par les forces de l’ordre qui ont attaqué et saccagé de nombreux commerces, en dérobant des biens et surtout de l’argent.
Les événements continuent toujours jusqu’à la rédaction de ce communiqué. Les forces de police lancent des bombes lacrymogènes à l’intérieur des domiciles des citoyens et utilisent des canons à eau.
Liberté & Equité :
1-Présente ses condoléances à la famille du défunt Hafnaoui et souhaite le prompt rétablissement aux blessés.
2-Dénonce avec force l’usage des balles réelles contre des citoyens non armés et leur tirer de dos provoquant le décès d’un des leurs et des blessures pour un grand nombreux d’entre eux, pour la simple expression de leur protestation pacifique contre les opérations de pillage dont été victimes de nombreux citoyens.
3-Appelle à ouvrir une enquête et à sanctionner les donneurs d’ordre de l’usage des balles contre des citoyens non armés.

EGYPTE

Une "martyre du pain"
Dans un coin, un homme regarde la scène, enfoncé dans ses souvenirs. Hamid, 46 ans - il en fait 20 de plus - revient du pays des morts : "Même des voisins qui s’entendent bien se traitent de tout. C’est la guerre... Je n’aime pas être ici, khalas ! [allez, on s’en va !]" Le 9 avril, sa femme est morte, étouffée dans la bousculade. Amal avait 43 ans, quatre enfants et un billet de 1 livre égyptienne (12 centimes d’euro) dans la main pour son quota de 20 galettes.

Dans les journaux gouvernementaux, sa mort a été expédiée en une brève, rendue à ces banales catastrophes du quotidien. Pour les médias indépendants, Amal est devenue ce qu’elle est : une figure pathétique, une "martyre du pain". Un peu d’humanité piétinée, au matin du xxie siècle, dans une file d’attente pour du mauvais pain parfois coupé de sciure, tout juste bon à nourrir la volaille.

La faim, qu’on croyait confinée aux sables du désert, a resurgi dans le grouillement des mégalopoles, du Mexique au Sénégal, où, loin d’insurrections héroïques, des millions de vies misérables se sont soulevées parce qu’elles n’ont plus de quoi acheter la farine, le riz, la viande que leur arrache l’envol des prix. En Egypte, depuis le début de l’année, une quinzaine de personnes sont mortes, comme Amal, aux marches d’une boulangerie, en se battant pour du pain. "On n’avait pas vu ça depuis les mamelouks", bougonne Malek, le poing écrasé sur le Klaxon de son taxi déglingué en plein gymkhana dans les rues du Caire.

15 morts... A l’échelle d’un pays où la conduite automobile relève de la sélection naturelle, avec un taux de mortalité 25 fois supérieur à la moyenne mondiale, ce n’est rien. Mais, à l’échelle d’une civilisation où "eish" signifie aussi "la vie" et qui détient le record de consommation de pain (400 grammes par jour), c’est la fin du monde. Les enfants du Nil ont un lien nourricier, sacré, au pain. "Sa dimension symbolique, culturelle, est omniprésente, observe l’écrivain Ali Salem. Un proverbe dit : "On ne trahit pas le pain et le sel." Jamais on ne trompera celui avec qui on a partagé ces denrées sous son toit..."

Deuxième importatrice de blé du monde, l’Egypte a subi de plein fouet la flambée des cours mondiaux, et la foule n’a cessé de grossir devant ces boulangeries subventionnées, où la galette est dix fois moins chère que le pain normal. Comme dans ces magasins où des enseignes branlantes, « Produits subventionnés par l’Etat », s’accrochent au passé et voient de nouvelles hordes, médecins, professeurs ou ingénieurs, se jeter sur les sardines et l’huile bas de gamme. Si ces subventions héritées du socialisme à la Nasser sont un gouffre financier (16 % du PIB), elles sont aussi le matelas social ultime : 40 % des Egyptiens vivent avec 1,26 euro par jour.

C’était une semaine avant son décès. Le journal télévisé, sur une chaîne satellitaire, faisait son gros titre sur un "mort du pain" et Amal avait fondu en larmes. "Je ne pensais pas que c’était encore possible..." lâcha-t-elle. Ça l’est. Ce 9 avril, Amal se lève à l’aube, comme d’habitude, pour prier, laver, éplucher, accomplir les menues tâches de son existence obstinée. Et être au "four" à 7 heures. Car, depuis des jours, le pain manque. L’attente s’étire, interminable, comme ce matin. A 9 heures, il arrive, enfin. C’est la ruée. 300 personnes en fusion. "On était paniqué de ne pas en avoir", se souvient, en agitant ses bras dans tous les sens, Aicha, une voisine qui ne se nourrit quasiment plus que de patates. Sur la pointe des pieds, ce 9 avril, Amal n’arrive pas à attraper ses galettes. La foule tangue. Elle tombe. Se cogne la tête. S’évanouit. Les gens l’enjambent. Aicha parvient à la porter dans un tuk-tuk, une moto-taxi. Fonce à l’hôpital. "Pas de médecin ! peste-t-elle. Et l’ambulance est arrivée deux heures plus tard pour la transférer dans un hôpital mieux équipé... On venait de lui tirer la couverture sur le visage. Elle a crevé comme une chienne !"

"Le régime a pris peur sur le pain"
Le jour même, l’ancien gouverneur de la région a fait venir Hamid, le mari, dans son bureau grand comme un palais. Avant, l’un de ses affidés l’avait sondé. Qu’est-ce qui lui ferait plaisir, à Hamid ? Un permis de taxi. Bien. Mais, d’abord, il faudra souffrir poliment. Dire dans une lettre qu’Amal était malade des poumons. Et ne pas parler aux médias. Hamid a préféré regarder la mort dans les yeux. "Je n’ai pas cédé, murmure-t-il. Résultat, j’ai touché 200 livres [24 euros], l’équivalent de mon salaire de chauffeur de microbus, au lieu des 3 000 à 5 000 prévues et je n’ai pas eu le permis." 200 livres, une misère. "On m’a dédommagé comme pour une vache", dit-il. Depuis, Hamid a porté plainte auprès du tribunal de Mansourah, chef-lieu de la région, et se dit l’objet de "pressions importantes".

"Le régime a pris peur sur le pain, observe la sociologue Dalal Bizri. A cause des émeutes de la faim de 1977, qui avaient fait 70 morts. Un trou noir dans la mémoire collective. C’est pour ça que le gouvernement a réagi au quart de tour." Le président Moubarak a appelé à l’aide les boulangeries réservées à l’armée et ordonné l’ouverture de 500 kiosques pour calmer la situation. A l’ombre des pyramides se dresse l’un de ces préfabriqués installés en urgence. Et, aujourd’hui, la seule file d’attente à l’horizon est celle qui mène à la tombe de Kheops.

L’employé de la boulangerie explique, tout sourire : "Des fourgons de l’armée apportent 1 000 galettes toutes les demi-heures, de 7 à 14 heures." Il ouvre grand son registre : "Tout est détaillé : les entrées, les sorties. Avant, le client devait toujours arroser le boulanger pour avoir ses galettes... Et on n’était jamais sûr d’en avoir, parce qu’il revendait, comme beaucoup, la moitié de sa farine subventionnée au marché noir." Depuis, le boulanger cuit ses pains encadré de deux plantons.

A quelques mètres de là, des touristes partent à la conquête du désert sur des pur-sang, dépassant au galop un âne au flanc blessé qui tire une carriole remplie de mangeaille. Un jeune, cordial et désœuvré, s’approche : "Ça va mieux, oui, mais jusqu’à quand il va rester, le préfabriqué ?" Il se fend d’un rire amer : "Ici, il y a les riches, les pauvres et rien au milieu !" Il y a ceux qui profitent de la croissance annuelle de 7%, de la libéralisation, et les autres. "Ceux qui sont bons à bouffer la poussière !" Soudain, le jeune s’interrompt. "Il y a un problème, ici ?" demande un homme en galabeya noire, attiré là comme par une laisse invisible. "Mister Moubarak is a very good man !" Yes, very good. Indéboulonnable, aussi.

L’indéboulonnable Moubarak
En vingt-sept ans de règne, "Ramsès II", l’un de ses surnoms, a vu défiler quatre présidents américains, trois présidents français, huit Premiers ministres israéliens et trois rois saoudiens. Il a survécu à la guerre froide, à l’explosion de Tchernobyl et d’Internet, au 11 septembre. Et, ce 4 mai, il fêtait ses 80 ans, promis à l’immortalité par un éditorial du quotidien Akhbar el-Yom montrant en Une le raïs sur une plaine féconde, égrenant du blé : "Monsieur le Président, vous êtes notre destin et nous sommes le vôtre. A qui d’autre pouvons-nous nous adresser, dire nos rêves et nos espoirs, nous plaindre ?"

Se plaindre de la hausse du prix du panier alimentaire (+ 50 % depuis le début de l’année) et des salaires minables, c’est bien ce qu’avait décidé de faire, sur le site Internet Facebook, un groupe de 70 000 activistes, hérauts d’une contestation sociale inédite qui perle depuis trois ans des ouvriers aux médecins, en passant par les percepteurs. "En 2006, on a enregistré 222 arrêts de travail. En 2007, 1 000. Et depuis janvier, 800", signale le politologue Amr Choubaki. Le 6 avril, un premier appel à la grève générale avait déjà été lancé, invitant les gens à rester chez eux. Du jamais-vu en Egypte, régie depuis 1981 par l’"état d’urgence", qui proscrit les manifs. Et, ce 6 avril, Le Caire était bien moins encombré qu’à l’ordinaire, pendant qu’au Nord, dans la ville de Mahalla, bastion de la lutte ouvrière, la police ramenait des manifestants à la raison : 3 morts, 150 blessés, 250 arrestations.

Après quoi, Moubarak a sorti le chéquier, promettant 30 % d’augmentation aux fonctionnaires. Une largesse qui a contribué à l’échec de la grève du 4 mai - soutenue par les Frères musulmans, qui avaient fait preuve d’une étonnante discrétion sur la crise du pain... Elle peut bien être "invivable", la vie, comme dit Ahmed, professeur de lycée, il faut faire avec. La grève, c’est une volupté d’Occidental. "J’arrête de nourrir mes enfants, c’est ça ?" questionne-t-il, étourdi par l’augmentation, d’un jour à l’autre, de son trajet en microbus : de 0,75 livre à 1,25 livre.

Et Moubarak a beau ne pas être aimé, il reste le raïs... "C’est aussi ça, la civilité égyptienne, observe Dalal Bizri. Pas d’affrontement. Une façon d’absorber les conflits, de perpétuer les choses, tout en les modifiant par petites touches." Mais le malaise est profond. "La crise du pain ne fait que refléter l’aventure maudite du quotidien, ici", observe Amina Khairy, journaliste à Al-Hayat.

Chez Groppi, pâtisserie qui fut la plus célèbre du Moyen-Orient, les piliers gainés de marbre et la mosaïque des années 1930 ont mal vieilli et l’on y boit un thé pour rendre hommage à la splendeur passée. Attablé, Samer Soliman, professeur à l’Université américaine du Caire, soupire : "Nous vivons un affaiblissement sans précédent de l’Etat. Cet Etat si cher aux Egyptiens, le premier moderne de la région, est capté par les intérêts particuliers. Seules prévalent la logique sécuritaire du régime et sa survie."

Mais avec 1,3 million d’habitants de plus chaque année, la pression de la rue va s’accentuer. Il n’y a pas que des bouches à nourrir, il y a aussi des rêves. Hamid en avait un, juste un : "Bien élever nos enfants et marier nos filles." C’est pour ça qu’il voulait son permis de taxi. Pour gagner plus et payer les dots. A défaut, Hamid vendra la Peugeot 504, l’appartement miteux. Mais il paiera la dot, répète-t-il, en boucle. Il veut "avoir l’âme en paix". C’est l’ultime révolte du pauvre.

Flambée des prix, émeutes du pain, menaces de grève générale, le régime Moubarak n’a pas lésiné sur la répression pour mater une contestation sociale qui manque de relais politique.

Les Frères Musulmans et lutte des classes en Egypte

Comment peut-on comprendre la neutralité et la non-implication des Frères Musulmans dans les récentes grèves ouvrières en Egypte ?
D’abord, et depuis leur création dans les années 1920, les Frères Musulmans n’ont jamais été intéressés par les questions dites « sociales » et se situent à droite en matière de politique économique.

Pour eux, les ouvriers représentent plus une matière à propagande religieuse que des sujets sociopolitiques à part entière.

Ils ont, par exemple, approuve une loi récente sur les baux agricoles qui liquide la réforme agraire des années 1950 et permet aux propriétaires fonciers de récupérer leurs terres au détriment des paysans ;

ils ne se sont jamais opposes aux politiques de privatisation du secteur public mis en œuvre par le gouvernement depuis plus de vingt ans, la seule réserve qu’ils avaient émise concernait la vente à des investisseurs étrangers…

Les Frères Musulmans se sont donc toujours positionnes en matière économique dans le camp de l’économie capitaliste radoucie par quelque intervention sociale des pouvoirs publics pour alléger les malheurs des pauvres.

L’origine sociale des Frères Musulmans peut fournir une explication : issus des classes moyennes, comme leur fondateur Hassan Banna, les Frères Musulmans recrutent traditionnellement et majoritairement des cadres moyens et des étudiants de l’enseignement supérieur.

Cependant, la société égyptienne a connu ces dernières années des transformations radicales qui ont mis en avant l’urgence de la question sociale. En effet, les politiques de privatisation, de restructuration et de transformation économiques ont profondément déstabilisé la société egyptienne : effondrement des classes moyennes, paupérisation des ouvriers et paysans, accroissement du chômage et disparition des petits métiers qui permettaient la survie d’une importante partie des classes populaires.

Plus récemment, une inflation record et la flambée des prix des produits alimentaires et des loyers ont déclenché des mouvements de protestation et de revendication qui ont rassemblé, au-delà des ouvriers et des artisans, de larges secteurs d’employés et de salariés (enseignants, médecins, journalistes, juges).

Les Frères Musulmans se sont trouvés impliqués dans un mouvement qui touchait désormais les classes moyennes.

C’est ainsi que leur groupe parlementaire a participe à des discussions concernant la politique sociale au sein de l’assemblée nationale pendant les années 2000-2005 et plus récemment a des débats houleux sur les privatisations du secteur public, les revendications sociales et salariales, la gestion des administrations locales, les comptes des organismes sociaux, la flambée des prix des matières de première nécessité.

Signalons en outre qu’en 2006, les Frères Musulmans ont présenté pour la première fois de leur histoire des candidats aux élections syndicales ouvrières.

Pourtant, lors de la grève des ouvriers du textile de Al Mahallah al Koubra du 6 avril, les Frères Musulmans n’ont ni appelé ni participé à la grève, ni dénoncé la féroce répression policière consécutive.

Ils ont même choisi ce moment pour boycotter les élections municipales tandis que des centaines de leurs adhérents ont été (et sont toujours) détenus et, n’en doutons pas, torturés.

Alors, les Frères Musulmans, qui pourraient jouer un rôle dans l’organisation des mouvements de classe et de masse actuels, vont-ils réussir à tromper, ou à trahir, leur base sociale désormais embarquée dans le même naufrage avec les classes les plus déshéritées de la société égyptienne.

MAROC

Sidi Ifni est une petite ville portuaire située à 200 km environ d’Agadir. Longtemps sous domination espagnole, cette ville n’a été rétrocédée au Maroc qu’en 1969 (rappelons que le Protectorat sur le Maroc a pris officiellement fin en 1956). Depuis, cette ville fait partie du Maroc marginalisé et les populations exaspérées multiplient depuis plusieurs années les mobilisations afin d’avoir accès aux droits constitutionnelleme nt reconnus, aux services publics, à la mise sur pied d’une véritable politique économique et sociale permettant la résorption du chômage et le décollage économique de la région

Intervention musclée de la police contre des chômeurs dans le port de Sidi Ifni (sud-ouest)

Selon plusieurs témoignages, les forces de l’ordre se sont déployées en masse samedi au lever du jour dans le port de Sidi Ifni, au sud d’Agadir, dans le sud-ouest du pays. Une intervention musclée qui aurait fait des dizaines de blessés. Au moins une vingtaine de jeunes chômeurs qui bloquaient près de 90 camions de poissons ont été également interpellés.

Les jeunes chômeurs avaient participé à un tirage au sort la semaine dernière organisé par la municipalité qui souhaitait embaucher huit personnes. Après la proclamation des résultats, les candidats malheureux sont descendus dans la rue et ont décidé de bloquer le port en signe de protestation. Selon l’agence de presse officielle marocaine, les jeunes ont été violents et ont refusé toutes les médiations, d’où l’intervention des forces de l’ordre.
Le témoignage d’un habitant de Sidi Ifni

« Sincèrement, il y a eu quelques dépassements : des vols perpétrés par la police, pas de tirs de balles mais des coups de matraques sur la tête. »

SIDI IFNI (MAROC) EN ETAT DE SIEGE

Nous apprenons ce matin 7 juin 2008, que de nombreux militants d’Attac et d’autres organisations font face à une sauvage répression qui s’est abattue sur les habitants de cette petite ville du Sud [1] du Maroc. Nos contacts nous ont parlé de morts et la chaîne de télévision Al Jazeera a annoncé que quatre personnes étaient décédées. D’autres rumeurs font état d’un nombre plus important.

Depuis le 30 mai dernier, les habitants de Sidi Ifni manifestent jour et nuit, exaspérés par le clientélisme qui prévaut au sein de la municipalité lors de l’attribution des emplois publics, alors que le chômage est endémique dans la région et que l’ouverture d’un nouveau port qui fournirait de l’emploi, tarde à se concrétiser.

Aussi, c’est d’abord vers le port que se sont dirigés les manifestants, qui y ont installé un campement afin de bloquer la sortie des camions frigorifiques de transport de poisson. Jour après jour, les manifestations se multiplient. Ainsi, une manifestation de plus de 200 femmes a fait la jonction avec les jeunes et ce sont plus de 4000 manifestants qui se sont rassemblés devant la municipalité jusqu’à obtenir l’ouverture, le 2 juin, de négociations avec les autorités locales et régionales. Une délégation a été constituée qui a revendiqué tout à la fois des mesures immédiates permettant aux familles de subvenir à leurs besoins, la finalisation de projets de développement économique (port et zone industrielle) et le respect des droits et de la dignité des travailleurs du port.

Les autorités ont d’abord criminalisé le mouvement, taxé d’illégalité et de manipulation extérieure, mais se sont finalement engagées à ouvrir une conserverie de poisson dans un délai de 45 jours et d’ouvrir l’accès aux emplois de la Solidarité nationale dans un délai de deux mois.

Mais les habitants, peu satisfaits des résultats des négociations et déjà échaudés (depuis 2005) par de multiples promesses non tenues, ont maintenu le blocus et la mobilisation

A quatre heures du matin, le 7 juin 2008, les forces de l’ordre ont violemment dispersé le piquet devant le port et effectué des descentes dans les maisons, opérant plusieurs dizaines d’arrestations, volant et saccageant les maisons, tandis que des tirs étaient entendus dans les rues.

Immédiatement, une manifestation s’est regroupée pour réclamer la libération des détenus et la ville est maintenant quadrillée par les forces de police qui continuent à rechercher les « meneurs », dont certains de nos militants d’Attac, à opérer des arrestations et à prendre en otage des membres de la famille des personnes en fuite.

Maroc :Chômage, misère, injustice, incertitude.

Les jeunes désespèrent et se révoltent. Hier Laâyoune et Agdz,
aujourd’hui Beni Tadjit. Et demain....Quatre jours d’émeutes à Beni Tadjit, province de Figuig

Alerte à l’émeute, à Beni Tadjit,
province de Figuig, du 8 au 12
juin. Une rixe qui a débouché
sur mort d’homme a été un déclen-
cheur d’émeutes entre militaires et
jeunes civils en furie.
Yacine Othmani a 16 ans. Il est orphe-
lin de père, il va au collège, mais il tra-
vaille aussi pour subvenir aux besoins
de sa mère et de ses frères et sœurs.
Une caserne a remplacé le petit poste
militaire depuis la découverte de pétro-
le à Talssint, à 30 km de là. Avant, on
ne connaissait Beni Tadjit que de nom,
la météo nationale y a une station.
Autrement, de ce côté du Maroc, le
Nord-Ouest, les plus renseignés disent
que Beni Tadjit, ça doit être entre
Missour et Figuig. Mais où exacte-
ment ? Il faudra que Yacine soit poi-
gnardé par un soldat pour que l’on
sorte les cartes du Maroc. Qu’on scrute
tous les villages de la partie Sud-Est du
pays. Beni Tadjit est là, à près de 60 km
de la route nationale, au tiers de l’iti-
néraire Errachidia-Figuig

Désert des Tartares

Vendredi soir, le 8 juin, une histoire de
filles a opposé Yacine à un militaire, la
bagarre est violente, le soldat plonge
un couteau dans le ventre de Yacine. Il
prend la fuite. Une ambulance emporte
Yacine grièvement blessé à Bouarfa,
soit à plus de 300 km de là. Errachidia
est à une centaine de kilomètres, mais
c’est une autre province, alors on ne
sait si l’ambulancier peu avisé, a esti-
mé que les soins dans un hôpital d’une
autre province poseraient un problème,
on ne sait pas non plus qui a donné des
consignes pour l’itinéraire de l’ambu-
lance. L’hôpital d’Errachidia n’est ni
plus ni moins équipé que celui de Bouarfa. Et à ce qu’on sait, ils ne dis-
posent certainement pas des équipe-
ments pour faire face à une telle
urgence. Une région vaste comme la
Belgique ne dispose pas d’un seul
hôpital. Quant aux habitants de Beni
Tadjit, on ne sait pas qui les soigne ni
comment.
Yacine meurt avant l’arrivée à Bouarfa,
cette autre ville oubliée.

L’ennui
Samedi matin, les jeunes amis appren-
nent le décès de Yacine et entrent en
ébullition. Ils sont de plus en plus
nombreux. Ils crient et protestent, ils
sont immédiatement rejoints par des
dizaines de jeunes scandalisés par le
meurtre, surtout qu’ils ne savent même
pas ce qu’est devenu le soldat qui a
tué. Les mécontents sont maintenant
dans la rue, de plus en plus nombreux,
la colère publique collective est deve-
nue une expression générale d’un
mécontentement radical, les jeunes
protestent contre un système qui les a
transformés en citoyens de quatrième
zone.
La cohorte, plusieurs centaines de per-
sonnes selon des témoins, décide de
venger Yacine. Une expédition est
organisée, la caserne est attaquée par
une nuée de jeunes en furie, les mai-
sons du village occupées par des mili-
taires aussi sont assaillies, panique
totale dans un village généralement
avachi. Un village dont la seule ani-
mation consiste en beuveries avec des
femmes hospitalières. L’installation
d’une caserne devrait être toujours sui-
vie de l’ouverture d’un bousbir, c’est
l’ordre des choses, il n’y a pas à être
hypocrite. Les jeunes appelés sont des
hommes, ils ont des droits, qui a
jamais pensé qu’on pouvait impuné-
ment faire défiler de jeunes et belles
donzelles devant des soldats en
manque grave ? Le résultat, on l’a vu
avec la mort de Yacine.
Hélicoptères
Quand son corps est ramené à Beni
Tadjit, samedi à 17 heures, on est passé
du mouvement d’humeur à la révolte
ouverte. On en veut aux militaires, au
médecin, à l’hôpital, aux autorités
locales, à tout et n’importe quoi.
Le calme revient dimanche matin. Le
jeune Yacine est inhumé, une déléga-
tion des manifestants, accompagnés
d’un représentant de la famille de
Yacine se présente aux autorités
locales et fait part de leurs exigences :
établissement d’un PV conforme aux
faits tels qu’ils se sont exactement
déroulés, indemnisation de la famille
du défunt, octroi d’autorisations d’ex-
ploitation diverses pour permettre à la
famille de Yacine de subvenir à ses
besoins, interdiction aux militaires
célibataires de résider hors de la
caserne.
Lundi matin, des incidents légers
opposent toujours jeunes civils et
jeunes militaires. C’est alors que l’irré-
parable advient, une cinquantaine de
militaires décident de mener une expé-
dition punitive contre les maisons de
civils, vandalisme, violence, injures
obscènes. Un autre gamin de moins de
16 ans est grièvement blessé et reste
affalé dans une mare de sang, des
femmes sont molestées. Où était le
commandant de la caserne lorsque ses
hommes se sont érigés en autorité
habilitée à brutaliser les populations ?
La population réagit comme elle peut,
les accrochages se multiplient, et deux
hélicoptères survolent la ville. Un sit in
est organisé devant le caïdat. Le gou-
verneur de la province Mustapha Aït
Mouma n’arrive que le lundi à 16
heures 30.Curieux.
Mais pas inexplicable. Dans le Désert
des Tartares, la vie humaine ne vaut
pas un clou, et les populations sont
fatalement abruties. C’est comme ça
qu’on a vu ces régions déshéritées du
Maroc depuis la nuit des temps. L’Etat
dans le sens moderne n’existe que par
des infrastructures sanitaires et
sociales rudimentaires, la poste, la per-
ception, la gendarmerie et le caïdat.
Idéal pour la sieste des fonctionnaires
définitivement blasés. Il est patent
qu’on n’a recours à la population que
lors des élections, puis la torpeur se
réinstalle.
M. Aït Mouma réunit les membres de
la société civile, les notables et l’élite
du village. Un geste d’apaisement
bienvenu, un engagement à prendre
l’affaire en mains. Le représentant de
l’Etat assure aux visiteurs que justice
serait faite et il demande aux jeunes de
retrouver leur calme.
Mardi matin, la ville retrouve son visa-
ge habituel, peu à peu, la vie reprend
ses droits, mais la vigilance des habi-
tants n’est pas endormie. Ils ont appris
que Sa Majesté le Roi avait suivi le
drame et qu’il avait pris des mesures
pour réinstaller la sérénité à Beni
Tadjit.
En effet, ce même mardi matin, Ahmed
Midaoui, ministre de l’Intérieur, les
généraux Housni Benslimane, com-
mandant en chef de la Gendarmerie
royale, Abdelhak Kadiri, chef des ser-
vices extérieurs marocains et
Abdelhafid Benhachem, chef de la
Sûreté nationale sont dépêchés par Sa
Majesté le Roi à Beni Tadjit. Ils ont
pour mission de rendre compte des
faits, et de la situation exacte dans la
région, de rétablir la tranquillité des
habitants, d’écouter leurs problèmes,
leurs revendications.
L’Etat de droit ressurgit comme par
enchantement. Des garanties sont don-
nées aux habitants, justice sera faite et
la délégation envoyée par Sa Majesté
présente ses condoléances à la famille
éprouvée. Des militaires sont immédia-
tement mis aux arrêts et présentés au
Tribunal militaire de Rabat, d’autres
écopent d’une mutation disciplinaire
dans la région de Errachidia.
Vandalisme
La délégation dépêchée par Sa Majesté
s’est réunie avec les notables, les
parents de manifestants, les habitants,
les représentants des partis politiques,
il y a unanimité, il est urgent de régler
définitivement le problème qui a mis le
feu aux poudres, mais il s’agit surtout
de reconsidérer la situation de la jeu-
nesse perdue de Beni Tadjit, entre chô-
mage
et
enfers
artificiels.
Indubitablement, c’est une leçon pour
tout le monde.
Il n’y a pas qu’en Algérie qu’une par-
tie du pays est exclue, désœuvrée,
désespérée, blasée, sans horizon, sans
avenir. La découverte de pétrole à
Talssint a fait exploser la démographie
et le tissu social de la région, une ruée
vers l’or suscitée par l’engouement
trompeur d’un gisement pétrolier qui
donnerait du travail à toute la jeunes-
se de la région a révolutionné les men-
talités, pas toujours en bien.
Dès lors, l’ordre et la paix véritable
règnent de nouveau sur la ville. Les
premières mesures sont vite prises, les
sanctions s’abattent sur les hommes
qui ont failli à leur devoir.
Le village est à l’image du Maroc
décentré, stérile, ingrat et aussi loin-
tain dans l’esprit de l’administration
que le Désert des Tartares. Pas d’eau,
pas de cultures, pas d’entreprise, le
chômage, 45 ° C l’été, 10 au-dessous de
zéro, l’hiver. Il y a peu d’argent qui cir-
cule, et peu de raisons de le faire chan-
ger de poche, on achète le moins pos-
sible et d’ailleurs, on arrive à peine à
subvenir au minimum vital.
Stérilité
Peu d’infrastructures, toutes défi-
cientes, un enclavement étouffant au
milieu d’une steppe hostile et de mon-
tagnes pelées, quelques moutons, c’est
Beni Tadjit et des Béni Tadjit, il y en a
des centaines au Maroc. Un rien peut
les faire basculer dans l’expression
d’une révolte diffuse, mais violente
contre l’oubli, l’isolement, le chômage
et la misère.
À Beni Tadjit, ce n’était pas une histoi-
re entre militaires et civils, le jeune
Yacine a été assassiné pour un motif
crapuleux, si l’on avait agi immédiate-
ment, le drame des 4 jours de troubles
n’aurait pas éclaté. Mais à quelque
chose malheur est bon, il faut tirer une
leçon de cette épreuve, nous savons
tous ce qui reste à faire pour qu’un
jour Ouezzane, Ben Guérir ou Bouarfa
ne s’embrasent pas.
Rabat le 13/6/2008 COMMUNIQUE relatif à la répression du sit-in de solidarité organisé par la coordination locale de RABAT pour la défense des libertés publiques LE 13 juin 2008 la Coordination Locale de RABAT pour la Défense des Libertés Publiques (dont fait partie la section de l’AMDH* rabat) a projeté d’organiser un sit-in de solidarité avec les citoyens/nes de la ville de SIDI IFNI qui ont été l’objet d’une féroce répression les 7 et 8 juin 2008. Dès leur arrivée sur le lieu du sit-in les manifestants/ tes ont trouvé un déploiement important des forces auxiliaires qui ont tenté d’empêcher les militants/tes d’accéder au lieu du sit-in. Mais ces derniers ont insisté pour tenir leur sit-in. Un officier a contacté des organisateurs pour leur signifier que le sit-in est interdit du fait qu’il n’est pas autorisé mais les militants lui ont rétorqué qu’un sit-in n’a pas besoin d’autorisation et qu’un tribunal a statué sur ce fait ; l’officier, embarrassé, a rétorqué que malgré tout ils ont des instructions pour empêcher le sit-in de se tenir ( c’est dire qu’au MAROC les instructions priment sur l’état de droits !!!!) Alors que des militants/tes s’apprêtaient à déployer les banderoles et à scander des slogans, les officiers ont donné l’ordre de charger les manifestants et de leur arracher les banderoles. Les forces auxiliaires ont commencé alors à frapper, à bousculer, à piétiner les manifestants et à les disperser violemment ; deux militants ont été évacués sur l’hôpital AVICENNES. IL s’agit de RABEA BOUZIDI (membre de la section de l’AMDH RABAT) qui s’est cramponnée à une banderole et qui a été violemment tabassée et d’ADIB ADESSLAM président de la section AMDH de RABAT ; ce dernier souffre non seulement de traumatismes multiples mais il a reçu un coup entre les jambes qui aurait pu lui être fatal. Malgré cette terreur les militants ont tenu à continuer le sit-in, à scander des slogans de solidarité avec les habitants/tes de SIDI IFNI ; plusieurs ont été malmenés comme AMINE ABDELHAMID, ABDELILAH BENABDESSLAM (tous deux vices présidente de l’AMDH) ainsi que ABDERRAZAK IDRISSI et NAOUFAL ABDELMOUMNI deux membres de la section AMDH de RABAT. L’intervention violente des forces auxiliaires a eu pour effet de scinder la manifestation en deux parties : une est restée sur les lieux du sit in l’autre est descendue l’avenue ALLAL BENABDELLAH poursuivie par les forces de répression. Les militants/tes n’ont cessé de scander des slogans de solidarité malgré les coups qui pleuvaient de partout. La férocité de la répression n’a eu d’égal que le courage et la ténacité des militants/tes qui ont tenu à manifester leur solidarité aux habitants de SIDI IFNI et à exprimer leur attachement à un MAROC de droits où le droit est constamment bafoué par l’ETAT lui-même. Malgré les blessures, malgré la répression sauvage, les militants/tes ont achevé leur sit-in de solidarité ; ils/elles ont montré qu’un droit ne s’octroie pas, il s’arrache. *AMDH : Association Marocaine des Droits Humains Voir les photos dans le lien ci-joint : http://www.dailymot ion.com/adib16/ video/9696030 <http://www.dailymot> كلمة الوقفة الاحتجاجية تحية لكل الحاضرين الملبين لدعوة المبادرة المحلية للدفاع عن الحريات الأساسية للتضامن مع مواطنات ومواطني مدينة سيدي افني باسم لجنة متابعة مبادرة الدفاع عن الحريات الأساسية نؤكد إدانتنا الصارخة للممارسات القمعية الهمجية التي عرفتها ساكنة مدينة سيدي افني وقبائل آيت باعمران منذ صبيحة يوم السبت 7 يونيو 2008، فقد سمعنا وشاهدنا صور الدمار والقمع الهمجي على المنازل والنساء والأطفال والشباب كما لو أن المدينة قد تعرضت لهجوم عدو أجنبي يحمل من الأحقاد ما يجعله يستبيح حرمات البيوت والنساء والأموال والحق في السلامة البدنية. إن القمع الهمجي الذي تم تسليطه على ساكنة مدينة سيدي افني لا يمكن أن نجد له أي مسوغ قانوني أو سياسي، بل أن نتائج الهجوم الحاصل تؤكد شيئا واحدا وهو أن القوات التي مارست القمع عبارة عن جماعة من المنحرفين الخارجين عن القانون، لذلك علينا كحقوقيين وكديمقراطيين أن نجرم مثل تلك الأفعال وأن لا نسمح بتكرارها وإلا أصبحت ممارسات جائزة تطلق يد السلطة في حرياتنا وأرواحنا كيفما شاءت. لكن المسؤولية المباشرة عن الأفعال الإجرامية الممارسة في سيدي افني إن كانت تلقى على قوات القمع وعلى الجنرالات الذين أصدروا تعليمات تؤدي إلى استباحة أموال وأجساد وكرامة المواطنات والمواطنين وحماية مرتكبي هذه الأفعال، فلا يجب أن تحجب عنا عمق الخلل السياسي والدستوري ولا مسؤولية السلطات التنفيذية والتشريعية والقضائية، فنحن كمواطنات وكمواطنين نصبح رهينة هذه الاختلالات الخطيرة وعمق اللامسؤولية ونتعرض لوقعها على عدة مستويات حيث نلاحظ أهمها فيما يلي : - ممارسة القمع الاقتصادي عبر الغلاء وتدهور الخدمات العمومية وتجميد الأجور وعبر انتشار البطالة حتى بين حملة الشهادات المعطلين وعبر انتفاء شروط العمل في القطاعين العام والخاص مما أدى إلى أحداث خطيرة كمحرقة روزامور وعمارة القنيطرة؛ - ممارسة القمع السياسي عبر الاستمرار في إسناد المسؤولية الشكلية لأشخاص قاطعهم 83 % من أبناء الشعب المغربي انتخابيا وإسناد المسؤولية الفعلية لوزارة الداخلية والاستعلامات العامة وباقي قوى القمع وحماية هذه الممارسات القمعية غير قانونية وتسخير القضاء لتمرير هذه الممارسات. إذن فالمسؤولية هي سياسية قبل كل شيء، وعلى السلطات العمومية أن تتحمل مسؤوليتها فيما يقع، فأحداث مدينة صفرو وأحداث الراشدية ومراكش وجرادة ثم أحداث سيدي افني اليوم لم تكن لتقع لو كانت هناك مسؤولية ومحاسبة ورد الاعتبار، ثم ان المسؤولية هي قضائية ثانيا وذلك باعتماد مبدأ التجريم للأفعال الخارجة عن القانون التي يمارسها المسئولون وكذا اعتماد مبدأ عدم الإفلات من العقاب، فاعتماد مثل هذه المبادئ قد تجنب على الأقل تحمل المسؤولية من طرف أشخاص اشتهروا بانتهاكاتهم الجسيمة لحقوق الإنسان كما هو الشأن بالنسبة للمفتش العام للقوات المساعدة الجنرال حميدو العنيكري بطل أحداث سيدي افني، ففي 15 يونيو من السنة الماضية أعطى هذا الشخص أوامره لتكسير أضلاع المدافعين عن حقوق الإنسان أثناء وقفة سلمية أمام البرلمان كما يفعلون اليوم بنا، ورغم أن الجمعية المغربية لحقوق الإنسان رفعت دعوة قضائية في الموضوع إلى أن القاضي المسؤول عن القضية أمر بحفظها وهو ما يؤكد تواطؤ مكشوف بين السلطتين التنفيذية والقضائية وغياب حياد الجهاز القضائي. إن لجنة متابعة مبادرة الدفاع عن الحريات الأساسية، إذ تتابع بقلق شديد ما حدث بسيدي افني، تعبر باسم جميع المكونات الحاضرة معنا في هذه الوقفة الاحتجاجية عن : Ø ادانتها للعنف الذي مورس في حق سكان مدينة سيدي إفني و الذي لا يمكن تبريره بضرورة فض اعتصام سلمي ؛ Ø مطالبتها بمحاسبة كل المسئولين عن الأفعال المتنافية مع حقوق الإنسان كما هي منصوص عليها في المواثيق و الاتفاقيات الدولية؛ Ø مطالبتها بإطلاق سراح المعتقلين ضحايا القمع الهمجي وكذا معتقلي جامعة القاضي عياض بمراكش وشباب الرشيدية وجرادة وطلبة مكناس مؤخرا؛ Ø استنكارها محاولات مختلف أجهزة الدولة التعتيم على ما جرى في مدينة سيدي إفني يوم 07 يونيو 2008 و الاستخفاف به؛ Ø تأكيدها على ضرورة الاستجابة للمطالب الاجتماعية المشروعة لأبناء المنطقة؛ Ø مطالبتها برفع التهميش و العزلة عن المنطقة؛ Ø دعوتها كافة المناضلات والمناضلين للانخراط في القافلتين التضامنيتين مع مواطنات ومواطني مدينة سيدي افني يوم الأحد 15 يونيو ويوم الأحد 22 يونيو 2008 Ø وفي الأخير وباسمكم جميعا نحيي المواطنات والمواطنين بسيدي افني والقرى المجاورة على روح النضال والصمود والتضحية التي أبانوا عنها في مواجهة التهميش والقمع ونجدد لهم دعمنا ومساندتنا لنضالهم المشروع. أنظر الصور في الرابط التالي : http://www.dailymot ion.com/adib16/ video/9696030 <http://www.dailymot>

ALGERIE

Les 28 et 29 et 30 mai 2008, de violentes émeutes ont éclaté dans la seconde ville d’Algérie, Oran. La relégation en seconde division du club de football de la ville, le MCO, a été le détonateur de l’explosion d’une colère nourrie par le chômage, la misère et la malvie. Les jeunes des différents quartiers, dont certains étaient encagoulés, s’en sont pris à plusieurs édifices publics, dont des agences bancaires. 70 policiers ont été blessés et 157 émeutiers ont été arrêtés. 84 personnes ont été gravement blessées.La population a été sommée de rester chez elle pendant que les affrontements éclataient dans toute la ville. Tous les magasins de la capitale de l’ouest algérien ont baissé rideau pendant 48h. C’est la plus grosse émeute depuis celle octobre 1988, qui avait emporté le système du parti unique, il y a tout juste vingt ans.Très vite, le ministère de l’Intérieur algérien s’est interrogé sur une éventuelle complicitéde ces personnes avec « d’autres parties étrangères ». La thèse du complot de l’étranger, inusable thème de propagande en Algérie, a refait surface, d’autant que d’autres émeutes se déroulaient dans une partie du pays, à Berriane.Des analystes, proches du pouvoir, ont invoqué l’irresponsabilité, l’attitude de victimes adoptée par la jeunesse, placée en situation de consommateurs, et non de citoyens. Ces observateurs ont réclamé moins de clientélisme d’Etat, et plus de responsabilité avec des valeurs morales transmises par l’école

Mais d’autres explications peuvent être avancées pour appréhender cette situation qui a vu des jeunes d’à peine 15 ans se lancer dans des émeutes.

DansLe Quotidien d’Oran, on peut lire : « Ce qui se passe dans notre pays est la remise en cause d’un système qui a dépossédé le peuple de son Etat, le privant du droit de citoyenneté. Ses désillusions sont amères et la colère à fleur de peau ».

Dans le même journal, Kamel Daoud écrit : « La Réconciliation nationale (il s’agit de l’amnistie ayant permis aux islamistes armés de réintégrer leurs vie antérieure) a « marché » pour les adultes pas pour leurs enfants. Elle est donc là, la génération de ceux qui sont nés durant les années 1990. Les enfants d’une guerre n’étant jamais des enfants, il ne faut pas s’étonner, aujourd’hui, de les voir nous revenir sous la forme d’une monstruosité, la nôtre. On a cru que l’on pouvait clore la décennie avec un référendum, une réconciliation entre survivants et en payant les plus récalcitrants. C’est donc faux. Pour les enfants des années 90, rien n’a donc été fait, ni narration assumée de l’histoire sale de cette époque, ni prise en charge pour leur reconstruire un univers habitable, ni rien qui puisse ressembler à une guérison. On peut toujours traficoter une réconciliation entre adultes, mais tout le monde sait que les enfants sont perspicaces, devinent le mensonge et savent le contourner ».

Le 31mai dans le quotidien El-Watan Chawki Amari note, sous le titre « Peuple sourd, Etat muet ». « Etrangement, le président de la République reste silencieux, absent, muet, comme non concerné par la situation, lui qui ne s’est pas adressé à son peuple depuis très longtemps ».

Silence du Président de la République algérienne, crise de la réconciliation nationale et résurgence de violence venant d’une jeunesse amnésique, mal vivre de la population et difficultés économiques, toutes ces raisons peuvent, bien sûr, être évoquer. A quoi, il faut ajouter celle des libertés publiques. Car au moment même où se développaient les émeutes de la jeunesse à Oran, se déroulait un autre événement qui allait davantage retenir l’attention des médias internationaux : l’arrestation de Habiba Kouider, interpellée la veille des émeutes, le mardi 27 mai. Cette jeune femme a comparu devant un tribunal pour « prêche d’un culte non musulman sans autorisation ». Elle avait été arrêtée dans un autobus en possession d’une dizaine de bibles. Depuis Février 2006 l’exercice d’un culte est conditionné à l’obtention d’une autorisation en Algérie, et les persécutions de Chrétiens se sont multipliées.

A ce propos, et concernant ce dernier fait, il faut signaler le signe d’espoir qu’est « l’appel à la tolérance et aux respects des libertés », publié par un groupe d’intellectuels algériens. Cet appel a recueilli plus de 2500 signatures. Dépassant leurs divergences, ils ont dénoncé les violations des libertés démocratiques, réaffirmé le droit de chacun de pratiquer le culte de son choix, ou de ne pas pratiquer, proclamant ainsi cette farouche volonté de vivre ensemble, dans le respect de chacun. Des dizaines de personnalités maghrébines, françaises et européennes ont soutenu cette initiative faisant de Habiba un symbole de courage et de liberté.

Il y a plus qu’une coïncidence de date entre l’émeutes des jeunes d’Oran et le procès de Habiba Kouider, car dans les deux cas il en va de l’espérance de vivre dans une société plurielle, et pouvant donner, à tous, espoir dans l’avenir. L’émeute d’Oran nous dit que 20 ans après octobre 1988, la question des espérances démocratiques reste toujours à l’ordre du jour en Algérie.

Algérie. Retour des émeutes

Depuis plusieurs mois, des émeutes secouent les villes d’Algérie. Dernières en date, à Oran, au début de la semaine. À l’origine des violences, des motifs divers qui font craindre un embrasement.De notre correspondant en Algérie. Lundi et mardi derniers, à Oran, la métropole de l’ouest algérien, des manifestants, en grande majorité des jeunes issus des quartiers populaires où les conditions de vie sont difficiles, ont pillé des magasins, saccagé des voitures et affronté les forces de l’ordre. La police a aussitôt arrêté près de 200 personnes, dont 28 mineurs.
Déclenchement soudain
Les émeutes avaient éclaté quelques minutes après l’annonce de la relégation en deuxième division du championnat national de football du MCO (Mouloudia Club d’Oran). Ces violences avaient été précédées le 16 mai par des affrontements sanglants entre des Arabes et des Berbères à Berriane dans la région de Ghardaïa, au sud du pays. Ces affrontements, qui avaient fait deux morts, constituaient les premières violences intercommunautaires en Algérie. Les villes de Chlef, dans l’ouest, et d’El Harrach, dans la banlieue est d’Alger, ont connu également des incidents, le mois dernier.
Des raisons multiples
Désormais, il suffit d’une petite étincelle pour provoquer des émeutes, souvent meurtrières. Les facteurs déclencheurs sont nombreux : mal de vivre dans les cités populaires, chômage (18 % de la population), incapacité des autorités à améliorer les conditions de vie des habitants malgré des recettes pétrolières records (les revenus pétroliers devraient atteindre 81 milliards de dollars en 2008), corruption généralisée, etc. Au-delà des explications, les Algériens et les Algériennes s’inquiètent sérieusement de la prolifération des émeutes urbaines : l’Algérie a enregistré en moyenne deux à trois émeutes par jour ces derniers mois, selon un haut responsable qui requiert l’anonymat. La prolifération des violences sociales s’ajoute à l’activisme d’islamistes armés qui multiplient les attentats. Deux civils ont été tués jeudi à Tizi-Ouzou, en Kabylie, par un groupe armé. La chute du pouvoir d’achat et le silence étrange des autorités aggravent le climat d’incertitude et de tension qui règne actuellement sur l’Algérie. « Si ce n’est pas le terrorisme, ce sont les émeutes urbaines. Cette situation est vraiment intenable », remarque un Algérois.
Vingt ans après
L’embrasement du pays est redouté par de nombreuses personnes qui craignent des émeutes à grande échelle comme celles qui ont endeuillé le pays, le 5 octobre 1988. Elles avaient fait des centaines de morts et mis fin à trente années de règne du parti unique. Les réformes économiques et politiques, qui ont suivi, n’ont pas réussi à améliorer la situation économique et sociale des Algériens.

INDONESIE

Les manifestations se multiplient en Indonésie contre le pétrole cher
28 mai 08

JAKARTA (AFP) — Les manifestations se multiplient en Indonésie depuis l’annonce vendredi d’une hausse de près de 30% des carburants en raison de la réduction des subventions publiques, touchant de plein fouet les plus pauvres déjà victimes de l’augmentation des prix des produits alimentaires.

Devant la montée du mécontentement, le président Susilo Bambang Yudhoyono a décidé lundi de reporter un déplacement en Europe prévu début juin afin officiellement de "se concentrer sur les problèmes économiques et le développement du pays", a indiqué son porte-parole.

Le même jour, le président a défendu sa décision de réduire les subventions sur l’essence, visant à alléger le fardeau sur le budget, estimant qu’il s’agit de "la solution la plus responsable pour sauver notre économie et protéger notre peuple".

Dans ce contexte tendu, le ministre de l’Energie, Purnomo Yusgiantoro, a annoncé mercredi que l’Indonésie allait se retirer de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). L’Indonésie, dont la production de pétrole a décliné depuis 1995, est devenue importateur net, alourdissant d’autant sa facture énergétique.

Les manifestations de protestation, qui avaient débuté la semaine dernière, se sont poursuivies cette semaine.

Au moins deux manifestants ont été arrêtés mardi alors qu’une trentaine d’entre eux jetaient des pierres sur la police, au cours d’une manifestation à l’Université de Makassar, dans la province de Sulawesi du Sud.

D’autres manifestations ont éclaté sur l’île de Sumatra, où des étudiants en colère ont tenté sans succès de braver des barrages policiers pour bloquer le convoi du vice-président Jusuf Kalla.

A Surabaya, deuxième plus grande ville du pays, des centaines d’étudiants et de pêcheurs ont bloqué une autoroute et intercepté un camion qui transportait du kérosène, selon le site d’informations Detikcom.

Mardi, à Jakarta, des étudiants se sont de nouveau réunis devant un commissariat de police pour réclamer la libération de 34 d’entre eux interpellés samedi lors de heurts avec les forces de l’ordre.

Des avocats ont par ailleurs engagé devant la justice une action collective contre le président "au nom du peuple", pour obtenir des millions de dollars afin de compenser la hausse du carburant.

Pour les Indonésiens, la hausse des carburants ne concerne pas uniquement les transports. Le pétrole domestique (ou pétrole lampant) est une source d’énergie très répandue, utilisée par les foyers les plus pauvres pour s’éclairer et cuisiner. Des foyers pauvres qui sont également touchés par la forte hausse récente du prix des produits alimentaires, notamment le riz.

L’Indonésie, quatrième pays le plus peuplé de la planète, subventionne massivement la vente de carburants et dépense une part très importante de son budget à maintenir l’essence à un prix artificiellement bas.

Avant la hausse de 33,33%, un litre d’essence subventionnée s’achetait à seulement 4.500 roupies (un demi-dollar). Or le pays est importateur net de pétrole. L’Etat comble la différence entre les cours du baril et le prix à la pompe. Le litre d’essence subventionnée coûte désormais 6.000 roupies.

Il s’agit de la troisième hausse décidée par le président Yudhoyono depuis son élection en 2004. La dernière hausse de 126% en 2005 avait déjà entraîné des manifestations, mais qui n’avaient pas duré.

Pour compenser l’augmentation, le gouvernement veut distribuer 1,5 milliard de dollars d’allocations au bénéfice des plus pauvres.

Les prix du pétrole brut ont été multipliés par six en six ans, passant de 20 dollars début 2002 à New York, à un plus haut de 135 dollars jeudi dernier.

suite à venir ...

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