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Proudhon est-il le père de l’anarchisme ?

31 octobre 2018, 07:09, par Robert Paris

En 1847, Proudhon, en prévision des événements qui mûrissent, voudrait avoir une tribune. On trouve dans ses carnets intimes la note suivante :

« Tâcher de m’entendre avec le Moniteur industriel, journal des maîtres, tandis que le Peuple sera le journal des ouvriers. »

Au début de 1848, Guizot suspend les cours de Michelet, comme il avait suspendu ceux de Mickiewicz et de Quinet ; Proudhon se félicite qu’on ait imposé silence à ces « empaumeurs de niais » et quand les étudiants protestent, il note :

« Quand est-ce que l’on casernera cette jeunesse débauchée et tapageuse ? courage, Guizot ! »

La montée révolutionnaire au cours de février 1848 lui inspire cette seule note :

« Le trouble et le scandale augmentent. La France, si elle ne renvoie pas son opposition, est perdue. »

Dans un article de journal du 19 février 1849, Proudhon a d’ailleurs retracé son « anxiété dévorante » devant les événements :

« Je me révoltais contre la marche des événements... Mon âme était à l’agonie. Je portais par avance le poids des douleurs de la République et le fardeau des calomnies qui allaient frapper le socialisme. »

« Le 21 février au soir, j’exhortais encore mes amis à ne pas combattre. »

Il ajoute que la fusillade du 23 « changea ses dispositions en un instant ». C’est fort bien dit. Malheureusement c’est inexact puisque le 24 février il notait dans ses carnets intimes :

« Le gâchis est désormais inextricable... Je n’ai rien à faire là-dedans... Cela va être effroyable... »

et puisqu’il écrivait le 25 :

« Mon corps est au milieu du peuple, mais ma pensée est ailleurs. J’en suis venu, par le cours de mes idées, à n’avoir presque plus de communauté d’idées avec mes contemporains ; »

Le 26 septembre 1848, il rendait visite à Louis-Napoléon Bonaparte et le trouvait :

« bien intentionné : tête et cœur chevaleresques ».

L’indifférence en matière politique l’amènera à écrire quelques semaines après le coup d’État :

« En aucun lieu de la terre, l’esprit qui est tout l’homme n’est aussi libre que chez toi. » (Il s’agit de la France.)

Et encore :

« Louis-Napoléon est, de même que son oncle, un dictateur révolutionnaire ; mais avec cette différence que le premier consul venait clore la première phase de la révolution, tandis que le président ouvre la seconde. »

Le 12 janvier 1853, il sollicite du prince Napoléon une intervention pour la concession du chemin de fer de Besançon à Mulhouse. Si la concession était obtenue, il confesse qu’il y trouverait l’occasion de faire une étude sur le thème suivant :

« satisfaire aux justes exigences du prolétariat sans blesser les droits acquis de la classe bourgeoise ».

Cette formule lui avait été suggérée par le prince au cours d’un entretien, comme répondant exactement aux vœux de l’empereur. Il importe peu, dans ces conditions, qu’il ait noté, en même temps, dans ses journaux intimes que Louis-Napoléon était un infâme aventurier, bâtard d’une princesse, débauché, crapuleux... destructeur des libertés publiques, usurpateur du pouvoir, voleur du trésor, mystificateur du peuple, puisqu’à la même date, comme il le dit lui-même dans une lettre :

« J’ai été aux Tuileries, au Sénat, à la Préfecture, voir quelques connaissances que j’ai parmi les amis de Louis-Napoléon. » (10 novembre 1852).

Quant à son attitude réelle à l’égard du prolétariat,

« j’ai prêché la conciliation des classes, symbole de la synthèse des doctrines » (lettre du 18 mai 1850) ; « appuyé sur la réconciliation des classes »

(instructions pour la rédaction de La Voix du Peuple), elle résulte de sa correspondance comme de ses carnets :

« J’ai assez de la vile multitude et des démagogues... la classe la plus pauvre est, par cela même qu’elle est la plus pauvre, la plus ingrate, la plus envieuse, la plus immorale et la plus lâche. » (Lettre du 26 avril 1852.)

Ce qu’il y a de plus arriéré, de plus rétrograde, en tous pays, c’est la masse, c’est ce que vous appelez la démocratie.

Il ira même jusqu’à reprocher au gouvernement de Napoléon III de « soutenir secrètement les ouvriers contre les patrons » (16 mai 1853) ; il définira les tendances du gouvernement dans la formule suivante :

« Si nous ne pouvons fonder une nouvelle hiérarchie sociale en nous faisant accepter des prêtres, des bourgeois, etc., nous jetterons la bourgeoisie en pâture à la plèbe. » (27 novembre 1853.)

Proudhon a eu des tours et des détours mais il a toujours été violemment opposé à... la révolution !!!

Pourtant Alternative Libertaire tente de le sauver comme ANARCHISTE !!!

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