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LFI vole au secours du 10 septembre des Gilets jaunes...

mardi 26 août 2025, par Karob, Robert Paris

LFI vole au secours du 10 septembre des Gilets jaunes…

Mélenchon et les insoumis annoncent à grands sons de trompette, longtemps après que les appels des Gilets jaunes aient été lancés, qu’ils soutiennent l’initiative du 10 septembre, avec un ton qui sous-entend qu’ils sauvent le mouvement à venir de l’accusation d’être manipulés par l’extrême droite. Mais, là non plus, la nouvelle n’est pas un scoop, attendu que le principal mouvement d’extrême droite, le RN de Le Pen, déclare qu’il n’y participe même pas (attendu que son mouvement d’organise pas des manifestations, dit sa responsable !). Ce type d’accusation, lancées dans le dernier mouvement, avait déjà fait long feu et n’a pas besoin d’une grande déclaration publique de Mélenchon pour être récusée. A part pour faire la publicité politicienne de Mélenchon et des Insoumis, présentés comme des dirigeants du mouvement du 10 septembre qu’ils ne sont nullement.

Même s’il a attendu pour se déclarer que les sondages indiquent que l’énorme majorité de la population soutient , comme tout le monde, ces derniers ont parfaitement le droit de rejoindre le mouvement du 10 septembre et sont tous appelés à y participer. Encore faut-il qu’ils en respectent l’indépendance et l’autonomie à l’égard des partis et syndicats. Encore faut-ils qu’ils n’aient pas comme seul objectif de participer au pouvoir, car, même avec leur participation y compris au sommet, celui-ci ne serait encore que la dictature des milliardaires.

Mais, désolé, on peut se tromper. Peut-être que Mélenchon n’a plus comme objectif numéro un de devenir le président de la république des profiteurs, des exploiteurs et des brigands ? Il ne l’a pas dit en tout cas et on peut en douter ! Peut-être qu’il se rallie au pouvoir du peuple, exercé de manière directe par ses comités, peut-être qu’il renonce à prétendre que l’élection du président et des parlements, c’est la démocratie ? Là non plus, il ne l’a pas encore admis ou déclaré. Peut-être que ses militants insoumis appellent les syndiqués de base à défendre que les directions syndicales ne doivent pas viser à diriger les luttes comme elles l’ont fait bureaucratiquement encore récemment pour le conflit des retraites. On n’a rien entendu en ce sens malheureusement mais cela viendra peut-être un jour… Il faudrait aussi que LFI appelle ses militants syndicalistes à arrêter de négocier avec le pouvoir des milliardaires, ce que ces bureaucraties ont encore fait sans l’ombre d’un résultat sur la question des retraites. Comme si on pouvait discuter avec ce pouvoir, comme si on pouvait régler à part la question des retraites, indépendamment de celle des chômeurs, de celle des journées chômées, de celle des milliards volés par les capitalistes dans les caisses de l’Etat, de celle des services publics, de celle du budget de l’Etat et des dettes et on en passe…

En attendant, LFI se dit « d’accord pour tout bloquer » avec le mouvement du 10 septembre et c’est tant mieux si les buts qui seront décidés dans les assemblées de Gilets jaunes sont respectés par Mélenchon. Pour le moment, ce dernier affirme que le mouvement se rallie à ses buts à lui. Pourtant, le nouveau mouvement des Gilets jaunes ne s’est pas encore réuni en assemblées souveraines et ne peut donc pas s’exprimer dans ce sens. Ce serait très étonnant qu’il choisisse de se rallier à un parti politicien qui pactise avec les bureaucraties syndicales, fût-il de tonalité radicale. Et surtout avec un parti qui se pose d’emblée en dirigeant, sans même avoir avancé des propositions et des proposé des perspectives et les avoir fait adopter par les assemblées.

LFI, un parti politicien ? Ce parti n’a-t-il pas tout récemment rejoué la comédie de l’alliance de la gauche, nommé « front populaire », avec les politiciens du parti socialiste et des politiciens écologistes de gauche ? Cette gauche là n’était-elle pas à l’origine des attaques antisociales actuelles ? LFI n’a-t-il pas contribué à soutenir la direction des luttes sociales par les bureaucraties syndicales, dont récemment celle des retraites, direction traitresse qui négocie avec nos ennemis et démobilise les travailleurs. Il s’agit des fameuses intersyndicales où est prônée la méthode des journées d’inaction suivies de négociations et l’alliance avec le syndicat CFDT ouvertement auxiliaire du pouvoir des milliardaires. C’est au point où même actuellement, quand le gouvernement Bayrou mène une attaque antisociale tous azimuts, le syndicat CFDT ne se propose rien de moins que d’inviter Bayrou à la tribune de son congrès ! Les autres syndicats, avant de se décider à propos de l’initative du 10 septembre mais aussi des conclaves et négociations de Bayrou, vont se consulter en intersyndicale début septembre ! Bayrou leur propose de négocier à quelle sauce on va nous couper la gorge et ces gens-là n’ont pas encore choisi entre Gilets jaunes et… Bayrou ! Dans le passé, LFI a cautionné les politiques de collaboration des intersyndicales, notamment celle des retraites.

LFI serait le dirigeant naturel du mouvement du 10 septembre ? Mais l’une des caractéristiques des Gilets jaunes dont il est issu est justement de récuser à la fois les manœuvres politiciennes et les bureaucraties syndicales, de refuser de négocier avec le pouvoir des milliardaires, de ne pas faire croire aux élections bourgeoises, et encore moins en la réforme du pouvoir des milliardaires qu’il s’agit seulement de renverser.

Bien sûr, Mélenchon est capable de clamer « pouvoir du peuple », tout en affirmant que celui-ci se réalise en votant aux élections bourgeoises pour un bon président de la République, en l’occurrence lui. Il avait même sérieusement proposé de devenir le premier ministre de Macron. Quel beau dirigeant pour un mouvement qui s’affirme hostile à tout compromis avec le pouvoir ! Loin d’en finir avec la fausse démocratie des assemblées parlementaires et des élections présidentielles comme le réclament les Gilets jaunes, Mélenchon nage en plein dedans.

Les Gilets jaunes affirment bâtir eux-mêmes une véritable démocratie des exploités, des pauvres, qui n’aura plus rien à voir avec la « démocratie » des milliardaires alors que Mélenchon ne prône qu’une réforme constitutionnelle au sein du système. Mélenchon n’a cessé de défendre les appareils syndicaux au sein du mouvement des Gilets jaunes, alors que les méthodes antidémocratiques de ces bureaucraties sont en complète contradiction avec les méthodes défendues constamment par les Gilets jaunes.

L’OPA prétendue de LFI sur le mouvement du 10 septembre n’est ni le premier ni le dernier des retournements politiciens de Mélenchon, qui est riche en renversements d’alliances et en ruptures avec ceux qu’il a publiquement encensé ou cultivé.

Les relations passées de Mélenchon avec les Gilets jaunes sont d’ailleurs suffisamment instructives. Au début du mouvement, Mélenchon se gardait bien de se compromettre avec les Gilets jaunes. En décembre 2018, il répondait à des interviews des médias : « Je ne porterais pas le gilet jaune parce que je n’en ai pas et je n’en ai pas parce que je ne conduis pas » ! Belle dérobade ! En mars 2019, Mélenchon expliquait qu’il avait sciemment choisi de ne pas participer personnellement aux manifestations de Gilets jaunes « pour ne pas alimenter de polémiques » ! Entre temps, Mélenchon avait accepté de discuter à l’Elysée avec un Macron qui venait de réprimer extrêmement violemment les manifestations de rue, alors que le mouvement lui-même refusait toute négociation directe avec Macron !

En 2019, Mélenchon n’avait pas déclaré qu’il soutenait le mouvement des Gilets jaunes mais que celui-ci « lui donne entièrement raison », ce qui est très différent.

Jamais au cours du mouvement, Mélenchon n’avait appelé la base des syndicats à se désolidariser de leurs directions qui, elles, soutenaient les mensonges de Macron, affirmant que les Gilets jaunes étaient une annexe de l’extrême droite antisémite.

D’ailleurs, durant les grandes vacances, il a fallu plusieurs semaines à Mélenchon pour s’aviser que le mouvement du 10 septembre était porteur d’avenir. Il lui a fallu d’abord s’assurer que l’opinion publique était favorable majoritairement à cette lutte, suivant en cela les bureaucraties syndicales qui s’en avisent aussi progressivement.

Bien sûr, il n’est pas mauvais pour le mouvement que tout le monde ait envie de le rejoindre mais il faut distinguer la base des syndicats ou des partis et leurs directions. Les premiers se tournent honnêtement vers une perspective de lutte contre le pouvoir des milliardaires et les autres font des choix tactiques pour coiffer la lutte et l’envoyer dans une impasse, comme ils l’ont toujours fait.

En déclarant dans les médias que LFI « est la force principale du mouvement », ce parti joue à nouveau son jeu politicien classique, tentant de récupérer les mouvements sans leur offrir la moindre perspective ni proposer ses idées et moyens d’action. Il ne fait que se rallier à celle du blocage sans appeler les travailleurs des entreprises où militent ses membres syndicalistes à fonder partout des assemblées de Gilets jaunes. LFI ne se mouille donc pas en déclarant participer au mouvement puisque ce parti ne renonce ni à ses buts politiciens ni à son rôle au sein des bureaucraties syndicales.

Les objectifs de Mélenchon restent la présidence de la République, les élections parlementaires, la fondation d’une sixième république bourgeoise, et pas de la deuxième république des travailleurs après la Commune de Paris de 1871 ! Celui qui continue d’affirmer que François Mitterrand est son idéal de président et d’homme politique n’est rien d’autre qu’un camaléon de la politique politicienne comme le populisme en a produit de nombreux.

Que cela plaise ou non à Mélenchon, faisons rentrer le Gilet jaune non pas chez les parlementaires et bureaucrates syndicaux spécialistes des retournements de veste, mais au sein des entreprises, dans les quartiers populaires, dans la base des syndicats, parmi les travailleurs, les chômeurs, les retraités, les jeunes, les femmes, tous ceux qui se fatiguent de plus en plus sans gagner d’argent, y compris les petits paysans, les petits commerçants, les travailleurs « libéraux ». Qu’ils s’assemblent tous en réunions souveraines, y prennent des décisions, les fassent appliquer, les imposent et remettent en cause ainsi le pouvoir des milliardaires en y opposant leur propre pouvoir ! La voilà la perspective véritable et il est à craindre que Mélenchon ne s’y rallie pas honnêtement !

Chacun a remarqué que la gauche et les syndicats avaient été discrédités par leur absence lors du mouvement des Gilets jaunes, première version, et les dirigeants de la gauche et des syndicats se tortillent dans tous les sens pour ne pas être totalement à l’écart cette fois, mais sans s’engager franchement, sans tirer une seule leçon, sans changer de conception. Ils font semblant de se rapprocher, pour mieux le ramener à leurs propres limites, à leurs propres attaches avec la société bourgeoise, pour l’entrainer dans leurs propres impasses, celles d’une société capitaliste complètement pourrie et décrépite. Les Gilets jaunes sauront s’en méfier et s’en démarquer !

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