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Une revendication juste que seule la classe ouvrière peut porter dans la protestation des "gilets jaunes" : Abolition de tous les impôts indirects !

vendredi 16 novembre 2018, par Robert Paris

La journée d’action des « gilets jaune » du samedi 17 novembre se présente comme une protestation contre les taxes qui rendent chers les carburants. Ces taxes sont des impôts indirects, comme la plus connue d’entre elles, la TVA.

Les débats autour de la préparation de cette journée devraient être l’occasion pour l’extrême gauche de remettre en avant la revendication : abolition de tous les impôts indirects. Or des organisations comme LO et le NPA ne la mettent plus en avant.

Cette revendication est aussi ancienne que le mouvement ouvrier :
« L’impôt saigne le malheureux » entend-on dans un des couplets de l’internationale.

Le programme du Parti Ouvrier Français (1882), affirmait dans son article 12 de la partie économique :

Abolition de tous les impôts indirects et transformation de tous les impôts directs en un impôt progressif sur les revenus dépassant 3.000 francs.

Les Considérants de ce programme rappellent même que cette revendication fut celle de la bourgeoisie révolutionnaire :

La bourgeoisie d’avant 1789, concourant pour sa bonne part aux dépenses nécessitées par la protection des biens de la noblesse, réclamait l’abolition des impôts indirects ; devenue classe régnante, elle les maintient parce qu’ils lui permettent de se décharger sur la classe ouvrière, d’une grande partie des dépenses qu’exige la conservation de ses biens. (...) L’abolition des impôts indirects et l’établissement de l’impôt progressif réduiraient sûrement le prix des vivres.

Le programme de Gotha (1875) de la social-démocratie allemande reprend cette revendication économique, comme faisant partie d’un programme minimum, compatible avec le capitalisme :

Le Parti ouvrier socialiste d’Allemagne réclame, sous le régime social actuel :
1.(...)
2. Un impôt unique et progressif sur le revenu pour l’État et les communes, à la place de tous les impôts indirects, spécialement de ceux qui pèsent sur le peuple.

Relisons ce qu’écrivait un parti d’extrême gauche, la LCR, en 1972. A quelques mises à jours près, il pourrait constituer le texte d’un tract pour des militants ouvriers désireux d’intervenir dans la journée de protestation du 17 novembre, mais ce n’est pas le NPA (l’héritier de la LCR) qui le fera, voir plus bas :

Contre la fiscalité des accapareurs

La fiscalité est aussi une des formes d’oppression de l’Etat bourgeois, et la fiscalité actuelle en France porte la marque de l’Etat fort. A la différence de la police, de l’armée, des tribunaux, auxquels on peut toujours espérer échapper, l’impôt — lourd tribut payé à la société qui « protège » le citoyen — frappe tout le monde.

Sauf bien entendu les premiers ministres, les grosses entreprises, et de nombreux députés de la majorité qui, très légalement, n’en paient pas le moindre. Un scandale ? Bien sûr, mais le vrai scandale n’est-il pas dans l’ensemble du système d’impôts mis en place par la Vème République ?

La fiscalité actuelle permet à la bourgeoisie de faire payer par les travailleurs le fonctionnement et l’entretien de son Etat. Sans compter ce qui lui est transféré directement par le biais de l’aide financière aux monopoles et aux grandes sociétés (les 3 milliards de subvention de l’Etat à Wendel-Sidélor par exemple).

En 1959, l’impôt sur les sociétés (payé par le capital) rapportait autant que l’impôt sur le revenu (payé par les travailleurs). Il n’en représente plus aujourd’hui que les trois-cinquièmes (pendant ce temps, le nombre de foyers assujettis à l’impôt sur le revenu a doublé), et ne fournit que 10% des recettes fiscales.

D’où vient l’argent ?

Pour l’essentiel (les deux tiers), les recettes fiscales proviennent des impôts indirects sur la consommation. 67% de ceux-ci sont fournis par la TVA dont le système est le suivant :

Un capitaliste achète une usine de chaussures ou la fait construire. Il achète également les matières premières, cuir, etc. Sur aucun de ces achats, il ne paie de TVA. C’est l’acheteur de chaussures qui la paiera, environ 20%. du prix de la marchandise ! Le même acheteur la paie sur tous les produits de consommation qu’il achète, de son journal à sa nourriture.

Or les travailleurs et les personnes à revenus modestes, au contraire des gros détenteurs de capital, dépensent l’essentiel sinon la totalité de leurs revenus pour la consommation courante. C’est donc sur eux que pèse, écrasant, le prélèvement fiscal.

Suppression immédiate des impôts indirects et de la TVA, gabelle de notre temps

Les capitalistes, à l’exemple de Chaban, ont toutes sortes de moyens parfaitement légaux pour ne pas payer d’impôts sur le revenu du capital. Il y a pour les capitalistes tant de combines pour échapper à l’impôt qu’ils ne peuvent pas les connaître toutes. C’est pour cela qu’ils louent les services de conseillers fiscaux, conseillers en fraude fort bien payés ! Quant à l’impôt sur les successions, là aussi, pourvu qu’on en ait les moyens, la légalité permet de ne pas payer : l’emprunt Pinay ne sert qu’à ça !

L’impôt sur les revenus touche plus fortement les salariés car ils ne peuvent cacher leurs salaires. Les autres s’arrangent beaucoup mieux : ainsi les médecins en 1967 à Paris déclaraient un revenu mensuel de 2000 francs seulement en moyenne !

De plus le système des tranches non indexées sur le coût de la vie permet d’augmenter les impôts par le simple jeu de l’inflation !

Un tel système n’est pas amendable, il doit être balayé !

  • Impôt sur le revenu, avec très forte progressivité, exemption pour les bas revenus, abattement forfaitaire par enfant, indexé sur le coût de la vie et sur l’évolution des prix et des salaires !
  • Impôt sur le capital et sur les grosses fortunes !
  • Soumission de l’emprunt Pinay aux droits de succession !
  • Pour cela, il faut le contrôle sur la compatibilité, les revenus de tous
  • Pour commencer, exigeons la publication des chiffres d’impôts de tous.

Ce que veut la Ligue Communiste, Manifeste du Comité Central des 29 et 30 janvier 1972.

Plus récemment, Lutte Ouvrière reprend cette argumentation, par exemple dans son Éditorial des bulletins d’entreprise du 28 octobre 2013 :

Le véritable matraquage fiscal concerne les classes laborieuses, les salariés y compris les plus pauvres et, plus généralement, tous ceux dans les classes populaires qui vivent de leur travail. Le véritable matraquage fiscal est la hausse au 1er janvier 2014 de la TVA, l’impôt le plus injuste qui soit parce qu’il frappe indistinctement au même taux les millionnaires et les chômeurs ou les SDF.

Le véritable matraquage fiscal, c’est aussi l’ensemble des mesures décidées en douce, qui font que d’un seul coup près d’un million de ménages (petits salariés et retraités) qui ne payaient pas d’impôt sur le revenu sont devenus imposables. Avec les conséquences qui en découlent, comme la perte de certaines allocations et la suppression de l’exemption de la taxe d’habitation.

Et même l’écotaxe, décidée par le gouvernement Sarkozy et reprise par le gouvernement Ayrault, contre laquelle des manifestations ont eu lieu ce week-end en Bretagne : si elle concerne aussi les grosses entreprises, elle frappe surtout les petites et les artisans. Elle sera aussi en fin de compte payée par les consommateurs, sur lesquels la hausse de prix sera répercutée.

On nous dit que tout cela est nécessaire car il s’agit de financer les services publics utiles à tous. La mauvaise blague : dans les services publics, on inclut aussi le coût de l’armée, de l’armement et de toutes les guerres de brigandage menées au Mali ou ailleurs. Et, par les temps qui courent, on paie surtout les cadeaux au grand patronat et les intérêts faramineux que les banques prélèvent sur un État endetté jusqu’au cou... pour avoir, pourtant, emprunté pour aider ces mêmes banquiers.

Alors, la seule politique fiscale juste du point de vue des exploités serait la suppression des impôts indirects, sauf sur des produits de luxe que seule la bourgeoisie achète ; et que l’impôt sur le revenu ne s’applique justement qu’au revenu, c’est-à-dire ce qui est tiré de l’exploitation par le biais du capital.

Pourtant, LO exclut cette revendication traditionnelle du mouvement ouvrier relativement à la journée du 17 novembre des « gilets jaunes » :

Pour les salariés, les retraités, les chômeurs, la seule façon de s’opposer à la baisse continue de leur niveau de vie est d’exiger l’augmentation des salaires, des retraites et des allocations. Et, pour que cette augmentation ne soit pas annulée ensuite, il faut que les revenus du monde du travail suivent automatiquement les hausses de prix et l’inflation.

Edito du 5 novembre : Il faut augmenter les salaires et les pensions.

De même :

Actuellement, la contestation s’exprime en particulier, et à juste titre, contre la hausse des carburants. Mais, en fait, tout augmente : le fioul, le gaz, l’électricité, les loyers… Il est indispensable que les travailleurs se mobilisent en mettant en avant leurs exigences, à commencer par l’augmentation des salaires, des retraites et des allocations, et leur alignement automatique sur le coût de la vie. Il n’y a qu’ainsi que le monde du travail se protégera contre l’appauvrissement qui résulte des politiques patronales et gouvernementales.

Edito du 12 novembre : Il faut augmenter les salaires.

De même, la revendication d’abolition des impôts indirects reste bien connue du NPA :

Il faut refuser la TVA et l’ensemble des taxes, ces impôts indirects totalement injustes qui amplifient les inégalités. NPA : Contre le gouvernement des riches

Mais comme LO, dans des textes à diffusion plus large, seule l’augmentation des salaires est mise en avant par le NPA :

Oui, tout augmente sauf les salaires, et les hausses
du prix des carburants, des prix en général, nous
rendent chaque jour la vie plus difficile. Pour augmenter
les salaires de 300 euros et avoir un SMIC à
1700 euros, il faut prendre sur les profits des capitalistes
et des multinationales. Nous demandons la
gratuité des transports en commun. Une nouvelle
organisation sociale est nécessaire, où nous n’aurions
pas à nous serrer la ceinture pour mettre 10 litres de
plus dans le réservoir de notre véhicule pour aller
bosser pour des salaires de misère…

Le NPA propose qu’une grande mobilisation pour
l’augmentation des salaires soit organisée par les
syndicats, les associations, les partis du mouvement
ouvrier. Nous le dirons également touTEs ensemble,
dans la rue, par la grève, avec les enseignant·e·s le 12
novembre, avec les chômeurs/euses et les précaires le
1er décembre , et chaque jour, au coté des salarié·e·s
en lutte pour leur condition de vie et de travail.
Tract NPA du 6 novembre

Quelles peuvent être les raisons d’une telle omission, de la réticence à populariser cette vieille revendication du mouvement ouvrier ?

Un élément de réponse est la tendance de ces organisations à s’intégrer dans les appareils syndicaux et dans ce but de reprendre gentiment leurs mots d’ordres . Or le plus grand de ces appareils, la CGT, met en avant les augmentations de salaires, les taxes sur les profits, mais semble avoir abandonné la suppression des impôts indirects.

On lit par exemple :
Principales propositions de la CGT (cf Pour un impôt plus juste et efficace :

  • Augmentation de la progressivité de l’impôt sur le revenu,
  • Suppression du bouclier fiscal,
  • Suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires,
  • Limitation du nombre de niches fiscales,
  • Taxation de tous les revenus financiers,
  • Harmonisation de la fiscalité européenne,
  • Limitation de la TVA,
  • Renforcement de la fiscalité du patrimoine,
  • Réformer la fiscalité locale (taxe habitation, taxe foncière...).

Que faire concernant la revendication de l’abolition des impôts indirects ? C’est une de celles à propos desquels les rédacteurs du programme du Parti Ouvrier français déclaraient :

Ce qu’il faut, c’est que d’un bout de la France à l’autre les têtes pensantes de la classe ouvrière soient familiarisées avec l’oeuvre d’expropriation capitaliste et d’appropriation nationale qui leur incombera dans un avenir chaque jour plus proche, c’est qu’elles soient en même temps d’accord sur une première série de transformations à opérer immédiatement.

C’est à répandre ce programme que s’est consacré le Parti Ouvrier, qui n’est et ne peut être qu’une espèce de sergent instructeur et recruteur, recrutant et instruisant pas tous les moyens : propagande parlée (réunions et conférences), propagande écrite (livres et journaux), propagande agie (grèves, pétitions, scrutins,etc).

Ce programme de 1882 est d’une actualité brûlante !

Messages

  • Un autre aspect frappe dans le mouvement des gilets jaunes : l’hostilité des appareils syndicaux à l’égard de ce mouvement auto-organisé, la volonté de faire croire qu’un tel mouvement ne pourrait favoriser que le fascisme. Cependant, nous constatons sur les lieux de travail que la classe ouvrière y est favorable, y compris la base syndicale ! Même l’extrême gauche officielle qui cultive le suivisme vis-à-vis des appareils syndicaux s’en est étonnée et offusquée. Mais elle s’est bien gardée d’expliquer le fondement même de cette réaction hostile des bureaucraties qui encadrent les travailleurs : la crainte d’être débordée dans ce rôle d’encadrement. En hurlant au fascisme à propos de cette tentative d’auto-organisation, les appareils, très discrédités, se préparent à en faire de même quand la classe ouvrière tentera de les déborder. Nous sommes maintenant avertis qu’ils crieront alors au fascisme et dénonceront tous ceux qui se feront les porte-parole de l’auto-organisation ouvrière comme des fascises en puissance !!!

  • Ce qui gêne les réformistes et les opportunistes dans le fait de s’attaquer aux impôts, c’est le fait de s’attaquer directement à l’Etat. Ils ne s’attaquent non plus jamais frontalement aux guerres et au terrorisme de leur propre Etat. Quant aux tentatives de lancer un mouvement en dehors des appareils, ils y ont toujours réagi violemment, comme pour le mouvement de retrait des fonds des particuliers des banques popularisé par Cantona ou le mouvement des bonnets rouges.

  • Le caractère d’auto-organisation n’affole pas que des réformistes et des apapreils syndicaux, il fait peur au pouvoir qui se plaint qu’aucun syndicat n’encadre, que des déclarations de manifestations n’ont pas été faites légalement en préfecture, que l’on ne peut pas savoir ce qui se passera et jusqu’à quand. On voit ici bien des points qui viennent de manquer aux tentatives de lutter des cheminots, encadrées par les appareils syndicaux et dont le mouvement a eu le caractère inverse, pas du tout auto-organisé et ne faisant pas du tout peur au pouvoir !!!

  • « Quand viennent le désespoir et la rage, et que personne ne sait les entendre, n’importe quoi devient possible. »

    Voilà en quels termes la bourgeoisie s’inquiète des effets possibles sur la mobilisation ouvrière à venir...

    Des gilets jaunes prolétariens, voilà ce que le journal Les Echos semble craindre tout en essayant de minimiser et de discréditer :

    Lire ici

  • "Ce qui est difficile, c’est qu’on n’a pas une organisation syndicale qui a l’habitude de faire une manifestation qui l’organise. Par exemple, une manifestation ça se déclare en préfecture. Là, très peu l’ont déclarée. J’appelle ceux qui nous écoutent à déclarer le lieu de la manifestation", a souligné le ministre de l’Intérieur.

    Comme ça les rassure quand les centrales syndicales font la police de la classe ouvrière !!!!

  • Les syndicats, ayant étranglé la lutte des cheminots contre la privatisation de la SNCF par Macron, ils dénoncent les Gilets jaunes et exigent que les travailleurs se soumettent à nouveau à leur diktat. Un tract distribué par la CGT hier sur les Gilets jaunes dénonçait « l’instrumentalisation de la colère des citoyens et des travailleurs orchestrée par l’extrême-droite et les transporteurs routiers ». La CGT proposait plutôt d’organiser des « combats interprofessionels qui ne peuvent se mener en dehors de notre organisation syndicale », c’est-à-dire qui sont voués à la défaite.

    Mais, ses combats interprofessionnels n’existent pas. La CGT mène des combats corporatistes.

  • Dire que l’extrême droite manipule ce mouvement, comme le font les syndicats, est pour le moment complètement imaginaire.

    La dirigeante néo-fasciste Marine Le Pen a déclaré au Parisien : « Nous avons été le premier parti à exprimer notre soutien total à ce mouvement qui est certes apolitique, mais dans lequel beaucoup de nos électeurs se retrouvent. » Mais elle a ajouté qu’elle ne se joindrait pas aux blocages : « Le rôle d’une dirigeante politique – sauf situation exceptionnelle – ce n’est pas d’être dans la rue, mais précisément d’offrir le choix de régler les problèmes des Français par le vote. »

  • Si la mobilisation devait avoir par la suite un caractère de classe non prolétarien ce serait certainement grâce aux appareils syndicaux.

    Bien sûr, il y a de nombreux petits patrons dans le mouvement mais aussi des travailleurs indépendants qui sont des prolétaires ubérisés et bien des travailleurs aussi !

  • Gilets jaunes : des comités de travailleurs partout !

    C’est une dernière exaction gouvernementale qui aura été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase : la hausse des taxes pétrolières qui a aggravé la situation de nombre de salariés et de professions dites libérales (englobant tous les salariés ubérisés et précarisés) qui sont contraints de beaucoup utiliser leur voiture. Le soulèvement a été rapide et inattendu. Le gouvernement s’est montré affolé par ce nouveau type de mobilisation qui ne s’était jamais produit en France. Il s’est même plaint de n’avoir aucun vis-à-vis institutionnel, aucune organisation avec laquelle il pourrait négocier, et tout particulièrement aucune organisation syndicale « responsable » avec laquelle il entretienne de bonnes relations, à savoir dont il soit le principal financeur, et qui passe le plus clair de son temps en négociations avec lui.

    Le caractère explosif, sans respect pour les règles établies, en somme le caractère semi insurrectionnel de la mobilisation, c’est exactement l’inverse de ce à quoi les organisations syndicales ont habitué les classes dirigeantes en France. L’inverse aussi du coup d’épée dans l’eau de la dernière « grande » action syndicale, celle des cheminots qui s’est conclue par une absence totale de crainte du même gouvernement. La comparaison ne peut que frapper tout le monde. Le mouvement inefficace des syndicats de cheminots est trop proche de nous pour que les leçons en soient effacées.

    On se souvient en effet que les classes dirigeantes étaient d’avance prévenues des jours de grève, ce qui laissait toute latitude pour organiser le travail des cadres et des non-grévistes et permettre qu’il y ait plus de trains les jours de grève que les autres jours… Les bureaucraties syndicales n’organisent des mouvements que pour des lâchers de vapeur, pour que la colère ait l’impression de s’être exprimée.

    Cependant, les travailleurs ne sont ni aveugles ni sourds, ils ont remarqué comment se comportaient les dirigeants syndicaux, comment les « chefs » de FO, de la CFDT, de la CFTC ou de la CGT pouvaient accepter un mode de vie bourgeois, des avantages exorbitants, et des postes étatiques ou institutionnels, ou carrément des directions dans le privé, succédant à des postes de direction syndicale. Ils ont remarqué que les appareils syndicaux font partie des principaux piliers du régime bourgeois. Ce dernier mouvement spontané ne fait que le souligner encore, que montrer que les échecs successifs, en particulier depuis celui du mouvement des retraites de 2000, provient non de la faiblesse de la classe ouvrière mais de l’impuissance des appareils syndicaux en termes de lutte de classes.

    Et c’est bien une lutte de classe que mène contre nous le patronat et son gouvernement. Ils ne s’en cachent même pas !

    C’est seulement en développant la lutte comme une lutte de classes et non comme de la collaboration-négociations que nous pouvons renverser le rapport de forces.

    Pour cela, il est indispensable de développer l’organisation autonome des travailleurs. Construire partout des comités dans les entreprises et les quartiers au sein du mouvement des gilets jaunes est un moyen de lancer une telle insurrection prolétarienne contre les attaques des capitalistes et de leur Etat.

    Dès le départ, par sa répression, par ses arrestations, le pouvoir a montré qu’il faisait des cadeaux aux capitalistes mais jamais aux travailleurs ni aux victimes de ses politiques destructrices. L’avertissement est donné : le mot de « démocratie » ne sera pas celui qui caractérisera le pouvoir en France dans les temps à venir !!!

  • Cela fait un bon moment que la classe ouvrière ramasse les coups, est de plus en plus en colère, et se demande comment s’organiser pour faire face, comment s’unir par-delà les divisions catégorielles et corporatistes imposées par les appareils syndicaux, les divisions site par site, public/privé, salariés/retraités/chômeurs, toujours mobilisés séparément, jamais pour de vrais mouvements menaçants pour les classes possédantes mais toujours pour des journées d’inaction à répétition. Nous avons cette fois une occasion de nous organiser pour riposter face à une attaque qui touche toutes les catégories des milieux populaires et, du coup, unifie aussi les travailleurs. Pour une fois, les agents hospitaliers peuvent s’unir aux cheminots, aux postiers, aux enseignants et aussi aux travailleurs du privé.

    Il est d’autant plus remarquable de constater l’hostilité virulente des dirigeants syndicaux et de certains dirigeants réformistes. Ces derniers ne veulent pas de l’auto-organisation qu’ils combattent aussi violemment que le pouvoir et la classe possédante ! C’est d’ailleurs particulièrement révoltant de remarquer cette attitude que bien des militants syndicalistes autour de nous ne marchent pas dans les mensonges selon lesquels les gilets jaunes sont des fascistes ou des manipulés par des fascistes, un bobard grossier. Cette attitude est encore plus remarquable si on pense aux dix dernières années où tous les mouvements dirigés par les syndicats ou les intersyndicales ont échoué. Ces prétendus dirigeants de la classe ouvrière n’ont pas un tel bilan positif pour se permettre de dénigrer un mouvement spontané qui démarre et pour lequel bien des choses sont possibles…

    Oui, la colère ouvrière peut tout à fait exploser maintenant et se saisir de cette occasion. On l’a vu plusieurs fois dans les jours précédents : les travailleurs en ont marre. Ils l’ont montré par exemple à Marseille, suite à l’effondrement des trois immeubles marseillais. Ils le montrent aussi dans les hôpitaux où la destruction du service public est avancée, où les suppressions de postes d’aides soignantes se multiplient, où les fermetures d’hôpitaux et de service continuent, où les regroupements d’hôpitaux se font en perdant sans cesse des emplois, etc. Dans de nombreux hôpitaux, EPHAD et en psychiatrie, les luttes localisées se multiplient, parfois même sans caution syndicale et hors des syndicats, mais il n’y a pas beaucoup de liaisons entre elles pour le moment. Les postiers en ont marre mais ceux des Hauts de seine ou d’ailleurs qui se battent restent isolés. Les agents d’EDF en ont marre, les agents de l’Energie en ont marre, les enseignants en ont marre et les appareils syndicaux n’organisent que leurs sempiternelles journées d’inaction secteur par secteur, catégorie par catégorie. il faut en finir avec cet encadrement catastrophique des luttes des salariés et pour cela pas de meilleur moyen que de s’organiser nous-mêmes, en comités, en collectifs, avec des assemblées générales qui dirigent véritablement, qui décident des mots d’ordre et des revendications, et d’élire nos délégués dans ces assemblées, afin de réunir des comités localement, régionalement, nationalement ! C’est nous qui payons les coups et c’est à nous de décider des moyens d’y faire face. Les véritables syndicalistes, loin d’être nos ennemis, sauront parfaitement jouer leur rôle dans cette action et nombre d’entre eux l’ont fait dès le début du mouvement.

    Avec la mort d’une manifestante, le pouvoir a joué la peur, la menace, le danger de débordement violent mais la violence, elle vient du pouvoir et des classes possédantes, pas de leurs victimes qui ne font que se défendre !!!

    Le caractère hors-normes, hors du cadre établi et reconnu (par le pouvoir bourgeois), hors de sa légalité éventuellement, hors des limites prévues par nos ennemis et mis en place par eux, est justement un des points positifs de ce mouvement des gilets jaunes.

    Faire en sorte que ce mouvement nous sorte de l’ornière où sont enfoncées les luttes ouvrières, y participer en développant l’organisation des travailleurs, leur liaison inter-entreprise et inter-secteurs, la convergence des luttes dont tout le monde parle sans qu’elle avance, voilà qui peut difficilement être accusé de favoriser l’extrême droite. Par contre, laisser se développer un désespoir social sans perspective, voilà la porte ouverte aux démagogues politiciens d’extrême droite fascistes ou autres menteurs politiciens professionnels. Si nous nous organisons nous-mêmes, nous ne sommes pas manipulés, nous nous informons nous-mêmes, nous prenons nos décisions nous-mêmes et ceux qui essaient de nous faire peur se démasquent comme des faux amis ou de vrais ennemis.

    Il faut bien prendre conscience que ce qui est en jeu n’est pas seulement de faire reculer Macron, que cela dépasse largement la seule question des taxes sur l’essence, et même des diverses attaques du gouvernement français actuel qui ne font que prendre la suite de celles des gouvernants précédents (remise en cause des retraite, destruction des services publics et des aides sociales, tout l’argent pour « sauver » le grand capital qui ne s’en effondre pas moins pour autant).

    Dans cette situation, Capital ou Travail, c’est la seule alternative. Pour le moment, seul le Capital est organisé et pas nous, travailleurs. C’est cela qui est l’enjeu de la période actuelle : allons-nous être capables de renouer avec le mode d’organisation qui a donné tant de force à la classe ouvrière, les assemblées générales souveraines élisant des délégués à des comités de grève et se fédérant à tous les niveaux.

    Les réformistes n’ont pas cessé de nous encadrer pour nous amener à… nous heurter à un mur, que ce soit en votant pour eux ou en les suivant dans leurs stratégies pour perdre. Ils n’ont cessé de dire qu’ils se mobilisaient pour nous, et de nous démontrer ainsi que nous étions impuissants. Nous voyons aujourd’hui que cette prétendue impuissance, nous pouvons très bien la réduire à néant en nous dirigeant par nous-mêmes. Ne perdons pas cette occasion de donner un coup d’arrêt sérieux aux attaques des classes possédantes. Ce n’est pas étonnant que les méthodes « classiques » échouent actuellement car la situation n’est plus celle du réformisme classique : les possédants et leurs gouvernements ne veulent plus céder face aux luttes réformistes car c’est leur système lui-même qui est en bout de course. Les réformistes, empêtrés dans leurs liens avec l’Etat et la bourgeoisie, sont incapables de reconnaître que le système a atteint ses limites et ne peut plus que s’effondrer en nous sacrifiant violemment. C’est pour cela que nous ne pouvons plus rien gagner à laisser les appareils syndicaux exiger le monopole de direction de la lutte. De véritables syndicalistes, ceux qui n’ont pas peur de la lutte des classes, n’exigent pas le monopole de la direction des luttes mais soutiennent le droit des travailleurs de se diriger eux-mêmes !

    Les dirigeants « calmes », « légalistes », « responsables » refusent de soutenir les gilets jaunes, mais ils oublient de nous dire que faire quand ce sont les classes possédantes et leurs dirigeants politiques au pouvoir qui cassent la société, qui détruisent la vie sociale, qui démolissent l’équilibre, qui provoquent même par leur mépris comme par leurs actions agressives, l’éruption généralisée.

    Oui, ce n’est pas une « simple action revendicative classique » qu’il nous faut ! Oui, c’est d’une insurrection des opprimés qu’il s’agit ! Et c’est bien la seule chose que les classes possédantes et les gouvernants à leurs ordres n’auront pas volé !!! Et cette explosion sociale, c’est à la classe ouvrière d’en prendre la tête, de lui donner des perspectives au fur et à mesure de son développement, de son extension !

  • Avec les gilets jaunes, pour la première fois depuis très longtemps, et c’est bien là le point essentiel des événements en cours , la classe ouvrière vient de se dégager de la séquestration dans laquelle les aristobureaucrates les avaient assujetti. C’est la première phase d’une dynamique qui n’est pas prête de s’interrompre si l’on se munit de jumelles et pas de loupes. Il y aura des à-coups, des reculs, mais d’’une manière générale le processus en cours est une énorme bouffée d’oxygène pour la classe populaire. Le démarrage est un peu brouillon mais il faut souvent des esquisses avant un chef d’oeuvre.
    Maintenant, pour celles et ceux qui sont réellement conscients de de la situation, qu’un journaliste de France Info TV a osé qualifié de "pré révolutionnaire" (rien que ça), la question est : que pouvons nous faire ? Comment s’organiser ? etc...
    En supplément voici mon analyse de la situation écrite il y a 6 jours sur mon blog (re)naissant.
    http://echos-et-table-rase.over-blog.com/2018/11/17-novembre-2018-contre-la-vie-chere.html

  • Imposer le grand Capital, pas le Travail, c’est pas les gouvernants capitalistes à la Macron qui le feront !

    Faisons-le nous-mêmes !!!

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