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Quelle est la politique des syndicats dans le conflit de PSA ?

jeudi 19 juillet 2012, par Robert Paris

Quelle est la politique des syndicats dans le conflit de PSA ?

Depuis des mois, les syndicats d’Aulnay déclarent qu’ils savent que le patron va fermer le site et ils ont eu tout le temps de développer leurs perspectives. Certes, ce même patron prétendait publiquement que c’était un projet ancien abandonné par la direction.

Mais les syndicats affirmaient qu’ils ne croyaient pas la direction. Quelle perspective défendaient-ils donc ?
Il y a bien sûr des grandes différences entre ces syndicats mais on peut dire qu’ils se rejoignaient pour la plupart pour :
 dénoncer spécialement les licenciements dans le cas d’une famille de grands patrons très riche
 développer une lutte concernant spécifiquement les salariés d’Aulnay et exigeant la non-fermeture du site sur l’argument du caractère indispensable de ce site et de la réfutation de la nécessité de sa fermeture dans l’intérêt de la firme.
 s’adresser à la population de la région et lui proposer de soutenir les ouvriers de PSA Aulnay
 exiger du gouvernement qu’il intervienne comme intermédiaire entre les salariés et le patron

Ces axes étaient en gros acceptés largement par plusieurs dirigeants syndicaux et n’étaient pas contestés par les salariés qui voulaient dénoncer la fermeture. Pourtant, nous voulons montrer que telle ne devait pas être la manière de poser le problème de dirigeants syndicaux se fondant sur les intérêts de classe des travailleurs.

Tous les points précédents méritent d’être discutés :

 les licenciements sont à dénoncer dans une grande entreprise qui fait des bénéfices autant que dans une petite entreprise qui en fait ou dans une grande qui, en ce moment, n’en fait pas. Les licenciements ne doivent pas être combattus entreprise par entreprise au nom de la situation de l’entreprise ni du type d’activité. Contester les licenciements, du point de vue des intérêts de classe des travailleurs, ce n’est pas entrer dans la logique du rentable, de l’efficacité, du site productif, soi disant nécessaire à l’entreprise. Même si bien des travailleurs pensent que leur travail est indispensable à l’entreprise et croient que cet argument renforce leur mobilisation. Cela a un autre inconvénient : cela les isole des autres entreprises. Faut-il se résigner dans les entreprises qui sont réellement en faillite ? N’est-ce pas une seule et même lutte qui doit être menée contre les licenciements dans les deux cas. Ne faut-il pas que toute la classe ouvrière s’unisse si elle veut avoir le rapport de forces permettant de remettre en question les licenciements et faire penser aux classes dirigeantes qu’elle représente un véritable danger social ?
 comment faire d’une lutte locale une lutte générale de la classe ouvrière ? En mobilisant la région contre la fermeture d’un seul site d’une seule entreprise ou s’adresser aux travailleurs de toutes les entreprises qui licencient et aussi de celles qui licencieront demain pour les appeler à s’unir. Partir peut-être de la mobilisation d’un site important menacé de fermeture mais pour en faire le point de regroupement des salariés de toutes les entreprises qui licencient, de toutes les catégories, professions et statuts.

 tous les mois dont ces syndicats ont disposé n’ont nullement servi à développer une telle propagande car aucun des syndicats d’Aulnay n’avaient cette volonté. Ils ont mobilisé les salariés de l’usine contre la fermeture d’Aulnay seulement et sans la relier aux menaces sur les autres sites de PSA et sans du tout les relier aux autres entreprises de l’Automobile ou d’autres secteurs de la classe ouvrière. Le simple fait de mettre sans cesse en avant des banderoles « non à la fermeture d’Aulnay » et des badges avec la même inscription exclusivement témoignait de cette orientation.

Pourtant, à l’époque celui qui le voulait savait déjà qu’une grande vague de suppressions d’emplois allaient concerner les travailleurs de tous les secteurs d’activité sitôt les élections terminées. Toutes les professions, toutes les régions allaient être touchées. Tout le monde pouvait le savoir, les syndicats comme les hommes politiques et les média. Le fait de ne pas relier l’attaque à venir contre les ouvriers d’Aulnay et celle contre tous les autres travailleurs était un choix d’autant plus remarquable que s’il existait à Aulnay un syndicat voix de son maître à Aulnay comme la CGC ou un syndicat patronal fasciste comme le SIA, la CGT par contre était dirigée par des militants de Lutte Ouvrière, organisation d’extrême gauche se revendiquant du trotskysme… dont le leader Mercier était même le second porte parole de l’organisation, conseiller municipal et candidat aux législatives pour cette organisation.

Son discours était sans conteste radical contre les mensonges patronaux mais sans conteste aussi il ne développait qu’un seule thème : le patron va fermer l’usine d’Aulnay. Et il s’en tenait strictement à ce point alors qu’il avait de multiples fois la parole dans les média en tant que représentant central de la CGT PSA…

Les discours des autres leaders syndicaux, que ce soit de la CGT ou d’autres syndicats, étaient le plus souvent encore bien pires…

A Aulnay, ils soutenaient comme on l’a dit au dessus la seule perspective syndicale qui disait que PSA se porte bien, n’a aucun problème, ne doit pas fermer, que les coffres sont pleins et que le gouvernement doit intervenir comme intermédiaire.

Ils ont co-signé une demande à Sarkozy dans ce sens. Ils n’ont cessé de demander des concertations Etat/patron/ syndicats, comme si le salut devait venir de là.
Bien entendu, ils s’appuyaient sur le fait que les travailleurs voient l’Etat comme l’intermédiaire indispensable, mensonge très généralement diffusé dans la population. Il n’y a rien d’étonnant que des syndicalistes diffusent la même thèse, sauf si l’un de ces syndicats est dirigé par des révolutionnaires comme le prétend la CGT d’Aulnay…

Ces syndicats d’Aulnay ne se sont donc pas tus pendant la campagne électorale, contrairement aux centrales nationales. Mais était-ce pour dire à l’ensemble des travailleurs, ceux de PSA, de l’Automobile, de toute la classe ouvrière : battons-nous ensemble et nous aurons les moyens d’interdire, nous, les licenciements ? Pas du tout ! Etait-ce pour dénoncer le silence complice des centrales concernant la vague de licenciements qui allait concerner tous les secteurs économiques et appeler tous ces secteurs à se mobiliser ? Du tout !
Non ! Ils disaient mobilisons Aulnay et demandons au gouvernement d’interdire les licenciements à Aulnay parce que, là, ils sont choquants vus que les profits de la famille Peugeot se portent bien, ce qui est un discours très différent…

Le simple fait que l’intersyndicale ait pu mener des actions, des manifestations, des pétitions, des mobilisations dans l’usine conjointement de la CGT-LO au SIA ex CFT, syndicat fasciste, en dit long sur le caractère de la politique menée par cette intersyndicale qui n’était nullement une politique de classe donnant une véritable perspective à la lutte…

Par exemple, le fait que la syndicaliste du SIA ait présenté les suppressions d’emploi comme une fatalité n’a pas représenté une gêne pour la CGT qui ne cessait de se féliciter de militer avec un syndicat patronal !!!
Le discours pseudo radical de la CGT de PSA Aulnay et de son leader Mercier posait lui-même problème.
Nombre de ses arguments étaient fallacieux. Il a publiquement déclaré que les licenciements étaient dus à des délocalisations alors qu’au contraire PSA avait maintenu l’essentiel de ses investissements en France, contrairement à son concurrent Renault.

L’explication du patron était certes contrée mais avec des arguments faux et dangereux car ils accusaient les travailleurs étrangers de leur voler leur travail. Mercier lui-même disait des choses allant dans ce sens, comme l’aurait fait Le Pen ou d’autres nationalistes comme le PCF…
La perspective était tout aussi fausse quand Mercier parlait de transformer Aulnay en une forteresse ouvrière comme si la lutte devait s’y cantonner…
Encore faux quand Mercier refusait de citer dans ses discours les menaces contre les salariés de Madrid et Sevelnord et de lier, lui qui se revendique d’appartenir à une organisation internationaliste révolutionnaire, les luttes par delà les frontières.

Certains discours apparemment radicaux étaient encore faux comme celui où il affirmait que « les travailleurs d’Aulnay vont vendre chèrement leur peau ».

Déjà à vendre la peau des travailleurs d’Aulnay le camarade Mercier ?!!!

C’est du défaitisme qui n’est pas révolutionnaire…

Bien sûr, Mercier est loin d’être le pire des dirigeants syndicaux, bien au contraire.

Depuis que PSA a dévoilé son plan de licenciements, on a pu remarquer que les dirigeants d’autres sites sont largement plus catastrophiques…

Anne Valleron, ingénieur chez PSA depuis 36 ans, déléguée CFE-CGC au comité de groupe européen a développé des arguments allant dans le sens de la direction. Elle a affirmé que personne, pas même la direction, « ne pouvait prévoir en 2007 que le marché européen allait passer de 18 à 14 millions de véhicules » et elle a déclaré qu’ « il est facile de relire le passé à la lumière du présent. » Donc le patron serait victime des circonstances. Elle est compréhensive vis-à-vis d’une direction qui supprime 10.000 emplois. Par contre, elle condamne les propos radicaux de la CGT d’Aulnay !
Le dirigeant CFTC de PSA Franck Don a estimé qu’il devait s’agir de circonstances exceptionnelles et il a déclaré que « Philippe Varin est un chrétien pratiquant et un homme de valeurs" et pour cette raison, estime Franck Don (CFTC), qui le côtoie à chaque CCE, "la façon dont a été géré ce dossier ne ressemble pas au Philippe Varin que je connais". La presse rajoute que « D’un naturel discret, l’ancien rugbyman, également amateur de voile, de tennis et de clarinette, n’hésite pas à entrer dans la mêlée pour défendre son cheval de bataille : la défense de la compétitivité en France. » Voilà un dirigeant syndical chrétien qui ne va pas se commettre dans une lutte de classe… contre un autre chrétien aussi adepte que lui de la compétitivité dans l’exploitation des travailleurs !!!

Dans la CGT, elle-même, le discours de Mercier est loin d’être le pire.

On a pu entendre le dirigeant de la CGT de Rennes affirmer que les licenciements à Rennes étaient dus au fait que l’on avait favorisé les salariés des autres sites et les entreprises situées à l’étranger !!!! Opposer les salariés de PSA entre eux, voilà ce qu’est le discours d’un dirigeant syndical CGT de Rennes !

Pendant des mois, la CGT a annoncé que la lutte visait à lutter contre la fermeture d’Aulnay et seulement d’Aulnay et elle vient seulement de changer son fusil d’épaule… mais c’est pour expliquer que la lutte va être longue et qu’il ne faut pas perdre ses forces. Il ne faut même pas faire grève plus d’une journée contre le plan de licenciements car il faudra garder des cartouches. Mercier explique que la lutte n’est pas un sprint mais un marathon et donc pas la peine de commencer à courir !

Pour Sud, il faudrait bloquer l’usine mais la CGT explique que 15 jours de blocage entraîne une perte de salaire, met les ouvriers sur les genoux financièrement et les épuise. De plus, cela peut servir à PSA pour accélérer son plan de supprimer une équipe pour le 31 janvier.

La CGT d’Aulnay, notamment par la voix de Mercier explique que « La syndicalisation à PSA est égale à la moyenne en France, entre 10 et 15% du personnel. Il faut donc mettre en place, dans la lutte contre PSA, une structure regroupant bien sûr les syndicalistes mais aussi les non-syndiqués, un comité d’organisation pour mener la lutte prolongée contre PSA, recueillir les sujétions, etc. Il faut respecter les points de vue différents et ne pas faire de différence entre syndiqués et non-syndiqués. Il ne faut rester pas enfermer dans l’usine mais élargir la résistance aux usines du groupe, puis sur les usine et entreprises du 93, près des centaines d’usines en France où les ouvriers et travailleurs sont menacés de licenciements, et élargir aussi à d’autres usines automobiles en Europe. »

Bien entendu, nous ne pouvons qu’être d’accord qu’il ne convient pas d’enfermer la lutte dans la seule usine d’Aulnay, d’autant que celui qui le dit était celui qui aprlait de transformer Aulnay en forteresse en se renfermant dans les murs…

Perspective fausse difficile à défendre maintenant qu’il est évident que les licenciements à PSA ne se cantonnent pas à Aulnay et que la vague de licenciements touche tous les secteurs, de la Téléphonie à l’Automobile et d’Air France au secteur public om le gouvernement pratique le non-remplacement des fonctionnaires partant en retraite et les suppressions de contrats précaires de manière plus dur que son prédécesseur de droite !

S’il se revendique de l’extrême gauche, en étant un des responsables de l’organisation Lutte Ouvrière, le responsable CGT de PSA Aulnay, Mercier, de famille PCF-CGT, qui est délégué syndical à plein temps de PSA, a développé sa dénonciation de la politique de PSA à la manière classique des délégués de la CGT et des militants du PCF. Loin de dire aux travailleurs que la perspective consiste à s’attaquer à l’ensemble des patrons, il a continué à revendiquer, comme un syndicaliste classique, des négociations avec le pouvoir d’Etat considéré par lui comme un intermédiaire nécessaire. Il jugé "insuffisants" samedi les propos de François Hollande sur le plan social au sein du groupe, estimant que l’Etat avait "les moyens d’interdire la fermeture" du site et "les licenciements".

"Pour nous, l’Etat a les moyens d’interdire la fermeture de l’usine et les licenciements. Récemment, il a interdit à Peugeot de vendre près de 200.000 véhicules à l’Iran, qui est le premier marché international de Peugeot. S’il peut faire cela, il peut interdire les licenciements", a-t-il affirmé.

C’est faux ! La classe ouvrière a les moyens de faire reculer les classes dirigeantes mais, en ce qui concerne l’Etat qui est au service de ces mêmes classes dirigeantes, c’est une illusion dangereuse de faire croire qu’il peut les interdire ! C’est donner une fausse perspective à la lutte qui vient.

« Il n’y a aucune raison que PSA annonce le moindre plan de suppressions d’emploi et encore moins de fermetures d’usine ». Jean-Pierre Mercier, délégué syndical CGT - PSA Aulnay fait la preuve, dans un communiqué de presse daté du 8 juillet 2012, que « les ventes sont loin d’être en recul et que PSA n’est absolument pas en difficulté. Au contraire, c’est un groupe multimilliardaire. ».

Certes, il y a un mensonge de la direction en la matière. Il faut donc expliquer pourquoi, aujourd’hui, les exploiteurs ne veulent plus exploiter autant de travailleurs. Mercier lui-même a un moment parlé de délocalisations. Mais la vraie réponse est dans l’analyse de la crise actuelle et Mercier se garde bien d’expliquer celle-ci.

L’opinion publique a, selon lui, assisté à « une véritable campagne mensongère de la part de la direction de PSA qui voudrait faire croire que les ventes de voitures pour le premier semestre ont considérablement chuté ».
Si ce n’est pas la baisse des ventes, ni des délocalisations, le désinvestissement de PSA comme de l’ensemble des capitalistes, c’est quoi ? Mercier se garde d’expliquer que la lutte actuelle n’est pas une lutte classique contre des licenciements dans une ou plusieurs entreprises mais une lutte contre un système qui n’a plus d’avenir car il a atteint ses limites.

Il se garde de dire que les travailleurs, pour offrir de nouvelles perspectives, doivent dépasser le cadre syndical réformiste… Il continue à discuter comme s’il n’y avait rien de changé au capitalisme depuis 2008…

A la veille du comité central d’entreprise où la direction doit annoncer l’ampleur de la restructuration du groupe, « il était impératif, pour PSA, d’annoncer une baisse des ventes et de rendre catastrophique la situation pour mieux justifier l’injustifiable ! », précise Jean-Pierre Mercier, avant de rappeler les chiffres records de 2010, ayant atteint 3 600 000 véhicules vendus et ceux de 2011, qui s’élevant à 3 550 000.

De plus, en décidant de suivre l’embargo sur l’Iran -2e marché pour le groupe, après le marché français-, suite à l’alliance avec la General Motors, « PSA a fait une croix sur une vente de plus de 450 000 véhicules par an ». En maintenant ses ventes en Iran, le groupe aurait dû annoncer le même niveau de ventes que celui de l’année dernière -un des meilleurs cru de son histoire.

« Évidement, conclut Jean-Pierre Mercier, en annonçant un même niveau de ventes mondiales qu’en 2011, il devient plus difficile à PSA de justifier l’injustifiable : la fermeture de l’usine d’Aulnay ainsi que le vaste plan de suppression d’emploi dans le groupe. »

« Une lutte contre une fermeture d’usine, c’est un marathon, pas un sprint ». Avec son sens de la formule, Jean-Pierre Mercier, leader CGT à l’usine PSA d’Aulnay, jongle avec les journalistes et incarne la mobilisation des salariés sur le site qui fermera en 2014.

« Une grève illimitée serait une erreur tactique : ça nous épuiserait rapidement financièrement et ça aurait un pouvoir de nuisance limité », martèle le leader CGT, 2e syndicat à PSA Aulnay.

« Nous seuls, on ne pourra pas empêcher la fermeture, […] il faut que les camarades de Rennes, Poissy, Sochaux entrent dans la bataille ». « On est une bombe sociale, politique, et ça, on va l’utiliser », dit Jean-Pierre Mercier, tout en rejetant la violence. « On n’a même pas fait brûler un pneu » depuis le début du conflit. « Il faut être plus intelligent ».

« On apprend des Total, des Molex, des Contis (de l’usine Continental, ndlr) que j’ai suivis de très près », dit-il. « Il y a eu deux documentaires sur les Contis. On les a visionnés plusieurs fois au syndicat, pour apprendre où ils se sont cassé le nez et leur succès ».

« C’est pas le fait qu’ils aient cassé la sous-préfecture (de Compiègne, en avril 2009, ndlr) qui a fait plier, mais leur mobilisation constante », affirme-t-il.

Oui, ce n’est pas la colère qui tient lieu de politique mais la haute stratégie de Lutte ouvrière et de la CGT PSA Aulnay semble bien ne pas en tenir lieu o plus. Elle n’appelle nullement à constituer partout de comités de travailleurs ni ne donne la dimension réelle de la lutte…

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