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Salut à l’opposition de gauche internationale !

3 mars 2014, 22:30

Des centaines et des milliers de bolchéviks-léninistes languissent dans les prisons staliniennes, Hier encore, j’étais avec eux, et ensemble nous partagions toutes sortes de tourments que nous infligeaient les gardes-chiourmes staliniens. Aujourd’hui je me trouve dans un pays semi-capitaliste, en "liberté". Hélas, il me semble que pour un révolutionnaire, il n’y a pas de place libre sur notre planète. En tout cas, aujourd’hui j’ai la possibilité de prononcer publiquement une parole de protestation contre les usurpateurs staliniens. Le devoir révolutionnaire m’oblige à faire appel au prolétariat mondial, en lui demandant son aide pour libérer des prisons staliniennes les révolutionnaires dévoués, les martyrs - les bolchéviks-léninistes. Que le prolétariat mondial sache que le pays des Soviets, comme tel, est en train de périr imperceptiblement, car le pouvoir soviétique sans communistes actifs et indépendants est impossible. C’est pourquoi la lutte pour un véritable parti communiste, la lutte contre les usurpateurs et contre le régime plébiscitaire, est la lutte pour la libération du système soviétique de sa dégénérescence tragique.

Pour faire connaître au prolétariat la situation des bolchéviks-léninistes en U.R.S.S. sous le régime stalinien, j’écrirai purement et simplement quelques mots de ma propre expérience. Le 30 juin 1934, je me suis enfui de ma déportation en Andijan, en me fixant comme tâche d’aller à Moscou, et de me présenter personnellement au C.C. pour parler de mon cas avec les gens qualifiés. Encore en mars 1934 j’ai fait connaître par télé­gramme au C.C. qu’étant oppositionnel, partisan de Trotsky, je cessais mon travail idéologique et organisationnel contre la direction du parti, et que j’étais prêt à remplir avec dévouement toutes les tâches du parti dans sa lutte pour la défense des conquêtes d’Octobre et la construction socia­liste, en soulignant en même temps la nécessité de l’action commune de tous les communistes contre l’offensive de la réaction fasciste. Ayant envoyé cette dépêche au C.C. j’attendis une réponse annulant l’application à mon cas du paragraphe 58 [1] et me restituant mes droits de membre du parti. Juridiquement, évidemment, aucun juge ne m’a condamné selon ce paragraphe. Mais en fait j’ai été condamné à la prison et à la déportation perpétuelles. J’ai été quatre ans en prison et trois ans en déportation. Pendant tout ce temps je n’ai vu personne sauf le juge d’instruction du G.P.Ou. et le garde-chiourme. D’habitude le juge d’instruction m’interrogeait pour la forme et le garde-chiourme ouvrait et fermait la porte de ma cellule, quand c’était nécessaire. J’étais condamné à ce sévère isolement sans qu’il y ait une preuve matérielle quelconque contre moi. Trois fois on a perquisitionné chez moi, on n’a trouvé absolument rien. Mais on m’a arrêté quand-même et emprisonné. Si tu es trotskyste, tu dois être en prison ou en déportation… Si tu renonces à l’opposition, tu reçois le "minus" [2]. Ça sera jusqu’à un certain point une peine moins grave. Par exemple on peut te transporter de la Sibérie du Nord dans la Sibérie du Sud… Les simples oppositionnels, on les torture sans pitié, en leur proposant de renoncer à leurs opinions. Après l’interrogatoire, le juge d’instruction, avant de lire le verdict, te propose de renoncer à tes opinions et s’il reçoit comme réponse un refus catégorique, tu entends dans le verdict les paroles les plus effrayantes : "pour un travail anti-soviétique, anti-communiste, contre-révolutionnaire," etc... Ma dernière condamnation - trois ans d’incarcération dans les pri­sons centrales du G.P.Ou.-, je l’ai terminée le 22 janvier 1934 ; mais quand même je n’ai été "libéré" qu’après 14 jours de grève de la faim, c’est-à-dire que j’ai été déporté...

Les oppositionnels emprisonnés dans l’isolateur de Verchne-Ouralsk, au nombre de 150 (nous y étions 485, mais on transporta beaucoup d’entre nous dans les autres prisons après quoi nous sommes restés 150) ont déclaré la grève de la faim contre la prolongation des peines, car avant la grève, en été 1932, une commission quelconque avec une certaine Andréïéva en tête, était arrivée de Moscou à Verchne-Ouralsk pour adoucir "la situation matérielle" des communistes emprisonnés. Elle prolongea leur peine à tous ceux qui l’avaient terminée dans l’isolation. 103 camarades reçurent de nouvelles peines de deux ans. C’est la seule chose que fît cette commission pour adoucir "la situation matérielle" des bolchéviks-léninistes emprisonnés dans l’isolateur de Verchne-Ouralsk. Jusqu’alors aucune commission n’était jamais venue. Cette commission, nous l’avions exigée nous-mêmes contre le traitement bestial de l’administration de la prison. On nous frappait souvent, on nous guettait, la garde tirait dans les fenêtres, à la suite de quoi un de nos camarades, Iesaïan, fut blessé à la poitrine. Nous demandâmes la commission, mais selon l’habitude on nous la refusa. Alors 485 communistes emprisonnés déclarèrent la grève de la faim qui dura 18 jours. La commission arriva, dispersa les "emprisonnés actifs" dans les autres isolateurs, et le blessé Iésaïan fut envoyé en Sibérie. C’est ainsi qu’elle "adoucit" notre situation. Et voilà que l’année suivante une nouvelle commission arrive et prolonge nos peines. C’est pourquoi en 1933 nous fûmes obligés de déclarer la grève de la faim de tous les communistes emprisonnés dans l’isolateur de Verchne-Ouralsk contre cette injustice inouïe. Nous commençâmes la grève le 11 décembre 1933. Le 20 décembre on transporta sur les bras les grévistes d’une cellule dans l’autre. Cela, pour perquisitionner dans les cellules. Puis on commença à nous alimenter par la force. Ce fut un spectacle inoubliable ; des vraies batailles eurent lieu entre les grévistes et les gardes-chiourmes. Naturellement les premiers furent battus. Épuisés, nous fûmes alimentés par la gorge avec des pompes appropriée. Les tourments furent inouïs, on nous introduisit dans la gorge de gros tuyaux en caoutchouc, on traîna les grévistes comme les chiens crevés dans la "cellule d’alimentation", personne ne capitula séparément. Le 15° jour de la grève notre comité de grève décida de la terminer à midi car beaucoup de grévistes avaient essayé de se suicider. Un des collaborateurs du G.P.Ou. vint chez nous dans l’isolateur du district d’Ouralsk et commença à menacer les grévistes de les envoyer dans les "solovki". Nos camarades le chassèrent naturellement de leurs cellules. La décision du comité de grève fut acceptée par tous les grévistes à l’unanimité. le représentant du G.P.Ou. dût verbalement (il ne voulait pas pour des raisons inconnues le faire par écrit) promettre de libérer ceux qui avaient terminé leur peine. C’est ainsi que le 22 janvier 1934, ma peine se terminant, on me transporta dans la cellule des "libérables".

Tarov


Tarov a été arrêté en tant que membre de l’Opposition de gauche. Il a passé trois ans en déportation, quatre en prison dans d’atroces conditions d’isole­ment, puis, de nouveau, plusieurs mois en exil.

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