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Les travailleurs de l’hôtel Park Hyatt Paris-Vendôme se révoltent

vendredi 20 septembre 2013

"J’ai nettoyé la chambre d’Eva Longoria et Tony Parker, moi !" Devant l’élégante entrée d’un palace parisien, femmes de chambre, bagagistes et autres petites mains de l’hôtellerie de luxe s’élèvent contre la sous-traitance et leurs conditions de travail.

Drapeaux rouges CGT, gilets fluo et slogans hurlés au mégaphone tranchent vendredi dans le décor de la rue de la Paix, à deux pas des bijoutiers de la place Vendôme.

"La lutte des classes, c’est ici", prévient l’écriteau d’un manifestant.

Une soixantaine de personnes, pour la plupart employées par un sous-traitant, la Française de services, protestent contre leurs conditions de travail au Park Hyatt Paris-Vendôme, un cinq étoiles qui a obtenu en 2011 la qualification de palace.

"Française voyou, Hyatt exploiteur", scandent les grévistes en distribuant aux clients des tracts rédigés en français et en anglais pour expliquer leurs revendications.

Les agents de service (femmes de chambre, valets ou équipiers) en sous-traitance demandent l’embauche par le groupe Hyatt, un 13e mois, le paiement des heures supplémentaires et l’amélioration de leurs conditions de travail. Ils avaient déjà fait grève la semaine dernière.

Ils ont été rejoints vendredi par sept salariés de l’hôtel, qui dénoncent leurs propres conditions de travail : journées à rallonge sans contrepartie, absence de 13e mois et de progression salariale.

"La direction de l’hôtel a voulu insister sur le fait que la grève était uniquement un problème de sous-traitance, mais ce n’est pas vrai. De nombreux collègues du groupe nous soutiennent, mais craignent des représailles", déclare Harold Kreyder, voiturier-bagagiste et délégué syndical CGT.

"On menace de les griller sur la place de Paris", assure-t-il, avant d’expliquer que les salariés en grève ont été inscrits comme membres du comité d’entreprise, pour bénéficier du statut de salarié protégé.

"Rihanna, Justin Timberlake, Johnny Depp"

Les clients de l’hôtel se faufilent au milieu de la protestation, certains levant le poing en l’air, pour faire mine de les soutenir. Côté rue, à bord d’une voiture de mariés, d’un petit train ou d’un bus touristique à impériale, des passagers applaudissent.

Une femme de chambre arbore autour du cou un panneau "Hyatt exploiteur". "C’est grâce à notre travail qu’Hyatt est passé en palace, dit-elle en demandant l’anonymat. On ne peut pas accepter qu’un palace fasse de la sous-traitance."

Une de ses collègues intervient : "Rihanna, Justin Timberlake, Johnny Depp... Tous sont venus ici. J’ai nettoyé la chambre d’Eva Longoria et Tony Parker, moi !"

"Toutes ces personnes viennent dans cet hôtel et vous pouvez imaginer que les femmes de chambre gagnent 800 euros par mois ? On veut que toutes les stars sachent ce qui se passe ici. Ils voient la propreté, mais ils ne savent pas ce qu’on endure", reprend la femme de chambre.

La direction de l’hôtel renvoie le règlement du conflit à son sous-traitant : "Park Hyatt Paris Vendôme n’est aucunement partie prenante au conflit en cours entre le prestataire et ses salariés", a-t-elle souligné dans un communiqué.

"Nous regrettons bien évidemment cette situation et, sans chercher à nous immiscer dans ce qui relève de la stricte compétence de notre prestataire, nous lui avons indiqué notre souhait d’en voir le règlement rapide, par un accord avec ses salariés, dans l’intérêt de chacune des parties et afin qu’il soit en mesure d’assurer les prestations qu’il s’est engagé à fournir et que les clients de notre hôtel sont en droit d’attendre", a-t-elle ajouté.

Quarante-quatre procédures sont en cours aux Prud’hommes, selon la CGT.

Les manifestants ont voté la poursuite de la grève jusqu’à mardi. Ce jour-là, qui coïncide avec le début de la fashion week parisienne, ils ont prévu un "défilé de mode alternatif" autour de l’hôtel.

Messages

  • Cette fois c’est à Marseille que les femmes de chambre se sont révoltées !

    A l’hôtel Radisson blu, sur le Vieux-Port, ces femmes de chambre donnent, depuis lundi, un tonitruant concert de casseroles devant le quatre étoiles marseillais. Les automobilistes leur répondent par de joyeux coups de klaxons ; les clients, par des regards perplexes. Dans l’univers feutré du luxe, l’irruption de ces femmes en colère détonne.

    Et ça se répète : la semaine dernière, ce sont les femmes de chambre de L’Intercontinental, toujours à Marseille, qui s’étaient déjà mises en grève. Et depuis le mois de juin, une demi-douzaine d’établissements ont, eux aussi, été touchés par un mouvement similaire.
    Marseille : le combat des femmes de chambre gagne le Radisson

    Cette fronde qui fait tache d’huile ne doit rien au hasard : depuis sa scission avec la CNT en 2011, la CNT-Solidarité ouvrière s’est justement construite sur la défense du "prolétariat moderne" constitué par l’armée des petits soldats du nettoiement. "C’est un secteur très précarisé, très peu syndiqué, constate Julien Huard, secrétaire départemental du syndicat. À Marseille, pour convaincre les femmes de se battre, il a fallu vaincre des peurs." Et l’appui d’une jeune juriste de 24 ans, Camille El Mhamdi, désormais salariée du syndicat. "Cette présence nous a aussi permis de mener des actions aux Prud’hommes", dans un autre temple touristique marseillais, le centre commercial des Terrasses du Port.

    Dans le petit monde des femmes de chambre, le bouche-à- oreille a fait le reste : les premières victoires du printemps (revalorisation salariale, fin du paiement à la tâche...) ont donné la niaque aux grévistes de l’automne. "La stratégie, détaille Julien Huard, c’est de faire pression sur les hôtels, dont l’image pâtit évidemment d’une grève." Pour l’heure, cette approche s’avère payante : après des succès à Paris, en 2014, au côté de la CGT-HPE (le groupe Accor et son sous-traitant avaient été condamnés à 400 000 € de dommages et intérêts), il n’a fallu que deux jours à L’Intercontinental pour trouver, avec son sous-traitant STN Groupe, une sortie de crise... victorieuse pour les femmes de chambre. Au Radisson blu, les négociations semblent avancer, même si Melody Bolle, la directrice de la communication de l’hôtel, demeurait prudemment en retrait : "Nous ne sommes pas au coeur de la négociation, jouer les médiateurs n’est pas notre rôle..." Mais le vuvuzela à l’heure du café-croissants, on se doute que cela fait désordre...

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