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Quand l’arbre révolutionne la Terre…

mercredi 29 octobre 2014, par Robert Paris

Quand l’arbre révolutionne la Terre…

On mesure rarement à quel point l’arbre a représenté une multitude de révolutions, à la fois pour les plantes, pour le vivant et pour la terre.

L’invention du bois, dit Callixylon, a été réalisée par Archaeopteris

L’arbre a inventé les grandes racines, les feuilles, les glands, la sève, le bois, les fruits, et le système microfluide, ou encore l’absorption en masse du gaz carbonique atmosphérique. L’arbre a inventé et fabriqué une quantité de substances comme des flavonoïdes, des terpènes, des lactones, et j’en passe.. Il a modifié les sols permettant ainsi à de nouvelles espèces d’arbres de s’implanter, les échanges moléculaires entre êtres vivants, les collaborations entre plantes (coévolution des espèces d’arbres en forêt), les possibilités de transplantation d’une vie dans une autre vie. Il a colonisé des territoires nouveaux.

L’arbre, par exemple, est un système microfluidique impressionnant. Il draine la sève vers des milliers de feuilles, de manière homogène, en s’appuyant sur un réseau de millions de petits capillaires, dont les diamètres varient entre des centaines de microns et une trentaine de nanomètres. C’est bien l’échelle micro ou submicrométrique qui est en jeu ici. L’arbre gère remarquablement ce réseau microfluidique. Il parvient même à travailler sous pression négative, ce qui, du point de vue de l’ingénierie hydraulique, représente une performance exceptionnelle. Bien sûr, des bulles nucléent en permanence dans les capillaires drainant la sève. Mais il existe, dans l’arbre, des milliers de vannes intégrées qui préviennent la formation d’une embolie généralisée.

Cela ne veut pas dire que l’arbre soit inaltérable ni inattaquable. A preuve : la première tentative de formation d’une chaîne du vivant sous forme d’arbre s’est terminée sans laisser de descendance. Les arbres sont donc apparus plusieurs fois, de manière indépendante.

L’arbre est un exemple de plus de la non-linéarité et de la redondance de l’évolution du vivant. Les arbres actuels ne descendent pas des premiers arbres. Aucun être vivant ne semble descendre des premiers arbres qui ont disparu sans laisser de successeurs évolutifs.

Les arbres ont représenté à certaines périodes une masse beaucoup plus importante qu’aujourd’hui. Ils ont servi de régulateur du climat mais aussi de dérégulateur. On soupçonne en effet que le grand arbre qui a le plus essaimé, l’Archaeopteris, d’avoir tellement procréé qu’il aurait mangé tout le gaz carbonique atmosphérique et provoqué ainsi une chute considérable de l’effet de serre, entraînant une glaciation… Ce n’est qu’une hypothèse mais elle semble assez bien corroborée par les faits !

Nous sommes accoutumés à penser que les arbres, comme les plantes, seraient un « règne » inférieur à celui des animaux, qui seraient beaucoup plus libres de leurs mouvements, beaucoup plus indépendants, beaucoup plus conscients de leurs actes. Il y a de nombreuses erreurs dans de telles professions de foi. Tout d’abord, les plantes n’appartiennent pas à un règne indépendant et les animaux à un autre règne. Les deux sont beaucoup plus imbriqués qu’on ne l’a longtemps cru. D’autre part, les arbres ont leur manière à eux de communiquer, de se déplacer, d’échanger, d’influencer leur environnement qui n’est ni moins efficace, ni moins mobile, ni moins sensible. Les arbres ont même une forme de conscience de l’univers qui les entoure. Ils agissent en direction de cet environnement de manière non passive. Il n’est pas nécessaire de développer un animisme de l’arbre ou de l’humaniser. Les arbres ont développé un mode de fonctionnement étonnant bien avant que l’homme ne puisse penser sur ce fonctionnement. Un exemple de la mobilité des arbres : ils ont su coloniser les continents aussi bien que les êtres humains sans pour autant disposer de la marche à pied comme l’homme… Il n’est même pas nécessaire de développer des thèses sur l’effet de serre et le réchauffement climatique pour prouver que la destruction massive des arbres en vue du profit est une catastrophe pour la planète, pour la vie et pour l’homme.

L’arbre est non seulement un être vivant étonnant mais aussi un individu émouvant, touchant, et pas moins interactif que bien des animaux. Bien des êtres humains ont été affectés sérieusement par la mort d’un arbre et cela n’a rien de ridicule ou de bêtement émotif. C’est une réalité : les arbres sont une part importante de la vie et le monde du béton a retiré de bien des citadins une part importante de richesse. Certains oublient parfois que, tout à côté de chez eux, existent des forêts et croient qu’il y a plus de relations à rechercher dans les appareils comme le portable, la télé et l’ordinateur que dans des promenades en forêt. Permettez-moi de penser que c’est une grande perte pour l’homme… Sans souhaiter revenir à la vie des chasseurs-cueilleurs qui savaient ce qu’ils devaient aux arbres, il est certain que, par rapport à eux qui ont quand même bâti notre cerveau humain actuel, nous avons perdu bien des points par rapport à eux et que l’avenir de l’humanité dépend aussi de sa capacité à retrouver des points de vue plus humains et moins immédiatement rentables, plus qualitatifs et moins quantitatifs.

Ce qui caractérise l’évolution des arbres, comme toute l’évolution du vivant, c’est non seulement le caractère non-linéaire de celle-ci : c’est son caractère brutalement révolutionnaire. D’un seul coup apparaît une propriété nouvelle qui change toute la direction de la transformation.

Archaeopteris invente la feuille

D’un seul coup nait une structure de type nouveau comme le gland, comme la feuille et tout le reste en est changé. D’un seul coup, une nouvelle espèce, une nouvelle famille, un nouvel embranchement. Et, en même temps, la nouveauté ne fait pas sortir le nouveau de l’ensemble du vivant. Des arbres sont issus des plantes mais aussi des arbres donnent naissance à des arbustes qui redonnent naissance à des plantes non arbres. Les plantes donnent, plusieurs fois et de manières différentes, à des époques et dans des conditions différentes, naissance à des arbres. L’arbre est à la fois un monde à part et pas un monde à part au sein du vivant…

Il ne serait pas exact au plan évolutif de spécifier « les arbres » car cette catégorie n’existe pas ni en termes d’espèces ni de groupements d’espèces, à aucun niveau hiérarchique. Et elle n’existe pas en termes évolutifs car il n’a pas existé un rameau de la vie appelé « les arbres » mais plusieurs et encore complètement imbriqués dans ce qu’on a appelé « les plantes », rameau qui n’existe pas non plus de manière indépendante du reste du vivant. Les catégories absolues, indépendantes, séparées, et non interdépendantes n’existent pas dans l’évolution de la vie et ne correspondent pas à la réalité historique et biologique. Pas plus pour les arbres que pour le reste du vivant.

L’arbre n’est pas défini par une seule arborescence évolutive des plantes mais est une potentialité d’évolution de l’ensemble des plantes. Des espèces d’arbres ne sont pas apparues à partir d’un seul type d’ancêtre de plantes mais de plusieurs. Un arbre n’est pas défini par un type évolutif ni par la taille de la plante. Il se défini essentiellement par certaines capacités de production dont celle du bois.

Au sens botanique, les arbres sont des plantes à bois véritable. Celui-ci, également appelé xylème secondaire, est produit par une rangée cellulaire (l’assise libéro-ligneuse) appelée cambium, située sous l’écorce.

La genèse du bois est un processus répétitif qui dépose une couche nouvelle sur les précédentes. Le résultat est souvent visible sous la forme de cernes d’accroissement. Ce résultat est une croissance en épaisseur issue du fonctionnement du cambium qui est le méristème secondaire du bois (le phellogène étant le méristème secondaire de l’écorce). On ne trouve de plantes à bois véritable, et donc d’arbres au sens strict, que chez les Gymnospermes et les Angiospermes Dicotylédones.

Il existe d’autres types de plantes à bois véritable, mais les arbres s’en distinguent par des dimensions plus importantes (comparées à celles des arbustes) ou par la formation d’un tronc nettement individualisé (que ne possèdent pas les arbrisseaux) et porteur (alors que les lianes ligneuses doivent trouver un support pour s’élever).

Selon la fertilité du sol et au terme de leur croissance verticale (issue du fonctionnement des méristèmes primaires apicaux), les arbres peuvent atteindre une certaine hauteur, qui est plus importante que celle des arbustes. Aucune définition universelle ne fixe de valeur absolue, mais des institutions comme la FAO considèrent qu’un arbre est une espèce capable dans de bonnes conditions de croissance de pousser au moins jusqu’à 5 m de hauteur. D’autres comme l’IFN fixent le seuil de définition à 7 m.

Le statut d’arbre est donné par le potentiel de l’espèce et non par la dimension d’un individu à un moment ou à un endroit donné. Ainsi un chêne de trois ans de 1,50 m seulement est un semi au stade fourré. De même un vieux pin rabougri accroché au sol squelettique d’une crête battue par les vents est un arbre nanifié et non pas un arbuste.

En écologie, on assimile quelquefois aux arbres diverses plantes arborescentes, comme les palmiers, les dragonniers, etc. ayant développé un pseudo-tronc dur, ramifié ou non, mais qui n’est pas composé de bois véritable. Quand elle est faite, cette assimilation porte généralement sur une plante ligneuse Monocotylédone. Pour les palmiers notamment, ce pseudo-tronc porte le nom botanique de stipe. Une feuille de raphia atteint jusqu’à 25 m par 4 m.

Nous avons souligné l’importance des arbres pour la planète. il convient aussi de souligner leur importance pour l’homme, pour sa construction intellectuelle, pour son savoir manuel, pour sa perception de l’univers. Le bois a été longtemps déterminant pour nombre d’éléments essentiels à l’homme : arcs et flèches, cabane, pirogue, etc...

Une preuve aussi de ce que nous devons aux arbres : nos ancêtres simiesques ont vécu dans les arbres et y ont trouvé la base de leur existence et de leur mode de vie (et de pensée). Notre « besoin d’arbres » a probablement des « racines » anciennes et, qui sait, peut-être aussi lointaines que cela… Ce ne serait pas scandaleux que les étapes précédentes de notre évolution nous aient marqué à ce point ! Il est certain que « se mettre au vert » provoque chez l’homme une sensation de bien-être, que les forêts ont un effet psychologique sur l’homme. Quiconque a pu mettre un pied dans une forêt primaire, non cultivée, saura aussi à quel point l’homme est maintenant loin psychologiquement de la vie au sein des forêts. Il ne s’agit pas de regretter ou pas ce changement irréversible. Les forêts qui nous entourent sont, comme le reste du monde, modifiées par la présence humaine. Ce sont surtout les forêts tropicales qui restent des forêts non cultivées, non fabriquées par l’homme. Mais même les forêts cultivées ne sont pas seulement des produits de l’activité humaine mais des produits de l’évolution du vivant. Nous n’avons pas inventé les arbres, même pas ceux que nous plantons. Nous ne sommes pas non plus la seule espèce à avoir tout modifié sur la planète. Les insectes ont plus modifié la planète que nous. Les dinosaures l’ont plus modifié que les mammifères. Les bactéries sont bien plus importantes que nous au sein des mécanismes du vivant et nous ne les maîtrisons pas. Les arbres ont plus modifié la planète que nous. Notre égocentrisme intellectuel, notre désir de dominer, de mettre à notre service le reste de l’univers, ne peut pas empêcher toutes ces réalités d’être présentes et prépondérantes.

Nous sommes un être vivant qui vient à peine de démarquer sur la terre et nous croyons que rien ne s’est passé avant nous alors que des millions d’histoires différentes nous ont précédé, avec des renversements historiques, avec des révolutions, avec des épisodes éprouvants, émouvants, impressionnants nous ont précédé de loin. Les arbres ont connu une partie de cette histoire. Ils sont même des acteurs d’une partie de cette histoire. Ils ont démontré des capacités impressionnantes de se transformer, de se battre pour la vie, de s’unir aux autres arbres, aux autres espèces vivantes, de se déplacer, de se protéger pour se maintenir, pour modifier ce qui devait l’être, pour transformer la planète.

Il ne serait nullement ridicule que les êtres humains admettent, modestement, apprendre des arbres quelques leçons pour vivre harmonieusement sur la planète… En particulier, on remarquera que l’arbre, tout en étant un individu, a une vie collective, des échanges, des colonies forestières, des modes d’existence collaboratifs, des échanges d’information et de matériaux via le sol et l’atmosphère qui sont impressionnants. Pour peu qu’on cesse de les voir comme une simple fabrique de bois pour nos meubles et notre papier ou comme un simple attrait touristique… Ou même qu’on les considère seulement comme un « poumon de la planète ». Les arbres ne sont pas seulement là pour protéger « notre » oxygène. Ils sont à leur place sur la Terre à un titre qui n’est pas inférieur à notre propre droit à l’existence sur la planète. Il n’est nullement nécessaire d’être animiste, de croire à l’aura de l’arbre, de défendre une conception mystique pour dire bonjour à un arbre avec lequel nous entretenons des relations régulières au même titre qu’il n’est pas scandaleux de parler à un chien ou à un âne… Il existe maintenant plus de gens qui parlent à leur machine, ordinateur ou téléphone, parfois pour l’insulter parce qu’elle ne fonctionne pas comme ils le veulent, et c’est bien plus ridicule que de parler d’un arbre comme un être vivant qui fait partie de notre vie…

Le plus ancien arbre actuellement existant est le Ginkgo biloba, de la famille des Ginkgogoacae, d’une famille d’arbre qui serait apparue il y a plus de 270 millions d’années, donc quarante millions d’années avant les dinosaures mais 130 millions d’années après les premiers arbres de la famille des Cladoxylopsides ! C’est un arbre qui ne possède pas de graines mais des individus mâles porteurs de châtons de forme cylindrique et des ovules qui ne sont pas encore ni des graines ni des fruits…

On trouve d’autres arbres très anciens comme le pin Wollemi qui a été retrouvé en Australie et s’est développé à l’époque des dinosaures.

Le pin Wollemi

Les arbres se sont développés à une époque préhistorique appelée "le Dévonien".

Le Dévonien est une période géologique s’étendant de 419 à 358 millions d’années. Il est suivi par le Carbonifère et précédé par le Silurien.

Au Dévonien moyen, il y a une augmentation considérable du nombre d’espèces de plantes accompagnée de l’accroissement en taille des plantes primitives. L’écorce s’accroit ce qui permet aux plantes de grandir encore en taille.

On peut citer notamment :

 Les Lycophytes

 Les Euphyllophytes

 Les Progymnospermopsides

 Les Lignophytes

 Parmi lesquels certains Cladoxylopsides sont de véritables arbres
Notamment le Pseudoporochnus nodosus qui est un arbre à tronc robuste avec de grosses branches caduques à ramification digitée et également divisée par des dichotomies.

Calamophyton est un arbre qui se distingue de Pseudoporochnus par ses organes latéraux de taille réduite qui, s’ils sont fertiles, portent six paires de sporanges rabattus vers l’axe principal.

Wattieza est un arbre qui peut atteindre huit mètres de haut et possède également des branches digitées.

Les Cladoxylopsides présentent des ressemblances avec les sphénophytes et les fougères (filicophytes). Toutefois leurs relations avec ces deux groupes et avec un autre groupe fossile contemporain, les Iridoptéridales, restent irrésolues.

Les travaux récents montrent que ce groupe présentait une anatomie et une morphologie variées. Certains genres étaient arborescents. C’est le cas de Eospermatopteris/Wattieza, qui composait la plus ancienne forêt connue, d’âge Dévonien moyen (385 millions d’années), retrouvée dans l’État de New York, à Gilboa. Ces fossiles étaient connus depuis longtemps sous la forme de moulages de troncs appelés Eospermatopteris. C’est en 2007 que la plante entière a été reconstituée et son appartenance aux Cladoxylopsida démontrée.

Eospermatopteris

Le groupe des Cladoxylopsides dont tous ses arbres s’éteint au Mississipien inférieur sans laisser de descendance connue.

Les Progymnospermopsides possèdent des troncs sur lesquels des branches latérales sont émises en hélice. La grande nouveauté consiste dans la présence d’un cambium bifacial, produisant du bois, ou xylème secondaire, analogue à celui des Gymnopsermes actuelles. Ces plantes au xylème secondaire déjà moderne ont conservé une reproduction archaïque avec des sporanges qui, à maturité, libèrent les spores. On peut distinguer trois ordres de Progymnospermopsides :

 les Aneurophytales (dévonien moyen) : notamment Aneurophyton, Rellimia et Tetraxylopteris

 les Archeoptéridales (dévonien supérieur)

 les Protopityales (carbonifère inférieur)

Les arbres de type moderne naissent au dévonien supérieur de plusieurs révolutions : première feuilles avec un limbe, premières graines.

L’Archaeoptéris (famille des Archéaeoptéridales) est l’une des premières plantes à feuilles modernes. C’est un arbre de plus de 30 mètres de haut, aux puissantes racines, au tronc imposant, atteignant 1 mètre cinquante de diamètre et renfermant du bois dense semblable à celui des Conifères actuels.

Archaeopteris présente une innovation qui définit le taxon des Lignophytes et que l’on retrouve donc chez les Spermatophytes : un cambium cribrovasculaire bifacial qui produit à la fois du xylème secondaire interne et du phloème secondaire externe. Les échanges alimentaires au sein de l’arbre sont donc nettement plus importants que chez les autres végétaux.

Cette meilleure alimentation peut expliquer la production très importante de feuilles et de branches (houppier nettement plus volumineux que celui de Lepidodendron) ainsi que son renouvellement important et régulier, grâce à la présence de bourgeons axillaires. Ce renouvellement et le remplacement des branches et feuilles brisées ou malades peut expliquer, pour partie, la durée de vie plus importante d’ Archaeopteris.

On voit donc que les premiers arbres du Dévonien supérieur / Carbonifère inférieur présentent des caractéristiques communes que l’on retrouve chez les formes plus récentes (du Secondaire à l’actuel).

Cette morphologie commune est le produit, au moins en partie, de contraintes du milieu (compétition) appliquées à la même époque sur différents groupes de végétaux occupant des milieux proches, voir les mêmes milieux (on a trouvé les premières Lépidodendrales et les fougères arborescentes dans les mêmes dépôts).

Chaque groupe va y répondre différemment en cette période des communautés terrestres si dynamiques en terme de diversification des formes et des taxons. Apparus dans au moins quatre taxons dans un laps de temps restreint (Lycophytes, Cladoxylophytes, Sphénophytes et Lignophytes Prégymnospermes), la forme arborescente est acquise par des voix différentes : l’arbre est donc une convergence évolutive.
La comparaison des Lépidodendrales et des Prégymnospermes montre que cette convergence est parfois très forte tant au niveau morphologique qu’au niveau de la nature, l’organisation et le fonctionnement des tissus impliqués.Cependant, une seule de ces deux formes aura une descendance conséquente : celle d’ Archaeopteris que l’on retrouve chez les Spermatophytes actuelles (Angiospermes et tous les taxons de l’ancien groupe des Gymnospermes) .

Les fougères et les prêles arborescentes connaîtront leur heure de gloire au Carbonifère supérieur avant de décliner pour ne représenter, à partir du Permien, qu’une part infirme de la biodiversité végétale. Les avantages évolutifs du système racinaire et du cambium bifacial des Prégymnospermes sont certainement à l’origine de cette réussite évolutive du groupe des Lignophytes.

Le Dévonien supérieur est donc marqué par l’apparition d’un type végétal majeur des écosystèmes terrestres : l’arbre. Son apparition dans différents taxons d’Embryophytes indique que le port arborescent répond à des contraintes environnementales subies par tous les groupes de végétaux terrestres, et y apportent les meilleures réponses adaptatives. Les innovations propres aux Prégymnospermes (appareil racinaire, cambium bifacial, remplacement des branches tombées) expliquent certainement la réussite évolutive de ce type d’arbre qui sera, pour l’essentiel, conservé chez l’ensemble des Lignophytes. (extrait de « Les écosystèmes terrestres au Paléozoïque » de Monique Dupuis et Patrick Ferreira)

Au Dévonien supérieur, de nombreuses Lycophytes deviennent arborescentes. Ces arbres, avec un tronc bien individualisé, une couronne de branches et de puisssantes racines superficielles, colonisent alors les endroits les plus humides, marécages ou bords de lacs – une végétation qui préfigure celle des marcages houillers. Ces Lycophytes sont nombreuses et variées. Le Lepidosigillaria, de l’Etat de New York, avait un tronc de cinq mètres de haut. Clevelandodendront, de l’Ohio, possédait un tronc de 1,5 m. Cyclostigma, abondant, est connu surtout pour ses écorces marquées de cicatrices circulaires, laissées par la chute de ses grandes microphylles ; cet arbre était hétérosporé. Leptophloeum, autre Lycophyte arborescente du Dévonien supérieur, est connue en Europe, en Afrique, en Asie et en Australie. C’est au Carbonifère que les Lycophytes connaissent leur heure de gloire. Elles s’accroissent vers le haut et vers le bas. Les Isoétales arborescentes du Carbonifère dépassaient 40 m de haut et 2 m de diamètre à la base.

C’est dans la seconde moitié du Carbonifère que la grande forêt de type équatorial s’est développée. Celle-ci devait ressembler à cette illustration.

Il y avait de grands arbres à écailles, Lepidodendron (1), à très haut port ; on connaît des troncs fossiles qui atteignent 35 m de longueur et on estime la hauteur totale de l’arbre à plus de 40 m. Il y avait aussi un grand arbre columnaire, Sigillaria (2), mesurant 30 m et plus, terminé par des bouquets de longues feuilles d’un mètre. Puis Cordaites (3), un autre grand arbre de 30 m, élancé, avec un tronc de 60 cm de diamètre et de longues feuilles. Calamites (4), plante arborescente ou semi-arborescente, croissant en bordure des plans d’eau, formant un axe dressé de 15 à 20 m, une sorte de prêle géante. Finalement, un arbre-fougère (5) pouvant atteindre les 20 m de hauteur, avec un tronc de 60 cm de diamètre.

Cette grande forêt a certes contribué à une augmentation du niveau d’oxygène de l’atmosphère terrestre au Carbonifère (voir oxygénation de l’atmosphère terrestre), mais elle a surtout contribué à accumuler d’énormes quantités de charbon, de là le nom de cette période du Carbonifère. Par la suite, on n’a jamais connu d’accumulations aussi importantes de charbon. Cela tient fort probablement au fait que les spécialistes de la transformation des végétaux nouvellement arrivé sur terre, c’est-à-dire les bonnes bactéries, n’étaient pas encore nés.

Lire encore sur les arbres

Portfolio

Messages

  • A lire, de Jacques Tassin : « A quoi pensent les plantes ? »

    Jacques Tassin :

    Est-il possible de se « mettre à la place » d’une plante, de comprendre ce qu’elle perçoit de ses semblables et du monde extérieur ?
    On a longtemps vu la plante comme un être passif et immobile, spécialisé dans la fascinante alchimie de la photosynthèse. Les progrès de la biologie végétale donnent aujourd’hui de la plante une image radicalement nouvelle : les plantes ont de multiples façons de percevoir leur environnement. Mieux : elles se parlent et communiquent tous azimuts avec leurs congénères par voie chimique, s’avertissant d’un danger potentiel, mais aussi avec les animaux qui les pollinisent ou vivent en symbiose avec elles.
    Malgré ces avancées majeures de la biologie végétale, l’intuition littéraire approche souvent mieux qu’elle l’intimité des plantes. Pour découvrir cette « intériorité végétale », rien de tel que le mélange précisément dosé de science et de poésie que propose ce livre.

  • « En argot les hommes appellent les oreilles des feuilles

    c’est dire comme ils sentent que les arbres connaissent la musique

    mais la langue verte des arbres est un argot bien plus ancien

    Qui peut savoir ce qu’ils disent lorsqu’ils parlent des humains

    les arbres parlent arbre

    comme les enfants parlent enfant

    ’Quand un enfant de femme et d’homme

    adresse la parole à un arbre

    l’arbre répond

    l’enfant entend

    Plus tard l’enfant

    parle arboriculture

    avec ses maîtres et ses parents

    Il n’entend plus la voix des arbres

    il n’entend plus leur chanson dans le vent

    pourtant parfois une petite fille

    pousse un cri de détresse

    dans un square de ciment armé

    d’herbe morne et de terre souillée

    Est-ce… oh… est-ce

    la tristesse d’être abandonnée

    qui me fait crier au secours

    ou la crainte que vous m’oubliiez

    arbre de ma jeunesse

    ma jeunesse pour de vrai

    Dans l’oasis du souvenir

    une source vient de jaillir

    est-ce pour me faire pleurer

    J’étais si heureuse dans la foule

    la foule verte de la forêt

    avec la crainte de me perdre

    et la crainte de me retrouver

    N’oubliez pas votre petite amie

    arbres de ma forêt. »

    “Les arbres parlent arbre” - Prévert - Arbres (1956).

  • « La vie secrète des arbres », Peter Wohlleben :

    « On peut observer cette association des arbres par leurs racines au bord des chemins, là où la pluie a lessivé la terre des talus et mis au jour les systèmes racinaires. Des scientifiques ont constaté, dans le massif forestier du Harz, en Allemagne du nord, que la plupart des individus d’une même espèce et d’un même peuplement sont reliés entre eux par un véritable réseau. L’échange de substances nutritives et l’intervention des arbres voisins en cas de besoin seraient la norme. Il apparaît ainsi que les forêts sont des superorganismes, des organisations structurées comme le sont par exemple les fourmilières… Les végétaux, par conséquent les arbres, sont parfaitement capables de distinguer leurs racines de celles d’espèces différentes et même de celles d’autres individus de la même espèce… Mais pourquoi les arbres ont-ils un comportement social, pourquoi partagent-ils leur nourriture avec des congénères et entretiennent-ils ainsi leurs concurrents ? Pour les mêmes raisons que dans les sociétés humaines : à plusieurs, la vie est plus facile. Un arbre n’est pas une forêt, il ne peut à lui seul créer des conditions climatiques équilibrées, il est livré sans défense au vent et à la pluie. A plusieurs, en revanche, les arbres forment un écosystème qui modère les températures extrêmes, froides ou chaudes, emmagasine de grandes quantités d’eau et augmente l’humidité atmosphérique… Les gros hêtres à l’écorce grise qui se protègent mutuellement me font penser aux éléphants qui vivent en troupeaux. »

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