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Algérie : la classe ouvrière est la principale menace pour la dictature militaire

samedi 17 août 2019

À des degrés divers, enseignants, postiers, employés du gaz, travailleurs des ports, employés des diverses administrations participent au mouvement.

Depuis le début du soulèvement du 22 février, au sein des classes populaires, en particulier parmi les travailleurs, le mécontentement n’a cessé de croître du fait de conditions sociales dégradées et dégradantes, de l’absence de travail et de la modicité des salaires.

Au plus haut moment charnière du soulèvement populaire, des dizaines d’entreprises ont été en proie aux grèves, des raffineries à Rouiba et à l’Eniem. Des milliers de travailleurs ont, en effet, débrayé dans de nombreuses sociétés. Durant tout les mois de mars et avril, des appels à la grève générale ont été lancés. Certes ces appels à une « grève générale » ont inégalement été suivis, mais ils ont été particulièrement entendus parmi les travailleurs algériens des entreprises productives publiques et privées, parmi les employés des administrations et des transports, les enseignants et les professeurs d’université et autres catégories professionnelles. De surcroît, outre l’éruption des grèves ouvrières massives, des protestations de chômeurs et des explosions de violence populaire ont surgi en divers endroits du pays : des alertes inquiétantes pour l’ordre établi. Des actions qui contrastent avec les manifestations politiques pacifiques. Qui plus est, des luttes puissantes et triomphantes axées sur les revendications salariales et les conditions de travail, contre les licenciements, contre la dictature de l’encadrement hiérarchique mafieux, la mainmise du syndicat d’Etat l’UGTA. Ces luttes revendicatives des travailleurs algériens ont constitué une ébauche d’autonomie ouvrière, une amorce d’auto-organisation.

Dans la sidérurgie et les mines de fer, des milliers d’ouvriers ont mené de longues grèves. Grâce à leur détermination et leur mobilisation, ils ont obtenu d’importantes augmentations de salaire, une amélioration des conditions de travail. Revendications obtenues directement par la négociation avec la direction des entreprises, le syndicat étatique l’UGTA ayant été écarté.

Dans le secteur de la sidérurgie, au cours du mois d’avril, plus de 70% des travailleurs des diverses mines de fer étaient en grève, générant des pertes considérables du chiffre d’affaires. Ces grèves ont permis d’arracher une augmentation du salaire de presque 10 000 dinars, des primes de rendement individuelles et collectives, des remboursements en cas d’accident de travail par l’assurance sociale. A Constantine, les travailleurs de l’entreprises des tracteurs agricoles (Etrag) se sont mis, à leur tour, en grève début avril. A Mostaganem, le port a été paralysé au cours du mois d’avril par la quasi-totalité des travailleurs portuaires. Ils ont exigé le congédiement du PDG, le renouvellement des contrats d’une catégorie de salariés précaires, l’augmentation des salaires de 20% avec un effet rétroactif à partir de janvier 2018. Revendications satisfaites dans leur intégralité. A Béjaïa, l’entreprise de confection Alcost a été également en proie à une grève engagée par les 720 ouvrières du secteur, au cri de « pas d’augmentation, pas de travail ! ».

L’entreprise publique d’électroménager d’Oued Aïssi, Eniem, était également en grève. Au cri de « nous voulons le changement du système et non un changement dans le système », les deux mille travailleurs d’Eniem ont manifesté contre le régime et contre la direction de l’UGTA, dénoncé pour son inféodation au patronat.

A Oran, les travailleurs de l’entreprise privée sidérurgique algéro-turque Tosyali, qui emploie 3 500 travailleurs dont 800 Turcs, se sont mis en grève pour leur «  permanisation  », autrement dit pour avoir un contrat à temps indéterminé. Ils ont peut-être été encouragés par la victoire des 1 100 agents communaux de la ville qui, après un mois de grève, ont obtenu une promesse de CDI.

Les ouvrières d’une entreprise textile de la région de Béjaïa ont fait grève sans que les délégués UGTA y appellent. Le lendemain, le directeur a appelé toutes les travailleuses à reprendre leur poste, sous menace de sanction. Une majorité l’a fait, et c’est lorsque les travailleuses ont fait pression qu’elles ont obtenu le droit de faire deux jours de grève non consécutifs.

En faisant grève au cours du mouvement, les travailleurs des ports d’Alger et de Bejaia ont aussi obtenu 26 % d’augmentation lors d’une grève récente. Naftal, l’unique distributeur de carburant, a dû lui aussi concéder des augmentations à ses salariés. Dans une autre entreprise textile, les travailleuses qui réclamaient une prime ont été reçues de manière odieuse par le directeur. Leur réponse a été  : «  Tu ne veux pas nous donner la prime, très bien. Maintenant, ce que nous voulons, c’est ta tête  ! Directeur dégage  !  » Elles ont eu gain de cause, le directeur a dû effectivement dégager.

Dans la zone industrielle de Rouiba, près d’Alger, les travailleurs de plusieurs entreprises de l’agroalimentaire telles que Ramy, Pepsi-Cola, Coca-Cola ou LU ont répondu à la grève générale, malgré les pressions patronales.

Les travailleurs de la SNVI, entreprise publique qui fabrique des engins et des camions dans le cadre de la société Sonacom, reprochent au pouvoir d’avoir fait péricliter le secteur public industriel au profit des multinationales et de riches hommes d’affaires algériens comme Haddad ou Tahkout. Ils reprochent au dirigeant de l’UGTA Sidi Saïd et aux pontes syndicaux locaux d’avoir été complices de ce bradage.

Seule la menace de l’amplification des grèves des ouvriers a ébranlé le régime. S’ils s’organisent de manière indépendante, ils sont la seule possibilité de mettre en place une véritable démocratie : celle des conseils de travailleurs.

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