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Quelle arme pour les travailleurs de PSA afin de lutter contre les licenciements ?

mercredi 25 juillet 2012, par Robert Paris

Non à la fermeture de PSA Aulnay est toujours la banderole déroulée par les syndicats de ce site alors qu’on sait maintenant que d’autres sites (Rennes, Melun, Poissy, Mulhouse, Sochaux, Vélizy-Meudon, Sevelnord, Madrid...) sont eux aussi très touchés par les suppressions d’emplois !!! Alors que le sens donné à la mobilisation devrait être une défense de tous les travailleurs menacés de licenciements et pas seulement du site d’Aulnay... Bien sûr, les salariés d’Aulnay n’ont besoin d’attendre personne pour se défendre mais leur meilleure défense consiste à donner à leur lutte une dimension générale s’adressant à toute la classe ouvrière menacée aujourd’hui ou demain...

Quelle arme pour les travailleurs de PSA afin de lutter contre les licenciements ?

Les travailleurs de PSA viennent de manifester nombreux devant le siège de PSA pour montrer qu’ils ne sont pas dupes ni des discours de la direction du trust, ni de ceux du gouvernement et sont décidés à compter d’abord sur leur propre mobilisation dans la rue.

« Ce n’est pas aux salariés du groupe de payer la note. On n’est pas prêt à se laisser faire, on va leur mener la guerre », a lancé sous les applaudissements Jean-Pierre Mercier, délégué CGT du site d’Aulnay. Bien ! Mais quelle guerre et de quels moyens disposons-nous pour la mener ? Quels en sont les enjeux ? Quels sont nos points d’appui ?

La presse affirme : "Les salariés de PSA Peugeot Citroën ont montré mercredi leur volonté d’en découdre en manifestant près de l’arc de triomphe et devant le siège parisien du constructeur, qui prévoit 8 000 suppressions de postes. Quelque 1 500 manifestants ont descendu l’avenue de la Grande-Armée, de l’arc de triomphe jusqu’au siège de PSA proche de la porte Maillot, lâchant des fumigènes sur l’air de "on ne lâche rien" et en tapant sur des fûts métalliques. L’essentiel de la manifestation est formée de salariés d’Aulnay. Il y a des cars venus de Rennes, de Sochaux, de Mulhouse, de la R&D à Vélizy. "

Raison de plus pour discuter des voies et moyens pour que cette mobilisation débouche réellement. On n’a que trop connu de vraies mobilisations suivant des centrales syndicales apparemment décidées et qui a mené dans le mur, purement et simplement. On a encore en mémoires la mobilisation des retraites…

Pour discuter cette question, encore faut-il dire à quel type d’attaque nous avons affaire, quelle est la politique des patrons, quelle peut être celle du gouvernement et ensuite seulement quels seraient les atouts de travailleurs décidés à en découdre pour défendre leurs emplois ?

Une chose frappe dans la dernière manifestation : les salariés d’Aulnay sont toujours au centre de celle-ci comme de toutes les déclarations politiques, syndicales et médiatiques. Les syndicats d’Aulnay avaient, une fois de plus, déployé leur banderole contre la fermeture du site d’Aulnay qui ne cite nullement les licenciements dans le reste du trust. Passe encore dans les mobilisations précédentes où on ne connaissait pas les plans du patron, mais maintenant que l’on sait que tous les sites sont touchés, c’est bel et bien une politique que de souligner cet isolement volontaire du cas d’Aulnay.
Cela ne correspond pas à la réalité de l’attaque patronale qui vise des milliers de travailleurs qui ne sont pas à Aulnay, qu’ils travaillent à Rennes, Vélizy, Melun, Meudon, Madrid ou Sevelnord.

D’ailleurs, la grande force des travailleurs d’Aulnay qui apparaissent comme les plus organisés et les plus mobilisés serait justement de s’adresser aux autres, de prendre la tête de l’ensemble, quitte à forcer la main aux syndicats locaux qui rechigneraient.

Sur ce plan, il est à remarquer que dans la manifestation d’aujourd’hui, seuls les syndicats d’Aulnay avaient appelé à la grève pour aller à la manifestation et aucun syndicat d’Aulnay ne s’est permis de discuter le choix des syndicats des autres sites, alors que c’est certainement une faiblesse importante de n’avoir pas mobilisé d’emblée et ensemble les salariés de PSA alors qu’ils sont attaqués ensemble.

Mais ce n’est pas tout. La dimension réelle de l’attaque patronale n’est pas donnée par les déclarations sur « la famille Peugeot » des syndicats les plus combatifs d’Aulnay, CGT et SUD. Car Sanofi, Air France, Hewlett-Packard, l’agroalimentaire, la Téléphonie, le Tourisme, le Bâtiment qui tous licencient, c’est aussi la famille Peugeot ? Et Ghosn de Renault qui n’a cessé de dire que si PSA licenciait, il en ferait autant, ne faut-il pas que les salariés de PSA rappellent ces discours aux salariés de Renault. Le patron de PSA a attendu la fin des élections pour licencier. Le patron de Renault attend la fin des licenciements à PSA pour annoncer son plan.

Et ainsi on saucissonne les luttes alors que l’attaque est générale. Même les fonctionnaires sont menacés. Aujourd’hui, c’est le non remplacement des partants en retraite, plus accentué encore avec Hollande qu’avec Sarkozy, et demain ?

Pourquoi les dirigeants de la lutte des PSA ne pourraient-ils pas s’adresser à l’ensemble de la classe ouvrière ? Il est quand même remarquable que la déclaration de Varin, patron de PSA, annonçant 8.000 suppressions de postes en France avait suscité une émotion parmi les travailleurs de tous les secteurs, du public comme du privé. Et, pour exprimer cette émotion, cette solidarité de tous les travailleurs avec les salariés de PSA, tout ce qui aura été fait par les syndicats, c’est d’affirmer qu’on va attendre septembre pour voir ce qu’on peut faire. C’est ce qu’appelle de l’attentisme.

Or cette émotion de l’ensemble des travailleurs pouvait parfaitement être transformée en conscience de la situation et des enjeux. Et la conscience de classe, c’est justement la principale arme que les travailleurs de PSA puissent utiliser pour augmenter leur rapport e forces face au patronat. Car ils n’ont pas contre eux que le patron Varin et « la famille » Peugeot. Il y a aussi tous les autres patrons qui veulent aussi s’attaquer aux emplois et qui comptent de manière évidente sur un succès de Varin pour faire reculer leurs salariés, se fondant sur l’idée : si les travailleurs très organisés d’Aulnay avec une CGT qui crie fort n’ont pas réussi à défendre leurs emplois, les autres salariés seront plus démoralisés ou plus passifs.

Et, effectivement, il s’agit d’un enjeu qui concerne bien au-delà d’Aulnay ou de PSA, bien au-delà du seul secteur Automobile. Certes, les salariés de Renault, de General Motors, les sous-traitants et les précaires devraient être entraînés dans la lutte pour que le rapport de forces permette aux uns et aux autres de gagner. Mais ce n’est pas tout. Il faudrait faire craindre au patronat un mouvement qui entraine toute la classe ouvrière. C’est seulement à ce prix que les autres patrons diraient à Varin de reculer…

Le premier pas aurait pu être, immédiatement après la première annonce de Varin, que des équipes de salariés de PSA aillent partout dans les gares parisiennes s’adresser aux salariés ou même simplement leur faire signer une pétition pour qu’ils puissent exprimer leur soutien. Ce n’est pas qu’une feuille de papier fera reculer les patrons, bien entendu. C’est seulement parce qu’il fallait un geste qui permette aux salariés de tous les secteurs de dire qu’ils sont solidaires, qu’ils comprennent que c’est l’emploi de tous qui est menacé. Et c’était effectivement le cas, juste après l’annonce de PSA : on pouvait entendre, de l’hôpital public à Renault, des salariés habituellement pas spécialement radicaux, déclarer : après PSA, ce sera nous.

Et cela venait peu après que la déclaration du gouvernement Ayrault selon laquelle on remplacerait encore moins les fonctionnaires retraités partants. La liaison public/privé pouvait, sur la défense des emplois, être mise en avant aussi par les salariés de PSA.

Bien entendu, il ne s’agit pas pour nous de dire que les dirigeants des centrales syndicales allaient faire ce simple geste de classe, qui n’a rien en soi de révolutionnaire, mais qui est aux antipodes de la politique collaborationniste des centrales. Au contraire, les équipes militantes qui ont à cœur les intérêts de leur classe ne doivent pas avoir peur de dire que le combat à mener dépasse de loin les capacités de ces prétendues directions de la classe ouvrière.

Non, une telle politique, consistant à commencer à répondre à une attaque d’ensemble par une riposte d’ensemble, ne peut avoir le but réformiste de signer un accord patronat/syndicat/gouvernement comme c’est toujours le cas de ces « dirigeants syndicaux ».
Elle ne peut non plus laisser croire que l’Etat bourgeois va jouer un rôle d’intermédiaire, de tampon entre patronat et salariés. Ni même en donnant aux travailleurs la fausse perspective de « faire pression sur le gouvernement ».

Pendant des mois, les syndicats, et en premier la CGT, n’ont-ils pas averti les travailleurs d’Aulnay que le patron mentait et comptait les licencier et n’ont-ils pas alors donné comme objectif aux salariés et aux militants d’imposer une négociation dirigée par Sarkozy ?

Même avec un gouvernement de droite, la CGT laissait croire que l’Etat devait être impartial et même aurait dû défendre les emplois… Quelle illusion catastrophique ! Ils ont juste obtenu des discours mensongers en réponse à leurs demandes ! Ils viennent d’obtenir exactement la même chose de Hollande, Ayrault et Montebourg… De belles paroles contre la famille Peugeot suivies de promesses de cadeaux de l’Etat aux patrons de Peugeot et Renault…

Depuis belle lurette, la pire trahison du syndicalisme a consisté à faire croire que l’on n’avait pas affaire à un Etat bourgeois mais à un Etat démocratique qui devait soi-disant défendre les citoyens et même les salariés. Trotsky ne disait-il pas déjà le 20 novembre 1919, à propos de la situation en France : « Le pire crime des dirigeants du syndicalisme régnant consiste en ce qu’ils ont remplacé l’action directe de la classe ouvrière par la sollicitation de faveurs auprès du gouvernement. (…) Nous avons pour devoir de porter à son paroxysme, au plus haut degré révolutionnaire, la haine qui s’éveille dans les masses contre le capitalisme. » Dans ce domaine, un Mercier de la CGT d’Aulnay n’est pas plus radical qu’un autre.

Pour les travailleurs, tout ce qu’a donné de concret ces négociations, c’est une étude de la situation de Peugeot et la nomination d’un médiateur.

Certes, même le syndicat patronal SIA de PSA dénonce les mesures du gouvernement et, un peu moins durement, la politique de Peugeot. Mais ce n’est pas tout.

Aucun syndicat de PSA ne donne la véritable dimension de la lutte à mener, la seule qui permettrait aux salariés de PSA de faire peur à leurs adversaires et de les obliger, du coup, à reculer.

CGT et SIA proposent une lutte surtout cantonnée à Aulnay qui ne pourra être qu’une lutte défaite…
Aucun de ces prétendus leaders n’a dit en clair que les centrales syndicales ne voulaient pas vraiment bouger.

Même les dirigeants dits d’extrême gauche qui dirigent certains syndicats ont refusé de le dire en clair. Or il n’existe pas de dirigeants réels de la classe ouvrière qui craignent d’appeler un chat un chat et un traitre de l’appeler un traitre. Car rien n’est plus essentiel pour la classe ouvrière que sa conscience de la situation, des perspectives des classes dirigeantes et des objectifs objectivement indispensables du coup, mais aussi la connaissance des ennemis et des faux amis…
De vrais dirigeants des travailleurs n’ont pas des stratégies occultes, n’ont pas des réponses à la place des travailleurs, mais s’adressent directement à la classe ouvrière et lui disent la vérité, aussi dure soit cette vérité à entendre.

Nous allons, en France, vers les premiers affrontements de classe liés à la crise fondamentale du capitalisme mondial. Il est possible que, même bien conduites, les premières luttes ne mènent pas à des succès, mais ce qui importe c’est qu’elles renforcent sur le terrain de classe l’ensemble des travailleurs… Telle n’est pas la stratégie des dirigeants syndicaux, même les leaders locaux, même ceux de l’extrême gauche…

Les plus radicaux des dirigeants syndicaux estiment que l’essentiel pour eux serait de dénoncer la stratégie économique des patrons et de dévoiler que PSA gagne de l’argent. Et ces licenciements seraient-ils justifiés aux yeux de dirigeants ouvriers dans les cas d’entreprises perdant véritablement de l’argent ? Normalement, absolument pas !

Et même si ces licenciements étaient indispensables aux patrons d’un trust, du point de vue de l’intérêt de l’entreprise capitaliste, le seraient-ils à nos yeux ?

Faut-il continuer à raisonner à l’intérieur même de la logique capitaliste au moment où celle-ci se retourne contre nous violemment ou faut-il dire clairement aux travailleurs : si ce système s’en prend à nos emplois, ne défendons plus le système, prenons-nous en à la propriété privée des entreprises, contestons la justice et la légalité d’une société qui estime juste et légal de nous jeter à la rue !!!

Après les déclarations affolantes d’un Varin, patron de PSA qui prévoyait 8.000 licenciements de salariés en CDI de PSA sans compter les précaires et les sous-traitants, les affirmations rassurantes du gouvernement abondent :
«  L’Etat ne laissera pas faire ? Pas de licenciements secs ! La négociation est bien engagée. »

Mais la réalité, c’est que rien n’a avancé pour les salariés de PSA et que rien ne peut avancer pour eux du côté des patrons et du gouvernement ainsi que des négociations, parce que, pour avancer, il faut faire reculer sur leur plan de licenciement non seulement la famille Peugeot mais la famille capitaliste, ce qui est bien autre chose !
Le plan qu’il faut combattre n’est pas celui de 8.000 emplois de CDI PSA, ni de 20.000 de l’Automobile, ni même des 50.000 vus par la CGT. C’est toute la classe ouvrière qui est aujourd’hui menacée dans son emploi par les plans patronaux. Il faut le lui dire carrément et lui dire aussi que ce sera une lutte vie contre vie : la vie du Capital contre celle du Travail. Ce n’est pas une lutte syndicale gentille et tranquille. L’enjeu est d’importance : notre emploi et celui de nos enfants. Si on perd, on n’a plus qu’à se retrouver à la rue…

Cela mérite d’autres moyens que les méthodes bien calmes des centrales syndicales. Il nous faut des conseils de travailleurs dans toutes les entreprises qui décident des buts et des moyens. Si nous sommes organisés, nous pouvons faire face à l’offensive patronale. Si nous voulons nous promener avec les centrales syndicales, c’est des pompes funèbres qu’il nous faudra car ces promenades seront autant d’enterrements de nos emplois !

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