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Révolte au Mali contre Moussa Traore

19 novembre 2017, 09:56

Souvenons-nous....

L’ambiance dans la classe ouvrière est telle que, le 1er mai 1990, le syndicat unique UNTM (Union Nationale des Travailleurs du Mali), se prononce pour la première fois en faveur de la démocratisation du pays. L’Association des Elèves et Etudiants du Mali, après la répression de 1979, se réveille de longues années de silence et de soumission. AEEM et Comité National d’Initiative pour la Démocratie appellent à une manifestation pour le multipartisme le 10 décembre 1990. Plus de dix mille manifestants répondent à l’appel. C’est la plus grande manifestation jamais organisée au Mali sous le régime de Moussa Traoré. La manifestation se déroule pacifiquement dans la capitale Bamako, mais le pouvoir n’entend pas reculer. Les organisateurs et les manifestants non plus. Le 24 janvier 1991, ils appellent à une nouvelle manifestation qui va enclencher le cycle des affrontements se terminant par la chute de Moussa Traoré.

Les manifestants bloquent les routes et saccagent les édifices publics. Les forces de l’ordre ouvrent le feu faisant de nombreux morts et blessés. Le 25 janvier, des chars sont déployés dans les rues de Bamako et les écoles sont fermées. Le 28 janvier, à la nouvelle de l’arrestation de plusieurs élèves et étudiants, dont le secrétaire général de l’AEEM, Oumar Mariko, le mouvement explose en insurrection de toute la jeunesse, englobant celle des quartiers populaires. Ces derniers, tout particulièrement les jeunes chômeurs, armés de bâtons et de pierres, envahissent les rues de la capitale, brûlent des magasins et des édifices publics, ainsi que des voitures. Les résidences de plusieurs membres du gouvernement et du parti unique, dont celle du directeur général des douanes, beau-frère du président Traoré, sont entièrement saccagées. A partir de ce moment, les émeutes se multiplient tous les jours dans Bamako. ù les manifestants érigent des barricades. Cette situation se propage aux villes des régions. Les morts de manifestants et le nombre de blessés ne cessent de croître tous les jours. Le 29 janvier, ce sont des centaines de manifestants arrêtés qui sont torturés.

Le général-président annonce que l’interdiction aux associations de faire de la politique est levée, mais cela ne diminue pas la pression de la rue. L’AEEM revendique la libération de tous les emprisonnés. Le 31 janvier, le gouvernement laisse entendre qu’il pourrait libérer de nombreux manifestants arrêtés dont Oumar Mariko. Le 2 février, la télévision nationale annonce la libération de 196 élèves sur les 232 officiellement arrêtées. 34 détenus ont été déférés en justice et condamnées pour trouble à l’ordre public, pillage, incendie, dévastation d’édifices publics, vol et recel. Les Touaregs du nord du Mali s’invitent dans la lutte, en attaquant l’usine de phosphates de Bourem, à une centaine de kilomètres de la ville de Gao, dans la nuit du 21 février 1991, tuant deux militaires.

Le 22 mars 1991, les émeutes reprennent à Bamako. De violentes manifestations parcourent la capitale. Les forces de l’ordre tirent à balles réelles et tuent. C’est un véritable carnage à la mitraillette et à la grenade offensive. La guerre est déclarée par le pouvoir aux jeunes manifestants qui enflamment le ministère de l’emploi. Le 23 mars, la jeunesse scolarisée est rejointe dans la révolte par les chômeurs et les travailleurs.

Les émeutes s’étendent à l’ensemble du pays. Des répressions violentes ont lieu à Sikasso, Ségou et Diola. Certains policiers se font lyncher. Le centre commercial de Bamako est le siège d’un véritable carnage. Tout ce qui appartient aux responsables du régime est saccagé. Les commerçants sont attaqués eux aussi. Les morts continuent de tomber, mais, cette fois, la foule ne recule plus devant les forces de l’ordre. Les étudiants inventent un moyen d’autodéfense face aux policiers. Ils l’intitulent article 320 : 300 francs CFA pour acheter un litre d’essence et 20 francs CFA pour une boite d’allumette. L’action consiste à jeter de l’essence sur les forces de l’ordre et à lancer une allumette.

Les jours suivants, les manifestations continuent, s’attaquant à la BIRD et à la Banque Mondiale de Bamako. L’hôtel de ville est saccagé. Deux dignitaires proches de l’ancien président ont été lynchés par la foule en colère. Le 29 mars, des villas de dignitaires sont pillées. L’Etat d’urgence a été décrété dans les villes. Le bilan est de nombreux manifestant morts et de centaines de blessés dont certains ont les membres déchiquetés. Le chef de l’Etat lance un appel au calme et affirme sa « totale disponibilité pour une dialogue et une consultation et pour trouver des solutions durables des différents problèmes ». Les manifestants répondent « C’est terminé. On ira jusqu’au bout. » Il y a déjà un bilan de plusieurs dizaines de morts. La grève générale commence, paralysant le pays. Les mères de famille, révoltées que leurs enfants soient tués, marchent sur la présidence à Koulouba. Le général-président leur barre la route avec des blindés. Mais l’armée ne marche plus et on est à un doigt d’une grave mutinerie.

Affirmant agir en coordination avec les organisations démocratiques, les militaires déposent Moussa Traoré et prennent le pouvoir le 27 mars 1991. Un régiment de parachutistes commandé par le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré (dit ATT) arrête Moussa Traoré. Le chef du coup d’Etat prend la tête d’un « conseil de réconciliation nationale » auquel collaborent l’UNTM et l’AEEM. Le multipartisme est instauré.

La révolution est détournée, trompée, faussée, volée... Jusqu’à aujourd’hui... Mais demain ?!!!

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