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L’impérialisme français réagit en vainqueur en Côte d’Ivoire. Rien de bon à en attendre pour le peuple ivoirien !!!

dimanche 22 mai 2011, par Robert Paris

Le Figaro, point de vue de la bourgeoisie française écrit : "Samedi matin, Nicolas Sarkozy se rend en Côte d’Ivoire. Une visite éclair, de quelques heures, officiellement purement protocolaire. Le président français vient assister, en compagnie d’une vingtaine de ses pairs, à l’intronisation en grande pompe du chef de l’État ivoirien, Alassane Ouattara. « Nicolas Sarkozy vient représenter un pays frère de la Côte d’Ivoire », insiste-t-on dans l’entourage d’Alassane Ouattara. La présence du ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, et de celui de la Coopération, Henri de Raincourt, montre qu’à Paris aussi on entend marquer les esprits.

Aucun président ne s’était rendu dans l’ancienne vitrine de la décolonisation depuis Jacques Chirac en 1995. Une autre époque. Entre ces deux dates, Paris et Yamoussoukro se sont brouillés. Abidjan a connu un coup d’État, une élection contestée, les émeutes anti-françaises de 2004, une guerre civile et l’intervention des troupes françaises le 11 avril dernier qui a permis aux forces fidèles à Alassane Ouattara de mettre un terme au régime de Laurent Gbagbo. Une aide décisive désormais assumée.
Présence militaire

« L’aide militaire française est indiscutable, reconnaît un diplomate. Le gouvernement d’Alassane Ouattara parle sans complexe de la portée du raid tricolore : « Il faut maintenant passer à autre chose, à la reconstruction du pays et là encore on souhaite que la France nous aide. » Paris a déjà débloqué une enveloppe de 400 millions d’euros. Dans les jours à venir, un conseiller militaire devrait être détaché auprès du président ivoirien. D’autres experts, notamment juridiques, devraient le rejoindre. Des nominations très rapides remarquées. Les fonctionnaires français, pléthoriques autour du président Houphouët-Boigny, avaient totalement disparu des palais ivoiriens.

Au-delà de la relance de la coopération, bloquée depuis 2004, le long entretien prévu entre Alassane Ouattara et son homologue français devrait se nouer autour d’un point délicat : la présence militaire française en Côte d’Ivoire. Dans le cadre des accords de défense signés au lendemain de l’indépendance en 1960, la France a longtemps entretenu une base militaire permanente en Côte d’Ivoire. Baptisé « 43e bima » (bataillon d’infanterie de marine), ce corps a été dissous en 2009. Depuis lors, Paris n’entretenait plus que « Licorne », une force engagée dans le cadre du déploiement de Casques bleus de l’ONU en Côte d’Ivoire. Cette mission internationale, dont l’objectif était de sécuriser les élections, devait plier bagages après le scrutin.

C’est de ce dernier retrait qu’Alassane Ouattara ne veut plus. Pour le président ivoirien, la situation sécuritaire en Côte d’Ivoire, où prolifèrent les armes, est encore trop instable pour une armée locale totalement désorganisée. Et un maintien des troupes françaises à moyen terme serait la seule garantie de maintenir la stabilité du pays. Jean-Louis Billon, le très influent président de Chambre de commerce et d’industrie de Côte d’Ivoire, va plus loin. « Il faut que le 43e bima soit rouvert. C’est le seul moyen de rassurer les investisseurs et de relancer le développement de la Côte d’Ivoire. »

« C’est une demande extrêmement difficile », souligne un diplomate. De fait, accéder à la demande ivoirienne entraînerait pour Paris un véritable changement de doctrine. La fermeture de Port-Bouët s’inscrit dans le cadre du redéploiement à la baisse des troupes françaises en Afrique. En février 2008, lors d’un discours au Cap en Afrique du Sud, Nicolas Sarkozy avait souligné que « la France n’a pas vocation à maintenir indéfiniment des forces armées en Afrique ». Quelques mois plus tard, le livre blanc de la défense entérinait ce désengagement pour ne plus garder que deux bases à Djibouti et au Gabon. Un retour en arrière serait complexe tant d’un point de vue stratégique que diplomatique. Alors que la France peine à mettre en œuvre sa nouvelle politique africaine, l’Afrique du Sud notamment verrait d’un mauvais œil ce changement. Quand au ministère français de la Défense, il compte déjà sur les gains financiers et humains que devaient entraîner ces départs pour soulager un peu son budget et ses troupes engagées sur de nombreux fronts.

Paris pourrait gagner un peu de temps avant de prendre une décision. La mission de l’ONU devrait en effet être maintenue plus longtemps que prévu.

Dans son bureau d’Abidjan, Pierre, un homme d’affaires français installé, ne cache pas sa satisfaction face au retournement de la situation en Côte d’Ivoire. « Être français en Côte d’Ivoire est de nouveau facile. Il y a comme un parfum des fastueuses années 1970. De toute façon l’armée française restera ici. C’est cher, sans doute. Mais ce que le France a perdu d’une main, elle le regagnera largement de l’autre. »

Interview de Cyril Musila

Atlantico : la présence de Nicolas Sarkozy à l’investiture d’Alassane Ouattara, est-ce une première pour un président français ?

Effectivement, il me semble que c’est la première fois. Je crois qu’il n’y a pas de président français qui ait assisté à l’intronisation d’un chef d’Etat africain. L’attitude de Sarkozy s’explique. Il était l’un des défenseurs de Ouattara. C’est en quelque sorte la reconnaissance de la consécration de la personne qu’il a soutenue, portée et carrément installée au pouvoir en bombardant le palais présidentiel d’Abidjan et pour avoir sorti Gbagbo et installé Ouattara. Il y a une sorte de logique. Il va jusqu’au bout de celle-ci. En même temps, cela peut être perçu par beaucoup ou en tout cas par les Africains comme un retour de la Françafrique sous un autre habit, avec un nouveau style et un nouveau modèle, mais sous couvert d’un dynamisme dont on ne comprend pas bien le sens. Mais surtout un président qui risque d’être reconnaissant vis-à-vis de ses supporters, de ses mentors, c’est la principale crainte des Ivoiriens. Que cela veut-il dire d’avoir été porté au pouvoir comme ça ? Que va-t-il donner en contrepartie de tous ses appuis ? Car cela n’est pas gratuit. C’est la grande question. C’est ce que l’on va observer. Alassane Ouattara va porter cela comme une sorte de manteau, tout le temps qu’il sera au pouvoir.

La venue de Sarkozy est en quelque sorte un aveu sur le rôle que la France a joué dans la prise de pouvoir de Ouattara ?

Bien sûr, c’est très clair. C’est un aveu et la continuation de la logique. C’est quelque part aussi, l’intention peut-être qu’il y ait une nouvelle lignée de chefs d’Etats plus attachés au sarkozysme, c’est d’ailleurs peut-être le premier, ou de mettre en place une autre forme de réseaux avec des chefs d’Etats typiquement issus de la patte sarkozyste.

La France a de nombreux intérêts en Côte d’Ivoire, comme ceux de Bolloré dans le port d’Abidjan…

Entre autres oui. Mais il y a aussi des secteurs miniers et un secteur pétrolier qui est très disputé, où il y a sans doute des positionnements qui pourraient être intéressants à observer. Il est clair que les intérêts les plus clairs et les plus visibles sont ceux de Vincent Bolloré au niveau du port ou du cacao, quand on connait un peu les relations plus ou moins personnelles et amicales entre le président français et Bolloré. On peut en conclure que cette visite est quelque part le rappel ou la consécration de ces enjeux économiques et que l’implication personnelle de Sarkozy dans le conflit ivoirien jusqu’à bombarder le palais présidentiel est analysée d’un point de vue africain comme ça, comme la consécration de cette politique.

La mesure de Sarkozy la plus remarquée est l’annonce du maintien des troupes française dans le pays.


L’arrestation de Gbagbo ne résout pas le conflit meurtrier qui sévit dans le pays. En outre, le soutien intéressé de la France à Ouattara va imposer une nouvelle dette aux Ivoiriens et faire les affaires des multinationales françaises.

La polémique continue de faire rage autour de la capture de Laurent Gbagbo, l’ancien président de Côte d’Ivoire. Ses partisans affirment que ce sont les soldats français du dispositif Licorne qui l’ont fait prisonnier. Les porte-parole d’Alassane Ouattara mais aussi de la France et de l’Onuci démentent, en s’en tenant à la version d’une opération menée entièrement par les hommes des Force nouvelles rebaptisées Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) de Ouattara.
En tout cas, sans les bombardements massifs aériens et terrestres du dispositif Licorne de l’armée française et de l’Onuci, les Forces républicaines n’auraient pas réussi à capturer Gbagbo ni vraisemblablement gagné la bataille d’Abidjan.
L’aide de la France et de l’Onuci ne datent pas de la résolution 1975 de l’ONU. En effet plusieurs mois auparavant, ils ont préparé cette attaque avec l’aide des gouvernements burkinabé et nigérian, fourni armes et munitions, formé et entraîné l’encadrement des FRCI et assuré la logistique tout au long de l’offensive.
Une fois de plus, ce qui était présenté comme une opération humanitaire n’est qu’une intervention militaire pour installer le protégé de l’impérialisme. Ce n’est pas nouveau, déjà les expéditions coloniales se présentaient comme des missions civilisatrices.
Dans cette bataille pour le pouvoir, Gbagbo comme Ouattara se sont conduits en seigneurs de guerre, utilisant milices, mercenaires et autres supplétifs pour terroriser les populations en perpétrant les pires exactions.
Évidemment, le bilan d’autosatisfaction de Juppé, ministre des Affaires étrangères – qui occupait le même poste à l’époque du génocide du Rwanda – souligne qu’aucun soldat français n’a trouvé la mort, mais se garde bien de communiquer le nombre de victimes ivoiriennes des bombardements français sur Abidjan.
Les populations civiles continuent de vivre la peur au ventre dans des conditions extrêmement difficiles, tant pour ceux qui sont resté en Côte d’Ivoire que pour les réfugiés.
Les opérations de ratissage des FRCI contre les milices pro Gbagbo occasionnent de nombreuses violations des droits humains et des exécutions sommaires, à tel point que les organisations humanitaires comme Human Rights Watch et Amnesty International1 ont protesté. Dans le même temps, les partisans armés de Gbagbo se désagrègent et forment des petits groupes qui pillent et violentent la population.
Ouattara se trouve dans une situation fragile. Son élection reste contestable aux yeux de nombreux Ivoiriens, son refus dès la fin des élections d’un recomptage ne fait qu’augmenter la suspicion. Mais surtout, Ouattara se retrouve otage vis-à-vis des chefs de guerre des FRCI. En effet, ces « Com Zone » (commandants de zone) dirigent les régions du nord du pays et s’enrichissent en imposant un racket sur toutes les activités économiques. Il sera difficile à Ouattara d’imposer un État de droit qui suppose de faire le ménage. Les forces armées qui l’ont soutenu sont loin d’être unies, comme on a pu le constater lors des affrontements à Abidjan.
Redevable aux chefs de guerre du nord du pays, il l’est aussi à l’Onuci mais surtout à la France qui veut faire de la Côte d’Ivoire un Eldorado pour les entreprises de l’hexagone, à la manière de ce qu’ont fait les USA avec l’Irak. Le gouvernement français vient de débloquer 400 millions d’euros sous forme de prêts pour la reconstruction du pays, soit plus du double de l’engagement de l’Union européenne.
Ces sommes iront directement dans la poche des multinationales françaises déjà très présentes dans le pays, pendant que le peuple ivoirien meurtri par la guerre se verra obligé de rembourser cette nouvelle dette… humanitaire.

Paul Martial

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