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Un camarade nous quitte : Jacques Morand

16 mai 2015, 16:20, par R.P.

Article de Jacques Morand :

Le dimanche 21 septembre 2008 la Fraction L’Étincelle a été exclue de Lutte ouvrière. Sans grande surprise pour ses membres puisque la direction avait annoncé son intention à l’avance. D’étrange façon il est vrai puisque c’est par voie de presse et non directement à la Fraction elle-même qui ne l’a donc appris que par les journalistes. Ce procédé révèle une conception des rapports internes dans LO qui nous semble bien éloignée de ceux que nous souhaitons pour le parti communiste révolutionnaire que majorité comme minorité veulent construire. Mais les mesquineries n’ont guère d’importance autre que d’en juger les auteurs.

En revanche on peut évidemment s’interroger sur les raisons qui ont poussé la direction de LO. Quel danger en effet pouvait bien représenter un groupe qui officiellement ne totalisait que moins de 3 % des membres de l’organisation ? Pourquoi nous exclure maintenant après avoir toléré la Fraction pendant 12 ans et s’être même servi de son existence pour tenter de convaincre que, contrairement à l’opinion généralement répandue dans et hors de l’extrême gauche, LO bénéficiait d’un régime interne des plus démocratiques ? Et il est vrai que si la direction en nous tolérant avait pris toutes garanties de rester à l’abri et maître de décider ce qu’elle voulait comme elle le voulait à tout moment (le refus de considérer comme membre de LO tout militant recruté par nous, par exemple, nous condamnait immanquablement à ne pas dépasser les 3 % de l’organisation), elle nous a laissé aussi parfois des possibilités de mener notre propre politique(même si ce ne fut pas sans réticence de sa part et sans combat de la nôtre, mais c’est là sans doute situation normale quand il y a opposition au sein d’un même parti) et une liberté pas toujours accordée aux minoritaires dans les organisations trotskistes ou d’extrême gauche.
Pour avoir combattu l’opportunisme…

Mais justement pourquoi revenir sur notre statut qui avait été accepté et dont nous avions usé (avec un respect scrupuleux des intérêts de l’organisation toute entière) pendant des années ? Au regard de ces confrontations ouvertes avec la majorité (interventions, désapprouvées par la direction de LO, pour susciter un mouvement contre les suppressions d’emplois autour des LU-Danone ou dans le mouvement étudiant contre le CPE, publication d’une revue commune avec un courant de la LCR, ce qu’était à l’origine Convergences Révolutionnaires …), les raisons formelles avancées aujourd’hui par la direction – notre politique lors des dernières municipales et notre attitude envers la tentative de la LCR de construire un nouveau parti anticapitaliste – n’apparaissent que comme de mauvais prétextes.

À Wattrelos, dans le Nord, la majorité avait décidé d’écarter les conseillers municipaux sortants LO, proches de la Fraction. Par là c’est bien elle qui a rompu la solidarité commune. Nous ne l’avons pas accepté, d’autant plus que cela était motivé par la volonté d’accomplir un tournant politique à 180° par rapport à la gauche et au PS. Dans l’espoir d’obtenir quelques postes d’élus municipaux, LO pouvait bien faire semblant d’adorer ce qu’elle avait brûlé jusque-là, promettre a priori de voter des budgets municipaux qu’elle avait refusés jusqu’alors. Nous n’étions pas d’accord avec ces palinodies, nous l’avons dit et nous avons agi en conséquence en présentant, sur la plate-forme politique qui était celle de LO jusque-là, les camarades qui la défendaient depuis 6 ans au sein du conseil municipal. Le fait que la majorité ait continué à refuser de faire liste commune avec nous, même après qu’elle eut essuyé un refus du PS, décidé d’un nouveau tournant à 180° et présenté une liste purement LO, corrobore que la rupture a bien été voulue et quasiment planifiée par la direction.

Le deuxième reproche qui nous est adressé est lui encore plus absurde : toujours lors de ces municipales nous avons passé alliance avec la LCR. La Fraction a en effet présenté une liste commune avec la LCR à Agen. Mais la majorité s’est elle-même présentée dans plusieurs autres municipalités sur les mêmes listes que la LCR, sans parler des villes où elle a explicitement recherché cette alliance sans la trouver, comme à Nantes par exemple. Alors ce qui était mauvais et vaut exclusion à Agen, était bonne politique à Nantes ou Alfortville ?

Les élections municipales sont passées et les démêlés qu’elles ont entraînés au sein de LO oubliés. LO elle-même après avoir observé pendant le temps d’une campagne électorale un silence de mauvais aloi sur la politique du PS et de la gauche, est heureusement revenue depuis à son attitude plus critique envers cette gauche et ce PS. Sur ce sujet en tout cas les frictions avec la Fraction auraient donc dû être du domaine du passé. Oui, vraiment, pourquoi donc ce qui était déjà un mauvais prétexte pour nous suspendre, l’est resté pour nous exclure neuf mois plus tard ?

C’est sans doute qu’il reste à faire le bilan de cette politique et des traces qu’elle risque de laisser : résultats décevants en terme d’élus alors que tout l’opportunisme déployé n’avait d’autre but que d’en obtenir beaucoup plus, image ternie de LO dans l’esprit de nombre de ses partisans et des travailleurs qui lui faisaient confiance, situation difficile des camarades élus sur les listes de gauche et pris maintenant entre les promesses faites à celle-ci et leur devoir de s’opposer frontalement à bien des aspects de sa politique y compris municipale. Voilà le bilan d’une politique calamiteuse, le bilan de la majorité, et c’est ce bilan… qu’elle ne nous a pas pardonné.

suite à venir...

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