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Tout idéaliste qu’il était, Hegel a découvert la dialectique objective du monde réel

dimanche 10 mars 2019, par Robert Paris

Tout idéaliste qu’il était, Hegel a découvert la dialectique objective du monde réel

Hegel, « Science de la Logique » :

« C’est seulement sur cette route qui se construit soi-même que la philosophie est capable d’être science objective, démontrée. »

Hegel dans « Introduction à la Petite Logique » :

« Le principe de l’expérience contient une détermination de la plus haute importance ; l’homme doit exister et se trouver dans l’objet pour que celui-ci soit saisi et connu ; pour parler avec plus de précision, il faut que l’objet lui-même soit tellement lié à l’existence humaine, que l’affirmation de lui-même et l’affirmation de l’objet soient inséparables. Il faut que l’homme existe et qu’il soit en rapport avec l’objet, soit qu’il y applique ses sens, ou ses facultés les plus hautes, et la conscience la plus intime de lui-même. »

Hegel dans « La Raison dans l’Histoire » :

« On commence par reprocher à la philosophie d’arriver à l’histoire avec certaines idées et de la considérer selon ces idées. Mais la seule idée apportée par la philosophie est celle de la Raison – l’idée que la raison domine le monde et que, par conséquent, l’histoire universelle s’est elle aussi déroulée rationnellement. Cette conviction – cette connaissance est un « postulat » à l’égard de l’histoire comme telle. Mais pour la philosophie, ce n’est pas un postulat…

La réflexion philosophique a pour but d’éliminer l’accidentel, c’est-à-dire la nécessité extérieure – nécessité qui se ramène à des causes qui elles-mêmes ne sont que des circonstances externes…. Nous devons chercher dans l’histoire un but universel, qui ne soit pas le but particulier de l’esprit subjectif ou du sentiment humain…

L’univers comprend à la fois la nature physique et psychique. La nature physique intervient dans l’histoire universelle, et dès le début nous attirerons l’attention sur ces rapports fondamentaux de la détermination naturelle… L’homme ne rompt pas l’unité du réel et de l’idéel… »

Hegel dans « Encyclopédie des sciences philosophiques » :

« La dialectique est l’âme de la recherche scientifique, et constitue l’unique principe à l’aide duquel le contenu de la science se voit conférer une liaison et une nécessité immanentes. S’écarter des déterminations rationnelles abstraites semble à la conscience commune une suggestion du simple bon sens, conformément à la maxime "vis et laisse vivre les autres", tout étant représenté comme également bon. Mais le fond de la chose consiste en ce que le fini n’est pas seulement limité du dehors, mais doit être détruit et transformé en son contraire, en vertu de sa propre nature interne. »

« Nous disons que toutes choses (c’est-à-dire tout ce qui est fini en tant que tel) doivent être déférées au tribunal de la dialectique, et, de ce fait, nous la définissons comme la force universelle irrésistible appelée à ruiner toutes choses, si durables qu’elles aient pu paraître. »

« L’ancienne métaphysique, qui considérait les choses comme faites une fois pour toutes, était issue d’une science de la nature qui étudiait les choses mortes et vivantes en tant que choses faites une fois pour toutes. Mais lorsque cette étude fut avancée au point que le progrès décisif fût possible, à savoir le passage à l’étude systématique des modifications s’opérant dans ces choses au sein de la nature même, à ce moment sonna dans le domaine philosophique aussi le glas de la vieille métaphysique. »

« Le nom de philosophie a été donné à tout ce savoir qui s’est occupé de la connaissance de la mesure fixe et de l’universel dans l’océan des singularités empiriques. »

Hegel dans « Science de la Logique » :

« Toutes les choses sont en elles-mêmes contradictoires. (…) C’est pourtant un préjugé fondamental de la logique traditionnelle et de la pensée ordinaire que la contradiction ne serait pas une détermination aussi essentielle et aussi immanente que l’identité. (…) C’est seulement en tant qu’une chose a une contradiction en elle-même qu’elle se meut, qu’elle a une impulsion et une activité. Ordinairement, on éloigne la contradiction des choses ; on affirme qu’il n’y a « rien de contradictoire ». (…) En général, la contradiction passe pour quelque chose d’accidentel dans le réel aussi bien que dans la réflexion, comme si elle était une anormalité, un paroxysme morbide et passager. (…) Il faut considérer la contradiction non comme une anomalie qui n’apparaît que ça et là ; la contradiction est le négatif dans sa détermination essentielle, le principe de tout mouvement spontané qui ne fait pas autre chose qu’expliciter la contradiction. Il faut reconnaître avec les dialecticiens de l’antiquité (Parménide, Zénon, Socrate...) les contradictions qu’ils ont montrées dans le mouvement, mais il ne faut pas en conclure que le mouvement n’est pas ; au contraire, on doit en conclure que le mouvement est le contraire de son existence visible. »

Hegel dans « Petite Logique » :

« L’actualité concrète est l’unité immédiate de l’essence et de l’existence, ou de l’interne et de l’externe.
La manifestation de l’actualité est aussi l’actualité ; car celle-ci se trouve d’une manière essentielle dans ses manifestations, et n’est elle-même une chose essentielle qu’autant qu’elle est une existence extérieure immédiate…
L’existence est l’unité immédiate de l’être et de la réflexion, et, par conséquent, phénomène…
L’Actuel pose cette unité, ce rapport où les termes sont devenus identiques…
La représentation conçoit la possibilité comme constituant la détermination la plus riche et la plus compréhensive, et la réalité, par contre, comme constituant la détermination la plus pauvre et la plus limitée.
D’où la proposition : est possible tout ce qui est, mais tout ce qui est possible n’est pas pour cela réel…
La possibilité et la contingence sont les moments de la réalité, l’interne et l’externe, posés comme simples formes qui constituent la sphère extérieure du réel. »

Hegel dans « Philosophie de la Nature » :

« Non seulement la philosophie ne peut être qu’en accord avec l’expérience naturelle, mais la naissance et la formation de la science philosophique ont la physique empirique pour présupposition et condition. »

Hegel dans « Esthétique » :

« Philosophie et science sont deux termes inséparables : car le propre de la pensée philosophique est de ne pas considérer les choses par leur côté extérieur et superficiel, mais dans leurs caractères essentiels et nécessaires. »

Introduction à la « Science de la logique » de Hegel :

« La seule chose nécessaire pour obtenir la progression scientifique, et vers la compréhension de laquelle il faut essentiellement s’efforcer, c’est la connaissance de cette proposition logique : le négatif est également positif, autrement dit, ce qui se contredit ne se résout pas en zéro, en néant abstrait, mais essentiellement en la négation de son contenu particulier ; autrement dit encore, une telle négation n’est pas complète négation, mais négation de la chose déterminée. (…) Le résultant, la négation, étant négation déterminée, a un contenu. Elle est un concept nouveau, mais plus haut, plus riche que le précédent, car elle s’est enrichie de sa négation, autrement dit de son opposé (…) elle est l’unité d’elle-même et de son opposé. »

Hegel dans introduction du cours de Heidelberg sur l’histoire de la philosophie :

« Je ne réclame rien sinon que vous m’apportiez la confiance en la science et la confiance en vous-mêmes. La première condition de la philosophie c’est le courage de la vérité et la foi en la puissance de l’esprit humain. (…) Les actes de la pensée paraissent tout d’abord, étant historiques, être l’affaire du passé et se trouver au-delà de notre réalité. Mais en fait, ce que nous sommes, nous le sommes aussi historiquement ou plus exactement : comme dans ce domaine, l’histoire de la pensée, le passé n’est qu’un des aspects, de même que dans nous sommes, l’élément impérissable commun à tous est lié indissolublement à ce que historiquement nous sommes. Le trésor de raison consciente d’elle-même qui nous appartient, qui appartient à l’époque contemporaine, ne s’est pas produit de manière immédiate, n’est pas sorti du sol du temps présent, mais pour lui c’est essentiellement un héritage, plus précisément le résultat du travail et, à vrai dire, du travail de toutes les générations antérieures du genre humain. (…) Or, cette tradition n’est pas seulement une ménagère qui se contente de garder fidèlement ce qu’elle a reçu et le transmet sans changement aux successeurs ; elle n’est pas une immobile statue de pierre, mais elle est vivante et grossit comme un fleuve puissant qui s’amplifie à mesure qu’il s’éloigne de sa source. (…) L’esprit universel ne sombre pas dans un calme indifférent. Sa vie est action. L’action présume une matière existante qui est son objet ; non seulement elle l’amplifie, l’agrandit en y ajoutant de la matière, mais essentiellement elle l’élabore et la transforme. (…) Notre position et notre activité – et celles de tous les temps - consiste à appréhender la science existante, à se former par elle et en elle-même, continuer à la former et à la faire s’élever plus haut. En nous l’appropriant, nous en faisons quelque chose qui nous appartient et qui s’oppose à ce qu’elle était précédemment. »

Hegel dans la Préface à « Science de la Logique » :

« La mutation complète qu’a subie parmi nous la manière de penser philosophique depuis environ vingt-cinq ans, le point le plus élevé que la conscience de soi de l’esprit a atteint sur elle-même pendant ce laps de temps n’ont encore eu jusqu’à présent que peu d’influence sur la configuration de la logique.
Ce qu’avant cette période on appelait métaphysique a été pour ainsi dire extirpé radicalement et a disparu de la liste des sciences. Où les voix de l’ontologie d’antan, de la psychologie rationnelle, de la cosmologie, ou même de l’antique théologie naturelle se font-elles entendre ? Où leur est-il loisible de se faire entendre ? Par exemple, des investigations portant sur l’immatérialité de l’âme, sur les causes mécanique et finale, où pourraient-elles encore éveiller un intérêt ? Même les preuves de l’existence de Dieu qui avaient cours naguère ne sont plus alléguées que d’un point de vue historique ou en vue de l’édification et de l’élévation de l’âme. C’est un fait que l’intérêt soit pour le contenu soit pour la forme de l’ancienne métaphysique, soit pour l’un et l’autre à la fois, est perdu. S’il est étrange qu’un peuple découvre comme inutilisables par exemple la science de son droit étatique, ses coutumes et ses vertus éthiques, il est pour le moins aussi étrange qu’un peuple perde sa métaphysique, et qu’en lui l’esprit occupé de sa pure essence n’ait plus d’être-là effectif.
La doctrine esotérique de la philosophie kantienne, - savoir que l’entendement n’a pas le droit de passer outre aux bornes de l’expérience, autrement la faculté de connaissance devient raison théorique qui n’engendre pour soi que des chimères, a justifié scientifiquement le renoncement au penser spéculatif. Au-devant de cette doctrine populaire vinrent les clameurs de la pédagogie moderne, cette misère des temps, qui dirige le regard sur le besoin immédiat ; selon elle, de même que pour la connaissance, l’expérience est ce qui est premier, ainsi pour le savoir-faire dans la vie publique et privée une vue théorique pénétrante va jusqu’à être nocive, alors que l’exercice et la culture pratiques sont après tout l’essentiel, ce qui seul est profitable. – La science et le sens commun se renforçant ainsi l’un l’autre pour provoquer le déclin de la métaphysique, cela parut entraîner le spectacle étrange d’un peuple cultivé dépourvu de métaphysique, - comme il en irait d’un temple doté par ailleurs d’ornements variés, mais privé de sanctuaire. – La théologie qui, au temps jadis, était la gardienne des mystères spéculatifs ainsi que de la métaphysique, quoique celle-ci fût dépendante, les avait abandonnés pour des sentiments, pour du practico-populaire, et pour l’historique en sa dimension d’érudition. A tel changement répond le fait que disparurent ces solitaires qui furent sacrifiés par leur peuple et séparés du monde dans le but de rendre présentes ma contemplation de l’éternel et une vie au seul service de cette contemplation, non pas pour utilité mais en vue de la bénédiction, - un disparaître qui, dans un contexte autre, peut être considéré, selon l’essence, comme le même phénomène que celui qui a été évoqué ci-dessus. – De sorte que, après dissipation de ces ténèbres, terne commerce avec soi-même de l’esprit tourné vers soi, l’être-là parut être converti dans le monde serein des fleurs, où, comme on le sait, il n’en est point de noires.
La logique n’a pas été aussi mal servie que l’a été la métaphysique. Que par elle on apprenne à penser, chose que l’on tenait autrefois pour son utilité, et partant pour son but – comme si l’on devait passer par l’étude de l’anatomie et de la physiologie pour apprendre à digérer et à se mouvoir -, ce préjugé s’est perdu depuis longtemps, et l’esprit qui relève du domaine pratique ne lui a pas réservé un meilleur sort. Néanmoins, vraisemblablement à cause de quelque utilité formelle, on lui laissa un rang parmi les sciences, bien plus elle fut même maintenue comme objet de l’enseignement officiel. Ce sort meilleur ne concerne pourtant que le destin extérieur ; car sa configuration et son contenu sont demeurés les mêmes, un contenu tel que le lui transmit une longue tradition, mais qui pourtant s’amenuisa et s’amaigrit toujours plus en cette transmission ; l’esprit nouveau qui s’est levé pour la science non moins que pour l’effectivité ne s’y est pas encore fait sentir. Mais quand la forme substantielle de l’esprit est passée en une autre figure, il est définitivement vain de vouloir maintenir les formes de la culture antérieure ; ce sont des feuilles fanées que chassent les bourgeons nouveaux déjà formés à leur base.
On commence peu à peu, et jusque dans le domaine de la science, à sortir d’un état d’ignorance à propos de cette universelle mutation. Sans qu’il y paraisse, même aux adversaires les autres représentations sont devenues familières, et ont été adoptées par eux ; et si, face à leur source et à leurs principes, ils ne cessent de faire la fine bouche et adoptent à leur égard une attitude qui les contredise, ils en ont en contrepartie accepté les conséquences, et n’ont pu se défendre de leur influence ; à leur comportement négatif toujours plus insignifiant ils ne réussissent à donner une importance positive et un contenu qu’en se mettant à l’unisson des nouvelles représentations.
Par ailleurs, il semble que le temps de la fermentation, qui inaugure une création nouvelle, soit passé. Lorsqu’elle apparaît pour la première fois, une telle création adopte communément une attitude d’hostilité fanatique à l’égard de la systématisation largement répandue du principe antérieur ; tantôt elle appréhende de se perdre dans l’extension du particulier, tantôt elle craint le travail qu’exige la formation scientifique, et, quand cette formation fait défaut, elle recourt tout d’abord à un formalisme vide. L’exigence d’une élaboration et d’une formation du matériau n’en devient alors que plus pressante. Il y a une période, dans la culture d’un temps comme dans la culture d’un individu, où l’on a surtout affaire à l’acquisition et à l’affirmation du principe dans son intensité non développée. Mais l’exigence supérieure vise à ce que ce principe parvienne à la science.
Quels qu’aient été les résultats auxquels on est parvenu à d’autres égards en ce qui concerne le contenu et la forme de la science, reste que la science logique, qui constitue la métaphysique proprement dite ou la pure philosophie spéculative, s’est vue jusqu’à présent encore très négligée. Ce que j’entends plus précisément par cette science et le point de vue qui est sien, je l’ai indiqué en première approche dans l’Introduction (introduction à Science de la Logique). Bien qu’un travail de nombreuses années n’ait pu donner à cet essai une plus grande perfection, il est souhaitable que ceux qui en jugent équitablement aient égard à la nécessité qui s’imposait de reprendre cette science à son début, à la nature de l’objet même, et à la carence en travaux préparatoires qui auraient pu être utilisés. – Le point de vue essentiel tient en ce que l’on a affaire en somme à un concept nouveau du traitement scientifique. La philosophie, en tant qu’elle doit être science, ne peut pas à cet effet, ainsi que je l’ai rappelé ailleurs, emprunter sa méthode à une science subordonnée comme l’est la mathématique, pas plus qu’elle ne peut en rester aux affirmations catégoriques de l’intuition intérieure, ou se servir du raisonnement fondé sur la réflexion extérieure. Mais c’est seulement à la nature du contenu qu’il revient de se mouvoir dans le connaître scientifique, en tant que c’est cette réflexion propre du contenu qui seulement pose et produit à la fois sa détermination même.

L’entendement détermine et fixe les déterminations ; la raison est négative et dialectique, parce qu’elle réduit à rien les déterminations de l’entendement ; elle est positive parce qu’elle produit l’universel, et subsume en lui le particulier. De même que l’on a coutume de prendre l’entendement comme quelque chose de séparé de la raison en général, de même aussi a-t-on coutume de prendre la raison dialectique comme quelque chose de séparé de la raison positive. Mais dans sa vérité la raison est esprit, et celui-ci est supérieur à l’un et à l’autre, il est une raison d’entendement ou un entendement de raison. Il est le négatif, ce qui constitue aussi bien la qualité de la raison dialectique que de l’entendement ; - il nie ce qui est simple, et c’est ainsi qu’il pose la différence déterminée de l’entendement ; il dissout tout autant cette différence, et c’est ainsi qu’il est dialectique. Pourtant il ne se maintient pas dans le néant de ce résultat, mais en lui il est aussi bien positif, et ainsi il a établi par là le premier terme simple, mais comme un universel ; sous cet universel n’est pas subsumé un particulier donné, mais dans ce déterminer et dans sa réduction le particulier s’est déjà co-déterminé. Ce mouvement spirituel, qui dans sa simplicité se donne sa détermination et dans celle-ci son égalité avec lui-même, et qui est donc le développement immanent du concept, est la méthode absolue du connaître, et en même temps l’âme immanente du contenu lui-même. – C’est seulement en suivant ce chemin qui se construit lui-même que la philosophie, je l’affirme, est capable d’être science objective, démontrée. – C’est de cette manière que j’ai essayé de présenter la conscience dans la « Phénoménologie de l’Esprit ». La conscience est l’esprit comme objet concret ; mais le mouvement par lequel elle se meut vers l’avant repose uniquement, comme il en va du développement de toute vie naturelle et spirituelle, sur la nature des essentialités pures qui constituent le contenu de la logique. La conscience, en tant qu’elle est l’esprit se manifestant, qui se libère sur son chemin de son immédiateté et de sa concrétude, parvient au niveau du savoir pur qui a pour objet ces essentialités pures elles-mêmes, telles qu’elles sont en et pour soi. Ce sont les pensées pures, l’esprit qui pense son essence. Leur auto-mouvement est leur vie spirituelle, il est ce par quoi la science se constitue et ce dont elle est la présentation… »

Hegel dans "La philosophie de l’Etre" :

"De quoi doit être fait le commencement de la science ? De la compréhension de la nature du connaître."

"La science elle-même doit saisir le concept de la science et, ce faisant, le concept premier, - et puisqu’il est premier, il inclut la séparation consistant en ce que le penser est objet pour un sujet."

"L’erreur fondamentale où tombe tout empirisme philosophique, c’est qu’il emploie les catégories métaphysiques de la matière, de la force, de l’unité, de la pluralité, de l’universel, de l’infini, etc. Il lie entre elles ces catégories, y suppose et y applique les formes du syllogisme, et tout cela sans savoir qu’il admet ainsi lui-même une connaissance métaphysique."

"Non seulement la philosophie ne peut être qu’en accord avec l’expérience naturelle, mais la naissance et la formation de la science philosophique ont la physique empirique pour présupposition et condition."

"Philosophie et science sont deux termes inséparables : car le propre de la pensée philosophique est de ne pas considérer les choses par leur côté extérieur et superficiel, mais dans leurs caractères essentiels et nécessaires."

"Une philosophie qui ne repose pas sur une connaissance systématique ne constitue pas une science, mais bien plutôt une forme, une manière de sentir individuelle et contingente quant au contenu. (...) Ce à quoi je me suis appliqué et m’applique dans mes recherches philosophiques, c’est à arriver à la connaissance scientifique de la vérité. C’est la voie la plus difficile, mais la seule qui possède un intérêt et une valeur pour l’esprit qui, une fois placé sur le terrain de la pensée, ne se laisse pas détourner de son but par de vaines apparences, et qui possède la volonté et le courage que donne l’amour de la vérité. (...) Quant à la science, elle a devant elle ce riche contenu qu’on amené des centaines et des milliers d’années d’activité scientifique (...) La pensée, dans le droit absolu de sa liberté, s’obstine et avec raison à se réconcilier avec le riche contenu qui est devant elle, en apprenant à le revêtir de sa forme essentielle, qui est la forme de la notion, la forme de la nécessité qui lie tout contenu comme toute pensée (...) "

"La connaissance, c’est l’approche sans fin vers l’objet, par la pensée. Il faut comprendre le "reflet" de la nature dans la pensée humaine non pas d’une façon "morte", "abstraite", non pas sans mouvement, non pas sans contradictions, mais dans un processus sans fin de mouvement, de naissance de contradictions et de leur résolution."

Hegel dans « Science de la Logique » :

« Tout ce qui est réel est rationnel, tout ce qui est rationnel est réel. »

Donc si l’on interprétait la première partie de la phrase comme un a priori idéaliste, la deuxième, elle, serait une affirmation d’un matérialiste convaincu !
A propos du chapitre de la Logique sur l’Idée de Hegel, où triomphe pourtant l’idéalisme absolu de la Science de la Logique, Lénine notait avec finesse : « C’est dans ce chapitre sur l’Idée absolue qu’il y a en réalité le plus de matérialisme et, le moins d’idéalisme ! » ; et d’ajouter superbement que « Le matérialisme intelligent est plus proche de l’idéalisme intelligent que du matérialisme bête ».

Hegel dans « Introduction à la Petite Logique » :

« L’on trouve dans la préface de ma « Philosophie du Droit », ces propositions : « Ce qui est rationnel est aussi réel, et ce qui est réel est aussi rationnel ». Ces propositions bien simples ont été vivement attaquées, et elles ont paru extraordinaires… L’existence est en partie apparence et en partie réalité. Dans la vie ordinaire, tous les événements, l’erreur, le mal et tout ce qui appartient à cet ordre de choses, ainsi que toute existence passagère et périssable, sont accidentellement appelés des réalités. Et même, aux yeux de la conscience vulgaire, c’est une exagération que de considérer une existence contingente comme une réalité, car une telle existence n’a que la valeur d’une « possibilité », laquelle peut aussi bien ne pas être.

Mais, lorsque j’ai parlé de réalité, il était bien aisé de comprendre dans quel sens j’ai employé cette expression, puisque dans ma « Logique », j’ai traité de la réalité, et que non seulement je l’ai distinguée du « contingent », qui a, lui aussi une signification, mais de l’être, de l’existence et d’autres déterminations.

Plusieurs opinions s’élèvent contre la réalité de la raison. D’une part, l’on ne voit dans les idées et l’idéal que des êtres chimériques, et dans la philosophie qu’un système de ces fantômes. D’autre part, l’idéal est considéré comme quelque chose de trop excellent pour avoir une réalité, ou bien encore comme ne pouvant la produire.

Mais la séparation de la réalité et de l’idée plaît surtout à l’entendement qui prend les rêves de ses abstractions pur des êtres véritables, et qui est fier de sa notion du « devoir », à l’appui de laquelle il invoque volontiers l’état des sociétés, comme si le monde réel n’existait pas, et qu’il eût fallu attendre la réalisation de cette notion pour qu’il soit ce qu’il doit être ! »

Karl Marx dans postface de la seconde édition allemande du Capital Livre premier :
« J’ai critiqué le côté mystique de la dialectique hégélienne il y a près de trente ans, à une époque où elle était encore à la mode... Mais bien que, grâce à son quiproquo, Hegel défigure la dialectique par le mysticisme, ce n’en est pas moins lui qui en a le premier exposé le mouvement d’ensemble. Chez lui elle marche sur la tête ; il suffit de la remettre sur les pieds pour lui trouver la physionomie tout à fait raisonnable. Sous son aspect mystique, la dialectique devint une mode en Allemagne, parce qu’elle semblait glorifier les choses existantes. Sous son aspect rationnel, elle est un scandale et une abomination pour les classes dirigeantes, et leurs idéologues doctrinaires, parce que dans la conception positive des choses existantes, elle inclut du même coup l’intelligence de leur négation fatale, de leur destruction nécessaire ; parce que saisissant le mouvement même, dont toute forme faite n’est qu’une configuration transitoire, rien ne saurait lui imposer ; qu’elle est essentiellement critique et révolutionnaire. »

Hegel a-t-il raison de dire que « Tout ce qui est réel est rationnel » ?

Hegel est-il seulement un idéaliste

Messages

  • Hegel : "

    "un fruit avant d’apparaître comme un fruit, a d’abord été une fleur et encore avant un bouton.."

    « La manière commune de penser conçoit l’opposition mutuelle du vrai et du faux avec d’autant plus de rigidité qu’elle a coutume d’attendre dans une prise de position à l’égard d’un système philosophique donné, ou une concordance, ou une contradiction, et dans une telle prise de position elle sait seulement voir l’une ou l’autre. Elle ne conçoit pas la diversité des systèmes philosophiques comme le développement progressif de la vérité ; elle voit plutôt seulement la contradiction dans cette diversité. Le bouton disparaît dans l’éclatement de la floraison, et on pourrait dire que le bouton est réfuté par la fleur : à l’apparition du fruit, également, la fleur est dénoncée comme un faux être-là de la plante, et le fruit s’introduit à la place de la fleur comme sa vérité. Ces formes ne sont pas seulement distinctes, mais encore chacune refoule l’autre, parce qu’elles sont mutuellement incompatibles. Mais en même temps leur nature fluide en fait des moments de l’unité organique dans laquelle elles ne se repoussent pas seulement, mais dans laquelle l’une est aussi nécessaire que l’autre, et cette égale nécessité constitue seule la vie du tout. Au contraire, la contradiction à l’égard d’un système philosophique n’a pas elle-même coutume de se concevoir de cette façon ; et, d’autre part, la conscience appréhendant cette contradiction ne sait pas la libérer ou la maintenir libre de son caractère unilatérale ; ainsi dans ce qui apparaît sous forme d’une lutte contre soi-même, elle ne sait pas reconnaître des moments réciproquement nécessaires. »

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