mardi 12 janvier 2010
Quelle intervention internationale après le séisme ?
Deux jours plus tard et un tremblement de terre est venu se rajouter à la misère et à la dictature :
Il ne suffit pas de dire : c’est le capitalisme.
Aux USA aussi, c’est le capitalisme. Le monde entier, c’est le capitalisme.
Mais tous les pays du monde ne sont pas occupés militairement par des milliers de militaires et de policiers des pays riches.
Les forces de l’ONU, la MINUSTAH, ne sont pas des forces d’aide à l’économie, à la nourriture et à la santé. Non, ce sont des forces armées.
S’y rajoutent des forces américaines, françaises et autres.
A remarquer que depuis la catastrophe du tremblement de terre, le peu de témoignages qui parviennent disent que la population s’auto-organise pour des secours mais qu’on ne voit aucun secours des armées, ni haitienne ni étrangères, pourtant nombreuses, aucun secours officiel ni de la minustah ni d’autres forces de l’Etat haïtien.
Il est nécessaire de rappeler que les révoltes sociales révolutionnaires menées par le peuple haïtien avaient été non seulement jusqu’à renverser des dictateurs mais même jusqu’à supprimer totalement les forces armées. l’armée était disparue de ses quartiers et ne les aréintgré que ces dernières années grâce à l’aide internationale.
Ces forces sont là pour aider les classes dirigeantes locales trop pourries pour être capables seules de rester au pouvoir face au peuple haïtien.
Elles sont là pour éteindre la flamme révolutionnaire du peuple haïtien.
Pour notre part, nous ne pleurons pas pour les peuples, nous sommes du côté de leur révolte !
Nous n’estimons pas que ce sont de "pauvres haïtiens" mais que ces prolétaires nous offrent une démonstration de courage dans leur lutte. malgré cette occupation militaire, malgré ces dictatures féroces comme celles des macoutes, celle de papa doc et bébé doc, vous avez mené vis luttes et vous êtres aussi révolté récemment contre la faim !
mais, en même temps, nous n’ignorons pas qu’ils ont été limités politiquement dans cette lutte par les forces politiques qui les dirigeaient, que ce soient des syndicalistes, les staliniens du parti dit communiste, des "démocrates" ou des religieux à la Aristide.
Du coup, ils n’ont pas pris le pouvoir qui était quasiment entre leurs mains.
Mais, s’ils n’ont pas pris le pouvoir, ils ont été assez loin pour se faire craindre des classes dirigeantes du monde. Et c’est cela qu’ils paient par l’occupation militaire.
FRÈRES HAITIENS, NOTRE COEUR SAIGNE AVEC VOUS ET NOTRE VICTOIRE FUTURE NE PEUT QU’ETRE LA VOTRE, CELLE DE TOUS LES OPPRIMES DU MONDE CONTRE TOUTES LES FORCES CAPITALISTES DU MONDE !
POUR SE SOUVENIR DES ÉVÈNEMENTS RÉVOLUTIONNAIRES, UN TEXTE DE L’EPOQUE :
LA REVOLUTION PROLETARIENNE EN HAITI
J.C. DUVALLIER CHASSE ... L’ARMEE AU POUVOIR
L’absence de direction révolutionnaire se fait immédiatement, douloureusement sentir en Haïti. Dans ce petit pays de 6 millions d’habitants se développe une authentique et profonde révolution prolétarienne. Toutes les couches exploitées et opprimées sont en mouvement. Sans quoi Jean‑Claude DUVALLIER n’aurait pu être chassé du pouvoir et contraint de fuir Haïti le 7 février (après trente ans de dictature de la famille DUVALLIERs il s’appuyait sur 200.000 "tontons‑ macoutes"). Sans quoi 18 mois après sa chute les puissantes grèves générales qui ont commencé le 22 juin contre le Conseil National de Gouvernement et celui qui le dirige, le général NAMPHY, qui ont succédé à J.C. DUVALLIER, n’auraient pas eu lieu.
Chasser DUVALLIER était indispensable. ‑ Tout devait commencer par là. Mais cela n’a pas suffi et ne pouvait suffire. Dans ce qui en constitue l’essentiel, l’armée et le corps des officiers, la police et ses détachements spéciaux, l’Etat bourgeois est resté en place. Y compris les prétoriens du régime DUVALLIER, les "tontons‑macoutes" n’ont pas été disloqués, liquidés. Le Conseil National de Gouvernement, le général NAMPHY, qui ont succédé au pouvoir à DUVALLIER, représentent le corps des officiers et les bandes d’anciens " tontons‑macoutes". Ils s’appuient sur eux. Comme le régime de DUVALLIER, ils bénéficient du soutien de l’impérialisme américain qui considère Haïti ainsi qu’une colonie. Le gouvernement en place dans le pays doit l’administrer à son compte et selon ses directives.
Suite à sa chute et à la fuite de J.C. DUVALLIER, le CNG et le général NAMPHY étaient par contre incapables d’éviter la floraison d’innombrables organisations politiques, la constitution de syndicats, une extraordinaire liberté d’expression, la naissance de multiples journaux, de postes d’émission de radio. Conjointement une formidable aspiration de changement radical de leurs conditions d’existence économique et politique anime le prolétariat, la population laborieuse, la jeunesse.
L’euphorie due à la chute de DUVALLIER et à sa fuite a rapidement pris fin. La déception, l’amertume et la colère ont suivi. Aucune des revendications économiques, sociales et politiques des masses populaires n’ont été satisfaites. Le CNG a plutôt aggravé leur situation économique et sociale et il veut imposer un cadre politique contraignant qui sauvegarde les intérêts de l’impérialisme américain et de l’oligarchie bourgeoise compradore. CONTRE LA TERRIBLE MISERE DES MESURES D’URGENCE
Les conditions de vie du peuple de Haïti sont effroyables. L’économie de Haïti est non seulement de type colonial mais elle a été soumise au pillage des DUVALLIER et de quelques familles. Cela allait jusqu’à : la vente de corps de Haïtiens morts aux universités américaines pour leurs classes d’anatomie ; la vente d’organes et du sang de Haïtiens aux laboratoires américains ; des Haïtiens étaient pour ainsi dire vendus en République Dominicaine comme coupeurs de canne à sucre. L’aide étrangère était en partie détournée dans les caisses des DUVALLIER et compagnie. DUVALLIER empochait 1 dollar sur chaque sac de farine sortant de la minoterie nationale d’Haïti et 50 cents sur chaque sac de ciment produit par la Société "Les ciments d’Haïti".
L’agriculture et l’industrie dépérissaient : l’agriculture ne satisfait plus que 60 % de la consommation d’une population mal nourries ; le revenu annuel par habitant (donc une moyenne qui comprend les revenus des plus riches et des plus pauvres) a baissé de 9 % entre 1980 et 1985 ; l’endettement extérieur atteint 1 milliard de dollars pour 5,4 millions d’habitants dans un pays où le revenu national par habitant (moyenne) était de 360 dollars en 1984, le plus bas d’Amérique latine. Le chômage touche 60 % de la population "active". Sur un autre plan : 80 % de la population est analphabète.
Seules les mesures économiques, sociales et politiques peuvent faire diminuer l’énorme et terrible misère populaire, réorganiser, réorienter et impulser la production. Expropriation de tous les spéculateurs, les prévaricateurs, les profiteurs d’hier et d’aujourd’hui. Mesures d’urgence qui permettent à chacun de satisfaire ses besoins élémentaires aussi bien par le paiement de salaires et l’attribution de ressources nécessaires que par la répartition des produits de première nécessité. Pas de superflu, de gros revenus, de grande richesse particulière alors que la classe ouvrière, la population laborieuse, la jeunesse souffrent de la faim, sont plongées dans la misère. Un emploi, un travail pour tous ceux qui peuvent travailler.
Rien que la réalisation de ces mesures exige l’organisation, l’intervention, le contrôle des travailleurs à tous les niveaux et dans tous les rouages de l’économie et de la finance et sans de profondes incursions dans la propriété privée des moyens de production et d’échange. D’emblée se pose la question : quelles décisions politiques sont indispensables pour appliquer ces mesures. En premier lieu, bien que cela ne suffise pas, tous les participants, les soutiens de la dictature, les profiteurs doivent être éliminés et châtiés. A l’évidence la bourgeoisie, compradore ou non, ne s’inclinera pas devant la brûlante nécessité de ces mesures d’urgence indispensables pour réduire dans l’immédiat la terrible misère populaire. L’impérialisme américain ne les acceptera pas non plus. LA POLITIQUE DU CONSEIL NATIONAL DE GOUVERNEMENT
Le CNG est l’instrument de défense de la bourgeoisie et de l’impérialisme. "Le Monde Diplomatique" de novembre 1986 écrivait :
" Si le rançonnement des patrons à pris fin, d’une certaine manière les postes clés sont toujours entre les mains des duvaliéristes. Et les structures des monopoles, de la contrebande et de la corruption demeurent en place solidement implantées. Elles peuvent réduire à néant les timides efforts d’assainissement conduits par le CNG. Ces effets sont notoirement insuffisants en matière d’épuration puisque jusqu’à présent, seuls deux grands tortionnaires de l’ancien régime ont été jugés : M. Edouard CLAUL, condamné à trois ans de prison et M. Luc DESYE condamné à mort ".
" Cette faiblesse à l’égard des hommes de main de la dictature est perçue par la plupart des citoyens comme un flagrant manque d’autorité et de légalité pour remettre de l’ordre dans la maison de fond en comble. Et tout est à faire : l’administration ne possède pas de fichier fiscal, il n’y a pas de registre de la fonction publique, aucun contrôle des fonds budgétaires ; bref, deux siècles après son indépendance, l’Etat haïtien reste effectivement à construire.
Les plus importantes décisions dans ce sens ne paraissent pas forcément heureuses, en particulier le projet de réduire de moitié le nombre des fonctionnaires et de renforcer, en revanche, les effectifs et la puissance des forces armées avec l’aide des USA. Cette dernière mesure, surtout, est interprétée par certains comme un moyen détourné d’intégrer les impopulaires "tontons‑macoutes" dans l’armée. Il va sans dire qu’un tel soupçon n’est pas de nature à calmer les esprits ni à apaiser les tensions sociales".
En quels termes ces choses‑là sont dites ! Le CNG ne fait aucun effort, même timide, d’assainissement sinon au compte du capital : privatisation et fermeture des sociétés d’Etat déficitaires sont à son programme. Les "citoyens" n’estiment pas que le CNG et le général NAMPHY manquent "d’autorité". Tout au contraire. Dès les mois de mars‑avril 1986 des manifestations, des grèves contre le CNG ont eu lieu. Le 26 avril 1986, devant la prison de Fort‑Dimanche, l’armée tirait : 7 morts. Une tentative de grève générale était sabotée par le PC d’Haïti et toutes les forces politiques bourgeoises pour qui, comme pour le PCH :
"le CNG est un gouvernement provisoire. Nous constatons qu’il est relativement paralysé à cause des contradictions internes, mais en même temps il réagit aux pressions des mouvements populaires et est amené à faire des concessions. Il est juste de parler d’apprentissage de la démocratie ; cela est également valable pour le CNG lui‑même. Avant de songer à l’élection présidentielle nous pensons qu’il serait préférable d’élire une Constituante qui pourrait elle‑même se convertir en Assemblée Nationale et désigner l’exécutif en attendant une normalisation".
Le CNG a tenté d’établir sa propre "légalité". Le 8 juin 1986, il annonçait que le 19 octobre aurait lieu l’élection d’une Assemblée Constituante. Il décidait que sur 61 "constituants", 20 seraient désignés par le CNG lui‑même. Les conditions d’élection éliminaient nombre d’électeurs et de partis. Les différents partis ont appelé au boycott des élections. 95 % des électeurs n’ont pas voté. Le CNG en a tiré la conclusion que le peuple haïtien n’était pas mûr pour la démocratie. L’ensemble des partis dont le Vent Communiste d’Haïti, l’église, ont appelé à voter "oui" au référendum du 29 mars organisé pour ratifier la "constitution". La fraude électorale éhontée s’ajoutant, il y eut 99,81 % de "oui", on ne sait cependant pas sur quel pourcentage de votants. La "constitution" prévoit l’élection d’un président de la République et d’une Assemblée. Le président de la République ne peut dissoudre le parlement. Le parlement ne peut renvoyer le président de la République. L’arbitre est de facto l’armée qui jouit de l’immunité. Elle constituera de fait le pouvoir réel. L’élection présidentielle devrait avoir lieu le 29 novembre 1987, le président élu entrer en fonction le 7 février 1988.
A peine la constitution était‑elle "ratifiée" dans ces conditions que le CNG dissolvait la Centrale autonome des travailleurs haïtiens pour avoir appelé à une grève générale à partir du 22 juin. La CATH appelait à la grève générale pour exiger la réouverture des entreprises d’État liquidées pour cause de déficit, la subvention du prix du riz récolté en Haïti, le dédommagement des planteurs frappés par la fermeture des sucreries, le doublement des salaires ouvriers (de 3 à 6 dollars par jour), etc... Il interdisait également toute manifestation commémorative de l’assassinat de manifestants par l’armée, le 26 avril 1986. LA GREVE GENERALE SABOTEE.
La grève générale lancée par la CATH pour la réintégration des travailleurs licenciés était largement suivie. A la suite de la promulgation d’un décret électoral réglementant les élections à venir et qui ne laissait qu’un rôle secondaire au Conseil électoral provisoire pourtant prévu par la constitution, la grève générale rebondissait et s’étendait. Un "comité de grève" constitué de "57 partis et organisations" lançait alors un mot d’ordre de grève générale à partir du 26 juin. Tout en annulant le décret et en relâchant des syndicalistes arrêtés, le CNG déclenchait la répression : en quelques jours l’armée et la police tuaient au mains 20 personnes et en blessaient des centaines d’autres. Après avoir suspendu, le vendredi 4 juillet# le mot d’ordre de grève générale, le comité des 57 appelait à une nouvelle grève relançant la semaine suivante un nouveau mot d’ordre de grève générale, grève ’qui allait, au cours des semaines suivantes, être interrompue, puis reprise, puis interrompue et ainsi de suite. C’est une technique soigneusement étudiée pour disloquer la grève générale.
Au lendemain des massacres par l’armée le "comité de grève" a "radicaliser" sa position. Il a réclamé le départ du général NAMPHY du CNG. Un de ses porte‑paroles précisait :
"Nous voulons rester dans le cadre de la constitution et nous sommes à la recherche d’une solution alternative démocratique".
Le "comité de grève" était à la recherche d"’un militaire patriote". Quant au Parti Unifié Communiste de Haïti, dès le début du mouvement, il définissait ainsi sa position :
Le Parti unifié des communistes haïtiens, quant à lui, fait remarquer que s’il reconnaît l’institution CNG, le gouvernement doit être composé d’autres personnes que des gens discrédités. Le PUCH met l’accent sur trois objectifs immédiats : le CNG doit retirer le décret de dissolution du syndicat (CATH) ; il doit revenir sur le décret anticonstitutionnel qui restreint les droits de Comité Electoral (CEP) ; enfin le PUCH demande que ce soit la CEP qui rédige le décret électoral puisque c’est la seule instance habilitée à organiser les élections. " ("L’Humanité" du 1/7/87.)
Depuis, la plupart des partis et, des organisations qui ont composé le "comité de grève" sont à la recherche, par la médiation de l’église catholique qui prêche le calme, d’un "compromis". UNE REVOLUTION PROLETARIENNE
La volonté de combat du prolétariat, de la jeunesse, de la population laborieuse est inappréciable, de même que leur capacité révolutionnaire. Mais tout est fait pour les désarmer politiquement. Aucune organisation ne défend le programme, la politique, n’ouvre la perspective qui leur sont indispensables pour vaincre. Les masses populaires de ce pays, constamment écrasées sous une dictature, connaissent le prix des libertés démocratiques. En opposition à la tradition dictatoriale, elles sont pour une représentation démocratique et une Assemblée Nationale souveraine. Encore que l’usage fait par le général NAMPHY et le CNG du mot d’ordre d’Assemblée Nationale souveraine, ou constituante, n’est certainement pas sans l’hypothéquer. Contre la dictature ouverte des DUVALLIER, celle du CNG, combattre sur ces mots d’ordre et pour ces objectifs est indispensable.
Mais les libertés démocratiques sont nécessaires à la classe ouvrière, à la population laborieuse, à la jeunesse. Pourquoi ? Sinon pour s’organiser elles‑mêmes et comme moyens et instrument de leur lutte de classe en vue d’atteindre leurs objectifs de classe. Une représentation démocratique de toutes les classes de la société, une Assemblée Nationale souveraine ne sauraient se maintenir longtemps en période de révolution, alors que les antagonismes entre les classes s’exaspèrent et deviennent inconciliables, lorsque dans un délai proche une des classes fondamentales doit l’emporter sur l’autre. Qui peut nier qu’il en soit ainsi actuellement en Haïti ?
Les mesures économiques et sociales évoquées plus haut ne sont que des mesures d’urgence. Elles exigent déjà une profonde incursion dans la propriété privée des moyens de production et d’échange et seul un gouvernement ouvrier et paysan porté au pouvoir par le prolétariat, la population laborieuse et s’appuyant sur eux peut les prendre. Satisfaire les énormes besoins populaires exige de réorganiser, de réorienter la production, de l’impulser selon un plan élaboré et réalisé sous le contrôle des travailleurs. C’est pratiquement l’ensemble des grands moyens de production, les banques, les assurances qu’il faut exproprier, c’est une réforme agraire radicale qu’il faut réaliser, c’est la dette extérieure qu’il faut annuler. Un gouvernement ouvrier et paysan, l’organisation et l’action révolutionnaire des masses, sont indispensables.
D’autant plus que, tant du point de vue économique que politique, la révolution en Haïti ne peut être considérée et n’a d’avenir que dans la perspective de la révolution prolétarienne dans les Caraïbes et en Amérique latine qui dresse les masses de ces pays contre l’impérialisme américain notamment, et les bourgeoisies compradores, subordonnées, ou au moins étroitement liées, au système impérialiste.
Les mots d’ordre démocratiques, y compris celui d’une Assemblée Nationale souveraine, sont des mots d’ordre transitoires et subordonnés au mot d’ordre et au combat pour le gouvernement ouvrier et paysan. Ils doivent être des leviers aidant le prolétariat la population laborieuse, la jeunesse à s’organiser, à constituer leurs comités, à les centraliser, à former leur propre parlement, leur propre exécutif ‑ comme doivent y contribuer tous les mots d’ordre et revendications de transition. L’objectif c’est : la prise du pouvoir par le prolétariat, la destruction de l’Etat bourgeois, la construction de l’Etat ouvrier fonctionnant selon les normes de la démocratie ouvrière. L’ARMEMENT DES OUVRIERS ET DES PAYSANS
Quelque soit le pays où elle se produit, dans toute grande lutte de classe, le prolétariat, la population laborieuse, la jeunesse sont généralement confontés à la police et à ses détachements spéciaux, lorsqu’ils ne les affrontent pas. Depuis longtemps la bourgeoisie évite autant que possible d’engager l’armée, lorsque c’est une armée de conscription, contre la classe ouvrière en mouvement : elle craint que les soldats ne se souviennent qu’ils sont des prolétaires sous l’uniforme. De plus, souvent l’armée semble avoir d’autres "missions" qu’une mission de guerre civile : la défense du pays. La fonction fondamentale de l’armée et du corps des officiers est très souvent masquée. En réalité dans tous les pays impérialistes, la fonction de l’armée et du corps des officiers est toujours la défense, à l’intérieur et à l’extérieur des frontières, des intérêts du capitalisme du pays qui est le leur. En cas de révolution prolétarienne# dans tous les pays, l’armée et le corps des officiers a comme tâche essentielle, la guerre civile au compte du capital, contre la classe ouvrière, la population laborieuse, la jeunesse, pour noyer dans le sang, si nécessaire# la révolution. Il faut remarquer d’ailleurs que la tendance actuelle des bourgeoisies des différents pays capitalistes et notamment impérialistes# est de revenir à une armée de métier, instrument beaucoup plus maniable entre les mains du corps des officiers que l’armée de conscription.
Dans la plupart des pays semi‑coloniaux, notamment en Amérique latine, Caraïbes comprises, l’armée a une fonction et une seule, évidente à tous : la guerre civile, le maintien de « l’ordre » impérialiste et bourgeois dans le pays. Une fois encore, en Haïti elle remplit cette unique fonction. Il ne peut y avoir d’authentique combat pour les libertés démocratiques, une Assemblée Nationale, et bien sûr pour les revendications du prolétariat, que sur la ligne qui mène au gouvernement ouvrier et paysan qui inclut une politique de liquidation de l’armée, du corps des officiers, de la police, de ses détachements spéciaux, des "tontons‑macoutes". Jamais la bourgeoisie, jamais aucune organisation ou parti de la bourgeoisie ne s’engageront sur cette voie. Tout juste parleront‑ils, s’ils ne peuvent faire autrement et pour faire illusion "d’épuration".
Seuls le prolétariat, la population laborieuses la jeunesse peuvent s’y engager. En Haïti, rien de plus urgent aujourd’hui que de développer une agitation politique, en relation avec les autres mots d’ordre, face à la répression et aux fusillades de l’armée, pour l’armement des ouvriers et des paysans. Commencer à organiser des groupes d’auto‑défense de travailleurs armés, s’orienter vers les milices ouvrières et paysannes, contre l’armée, le corps des officiers, la police, les " tontons‑macoutes" est une impérieuse nécessité. Attendre du pouvoir bourgeois leur liquidation est vain et dangereux. Espérer qu’ « ils » se désagrégeront du seul fait de la grève générale ou de tout autre mouvement n’est pas moins dangereux. Par une politique résolue, en commençant à s’organiser en milices et à s’armer, seuls les travailleurs les feront se disloquer, éclater, les liquideront.
Voilà qui situe bien la nature de la révolution en cours en Haïti : une révolution prolétarienne. Elle s’oppose radicalement aux gouvernements, au pouvoir, à l’État bourgeois. Pour le prolétariat une seule issue positive : prendre le pouvoir en s’appuyant sur les couches exploitées et opprimées, détruire l’Etat bourgeois jusqu’en ses fondements, constituer un Etat ouvrier. Aucune organisation ne l’explique et ne pratique une politique en conséquence. Aucune organisation ne développe d’agitation pour l’armement des ouvriers et des paysans et n’agit pour la constitution de la milice ouvrière et paysanne. Là réside une des faiblesses de la révolution en Haïti.
Les troupes françaises dehors, elles aussi !
Les troupes de l’ONU en pleine action contre les quartiers populaires
Des militants haïtiens déclarent : « N’écoutez pas ceux qui vous disent que ces soldats ont été envoyés pour la paix ! En réalité depuis 4 ans certains ont pris part à de multiples exactions dans les quartiers populaires. Des soldats et régiments entiers sont accusés et assignés en justice, de crimes, de vols et de viols. Alors qu’en avril dernier le riz et les céréales avaient doublées de prix sous l’effet de la spéculation internationale et que notre peuple comme dans 40 autres pays du monde est descendu dans la rue pour protester, ce sont ces soldats de la MINUSTAH qui ont réprimé et tiré sur le peuple qui avait faim, faisant 6 morts et 190 blessés par balles. Au nom de quoi devrait-on accepter que ces exactions et que cette occupation militaire continuent, que soient foulées aux pieds l’intégrité, la souveraineté et la constitution même de notre nation ? »
Ils poursuivent « Comme vous le savez, notre pays vient de subir en moins de 2 semaines le passage des ouragans Fray, Gustav, Hanna, el Ike. Tous les départements de notre pays ont été gravement atteints, certains complètement ravagés, faisant officiellement plus de 600 morts, 50 disparus et 800 000 sinistrés. Cette situation se trouve aggravée par le fait que Ies quelques services publics qui subsistent et n’ont pas été privatisés ou liquidés par les plans d’ajustement structurels sont aujourd’hui debordés ne pouvant pas réellement venir en aide à la très grande majorité de la population... Que les 40 gouvernements qui maintiennent ces régiments d’occupation, qui coûtent annuellement 540 millions de dollars US (chiffre publié sur le site de la MINUSTAH) retirent immédiatement ces régiments et s’ils veulent vraiment aider le peuple haïtien, qu’ils utilisent ces 540 millions de dollars pour remplacer ces soldats par des pompiers, des médecins, des personnels de la Sécurité civile, des techniciens, des ouvriers pour reconstruire les routes et toutes les infrastructures détruites. »
Considérant que Haïti – la première république noire – a subi les occupations étrangères au cours de toute son histoire, y compris l’occupation US d’une façon presque continue depuis le 29 juillet 1915, et
Considérant que les Etats-Unis ont fomenté deux coups d’Etat contre le président légitimement élu d’Haïti, Jean Bertrand Aristide, une première fois le 30 septembre 1991 et ensuite le 29 février 2004, et
Considérant que ces deux coups d’Etat ont été menés pour promouvoir les intérêts des entreprises multinationales US et les privilèges de l’oligarchie et assurer le remboursement de la dette extérieure contractée par les Duvalier, et pour maintenir les conditions de travail inhumaines permettant la surexploitation du peuple haïtien, et
Considérant que depuis le reversement d’Aristide en 2004, Haïti a été occupée par une force de soi-disant « maintien de la paix » de l’ONU — la MINUSTAH – qui n’est rien d’autre qu’une force d’occupation dirigée par les Etats-Unis contre les intérêts et la souveraineté du peuple haïtien, et
Considérant que les troupes de la MINUSTAH ont tué des travailleurs haïtiens et des militants qui luttaient pour le retour de la démocratie et la fin des conditions de travail semblables à l’esclavage imposées par les entreprises multinationales,
Ils réclament le départ de toutes les troupes d’occupation.
suite à venir...
Les troupes de l’ONU hors d’Haïti !
Récemment, de terribles nouvelles ont commencé à être connues révélant le caractère des forces d’occupation des casques bleus de l’ONU en Haïti (MINUSTAH). Durant l’attaque commandée par le Conseil de sécurité de l’ONU dans la nuit du 24 janvier (ainsi que les nuits suivantes), 400 soldats, soutenus par des hélicoptères, ont pénétré les quartiers les plus pauvres de Port Prince, la capitale, avec des véhicules blindés et des fusils automatiques d’un haut potentiel de feu. On estime que cette attaque a causé au moins 70 morts et des dizaines de blessés, bon nombre d’entre eux étant des enfants. (Rebelión, 10/02/07).
Un des secteurs les plus affectés a été Cité Soleil, où 300 000 personnes vivent dans des conditions de pauvreté extrême. Non contents d’assassiner des habitants sans défense, les hélicoptères de l’ONU ont détruit tous les réservoirs fournissant l’eau pour la région. La MINUSTAH a des camions-citerne pour le transport, mais l’organisation HIP (Haïti Information Project) a révélé qu’ils avaient confié la gestion de l’eau à des spéculateurs privés qui la revendent, ce qui oblige la population à marcher plusieurs kilomètres pour remplir un sceau d’eau.
Ce massacre est dans la continuité de l’action répressive que la MINUSTAH mène dans le pays. Cette fois elle est allée plus loin au point que, indépendamment des révélations faites par les organisations des droits de l’homme, l’ancien ambassadeur américain, James Foley, a mis en garde son gouvernement contre « l’utilisation démesurée de la force de la part de l’ONU ».
Un régime colonial
Haïti est l’un des pays les plus pauvres d’Amérique avec des indicateurs sociaux-économiques semblables à ceux des régions les plus pauvres d’Afrique. Sur ce continent, le destin du pays et de sa population serait probablement condamné à l’oubli. Mais Haïti fait partie des Caraïbes, une région clé pour l’impérialisme américain, qui la considère comme son « arrière-cour », où il se donne le droit d’intervenir politique et militairement. La précédente invasion des « marines » a eu lieu en 2004 pour renverser le Président Jean-Bertrand Aristide, un prêtre catholique qui, en 1986, avait gagné en prestige dans les quartiers pauvres de Port Prince, pendant la lutte qui avait jeté à bas la dictature sanguinaire de Duvalier.
Voilà comment un régime colonial sous occupation militaire a été installé. Peu de temps après cela, et afin de permettre à Bush de concentrer son effort militaire en Irak, les marines ont été retirés et remplacés par les casques bleus de l’ONU (environ 10 000 soldats amenés par le Brésil avec la participation de troupes venant d’Argentine, du Chili, et de l’Uruguay, entre d’autres). L’intention était de déguiser l’occupation impérialiste au moyen de troupes de « pays frères » venus du continent.
En 2006, dans le cadre de l’occupation et comme un moyen de déguiser le caractère colonial de la vraie situation, des élections présidentielles ont eu lieu. René Préval a battu le candidat soutenu par l’impérialisme (Leslie Manigat) ce qui a signifié - dans les faits - une défaite pour l’impérialisme. Défaite qui a été possible parce que les haïtiens se sont mobilisés massivement. Aussi bien les résultats électoraux que la mobilisation, ont démontré qu’il y avait une vraie colère contre l’occupation. Même si Préval agit en tant que marionnette de l’occupation, la résistance est toujours présente.
Les vraies raisons de ces massacres
Le prétexte utilisé par l’ONU pour justifier cette attaque est « la chasse aux bandes de criminels » qui agissent dans ces quartiers. Mais dans la réalité, ces bandes ont « le feu vert » des casques bleus pour que régulièrement elles agissent en tant qu’escadrons de la mort contre les activistes qui se battent contre l’occupation, et c’est, avec la complicité de la MINUSTAH. La haine de l’occupation s’est constamment accrue et elle est devenue manifeste lors des actions de masse contre la MINUSTAH et le gouvernement de Préval. Par exemple : le 16 décembre dernier, comme nous pouvons le voir dans une vidéo de la HIP, « plus de 10 000 personnes se sont mobilisés dans Cité Soleil en criant : « A bas Preval ! », et en exigeant le retour d’Aristide, la fin de l’occupation militaire et la libération des prisonniers politiques ». Des manifestations semblables ont eu lieu dans d’autres quartiers de la capitale et dans plusieurs autres villes dans le pays. La presse étrangère rapporte aussi le renforcement du mouvement de Lavala, liée à l’ancien Président Aristide. En conclusion, les massacres font partie de l’effort pour accroître l’occupation et contrôler le pays contre une situation que Le Monde (27/12/06) décrit comme « Le chaos règne en Haïti ».
Les laquais de Bush
Nous considérons particulièrement révoltant le fait que la majorité de troupes de la MINUSTAH ont été fourni par les gouvernements de Lula, Kirchner, Bachelet et de Tabaré Vázquez, et que celle-ci soit sous commandement du général brésilien José Elito Carvalho Siqueira. Les peuples latino-américains ont une grande dette historique de gratitude envers Haïti, la première nation indépendante sur ce continent (grâce à une révolution de ses esclaves noirs), et qui a octroyé l’asile et l’aide financière aux leaders de la lutte contre la colonisation espagnole tel Francisco Miranda et Simon Bolivar. Maintenant les présidents de ces pays, comme de véritables laquais de l’impérialisme payent leurs dettes en participant à l’invasion militaire et à la répression criminelle de la population haïtienne. Même l’administration d’Evo Morales fait partie de ce crime. Andrés Solís Rada, ancien ministre bolivien des hydrocarbures et de l’énergie, dénonce qu’Evo « a bloqué toutes tentatives d’empêcher les troupes boliviennes d’être envoyé au Congo et en Haïti » (Rebanadas de realidad, 19/01/07).
La MINUSTAH dehors !
La Ligue Internationale des Travailleurs - Quatrième Internationale exprime sa solidarité et son soutien le plus total dans la lutte de la population haïtienne contre l’occupation par la MINUSTAH et pour restaurer la souveraineté du pays. Nous dénonçons et condamnons ces massacres comme étant une nouvelle preuve du degré de cruauté que peut atteindre l’impérialisme pour la défense de ses intérêts. De ce point de vue, nous sommes totalement en accord avec le rapport émis par le coordonnateur du Comité Démocratique Haïtien en Argentine lorsqu’il exige « la fin des massacres et le retrait immédiat du MINUSTAH ».
Nous appelons toutes les organisations qui se réclament anti-impérialistes et démocratiques, a mettre en oeuvre une campagne unitaire d’information, de rassemblements et de manifestations sur ces points. Nous appelons tout ceux qui condamnent l’invasion de l’Irak à répéter la même unité pour Haïti contre l’occupation impérialiste qui est identique, même si pour Haïti elle est déguisée avec des casques bleus.
Cette campagne est particulièrement nécessaire dans des pays latino-américains tels que le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay, le Chili et la Bolivie pour exiger que leurs gouvernements cessent d’agir en tant que laquais de Bush et retirent leurs contingents armés. Nous nous adressons très particulièrement aux centrales ouvrières dans ces pays (CUT brésilienne, COB bolivienne, CTA argentine et PIT-CNT uruguayenne) lesquelles, indépendamment de leur position générale en ce qui concerne ces gouvernements, occupent une place centrale dans cette campagne.
Sao Paulo, 14 Février 2007
Secrétariat International de la Ligue Internationale des Travailleurs - Quatrième Internationale
La MINUSTAH hors d’Haïti !
Exigeons des gouvernements Lula, Kirchner, Bachelet, Tabaré et Evo, le retrait immédiat de ses soldats !
Vive la lutte du peuple haïtien !