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En agressant violemment Gaza, Nétanyahou tente de protèger la sécurité de sa réelection et celle de ses classes dirigeantes… du mécontentement social des Israéliens appauvris

vendredi 16 novembre 2012, par Robert Paris

En agressant violemment Gaza, Nétanyahou tente de protèger la sécurité de sa réelection et celle de ses classes dirigeantes… du mécontentement social des Israéliens appauvris

La nouvelle guerre de Gaza qui a commencé par l’assassinat par l’armée israélienne du chef militaire de la branche armée du Hamas, Ahmed al-Jaabari, qui a été tué par un missile ciblant sa voiture. Bien entendu, les groupes armés de Gaza n’ont pas manqué de riposter et Nétanyahou en a pris prétexte pour lancer des bombardements massifs des civils de Gaza et la préparation d’une offensive militaire avec mobilisation des réservistes.

Nétanyahou a présenté Ahmed al-Jabari comme un terroriste agressif et dangereux et sa mort comme une nouvelle positive. Mais même le journal israélien Haaretz explique qu’il était en réalité « un sous-traitant, dont le rôle était de maintenir la sécurité d’Israël à Gaza » :

« Ce titre va sans doute paraître absurde pour quiconque a vu ces dernières heures Jabari décrit comme "une figure du terrorisme", "Le chef d’Etat-major de la terreur" ou "notre Ben Laden". Mais c’était la réalité pendant cinq ans et demi. Israël a demandé au Hamas de respecter la trêve dans le Sud et de la faire respecter par la multitude d’organisations armées de la bande de Gaza. L’homme qui se chargeait d’appliquer cette politique était Ahmed al-Jabari. »

"Très critiqué sur le plan économique et social, Netanyahou veut à tout prix déplacer le débat politique sur les questions de sécurité, un terrain plus propice", estime Ilan Greilsammer.

L’insécurité à laquelle se heurte Nétanyahou n’est pas celle due à des attaques palestiniennes venant de Gaza mais celle des élections législatives venant en janvier prochain et qu’il ne se voit pas gagner. Ce chef du gouvernement, déjà à l’extrême droite de l’échiquier politique israélien, a déjà essayé de conforter sa position politique en vue des élections en signant un accord politique avec un petit groupe encore plus fasciste que le sien… ce qui a semblé très significatif de son isolement. Il ne peut pas faire de la guerre contre l’Iran, ou au moins de frappes aériennes ciblées, un argument publicitaire car les USA ne l’y ont pas autorisé pour le moment. Ce type d’action ne peut être choisie par les USA qu’en fonction de l’effondrement économique mondial car il signifierait un choix d’entrer dans la troisième guerre impérialiste mondiale, l’Iran faisant maintenant partie du bloc de la Chine, de la Russie et de la Syrie.

Par contre, du moment qu’il fait sonner la menace d’une attaque palestinienne dangereuse pour la sécurité des Israéliens, il ne peut qu’avoir le soutien de tous les courants politiques et engranger l’avantage politique de gouverner s’il apparaît avoir eu des succès militaires. Il est loin d’être le premier gouvernement israélien à avoir agi ainsi. Déjà la plus grande opération militaire et la plus violente contre la population civile de Gaza, « Plomb durci », avait le même objectif politicien et se déroulait aussi à la veille d’élections internes à Israël. Aucun parti politique ne se permettrait de refuser sa solidarité à Nétanyahou dans ces conditions. D’autant qu’être le parti de la paix en Israël n’est pas un drapeau porteur en ce moment en voix aux élections. La politique de l’Etat israélien, de plus en plus violemment hostile aux Palestiniens, s’est déroulée quelque soient les gouvernements, de gauche comme de droite, et a favorisé récemment la poussée à droite de l’opinion publique. Cette dernière ne croit plus à une paix que les gouvernements successifs se sont activés à torpiller systématiquement.

Mais, dans ce cas, se rajoute à cette opération politicienne un objectif pour les classes dirigeantes israéliennes menacées par le mécontentement social comme elles ne l’avaient pas été dans le passé. Autant la guerre contre les Palestiniens n’est pas très contestée par la population israélienne autant la politique anti-sociale de Nétanyahou et des classes dirigeantes israéliennes qui font payer la crise aux travailleurs et aux masses populaires l’est.

On l’a vu avec le « printemps arabe » des Israéliens en juillet 2011 et même en juillet 2012. Ce n’est pas la question palestinienne mais la question sociale qui avait été à la base de la révolte. Les salaires n’ont quasiment pas augmenté alors que ces cinq dernières années, la population a subi une inflation de 16%, et près de 30% pour les produits alimentaires. 25% de la population israélienne vit en dessous du seuil de pauvreté, et à cela il faut ajouter les politiques de privatisation qui s’en prennent à des secteurs comme l’éducation ou la santé publique. Chez les jeunes travailleurs d’Israël, il n’est pas rare d’avoir deux ou trois emplois précaires pour essayer de joindre les deux bouts… C’est donc sur la hausse des prix que les protestations ont commencé, d’abord, en particulier par des réseaux sociaux, contre la hausse du prix du fromage blanc, un aliment de base en Israël, puis sur la question de l’accès et des prix du logement, avec, à Tel Aviv d’abord et dans d’autres villes ensuite, la mise en place de campement de tentes. Le mouvement a dénoncé à la fois la vie chère et les privatisations. Et si la question du logement est celle qui a lancé le mouvement, il y a de nombreuses autres protestations, comme celle des médecins des hôpitaux publics, de salariés de l’éducation contre la privatisation, des parents lors des « marches des landaus » pour la baisse des prix des produits pour bébés, l’accès aux crèches et aux congés maternité et parentaux.

Les revendications concernent essentiellement l’accès au logement, la vie chère et le refus des privatisations. La plate-forme revendicative exigeait l’accès au logement et le refus du plan de Netanyahou sur le logement (la promesse de construire 50.000 logements… dans sept ans), des revendications comme la gratuité de l’éducation, la création de postes, de lits et l’augmentation du budget pour les hôpitaux, le refus de la privatisation de l’éducation et de la santé mentale, la baisse des impôts indirects, etc.

Il faut rappeler que 20% de la population israélienne est arabe. Les arabes subissent, comme les autres israéliens, l’exploitation capitaliste, le chômage, les hausses des prix et les politiques d’austérité. A cela s’ajoute en plus des discriminations racistes, parfois indirects par exemple pour ce qui est de l’emploi. A l’exception des druzes et des volontaires, les arabes d’Israël ne font pas leur service militaire, et pour les emplois par exemple, il arrive fréquemment que des annonces indiquent rechercher quelqu’un « ayant terminé son service militaire », ce qui exclut de fait les Arabes. Dans le Néguev, au sud d’Israël, bien des bédouins vivent dans ce qu’on appelle des villages non-reconnus. Aussi, les habitant(e)s de ces villages n’ont quasiment pas accès aux services ou équipements publics et sont sous la menace constante de voir leurs villages détruits par l’armée. Il y a depuis des années régulièrement des protestations des habitant(e)s de ces villages, et il est intéressant de souligner le lien, parmi les revendications, entre les bédouins du Néguev et les habitants des villes. A Beer Sheva d’ailleurs, les bédouins ont participé aux manifestations pour le logement aux côtés des étudiants et des jeunes de la ville.

Au delà du Néguev, le mouvement de protestation touche également les villes et les villages arabes au nord d’Israël. Ainsi il y a eu des manifestations à Nazareth, un campement a été installé à Taibeh, etc. Et bien sûr, dans les villes comme Haïfa, juifs et arabes manifestent ensemble. Il s’agit bien d’un mouvement qui regroupe l’ensemble de la classe ouvrière et au-delà des classes populaires (il y a eu une manifestation de fermiers à Tel Aviv par exemple le 3 août 2011), qu’il s’agisse de Juifs ou d’Arabes.

Les classes dirigeantes ont maintenu leur politique anti-sociale malgré ces mouvements et voudraient, avec la crise mondiale, encore l’aggraver massivement. Seul un climat de guerre peut leur permettre d’obtenir le calme social nécessaire à leur opération.

Gaza était également menacé par un « printemps arabe » qui avait commencé à éclater en mai 2011 et l’attaque israélienne vise également à stabiliser la situation politique du Hamas, contrairement à ce que prétend Israël. La révolte sociale se développe à Gaza comme en Israël et aussi comme en Cisjordanie et elle déstabilise tous les gouvernements. Rappelons que Nétanyahou avait montré sa solidarité aux classes dirigeantes palestiniennes de Cisjordanie contre le mouvement social. Benjamin Netanyahu avait alors remboursé en temps et en heure la TVA et les droits de douanes prélevés sur les produits importés par les Palestiniens qui transitent par les ports israéliens et qu’il bloquait. Ces recettes fiscales sont vitales pour un budget palestinien, grevé par un déficit de 1,1 milliard de dollars sur un total de 4 milliards en raison de la baisse de l’aide internationale. Israël a également augmenté de 5.000 le nombre de permis de travail pour les Palestiniens. En fait, Israël se plaint du Hamas et de l’Autorité palestinienne comme il se plaignait de Moubarak mais il ne craint rien tant que leur déstabilisation par le peuple palestinien.

Nétanyahou avait fait de même face à la révolte sociale à Gaza. L’armée israélienne avait également levé une partie des centaines de postes de contrôle sur les routes qui transforment tout déplacement des biens et des personnes en parcours du combattant. Les autorités israélienne avaient aussi allégé le blocus imposé à la bande de Gaza, contrôlée par les islamistes du Hamas les grands rivaux de Mahmoud Abbas. L’Etat hébreu permettait désormais le transfert de 25 millions de dollars par mois de Cisjordanie vers la bande de Gaza pour régler régulièrement la paye de dizaines de milliers de fonctionnaires.

Même si les Israéliens ne s’en sont pas rendu compte, les classes dirigeantes israéliens ont toujours joué de l’existence du Hamas et l’ont même favorisé pour mieux diviser les Palestiniens et refuser la naissance d’un Etat palestinien.

Une fois de plus, la guerre prétendument pour la « sécurité d’Israël » peut facilement être proclamée par un gouvernement qui ne la vise nullement, les classes dirigeantes israéliennes ayant toujours tiré leur propre sécurité et leurs bonnes affaires, notamment le soutien financier américain massif, de leur attitude violemment agressive vis-)à-vis des Palestiniens.

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