Accueil > ... > Forum 24413

Quand Paul Fabra prétend que la cause de la crise actuelle du capitalisme est... l’erreur de Karl Marx

17 avril 2014, 09:46

Si, du point de vue de la valeur d’usage, la marchandise prise isolément apparaissait à l’origine comme un objet indépendant, en revanche, comme valeur d’échange, elle était dès l’abord considérée par rapport à toutes les autres marchandises. Toutefois, cette relation n’était qu’un rapport théorique, existant dans la pensée. C’est seulement dans le procès d’échange qu’il se manifeste. D’autre part, la marchandise est bien valeur d’échange, pour autant qu’elle renferme un quantum déterminé de temps de travail mis en œuvre pour la produire et qu’elle est ainsi du temps de travail matérialisé. Mais, telle qu’elle est de façon immédiate, elle est seulement du temps de travail individuel matérialisé, ayant un contenu particulier, et non du temps de travail général. Elle n’est donc pas immédiatement valeur d’échange, mais doit tout d’abord le devenir. En premier, elle ne peut être matérialisation du temps de travail général qu’autant qu’elle représente du temps de travail appliqué à un but utile déterminé, donc contenu dans une valeur d’usage. C’était seulement à cette condition matérielle que le temps de travail contenu dans les marchandises était supposé travail général, social. Si donc la marchandise ne peut devenir valeur d’usage qu’en se réalisant comme valeur d’échange, elle ne peut, d’autre part, se réaliser comme valeur d’échange qu’en s’affirmant valeur d’usage dans son aliénation. Une marchandise ne peut être aliénée comme valeur d’usage qu’au profit de celui pour qui elle est valeur d’usage, c’est-à-dire objet de besoin particulier. D’autre part, elle n’est aliénée qu’en échange d’une autre marchandise, ou encore, en nous plaçant au point de vue du possesseur de l’autre marchandise, celui-ci ne peut également aliéner, c’est-à-dire réaliser, sa marchandise qu’en la mettant en contact avec le besoin particulier dont elle est l’objet. Dans leur aliénation universelle, en tant que valeurs d’usage, les marchandises sont rapportées les unes aux autres d’après leur différence maté­rielle d’objets particuliers, satisfaisant par leurs propriétés spécifiques des besoins particu­liers. Mais, en tant que simples valeurs d’usage, elles sont choses indifférentes les unes aux autres, et, bien plutôt, sans rapport entre elles. En tant que valeurs d’usage, elles ne peuvent être échangées qu’en se rapportant à des besoins particuliers. Mais elles ne sont échangeables qu’en tant qu’équivalents, et elles ne sont des équivalents que comme quantités égales de temps de travail matérialisé, ce qui efface toute considération de leurs qualités naturelles de valeurs d’usage et, par suite, du rapport des marchandises aux besoins particuliers. Comme valeur d’échange, au contraire, une marchandise se manifeste en remplaçant comme équi­valent n’importe quel quantum déterminé de toute autre marchandise, la première marchan­dise, étant indifféremment valeur d’usage ou non pour le possesseur de l’autre marchandise. Mais, pour le possesseur de l’autre marchandise, elle ne devient marchandise que dans la mesure où elle est pour lui valeur d’usage et, pour son propre possesseur, elle ne devient valeur d’échange que dans la mesure où elle est marchandise pour l’autre. Le rapport entre les marchandises doit donc être à la fois un rapport où elles apparaissent en tant que grandeurs essentiellement semblables, ne différant que quantitativement ; il doit s’exprimer par une mise en équation où elles apparaissent comme matérialisation du temps de travail général, et il doit en même temps être leur rapport en tant qu’objets qualitativement différents, que valeurs d’usage particulières répondant à des besoins particuliers, bref un rapport qui distin­gue les marchandises en tant que valeurs d’usage réelles. Or cette mise en équation et cette différenciation s’excluent réciproquement. Ainsi s’établit non seulement un cercle vicieux, la solution de l’un des problèmes supposant l’autre résolu, mais un ensemble d’exigences contra­dic­toires, la réalisation de l’une des conditions étant directement liée à la réalisation de son contraire.

Le procès d’échange des marchandises doit être à la fois le développement et la solution de ces contradictions, qui ne sauraient toutefois s’y manifester sous une forme aussi simple. Nous avons vu seulement que les marchandises elles-mêmes sont rapportées les unes aux autres en tant que valeurs d’usage, c’est-à-dire que les marchandises apparaissent comme valeurs d’usage à l’intérieur du procès d’échange. La valeur d’échange, au contraire, telle que nous l’avons considérée jusqu’ici, n’existait que sous la forme abstraite que nous lui avons donnée ou, si l’on veut, sous la forme abstraite que lui donne le possesseur de marchandises individuel, qui a la marchandise, en tant que valeur d’usage, dans son grenier, et l’a, en tant que valeur d’échange, sur la conscience. Or, à l’intérieur du procès d’échange, les marchan­dises elles-mêmes doivent exister les unes pour les autres, non seulement comme valeurs d’usage, mais comme valeurs d’échange, et ce mode d’existence qui est le leur doit apparaître comme le propre rapport des marchandises entre elles. La difficulté, qui nous a tout d’abord arrêtés, était que, pour se manifester comme valeur d’échange, comme travail matérialisé, la marchandise doit être préalablement aliénée comme valeur d’usage, trouver acquéreur, alors qu’inversement son aliénation comme valeur d’usage suppose son existence comme valeur d’échange. Mais supposons cette difficulté résolue. Supposons que la marchandise ait dé­pouil­lé sa valeur d’usage particulière et que, par l’aliénation de celle-ci, elle ait rempli la condition matérielle d’être du travail socialement utile au lieu d’être du travail particulier de l’individu pour lui-même. Il faut alors que, dans le procès d’échange, la marchandise, en tant que valeur d’échange, devienne pour les autres marchandises équivalent général, travail général matérialisé, et qu’elle acquière ainsi non plus l’efficacité limitée d’une valeur d’usage particulière, mais la faculté d’être représentée immédiatement dans toutes les valeurs d’usage considérées comme ses équivalents. Or chaque marchandise est la marchandise qui doit, par l’aliénation de sa valeur d’usage particulière, apparaître comme la matérialisation directe du temps de travail général. Mais, d’autre part, dans le procès d’échange, seules s’affrontent des marchandises particulières, c’est-à-dire des travaux d’individus isolés que matérialisent des valeurs d’usage particulières. Le temps de travail général lui-même est une abstraction qui, comme telle, n’existe pas pour les marchandises.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.