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Emeute en Algérie

lundi 16 novembre 2009

Le quartier populaire de Diar Echems, sur les hauteurs d’Alger, a été le théâtre de violents affrontements entre les forces de l’ordre et des centaines de jeunes en colère, lundi et mardi. Les violences ont éclaté après l’intervention de policiers venus évacuer des baraques de fortune sur un terrain de football adjacent à la cité. Crise perpétuelle du logement. La presse algérienne recense une cinquantaine de blessés côté police anti-émeute et une quarantaine d’interpellés chez les émeutiers. Les affrontements de Diar Echems ne constituent pas un cas isolé. L’émeute est devenue un véritable phénomène de société en Algérie, où il ne se passe pas une semaine sans que des troubles n’éclatent dans une ville ou un village. Dimanche dernier, les habitants de Rouissat, près Ouargla (800 km au sud d’Alger), ont barré la route principale de leur commune à l’aide de pierres et de pneus brûlés pour attirer l’attention sur des nuisances causées par des travaux d’assainissement. A Skikda (500 km l’est d’Alger), des habitants des localités de Beni Bechir et Ramdane Djamel avaient bloqué des routes, le 26 septembre dernier, pour dénoncer des coupures récurrentes de l’électricité. Même scénario à Annaba, suites à des inondations, à Mila pour des problèmes d’approvisionnement en gaz, en Kabylie pour l’alimentation en eau potable.

C’est, selon plusieurs analystes, à cause d’un déficit d’associations et de syndicats autonomes, en l’absence d’une réelle société civile et d’une opposition crédible, que les Algériens ont souvent recours au langage des barricades et des pierres. « En refusant (…) l’institutionnalisation du conflit social, l’expression autonome des revendications et la représentation politique de la société selon les intérêts en conflit, le régime politique génère l’émeute, l’expression extrême et violente de la prise de parole », analyse le politologue Mohamed Hachemaoui dans les colonnes d’El Watan. Les émeutes sont selon lui « l’œuvre rageuse d’une jeunesse désemparée, lourdement frappée par le chômage ».

« Les réseaux mafieux » et la question du logement

Evoquant les problèmes de logement, souvent à l’origine des émeutes en Algérie, Noureddine Hakiki, sociologue, professeur à l’université d’Alger, estime que cette forme de contestation sociale n’est pas uniquement liée à des conditions de vie difficiles. L’émeute est selon lui, dans bien des cas, le fait de « puissants réseaux mafieux qui utilisent des populations réellement dans la besoin pour verser dans le trafic de logements ». « Si on ne peut pas nier qu’il y a crise du logement, on ne peut pas non plus nier le fait que l’Etat algérien a construit beaucoup de logements ces dernières années en comparaison au Maroc ou à l’Egypte », ajoute-il. « Mais il est difficile d’identifier ceux qui méritent et ceux qui ne méritent pas, quand vous avez une puissante mafia qui sait comment constituer des dossiers et contourner les restrictions de la loi ».

L’Etat s’enorgueillit d’avoir construit plus d’un million de logements les dix derrière années. Il en annonce autant d’ici 2014 et prévoit d’investir l’équivalent de 10 milliards d’euros pour améliorer les conditions de vie des Algériens. Mais en « l’absence d’une véritable démocratie, avec des intermédiaires entre la population et les pouvoirs publics, comme les partis d’opposition, les associations qui travaillent sur le terrain, et des autorités qui communiquent, l’émeute comme phénomène de « contre-pouvoir a encore de beaux jours devant elle », craint Noureddine Hakiki.

Lundi et mardi, des centaines de jeunes, soutenus par des femmes et des pères de familles de la cité populaire de Diar Echems, ont affronté les forces de l’ordre avec des pierres en les empêchant d’entrer dans ce bastion pauvre du quartierEl Madania, situé sur une colline.
Photo : AFP
Des incidents ont opposé, durant deux jours, la police aux habitants d’une cité d’Alger.Ils réclamaient de meilleurs logements. La fronde touche aussi d’autres villes du pays.
Alger. De notre correspondant

Après 48 heures d’affrontements entre manifestants et forces de l’ordre qui ont fait une cinquantaine de blessés, Diar Echems (les maisons du soleil) a retrouvé, hier, un calme précaire. Pour les 1 400 habitants de cette « cité de recasement » construite à la fin des années 1950 à El Madania (ex-Clos Salembier), sur les hauteurs d’Alger, la coupe est pleine. Des familles de dix à quinze personnes s’entassent dans des F1 exigus. Pour atténuer la promiscuité, ils ont construit des baraques sur les aires de jeu et les terrains environnants. Un bidonville à un jet de pierre du palais présidentiel !

Lundi, ils ont tenté de squatter le stade municipal, déclenchant une réaction vigoureuse des autorités. Rachid, chômeur de 22 ans, est déterminé : « Je vis avec mes parents, mes quatre frères et mes trois soeurs dans une pièce unique. Nous dormons à tour de rôle. Mon frère de 34 ans est toujours célibataire, faute de logement. Nous irons jusqu’au bout, advienne que pourra ! ». Le wali (préfet), qui a reçu une délégation des contestataires, a promis de « régler le problème ».

Prime à la violence

Boualem, 43 ans, transporteur public et soutien d’une famille de neuf personnes, reste sceptique :« Il veut gagner du temps. Et même si l’État construit des logements,ce sont les privilégiés qui vont encore en profiter ».

Le président Bouteflika avait promis, en avril 2004, un million de logements. Malgré d’incontestables réalisations, la crise est loin d’être jugulée. Sur fond de sentiment d’injustice et de déficience des services publics, des émeutes sporadiques éclatent un peu partout dans le pays. Elles risquent d’aboutir à une révolte généralisée. Déjà, à 800 km au sud d’Alger, des habitants de la commune de Rouissat ont, dimanche, bloqué les routes avec des pierres et des pneus enflammés. Des troubles étaient également signalés à Annaba, grande métropole de l’extrême-est algérien, à Tizi Ouzouen Kabylie ou à Boumerdès, à l’est de la capitale.

En verrouillant les espaces de liberté, le pouvoir a encouragé l’émeute comme ultime moyen d’expression. Avec l’impunité et des « primes à la réinsertion » accordées aux terroristes par la loi sur la « réconciliation nationale » en 2005, la violence est devenue, pour beaucoup de jeunes, un moyen de promotion sociale.

Mohammed (pseudonyme) travaille à côté de la cité de Diar Echams. Il passe tous les jours devant en voiture et connait des habitants de la cité.

Hier soir, en passant devant la cité, ce que j’ai vu m’a rappelé les émeutes du 5 octobre 1988 [révolte populaire qui avait fait plus de 400 morts ndlr]. Je n’étais qu’un enfant à l’époque mais c’était la même atmosphère. J’ai vu des personnes de tous les âges jeter des pierres, les femmes envoyaient des pots de fleurs des balcons sur la police anti-émeute. C’était un ras-le-bol général. Les affrontements et les incendies ont duré jusqu’à tard dans la nuit.

Deux choses ont déclenché ces émeutes. D’abord les policiers ont essayé de détruire les baraques de fortune installées, faute de place, par les habitants sur les parties communes (stade, aires de jeu) il y a maintenant quelques années. Mais devant la colère des habitants, les policiers ont dû interrompre la démolition.

Ensuite, une liste de personnes qui bénéficieraient d’un relogement a été publiée dans la cité. Mais quand les habitants ont vu que les noms de personnes habitants d’autres cités y figuraient, ils ont été exaspérés et se sont rassemblés pour protester.

La situation du logement en Algérie est très confuse. Beaucoup de riches, parce qu’ils connaissent des gens haut placés et qu’ils donnent des bakchichs, profitent des logements sociaux. Alors que ceux qui en ont besoin parce qu’ils vivent avec une famille nombreuse dans un F1 n’y auront jamais accès parce qu’ils ne connaissent personne.

La situation s’est un peu calmée aujourd’hui parce que la police anti-émeute reste à l’extérieur de la cité. Le bidonville est un enchevêtrement d’immeubles avec beaucoup de balcons, c’est très dangereux pour eux d’y entrer.

L’objectif pour les autorités, c’est de calmer la situation au maximum afin que la colère ne se propage pas aux cités voisines. Cette cité est d’autant plus un enjeu qu’elle est située à seulement 2 kilomètres de la présidence. Mieux vaut donc camoufler les violences très vite.

Mais je pense que les affrontements vont reprendre dès ce soir."

La suite

Messages

  • Le sociologue algérien qui dit que l’état fait ce qu’il peut, qu’il y a eu des constructions mais qu’il faut faire un tri des méritants ; donc il y a les prolos qui peuvent dormir dehors et ceux qui ont le droit à 4 murs.

    Cela me fait penser au délégué municipale du front de gauche à Nanterre qui dit la même chose à propos des crèches.

    LEs bureaux vides construits il y a quelques mois : 8000m² entre Nanterre et Rueil 2000.
    Plusieurs appartements vides dans des copropriétés car le sytème des syndics et des copropriétés ne veulent rien décider, ou parce que les propriétaires sont des personnes politiques à qui il faut une adresse de complaisance.

    Sans parler de la corruption pour l’attribution de logements, de places en crèches etc..les personnels qui montent les dossiers le constatent en permanence.
    L’Etat qui payent à ses hauts fonctionnaires des appartements de 400m² en plein Paris.

    LEs propriétaires/bailleurs qui osent faire payer 360 euros par mois un studio bourré de moisi car l’humidité était à 100%. La justice donne raison à la proprio.

    Les salariés des grandes multinationales, bénéficiant du 1% patronale, sont poussés dehors car ces entreprises vendent les logements au marché privé.

    Les tentes et les abris en carton, remplissent les bords de routes, de périphériques etc..

    Donc ce qui se passe en Algérie n’est que le début d’une vague de révolte qui touchera tous les pays du monde, par rapport à la question des logements et de la subsistance.

  • les problème est loin d’être fini en algerie depuis plusieurs Annes les luttes ne cesse de progresser.car depuis dix ans l’État algérienne massacre et humilié la populations .le raz le bol
    des gens contre le gouvernement et immense car depuis 1988 rien n’est réglé toute a augmenté
    le chômage la misère le clientisme le désespoirs d’ailleurs les manifestents l’ont exprimes en 2001
    vous ne pouvais pas nous tuer on est déjà morts. bientôt un nouveau 88 en algerie cette
    fois ils fau aller jusqu’au bout pour en finir . prolétaires égyptiens et prolétaires algériens
    nous ne sommes pas des ennemis, nos ennemis c’est nos gouvernements .c est nos dirigents
    qu’il faut tuer. vive les ouvriers egyptiens et les ouvries algeriens et mort aux gouvernements
    egyptien et algerinne. vive la revolution

  • Comme on le voit, la réponse du gouvernement algérien est d’instrumentaliser le foot ball en se servant d’un incident entre supporters pour monter toute la population pauvre contre la population égyptienne afin de détourner la colère sociale... avec le risque de morts d’hommes !!!

  • Nous nous assignons comme but final la suppression de l’État, c’est-à-dire de toute violence organisée et systématique, de toute violence exercée sur les hommes, en général. Nous n’attendons pas l’avènement d’un ordre social où le principe de la soumission de la minorité à la majorité ne serait pas observé. Mais, aspirant au socialisme, nous sommes convaincus que dans son évolution il aboutira au communisme et que, par suite, disparaîtra toute nécessité de recourir en général à la violence contre les hommes, toute nécessité de la soumission d’un homme à un autre, d’une partie de la population à une autre ; car les hommes s’habitueront à observer les conditions élémentaires de la vie en société, sans violence et sans soumission."

    Lénine

  • De violentes émeutes ont éclaté, hier, à Batna, région chaouie à l’est algérien. Lors des manifestations, un groupe de jeunes émeutiers a tenté de s’introduire dans la prison de Barika.

    L’intervention des forces de répression a dissuadé les manifestants qui ont coupé l’eau potable et empêché le ravitaillement de cette structure en denrées alimentaires.

    Selon des informations, une rumeur faisant état de l’annulation d’un projet de station électrique alimentée en énergie solaire serait la cause de ce soulèvement populaire. Les tentatives des autorités locales d’imposer le calme se sont avérées vaines. Le climat est très tendu et le risque de propagation de la protestation n’est pas à écarter en ces temps de vaches maigres en Algérie.

  • Imposée depuis quelques jours, l’austérité a déjà mis le feu aux poudres en Algérie. Des émeutes ont éclatées dans le Nord du pays, notamment dans le chef-lieu de la Petite Kabylie : Béjaïa. Des débordements survenus en marge d’un appel à la grève des commerçants, en réaction à la hausse de la TVA sur les produits de consommation.

    Le mouvement social a rapidement dégénéré à Béjaïa qui a connu des affrontements entre jeunes et forces de police. Des scènes de guérilla urbaine qui ont enregistré la dégradation d’édifices publics et le pillage de commerces. Un climat qui rappelle les événements de 2001 où la Kabylie a connu un vaste mouvement de contestation violemment réprimé par le pouvoir. Selon la presse algérienne, quelques quartiers d’Alger ont également été contaminés par les troubles, notamment le quartier chinois et la zone d’Ain Benian (Ouest). Des incidents qui ont été rapidement maîtrisés par la police.

    Ce mouvement social vient en réaction à la hausse de la TVA qui est passée de 17 à 19%, le 1er janvier dernier et représente la première grève générale de commerçant depuis la guerre d’indépendance. Pour la société civile, ce déchaînement de violence est contre productif et facilite la répression de l’Etat sous couvert de « rétablir l’ordre ».

  • Des affrontements entre des manifestants et la police ont fait un mort et des blessés hier à Ain Beida. Ces affrontements ont éclaté suite à une tentative de manifestation pour exiger une enquête sur la mort d’un jeune homme quelques heures après sa libération des locaux de la police, où il aurait subi des mauvais traitements.

  • La population d’Aïn Beïda, ville de la wilaya d’Oum El Bouaghi, dans l’est algérien, a vécu une nuit d’enfer mercredi 4 octobre. Une violente émeute a éclaté suite au décès tragique d’un jeune homme de 19 ans, après avoir été férocement brutalisé dans les locaux de la police, rapportent nos confrères algériens.

    Le décès de la victime, à la force de l’âge, a provoqué "une nuit d’émeute d’une violence inouïe", indique la même source, qui déplore aussi le décès d’un jeune émeutier de 25 ans, suite à une intervention policière "musclée" contre des jeunes sans défense en rajoutant ainsi au calvaire d’une jeunesse livrée aux gémonies par le régime répressif de Bouteflika.

    Outre les deux décès tragiques enregistrés, plusieurs dizaines d’émeutiers ont été blessés à Aïn Beïda, commune la plus peuplée de la wilaya d’Oum El Bouaghi, située dans la région des Aurès.

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