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La grève des enseignants en Algérie

dimanche 15 novembre 2009, par Robert Paris

ALGER - Des centaines de milliers d’enseignants du primaire et du secondaire se sont mis en grève lundi en Algérie pour protester contre l’inflation responsable, selon eux, de l’annulation des hausses de salaire.

Ce mouvement, présenté par les syndicats d’enseignants comme le plus important depuis 2003, illustre la difficulté du pouvoir à maîtriser la hausse des prix évaluée par le gouvernement à 3,5% et par le Fonds monétaire international à 5,8%.

Selon Meziane Meriane, secrétaire général d’un syndicat indépendant de l’enseignement secondaire, 90% environ des professeurs des collèges et lycées étaient en grève à travers le pays. La proportion de grévistes serait légèrement moindre dans le primaire.

"Les traitements des professeurs ont été augmentés (l’an dernier) mais le problème est que l’inflation galopante a englouti toutes ces hausses", a expliqué le syndicaliste. "Ce que nous voulons, c’est que le niveau de vie de tous les fonctionnaires soit garanti".

Il a ajouté que le mouvement de grève se poursuivrait jusqu’à la fin de la semaine. Au cas où les revendications ne sont pas satisfaites, les syndicats se réuniront pour décider de la suite à donner.

Les syndicats autonomes de l’éducation affiliés à l’intersyndicale, qui ont initié cette action de grande envergure, n’ont pas caché leur satisfaction quant à la réussite de ce mouvement de grève. Le premier responsable du Cnapest, Nouar El Arbi, a parlé d’un taux de participation de 94% dans le secondaire, ce qui constitue pour lui une avancée non négligeable vers l’aboutissement des doléances des « donneurs du savoir ». M. Meziane Meriane, secrétaire général du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (SNAPEST), a quant à lui annoncé un taux de participation qui varie entre 90 et 100 % à travers l’Algérie, selon les régions. « Nous n’avons jamais atteint ce chiffre depuis 2003. C’est vraiment une grande réussite de la mobilisation et de l’unification syndicales », a-t-il déclaré.

La dégradation continuelle du pouvoir d’achat, le retard dans la promulgation du régime indemnitaire et la question des œuvres sociales et de la médecine du travail sont autant de raisons qui ont conduit les enseignants à observer un mouvement de grève qu’ils considèrent comme ultime alternative au recouvrement de leurs droits. « Cette grève est une action légitime pour faire valoir nos droits », nous a déclaré Nadia N., enseignante dans le secondaire à Tizi-Ouzou, non sans s’indigner contre « la dégradation du pouvoir d’achat des travailleurs de l’éducation qui buttent continuellement sur la cherté de la vie ».

La défense de l’école publique et de sa qualité par l’ouverture de postes budgétaires, l’allégement des programmes et du volume horaire des élèves, l’intégration de tous les enseignants contractuels en poste et la revalorisation des salaires sont des doléances récurrentes du corps enseignant. Mais les autorités de tutelle semblent, une fois de plus, faire la sourde oreille.

Par ailleurs, selon une correspondance de la wilaya d’Oran, la grève a été fortement suivie notamment au niveau secondaire atteignant un taux de 97%. « Cela est dû au Snapest qui maîtrise 53 lycées sur les 55 qui existent dans cette wilaya », nous dit-on. Les mêmes impressions ont été recueillies dans la wilaya de Annaba avec « un taux de 95% au niveau des écoles primaires et CEM et 100% dans les lycées », selon nos correspondants.

Dans la wilaya de Béjaïa, la grève a été suivie à « 80% dans les lycées, mais beaucoup moins au niveau des écoles primaires et CEM parce que c’est le Syndicat national des travailleurs de l’éducation (Snte), affilié à l’Union générale des travailleurs algériens (Ugta) qui domine », soulignent nos correspondants.

Le sit-in des professeurs contractuels de l’éducation nationale a eu lieu, hier, devant le siège de la tutelle à El-Mouradia à Alger. Ce rassemblement appelé par le Syndicat national des enseignants contractuels, affilié au Snapap, a duré près d’une heure avant qu’il ne dégénère.

Des syndicalistes ont été bastonnés sous prétexte qu’aucun rassemblement n’est toléré. Tout a commencé aux alentours de 11h30 lorsque des dizaines de personnes ont commencé à affluer vers le siège du ministère de l’Éducation pour prendre part au rassemblement. Sans surprise aucune, un important dispositif leur barre le chemin. Toutes les issues menant au département de Benbouzid ont été quadrillées.
Les manifestants ont été contenus sur le trottoir faisant face au lycée Bouamama (ex-Descartes). Un autre groupe est bloqué plus loin. La situation semble pourtant à ce moment-là maîtrisable. Des grévistes négocient avec les policiers pour qu’une délégation soit autorisée à se rendre au ministère de tutelle pour déposer une lettre dans laquelle ils demandent au ministre de revoir sa copie et d’ouvrir le concours de recrutement des enseignants aux professeurs contractuels.

Ils étaient loin de s’imaginer que le regroupement serait réprimé avec autant de violence. Obéissant aux ordres de leurs supérieurs, des policiers ont tabassé sans discernement les manifestants. Après des négociations très serrées, les éléments de la Sûreté nationale ont donné leur accord pour qu’une délégation accède à la Présidence et dépose a plateforme de revendications.

Les enseignants qui ont tenté de brandir des pancartes ont été bousculés, malmenés avant d’être interpellés. “Cette attitude nous renseigne sur le traitement réservé à la question des contractuels. Enfermé dans sa logique, le ministre du secteur refuse toute prise de contact avec les grévistes”, a déclaré Meriem Marouf, représentante du Syndicat national des enseignants contractuels. Elle
précise que le concours de l’éducation nationale, organisé le 17 novembre prochain, sanctionne de facto les enseignants contractuels puisqu’il exige une licence et un magistère pour postuler à l’examen. Au-delà des revendications salariales, les contractuels exigent leur réintégration dans leur poste de travail.

Par ailleurs, la grève se poursuit dans les établissements scolaires et les animateurs de cette action affichent, en dépit des menaces et des intimidations, leur entière détermination à poursuivre cette grève ouverte. Étant présents dans plusieurs wilayas du pays, les six syndicats autonomes de l’éducation nationale ont paralysé, encore une fois, plusieurs établissements scolaires. “La grève continuera. Nos revendications sont légitimes et nous n’avons reçu aucune notification de la justice”, ont affirmé, hier, les syndicats de l’éducation nationale.
Ils comptent poursuivre le mouvement de protestation et se disent, également, satisfaits de la mobilisation de leurs adhérents qui a atteint, selon eux, le taux de 90%. “Au lieu de chercher les vraies solutions aux problèmes des fonctionnaires, la tutelle se cache derrière les détails superflus et tente par tous les moyens de casser notre mouvement, en usant des vieilles méthodes”, s’indignent les syndicalistes.

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