Accueil > ... > Forum 4471

Quoi de neuf dans la lutte des cheminots ?

4 juillet 2010, 16:11, par marek abdel

Suite grève de 1986

Le déclenchement de la grève

Deux jours avant le déclenchement de la grève, le 16 décembre, la SNCF se lançait dans une grande campagne télévisée. Des spots coûteux- cent millions de francs- sur le thème : « c’est possible à la SNCF ! » montraient les cheminots dont rêve la SNCF : dociles.

La veille de la grève, le journal le monde donnait la parole à Jean Dupuy, le Directeur Général de la SNCF, qui expliquait qu’il voulait mobiliser vingt mille agents de l’encadrement pour constituer auprès des cheminots ce qu’il appelait « des groupes d’initiatives pour le progrès ». Ceux-ci seront, disait-il, « une façon de donner aux cheminots des moyens et l’envie d’exprimer les idées qui leur trottent dans la tête pour améliorer notre fonctionnement. Ils diront librement ce qu’ils trouvent nécessaire pour une plus grande qualité de service. Ils parleront de leurs conditions de travail, parce que la liberté d’expression ne se divise pas. »

Le lendemain, en effet, les cheminots commençaient à exprimer toutes leurs idées. Et quelques jours plus tard, c’est dans la rue qu’on entendait le slogan : « Gagner : oui, c’est possible à la SNCF » !

Les réactions de la base contre les attaques de la SNCF

La grève a pris, à contre- pied, la direction. Celle-ci comme tous les patrons est engagée, depuis des mois et des années dans une offensive contre les conditions de travail et les salaires des cheminots, qui sembla même redoubler ces derniers mois.

Au cours de l’été, le ministre des Transports, Douffiagues, mettait en cause le statut des cheminots, annonçant clairement l’intention du gouvernement de liquider toute une série d’acquis. A la rentrée de septembre, la SNCF annonçait une nouvelle vague de suppressions de postes –huit mille deux cent officiellement- pour 1987. Puis c’était ensuite le projet de nouvelle grille des salaires, chez les sédentaires et chez les roulants, où la part à l’ancienneté dans les promotions disparaissait complètement. Même les médecins SNCF étaient mobilisés pour sanctionner les cheminots trop souvent malades au goût de la direction.

Début septembre, au dépôt Paris-La Chapelle, le dépôt qui fut à l’origine de la grève, la SNCF annulait une prime de cinquante-six francs par jours attribuée aux élèves-conducteurs. Cela équivalait à une perte sèche qui pouvait se monter à mille francs par mois pour des salaires, toutes primes comprises, de huit mille francs. Les trente huit élèves-conducteurs concernés s’étaient mis en grève et étaient rejoints par la quasi-totalité des cent quarante agents de conduite du dépôt en solidarité. Du coup, la direction reculait, partiellement au moins. Début novembre, c’est à l’ensemble des agents travaillant sur écran informatique, notamment ceux chargés de la vente et des réservations de billets, que la SNCF décidait de retirer une prime de « saisie informatique ».

Les employés des réservations décidaient une grève de la réservation qui s’étendait en deux semaines aux principales gares de France ; la SNCF reculait là encore. Dans un cas comme dans l’autre, c’était bien l’extension du mouvement ou la menace d’extension qui lui avait fait peur. Et aussi le fait que l’extension était due à la base, aux cheminots eux-mêmes. La grève de la réservation s’était étendue sans appel syndical, simplement en reprenant l’exemple donné par la gare Saint-Lazare, et appris par le téléphone de service ou par la télévision.

Ainsi, il s’avérait que de telles réactions pouvaient faire reculer la SNCF.

Dans le climat morose des premiers mois de la rentrée sociale, ces quelques réactions, comme sans doute d’autres ailleurs, passaient souvent inaperçues. Mais les leçons de tels mouvements n’étaient pas pour autant perdues. Elles étaient discutées par maints cheminots.

Etait présent aussi le souvenir de la grève « sauvage » des conducteurs du 30 septembre 1985. Après les graves accidents ferroviaires de l’été précédent, la SNCF avait tenté de faire porter la responsabilité aux cheminots. Des agents de conduite, elle entendait exiger « un contrôle d’aptitude » qui se rajoutait aux examens de sécurité déjà existants. Au dépôt de Chambéry, un premier agent de conduite ayant reçu une convocation à cet examen décidait, seul, de poser le sac. Le conducteur appelé pour le remplacer en fit autant. La grève partit comme une traînée de poudre, s’étendait à la totalité du pays en deux jours. Le 30 septembre au matin, la France se réveilla sans trains. Dans l’après-midi, la direction, qui la veille encore parlait de manière arrogante d’étendre son examen à toutes les catégories de cheminots, le remisa à toute vitesse.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.