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Quelques questions sur la crise de l’euro et de l’Europe

mercredi 12 janvier 2011, par Robert Paris

Crise de la Grèce ? Crise de l’Irlande ? Crise du Portugal ? Crise de l’Espagne ? Ou crise de l’Europe ? Crise du fonctionnement de l’Europe ou crise économique ?

Est-ce la fin de l’euro ou la fin de l’Europe ?

Crise de la monnaie ? Crise bancaire ? Crise de la dette des Etats ? Crise des économies ? Crise sociale ?

1°) Crise spécifique ou étape de la crise mondiale ?

2°) Crise réelle ou crise spéculative ?

3°) Crise des Etats ou crise de la bourgeoisie privée ?

4°) L’Euro et l’Europe sont-ils menacés ?

5°) Quelle réactions à prévoir pour la bourgeoisie européenne ?

6°) Quelles réactions des travailleurs et des peuples ? Quels moyens d’action ? Quel programme de lutte et de revendications ?

Il est clair que l’Europe est le centre d’une attaque spéculative qui vise ses Etats très endettés, sa monnaie et ses économies, les trois à la fois dans toute l’Europe et pas seulement dans quelques pays qui ont été désignés du doigt.

Même si les médias français font preuve d’un remarquable silence conjugué sur le sujet, la réalité de la crise de l’euro, expression de la crise mondiale, continue à se frayer son chemin dans les faits.

Derrière ce silence inquiétant pour un pays vu comme un élément central de la zone euro, ce qui apparaît est la panique des politiques et les divisions criantes quant aux mesures à prendre.

Aberration supplémentaire : chacun se concentre sur les problèmes de la Grèce, feignant de ne pas voir que, maintenant, la crise a largement débordé le petit cadre de la Grèce et s’attaque à l’ensemble de la zone.

La tragédie n’est pas grecque. Elle est celle de toute la zone euro et derrière elle, de toute l’Union européenne qui en est touchée de plein fouet.

Panique, divisions et contradictions

C’est une évidence majeure que de dire que la panique -pour user d’un terme modéré- a gagné les sphères les plus élevées de l’Union européenne et de la BCE.

L’annonce récente par la BEI (Banque Européenne d’Investissements) indiquant que son rôle est de financer des projets et non de couvrir des déficits publics des Etats est un signe qui ne trompe pas.

Les déclarations solennelles et les articles de presse rassurants ne font plus effet sur personne de réfléchi. Ce qui aujourd’hui est regardé par beaucoup comme une solution possible n’est que le report dans le temps d’une crise aggravé et démultiplié.

Au plus haut niveau de la zone euro et maintenant de l’Union européenne, les affrontements et contradictions sont manifestes. Cette situation est d’autant plus criante que personne n’est en mesure de définir avec clarté et un minimum de certitude une stratégie de sortie de crise apportant une solution durable. Ceci a un motif sérieux : il n’en existe pas !

Les pressions les plus fortes s’exercent pour que, rompant avec les Traités signés et acceptés, une intervention massive soit engagée afin de soutenir les Etats à l’évidence en grande difficulté.

Outre la question de la possibilité technique et juridique, dans le cadre des Traités actuels, de pouvoir s’engager dans cette voie que certains appellent « la voie fédérale », le problème essentiel est et demeure : cela suffira-t-il à endiguer la crise ou cela va-t-il, au contraire, l’aggraver en l’étendant encore plus largement ?

La zone euro et ses impasses

Il importe ici d’être clair et concret : bien évidemment, les dirigeants de l’UE et de la zone euro sont obligés de dire à leurs opinions publiques qu’ils agissent et vont agir.

La difficulté ici réside dans l’action elle-même et sa nature. Modifier les règles originelles qui ont conduit à la création de l’euro, c’est ouvrir les portes à d’autres problèmes que les concepteurs de l’euro et de la zone euro ont voulu éviter.

En d’autre termes, transformer la zone euro telle qu’elle est à ce jour en « union monétaire fédérée », c’est faire clairement faire porter sur toutes les économies et les budgets des Etats de cette zone les difficultés actuelles, mais aussi celles qui surviendront vite dans un tel cadre modifié.

En un mot, cela revient à propager la crise actuelle de quelques-uns pour le moment...aux 16 pays de la zone euro pour toujours !

Certes, ne rien faire reviendrait à attendre que la crise détruise et disloque la zone euro et achève l’euro.

Mais, agir de manière « fédérale » tend au même résultat à terme. Seuls les délais peuvent être reculés au prix de crises plus fortes et plus dramatiques, car remettre les déficits des budgets des 16 Etats de la zone euro dans la limite des 3% du PIB et ramener leurs dettes publiques en dessous de 60% est socialement explosif, pour chaque Etat, donc concrètement impossible à court terme !

En effet, un autre aspect des évènements nourrit les contradictions les plus violentes au sommet des structures européennes : la crainte- fondée- de véritables crises sociales à caractère insurrectionnel, comme cela se dessine en Grèce avec les récentes émeutes paysannes contre la fin des subventions au monde rural de ce pays.

Une « thérapie de choc », comme aiment à les appeler les économistes les plus cyniques, serait à la fois très probablement insuffisante afin de redresser durablement les déficits publics abyssaux (pour autant que ceux-ci soient sincères) et abaisser les dettes publiques, mais constitueraient des menaces terribles pour la stabilité sociale et politique même des Etats de la zone.

Gestion de crise à vue et explosions sociales en perspective

Le panorama qui s’offre aux yeux est donc celui d’une crise à étages multiples de la zone euro que la crise actuelle nourrit et développe rapidement.

Toute décision de type « fédéraliste » qui serait prise dans les jours qui viennent, quelle qu’elle soit, aurait des effets dangereux pour les 16 Etats de la zone euro, tandis qu’elle engendrerait des explosions sociales qui, pourraient, par leur intensité et/ou leur violence, annuler les effets des mesures prises, tout en étendant le rejet populaire massif de l’euro et des politiques économiques qui lui sont intrinsèquement liées.

Conclusions

1- Le mythe de l’euro protecteur et salvateur, est détruit dans l’opinion publique. Plus encore, son rejet comme monnaie apporteuse de malheurs croissants pourrait s’accentuer fortement dans l’opinion publique des 16 Etats concernés -notamment en Allemagne- si une orientation « fédéraliste » sur le plan financier était mise en œuvre, transformant contre son gré ce pays en « banquier de la zone euro ».

2- La zone euro et l’Union européenne telles que bâties jusqu’à ce jour sont condamnées : il est possible de retarder encore quelques mois, voire même un an la sentence, mais elle est déjà inscrite dans les faits inévitables qui découlent des processus actuels en cours sous nos yeux.

3- Cette crise de l’euro est bien l’expression particulière de la crise mondiale qui continue son cours : de ce point de vue aussi, toute décision interne à la zone euro aura des conséquences lourdes sur la marche générale de la crise internationale, avec effet boomerang prévisible.

4- Les bourgeoisies européennes sont incapables de freiner la spéculation, incapables de la condamner autrement qu’en paroles, incapables de la punir et de la faire payer, même si elle détruit des économies.

5- Les bourgeoisies européennes sont incapables de se passer de la planche à billets pour financer les économies privées en panne.

6- Les bourgeoisies sont incapables de surmonter leurs intérêts particuliers pour aller dans le sens d’un intérêt général à l’Europe. la crise est donc en train de faire exploser leurs alliances.

Quelle politique pour les travailleurs face à la crise ? Défendre l’Europe et l’euro ? Anticiper leur chute ou la revendiquer ? Ou défendre les intérêts des travailleurs et des peuples qui ne sont pas des intérêts nationaux ni des intérêts européens !

Se défendre derrière les frontières nationales est tout aussi illusoire que vouloir se défendre derrière les frontières de l’Europe. L’adversaire se défie de toutes les frontières. Il est tout aussi national qu’européen ou international. Ce sont les classes dirigeantes qui détruisent la société et ce n’est pas les gouvernants qui vont les en empêcher. Faire croire qu’en "défendant l’économie nationale" on défendra les travailleurs est un mensonge qui n’a rien d’innocent. Une certaine gauche propage ce genre de fausses perspectives et prétend qu’en sortant de l’euro on défendra les emplois et les salaires. une autre gauche déclare que l’euro est la meilleure défense. Bien entendu, ces gens-là n’ont rien à voir avec les intérêts des travailleurs mais leurs discours ont un certain poids dans les esprits.

L’impérialisme français n’a pas à recevoir le soutien des travailleurs, même sous prétexte de défendre les emplois !

La défense des travailleurs doit les unir par-delà les frontières mais aussi au delà des frontières de l’Europe.

suite à venir...

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