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Révolutions de la Grèce antique

22 janvier 2013, 20:53

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Histoire de cette révolution à Athènes.

Les eupatrides, après le renversement de la royauté, gouvernèrent Athènes pendant quatre siècles. Sur cette longue domination l’histoire est muette ; on n’en sait qu’une chose, c’est qu’elle fut odieuse aux classes inférieures et que le peuple fit effort pour sortir de ce régime.

L’an 598, le mécontentement que l’on voyait général, et les signes certains qui annonçaient une révolution prochaine, éveillèrent l’ambition d’un eupatride, Cylon, qui songea à renverser le gouvernement de sa caste et à se faire tyran populaire. L’énergie des archontes fit avorter l’entreprise ; mais l’agitation continua après lui. En vain les eupatrides mirent en usage toutes les ressources de leur religion. En vain ils dirent que les dieux étaient irrités et que des spectres apparaissaient. En vain ils purifièrent la ville de tous les crimes du peuple et élevèrent deux autels à la Violence et à l’Insolence, pour apaiser ces deux divinités dont l’influence maligne avait troublé les esprits[7]. Tout cela ne servit de rien. Les sentiments de haine ne furent pas adoucis. On fit venir de Crète le pieux Épiménide, personnage mystérieux qu’on disait fils d’une déesse ; on lui fit accomplir une série de cérémonies expiatoires ; on espérait, en frappant ainsi l’imagination du peuple, raviver la religion et fortifier par conséquent l’aristocratie. Mais le peuple ne s’émut pas ; la religion des eupatrides n’avait plus de prestige sur son âme ; il persista à réclamer des réformes.
Pendant seize années encore, l’opposition farouche des pauvres de la montagne et l’opposition patiente des riches du rivage firent une rude guerre aux eupatrides. A la fin, tout ce qu’il y avait de sage dans les trois partis s’entendit pour confier à Solon le soin de terminer ces querelles et de prévenir des malheurs plus grands. Solon avait la rare fortune d’appartenir à la fois aux eupatrides par sa naissance et aux commerçants par les occupations de sa jeunesse. Ses poésies nous le montrent comme un homme tout à fait dégagé des préjugés de sa caste ; par son esprit conciliant, par son goût pour la richesse et pour le luxe, par son amour du plaisir, il est fort éloigné des anciens eupatrides et il appartient à la nouvelle Athènes.

Nous avons dit plus haut que Solon commença par affranchir la terre de la vieille domination que la religion des familles eupatrides avait exercée sur elle. Il brisa les chaînes de la clientèle. Un tel changement dans l’état social en entraînait un autre dans l’ordre politique. Il fallait que les classes inférieures eussent désormais, suivant l’expression de Solon lui-même, un bouclier pour défendre leur liberté récente. Ce bouclier, c’étaient des droits politiques.

Il s’en faut beaucoup que la constitution de Solon nous soit clairement connue ; il paraît du moins que tous les Athéniens firent désormais partie de l’assemblée du peuple et que le Sénat ne fut plus composé des seuls eupatrides ; il paraît même que les archontes purent être élus en dehors de l’ancienne caste sacerdotale. Ces graves innovations renversaient toutes les anciennes règles de la cité. Suffrages, magistratures, sacerdoces, direction de la société, il fallait que l’eupatride partageât tout cela avec l’homme de la caste inférieure. Dans la constitution nouvelle il n’était tenu aucun compte des droits de la naissance ; il y avait encore des classes, mais elles n’étaient plus distinguées que par la richesse. Dès lors la domination des eupatrides disparut. L’eupatride ne fut plus rien, à moins qu’il ne fût riche ; il valut par sa richesse et non pas par sa naissance. Désormais le poète put dire : dans la pauvreté l’homme noble n’est plus rien ; et le peuple applaudit au théâtre cette boutade du comique : De quelle naissance est cet homme ? — Riche, ce sont là aujourd’hui les nobles[8]. Le régime qui s’était ainsi fondé, avait deux sortes d’ennemis, les eupatrides qui regrettaient leurs privilèges perdus, et les pauvres qui souffraient encore de l’inégalité.
A peine Solon avait-il achevé son oeuvre que l’agitation recommença. Les pauvres se montrèrent, dit Plutarque, les âpres ennemis des riches. Le gouvernement nouveau leur déplaisait peut-être autant que celui des eupatrides. D’ailleurs en voyant que les eupatrides pouvaient encore être archontes et sénateurs, beaucoup s’imaginaient que la révolution n’avait pas été complète. Solon avait maintenu les formes républicaines ; or le peuple avait encore une haine irréfléchie contre ces formes de gouvernement sous lesquelles il n’avait vu pendant quatre siècles que le règne de l’aristocratie. Suivant l’exemple de beaucoup de cités grecques, il voulut un tyran.

Pisistrate, issu des eupatrides, mais poursuivant un but d’ambition personnelle, promit aux pauvres un partage des terres et se les attacha. Un jour il parut dans l’assemblée et prétendant qu’on l’avait blessé, il demanda qu’on lui donnât une garde. Les hommes des premières classes allaient lui répondre et dévoiler le mensonge, mais la populace était prête à en venir aux mains pour soutenir Pisistrate ; ce que voyant, les riches s’enfuirent en désordre. Ainsi l’un des premiers actes de l’assemblée populaire récemment instituée fut d’aider un homme à se rendre maître de la patrie.

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