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"Les javanais" et "Planète sans visa" de Jean Malaquais

26 septembre 2016, 09:27

En 1926, le bac en poche, il décida de quitter Varsovie pour la France. Il y travailla comme ouvrier ; notamment dans les mines de Provence (La Londe-les-Maures). De cette expérience au milieu des étrangers parias et damnés de la terre, il tira la matière de son livre : Les Javanais, prix Renaudot 1939.

Il s’intéressa vite aux idées révolutionnaires. Le stalinisme le dégoûtait tout autant que l’ambiance nationaliste et xénophobe régnant en France. Il gravita autour de la Ligue communiste trotskiste dirigée par Alfred Rosmer, Pierre Frank, Pierre Naville (voir ces noms), mais ne s’y engagea pas à la différence de son ami Marc Chirik. (Voir ce nom.). Vers 1933, Vladimir Malacki, qui se faisait appeler Jean Malaquais (comme un quai de Paris), prit contact avec les groupes révolutionnaires à gauche du trotskisme : l’Union communiste de Henri Chazé (Gaston Davoust [voir ce nom]), les bordiguistes italiens - regroupés autour des publications Prometeo et Bilan - immigrés en France et Belgique (Ottorino Perrone, Otello Ricerri, Bruno Zecchini) [voir ces noms]).

Dans la dèche à Paris, il fit tous les métiers, y compris celui de débardeur aux Halles, sans avoir de domicile fixe. A la Bibliothèque Sainte-Geneviève, où il se réfugiait, il lit Céline et Gide. Un soir de 1935, il tomba soudainement sur ces lignes de Gide : "Je sens une infériorité de n’avoir jamais gagné mon pain". Jean Malacki, scandalisé, lui écrivit pour lui parler des conditions de ceux qui n’avaient pas de toit et vivaient dans la misère au jour le jour. Gide lui répondit à la poste restante de la rue Cujas, Malaquais n’ayant pas d’adresse, et lui envoya 100 francs, qui lui furent retournés. Il rencontra enfin André Gide à son domicile : " — C’est toi Malacki ? ". " — C’est toi Gide ? " Personne n’avait osé tutoyer le grand écrivain. Flairant vite un écrivain doué, passionné et riche d’une expérience de paria, Gide lui donna de l’argent qui lui servit à louer une maison en province, tout le temps nécessaire à l’écriture de son roman Les Javanais. Ce livre social sur l’immigration dans la France xénophobe des ligues d’extrême droite et du préfet Chiappe fut d’abord refusé par Gallimard, puis publié chez Denoël en 1939. Couronné par le prix Renaudot en 1939, le roman fut traduit dans plusieurs langues.

En août 1936, il partit en Espagne lorsqu’éclatèrent la révolution et la guerre civile ; il prit contact avec les milices du POUM et la colonne Lénine, dirigée par des dissidents bordiguistes italiens comme Enrico Russo (Candiani [voir ce nom]). Il rencontra Kurt Landau, trotskyste autrichien, qui sera bientôt assassiné par le GPU, Andres Nin, théoricien du POUM et autre victime du GPU ; et Gorkin, chef du POUM, qu’il retrouva et côtoya à Mexico pendant la guerre. Il eut le malheur de se retrouver un jour face à Ilya Ehrenburg, écrivain stalinien promu chef de brigade internationale. Il fut à deux doigts d’être exécuté comme ‘agent fasciste’ et provocateur. Il réussit à retourner en France, en septembre-octobre 1936. Il noua des liens avec Ante Ciliga et surtout Victor Serge, tous deux échappés du Goulag stalinien.

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