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Les mille et un mensonges de la « crise grecque »

2 juillet 2015, 08:28, par Robert Paris

Le caractère profondément bourgeois et officiel de Syriza se montre clairement dans son alliance politique avec le parti ANEL (Grecs Indépendants), une scission droitière et xénophobe du parti conservateur ND (Nouvelle Démocratie). La décision d’Alexis Tsipras, le dirigeant de Syriza, de former une coalition avec ANEL était sous tous les aspects, un choix. S’il l’avait voulu, Syriza aurait tout aussi bien pu former un gouvernement minoritaire et s’appuyer sur les voix du Parti communiste grec (KKE) et d’autres partis pour le soutenir dans ses principales initiatives politiques.

En s’alliant avec ANEL, Syriza cherchait à créer les meilleures conditions pour effectuer un virage politique à droite et voulait signaler à la bourgeoisie grecque et internationale que le nouveau gouvernement ne menaçait en rien ses intérêts fondamentaux.

On a confié le ministère de la Défense au dirigeant d’ANEL, Panos Kammenos, un homme très proche des militaires. Dans sa première déclaration en tant que ministre, Kammenos s’est engagé à trouver des fonds pour de nouveaux programmes d’armements, à maintenir les programmes actuels et à faire une revue des nouvelles menaces sécuritaires.

Syriza et Tsipras sont pleinement conscients des implications d’une telle nomination. Entre 1967 et 1974, la Grèce fut dirigée d’une main de fer par une junte militaire. Dans l’espace d’une semaine après avoir saisi le pouvoir, l’armée arrêta plus de 8.000 personnes à partir de listes méticuleusement préparées à l’avance. Des milliers de personnes ont subi d’horribles tortures aux mains du régime dans des camps spécialement conçus.

Kammenos qui a été député de ND pendant 20 ans a des relations étroites avec Panayiotis Baltakos, l’ancien secrétaire du conseil des ministres de l’ex premier ministre Antonis Samaras. L’année dernière Baltakos avait entamé le lancement d’un parti d’extrême droite, Rizes (Racines), basé sur « l’Eglise orthodoxe, les services de sécurité et les forces armées ».

Syriza fait ses propres ouvertures à ces forces. Dès la fermeture des bureaux de vote, le futur ministre de l’Intérieur, Nikos Voutsis, avait téléphoné aux chefs de la police et de l’armée. Le journaliste Paul Mason de Channel 4 News a rapporté que Voutsis leur avait dit, « Nous vous faisons confiance ». Mason a remarqué que cela était dit bien que « l’armée grecque et la police aient été organisées depuis la Guerre Froide pour réprimer l’extrême gauche, allant jusqu’à donner une formation politique à leurs officiers sur les périls du marxisme ».

Avant l’élection, Syriza avait annoncé son intention de dissoudre la police anti-émeute et de l’incorporer au reste de la police. Après son arrivée au gouvernement, cette promesse n’a pas duré une journée : un secrétaire d’Etat à l’Intérieur a annoncé que « la police aur[ait] des armes au cours des manifestations. »

Il est bien connu que le personnel de la police grecque se compose en bonne partie de partisans du fascisme. Dans l’élection de la semaine dernière, comme dans celle de 2012, entre 40 et 50 pourcent des policiers ont voté pour le parti fasciste Aube dorée.

La déclaration de Voutsis n’est pas de la naïveté politique. Il informe la police et l’armée que dans les circonstances d’une crise économique et sociale qui s’aggrave et confronté à l’inévitable apparition d’une contestation de masse dès qu’il commencera à imposer son propre programme d’austérité, Syriza aura recours à la force armée de l’Etat pour écraser l’opposition.

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