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Luttes de classe en Chine

29 novembre 2017, 07:01

Devant l’usine Jabil de Wuxi, près de Shanghaï, dans l’est de la Chine, rien ne laisse penser qu’une grève a eu lieu deux jours plus tôt. Les barricades improvisées qui bloquaient les entrées, mercredi 18 octobre, ont été nettoyées, et tout semble revenu à la normale. Tout juste remarque-t-on un nombre important de gardiens devant chaque entrée de l’usine. Mais l’atmosphère est tendue. Certains ouvriers coupent court à la conversation dès qu’on évoque la grève. Rien vu, rien entendu. Deux débrayages ont pourtant eu lieu en deux semaines chez ce fournisseur américain d’Apple, victime des mauvaises ventes de l’iPhone 8, d’après des employés. Des intérimaires réclament des primes promises au moment de leur embauche.

Ceux qui parlent sont ceux qui n’ont plus peur des répercussions. Deux trentenaires sortent de l’usine la mine sombre. Ils viennent de refuser d’être transférés dans la ville d’à côté, Suzhou, donnant, de fait, leur démission. « Moi, je n’ai pas fait grève, mais nous sommes des milliers concernés par les réorganisations. On s’est installés à Wuxi, ma femme travaille aussi dans l’usine, je n’ai pas envie de partir. » Son camarade raconte la même histoire et conclut, dépité : « On a travaillé pour eux des années, mais ils s’en foutent. Maintenant, on va chercher du boulot ailleurs. »

L’organisation non gouvernementale China Labor Watch (CLW), installée à New York, a rapporté un premier débrayage, le 11 octobre, suivi d’un second, le 18. Sur des vidéos postées dans un premier temps sur le réseau social Weibo (similaire à Twitter), on voit des dizaines, peut-être une centaine de salariés bloquant l’entrée du site Green Point de Wuxi. Quelques-uns sont ceinturés par des agents de sécurité de Jabil. Des policiers sont également présents.

Les infos sur les grèves ouvrières en Chine ont de plus en plus de mal à percer…

Quatre ans de prison pour Lu Yuyu : ce blogueur chinois a été reconnu coupable par un tribunal de la ville de Dali, dans le sud-ouest de la Chine, d’avoir « provoqué des troubles et attisé des querelles ». Lu Yuyu et sa compagne avaient été arrêtés l’an dernier pour avoir créé un blog répertoriant manifestations et mouvements sociaux en Chine.

Lu Yuyu est un ancien travailleur migrant. En 2012, il crée avec sa femme un blog qui recense toutes les grèves et manifestations d’ouvriers en Chine. Le couple met en évidence une explosion des conflits sociaux dans le pays : 5 000 en 2015 et 2016, selon une ONG basée à Hong Kong, le China Labour Bulletin.

C’est deux fois plus que les quatre années précédentes cumulées. Une augmentation due au ralentissement de l’économie, à la robotisation, aux fermetures d’usines. Le blog devient un outil pour les militants défendant les droits des travailleurs.

Lu Yuyu et Li Tingyu sont arrêtés en juin 2016, accusés d’avoir « provoqué des troubles et attisé des querelles », un motif souvent utilisé par Pékin pour faire taire les critiques. Li Tingyu a été jugée en avril dernier et libérée, sans que le verdict ne soit rendu public.

Lu Yuyu lui écope aujourd’hui de quatre années de prison ferme, une peine extrêmement sévère et d’autant plus inquiétante, souligne Amnesty International, que le blogueur ne faisait que compiler des informations publiques, et donc déjà disponibles ailleurs. Une peine qui, selon le China Labour Bulletin, résonne comme un nouvel avertissement pour ceux qui tentent de défendre les droits des travailleurs en Chine.

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