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Pourquoi la Chine n’a pas été finalement le lieu de naissance du capitalisme ?

mercredi 20 octobre 2021, par Robert Paris

Pourquoi la Chine n’a pas été finalement le lieu de naissance du capitalisme ?

Très marqués par le fait que la Chine a longtemps été considérée comme une nation du Tiers monde, certains auteurs continuent de nier le fait qu’une bourgeoisie, avec artisanat, commerce et même grand commerce international, accumulation de capitaux et début de revendication politique, ait pu voir le jour, dans la Chine ancienne et même dans la Chine antique, à une époque équivalente et même précédent les civilisations grecque et romaine.

Les historiens oublient systématiquement la Chine dans les origines du capitalisme :

https://core.ac.uk/download/pdf/7048999.pdf

https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_du_capitalisme

« Alors que certaines conditions favorables à la formation et au développement des rapports capitalistes de production ont commencé à s’accumuler en Chine plusieurs siècles, souvent, avant qu’elles n’apparaissent en Europe occidentale, alors que « les Chinois ont joui, pendant l’Antiquité et jusqu’au Moyen Âge, d’une avance technologique », pourquoi l’empire du Milieu n’a-t-il pas donné naissance au capitalisme ? »

https://www.monde-diplomatique.fr/2019/11/BIHR/60915

La découverte de l’Amérique et de la route des Indes orientales par le Cap de Bonne-Espérance ne furent des événements importants que pour les Européens et n’ont de sens que parce qu’il existait un système mondial reliant la Méditerranée à la Chine par les routes de la soie en Asie centrale et des épices dans l’Océan indien, auquel les Européens, jusque-là en position marginale, voulaient pleinement participer...

Le « développement technologique » que constitua la révolution industrielle n’a de sens que dans le « procès économique mondial  ». C’est parce qu’il fallait faire baisser les coûts face à la concurrence des producteurs asiatiques que les entrepreneurs européens eurent recours au machinisme. Si « la Révolution industrielle en Grande-Bretagne commença  » par le textile, c’est parce que « la Grande-Bretagne et l’Europe occidentale étaient en concurrence […] avec l’Inde et la Chine ».

https://www.cairn.info/revue-actuel-marx-2013-1-page-76.htm

Le monde occidental se glorifie de sa technologie révolutionnée très anciennement mais le capitalisme n’est pas d’abord un produit de la technologie :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4517

Genèse du capitaliste industriel :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3368

Alors que les relations commerciales entre la Chine et l’Occident remontent au IIe siècle avant J.-C. et à l’ouverture de la route de la soie, la civilisation chinoise est demeurée longtemps à peu près ignorée des Européens.

https://books.openedition.org/pulm/4406?lang=fr

« Le peuple chinois s’est levé et sa renaissance après plus d’un siècle de sous-développement et d’invasions est irréversible » déclare le président Xi Jinping lors du centenaire du Parti communiste. Bien des commentateurs occidentaux affirment alors que le dirigeant chinois réinvente le glorieux passé de la Chine.

La Chine réécrit-elle son histoire en grandissant son glorieux passé :

https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/archeologie/la-chine-reecrit-elle-son-histoire_151199

Les bourgeoisies occidentales sont fières d’avoir soi-disant initié, en même temps que la grand développement économique, le développement de la démocratie auquel elles auraient donné le pouvoir d’Etat par « leur » révolution politique et sociale, en Angleterre comme en France. Bien entendu, elles ne mettent plus trop l’accent sur l’aspect révolutionnaire, avec la mobilisation des masses pauvres. Elles ne gardent que le prétendu « état de droit » ou « l’habeas corpus » pour les Anglais, comme si les libertés démocratiques étaient le résultat d’une action juridique et politicienne des juristes et des assemblées politiciennes bourgeoises et pas de l’insurrection des masses pauvres ! Il va de soi qu’Anglais ou Français ont prétendu avoir inventé la révolution démocratique, alors qu’ils ne faisaient que suivre bien d’autres révolutions, que ce soient celles de Gand, de Suisse, de Corse, et… il y a bien plus longtemps… de Chine !!!

Eh oui, la bourgeoisie chinoise a postulé au pouvoir à l’époque de Jésus !!! Et elle a failli réussir à renverser les seigneurs féodaux…

Mais cela n’empêche pas, par exemple, l’historienne Régine Pernoud d’affirmer, en se rengorgeant, une origine ouest-européenne et même française de la bourgeoisie, dans son « Histoire de la bourgeoisie en France » :

En Chine et en Inde, la première grande bourgeoisie visant le pouvoir et la domination mondiale, bien supérieure, s’est développée à l’époque de Jésus-Christ, alors que les bourgeois occidentaux, encore appelés « les poudreux » du fait que ces colporteurs étaient couverts de poudre des chemins sur lesquels ils transportaient leurs marchandises à pied ou sur des ânes. Ces derniers n’en étaient même pas encore à revendiquer le droit d’ouvrir des marchés, de déposer leurs marchandises sur la plage de Seine à Paris, ou place de Grève, et même pas à disposer de municipalités ou de corporations, quand les bourgeois asiatiques menaçaient depuis longtemps le pouvoir féodal mais se heurtaient à un Etat central très violent et très puissant.

La Chine a eu une grande bourgeoisie

Citons d’abord la bourgeoisie commerçante de la soie… La route de la soie est un réseau ancien de routes commerciales entre l’Asie et l’Europe, reliant la ville de Chang’an (actuelle Xi’an) en Chine à la ville d’Antioche, en Syrie médiévale (aujourd’hui en Turquie). Elle tire son nom de la plus précieuse marchandise qui y transitait : la soie.

La route de la soie était un faisceau de pistes par lesquelles transitaient de nombreuses marchandises, et qui monopolisa les échanges Est-Ouest pendant des siècles. Les plus anciennes traces connues de la route de la soie, comme voie de communication avec les populations de l’Ouest, remontent à « 2000 avant notre ère au moins ». Les Chinois en fixent l’ouverture au voyage de Zhang Qian entre -138 et -126. Mais la route de la soie s’est développée surtout sous la dynastie Han (206 av. J.-C. - 220 ap. J.-C.), en particulier Han Wudi.

Puis sous la dynastie Tang (618-907). À partir du XVe siècle, la route de la soie est progressivement abandonnée, l’instabilité des guerres turco-byzantines, puis la chute de Constantinople poussant en effet les Occidentaux à chercher une nouvelle route maritime vers les Indes. L’abandon de la route de la soie correspond ainsi au début de la période des « Grandes découvertes » durant laquelle les techniques de transport maritime deviennent de plus en plus performantes. Du côté chinois, les empereurs Ming Yongle, puis Ming Xuanzong chargent, à la même époque, l’amiral Zheng He d’expéditions maritimes similaires.

L’aristocratie commence à perdre son influence sous les Ts’in. En même temps se fait sentir, pour la première fois dans l’histoire de la Chine, celle des marchands. C’est un riche marchand, Lu Pou wei, qui a exercé la régence au temps où le « Premier Empereur » n’était encore que le prince Tcheng. Ce sont les marchands qui réclameront l’unification des poids et mesures et de l’écartement des essieux. Sous les Han, l’expansion géographique de la Chine, la conquête ou l’exploitation de nombreux pays étrangers, le développement remarquable des communications favorisent la constitution d’une riche bourgeoisie commerciale. Le sel, le fer, les chevaux, les produits de luxe, perles, soieries, or, bronze, jade, laques, épices, offrent autant de moyens de faire fortune, tandis que les classes supérieures s’enrichissent par les taxes, les corvées, le travail des artisans. D’autres fortunes s’édifient sur l’exploitation de mines, de fonderies, sur le commerce des grains, des prêts d’argent. Mais la classe des marchands ne tarde pas à encourir la défaveur générale. Déjà les philosophes de la fin des Tcheou leur reprochaient de diminuer la matière taxable et la tradition chinoise est d’exalter l’agriculture. Les lettrés Han voient d’un mauvais œil ces ennemis du paysan, avec leurs habitudes de luxe et leur cosmopolitisme, leurs activités qui engendrent l’inflation monétaire et jettent le trouble dans une économie rurale où le grain est la commune mesure des échanges. Et puis, ces nouveaux riches accaparent les terres pour y investir leurs profits. Dès le début de la dynastie, des mesures sévères sont prises contre les marchands. Ils sont lourdement taxés. Il leur est interdit de porter des vêtements de soie, d’avoir des chars, d’occuper des fonctions publiques. Plus tard, on leur retirera le droit d’acheter des terres. On gêne leurs activités en créant des monopoles d’État et des « greniers d’égalisation », p’ing ts’ang, en stabilisant les prix, en faisant aux paysans des prêts de semences et de nourriture. Mais ces mesures n’agissent que médiocrement et sous l’empereur Wou, par exemple, on voit les marchands prospérer à l’envi aux dépens de l’agriculture, négligée par de nombreux paysans qui vont chercher fortune dans les grandes villes et se livrent à des spéculations commerciales. L’industrie n’est guère représentée que par des artisans, que l’État favorise, tandis qu’il persécute les marchands. A la capitale, d’innombrables artisans exercent toutes sortes de métiers, dont beaucoup sont de véritables métiers d’art, et contribuent ainsi au luxe de la cour et des classes riches. Quant aux matières premières et à certains produits fabriqués, le gouvernement des Ts’in s’en réserve le monopole et celui-ci sera maintenu longtemps par les Han. Toutefois un débat fameux eut lieu, au cours de l’ère che yuan (86-81 av. J. C.) de l’empereur Tchao, à propos du monopole du sel et de celui du fer. Attaquées par les lettrés, ces institutions furent défendues par le yu che ta fou Sang Hong yang. La controverse fit l’objet d’un ouvrage en 10 livres, dû au lettré Houan K’ouan, le Yen tie louen (Discussions sur le sel et le fer), et publié sous l’empereur Siuan (73-49 av. J. C.). (…)

La structure de la société des Han était trop délicate pour résister à une crise grave : la révolte des Turbans Jaunes, puis les rivalités des généraux et gouverneurs provinciaux qui se disputèrent le pouvoir un demi-siècle durant sous des empereurs impuissants la détruisirent de fond en comble. La population des campagnes, que la carence de la police publique laissait sans défense à la merci des bandes armées (pirates ou soldats), s’enfuit en abandonnant ses champs (ce furent les « familles errantes », lieou li kia), ou se mit sous la protection des grandes familles là où celles ci étaient capables de maintenir un peu d’ordre. Après le passage de Tong Tcho et de ses lieutenants à Tch’ang ngan (191), toute la région avoisinante resta p.74 déserte pour plusieurs années : des centaines de milliers d’habitants de la vallée de la Wei avaient fui jusqu’aux bords du Yang tseu, où Ts’ao Ts’ao les trouva encore installés une trentaine d’années plus tard. Dans d’autres régions, les paysans, sans fuir aussi loin, se cachaient dans la montagne ou dans les marais avoisinants. Les grandes familles se défendaient mieux, fortifiaient leurs résidences, armaient leurs membres, leurs fermiers, leurs esclaves. Ainsi se constituaient des compagnies, pou kiu, de soldats privés, kia che ou kia ping. A ces noyaux de résistance s’agrégèrent les petits propriétaires, mais à un rang subordonné ; ils devinrent des protégés, yin jen. Il y en avait deux classes : les « hôtes du vêtement et de la nourriture », yi che k’o, les parents pauvres, protégés jusqu’au septième degré et qui imposaient leur entretien aux trois premiers degrés des branches prospères de la famille ; les autres formaient la foule des « hôtes cultivateurs », tien k’o. Au début du IIIe siècle, les cinq sixièmes de la population s’étaient ainsi trouvés sous la protection du dernier sixième. La situation de ces protégés, qui n’existaient pas sous les Han Postérieurs, ne ressemblait en rien à celle des colons du monde méditerranéen : ils n’étaient pas liés au sol, mais au seigneur, et celui-ci les emmenait avec lui quand il changeait de séjour. Li K’ien ayant quitté vers 190-193 son domaine de K’iu ye (dans le Chan tong actuel) à cause des troubles, pour aller s’installer à Tch’eng che (dans le Chan tong actuel, au sud de la même sous préfecture K’iu ye), qui lui paraissait plus tranquille, y emmena plusieurs milliers de familles d’« hôtes », c’est à dire de clients et de salariés de sa famille. Et quand, un quart de siècle environ après, son fils Tien devint marquis de Tou t’ing, ces trois mille familles furent de nouveau déplacés, et transférées dans son fief, près de Ye (dans le Ho nan actuel) : elles comptaient treize mille personnes. D’aussi longs déplacements devaient être rares, car transporter tant de monde coûtait cher et était fort difficile ; mais on voit à tout instant des patrons déplacer quelques dizaines de familles de leurs clients. Au début de la dynastie Tsin, dans la seconde moitié du IIIe siècle, l’empereur Wou ayant reconstitué l’unité impériale et rétabli la paix, s’efforça par tous les moyens de faire sortir les paysans de cette dépendance : en 265, il rendit la liberté à tous les engagés qui faisaient partie de l’armée, pou kiu, et la mesure fut prise encore une fois en 277. En 280, s’attaquant directement à la clientèle des grandes familles, il en fixe l’importance d’après le rang du patron : les « hôtes du vêtement et de la nourriture » ne devaient pas dépasser trois pour le plus haut dignitaire et un pour les petits fonctionnaires ; « les hôtes cultivateurs », de quinze familles pour les fonctionnaires du premier et du second rang à une famille pour ceux du neuvième rang. Ces mesures n’eurent qu’un succès limité : les paysans répugnaient à abandonner la position à laquelle ils étaient habitués, malgré ses inconvénients. Néanmoins, la population libre doubla lentement en une quinzaine d’années. Mais bientôt la guerre civile et les invasions barbares montrèrent que le gouvernement central était incapable d’assurer la sécurité des campagnes et les petites gens durent rentrer dans cette clientèle dont quelques uns avaient été libérés un instant. Cette fois ce fut définitif ; sans devenir esclaves ou serfs, ils rentraient dans la clientèle des grands et formaient peu à peu une classe intermédiaire entre les hommes libres, lang, leang, et les esclaves, nou pei : celle des clients, pou k’iu et des « familles diverses », tsa hou, que connaît encore le Code des T’ang et dont il détermine la situation juridique. Ceux qui échappaient à la « protection » furent presque tous de grands propriétaires avec des domaines très étendus. »

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article5293

Quand les économies asiatiques semblaient devoir dominer le monde : non loin de l’époque de Jésus-Christ…

HENRI MASPERO « Les institutions de la Chine » :

« L’aristocratie commence à perdre son influence sous les Ts’in. En même temps se fait sentir, pour la première fois dans l’histoire de la Chine, celle des marchands. C’est un riche marchand, Lu Pou wei, qui a exercé la régence au temps où le « Premier Empereur » n’était encore que le prince Tcheng. Ce sont les marchands qui réclameront l’unification des poids et mesures et de l’écartement des essieux. Sous les Han, l’expansion géographique de la Chine, la conquête ou l’exploitation de nombreux pays étrangers, le développement remarquable des communications favorisent la constitution d’une riche bourgeoisie commerciale. Le sel, le fer, les chevaux, les produits de luxe, perles, soieries, or, bronze, jade, laques, épices, offrent autant de moyens de faire fortune, tandis que les classes supérieures s’enrichissent par les taxes, les corvées, le travail des artisans. D’autres fortunes s’édifient sur l’exploitation de mines, de fonderies, sur le commerce des grains, des prêts d’argent. Mais la classe des marchands ne tarde pas à encourir la défaveur générale. Déjà les philosophes de la fin des Tcheou leur reprochaient de diminuer la matière taxable et la tradition chinoise est d’exalter l’agriculture. Les lettrés Han voient d’un mauvais œil ces ennemis du paysan, avec leurs habitudes de luxe et leur cosmopolitisme, leurs activités qui engendrent l’inflation monétaire et jettent le trouble dans une économie rurale où le grain est la commune mesure des échanges. Et puis, ces nouveaux riches accaparent les terres pour y investir leurs profits. Dès le début de la dynastie, des mesures sévères sont prises contre les marchands. Ils sont lourdement taxés. Il leur est interdit de porter des vêtements de soie, d’avoir des chars, d’occuper des fonctions publiques. Plus tard, on leur retirera le droit d’acheter des terres. On gêne leurs activités en créant des monopoles d’État et des « greniers d’égalisation », p’ing ts’ang, en stabilisant les prix, en faisant aux paysans des prêts de semences et de nourriture. Mais ces mesures n’agissent que médiocrement et sous l’empereur Wou, par exemple, on voit les marchands prospérer à l’envi aux dépens de l’agriculture, négligée par de nombreux paysans qui vont chercher fortune dans les grandes villes et se livrent à des spéculations commerciales. L’industrie n’est guère représentée que par des artisans, que l’État favorise, tandis qu’il persécute les marchands. A la capitale, d’innombrables artisans exercent toutes sortes de métiers, dont beaucoup sont de véritables métiers d’art, et contribuent ainsi au luxe de la cour et des classes riches. Quant aux matières premières et à certains produits fabriqués, le gouvernement des Ts’in s’en réserve le monopole et celui-ci sera maintenu longtemps par les Han. Toutefois un débat fameux eut lieu, au cours de l’ère che yuan (86 81 av. J. C.) de l’empereur Tchao, à propos du monopole du sel et de celui du fer. Attaquées par les lettrés, ces institutions furent défendues par le yu che ta fou Sang Hong yang. La controverse fit l’objet d’un ouvrage en 10 livres, dû au lettré Houan K’ouan, le Yen tie louen (Discussions sur le sel et le fer), et publié sous l’empereur Siuan (73 49 av. J. C.). (…) La structure de la société des Han était trop délicate pour résister à une crise grave : la révolte des Turbans Jaunes, puis les rivalités des généraux et gouverneurs provinciaux qui se disputèrent le pouvoir un demi-siècle durant sous des empereurs impuissants la détruisirent de fond en comble. La population des campagnes, que la carence de la police publique laissait sans défense à la merci des bandes armées (pirates ou soldats), s’enfuit en abandonnant ses champs (ce furent les « familles errantes », lieou li kia), ou se mit sous la protection des grandes familles là où celles ci étaient capables de maintenir un peu d’ordre. Après le passage de Tong Tcho et de ses lieutenants à Tch’ang ngan (191), toute la région avoisinante resta p.74 déserte pour plusieurs années : des centaines de milliers d’habitants de la vallée de la Wei avaient fui jusqu’aux bords du Yang tseu, où Ts’ao Ts’ao les trouva encore installés une trentaine d’années plus tard. Dans d’autres régions, les paysans, sans fuir aussi loin, se cachaient dans la montagne ou dans les marais avoisinants. Les grandes familles se défendaient mieux, fortifiaient leurs résidences, armaient leurs membres, leurs fermiers, leurs esclaves. Ainsi se constituaient des compagnies, pou kiu, de soldats privés, kia che ou kia ping. A ces noyaux de résistance s’agrégèrent les petits propriétaires, mais à un rang subordonné ; ils devinrent des protégés, yin jen. Il y en avait deux classes : les « hôtes du vêtement et de la nourriture », yi che k’o, les parents pauvres, protégés jusqu’au septième degré et qui imposaient leur entretien aux trois premiers degrés des branches prospères de la famille ; les autres formaient la foule des « hôtes cultivateurs », tien k’o. Au début du IIIe siècle, les cinq sixièmes de la population s’étaient ainsi trouvés sous la protection du dernier sixième. La situation de ces protégés, qui n’existaient pas sous les Han Postérieurs, ne ressemblait en rien à celle des colons du monde méditerranéen : ils n’étaient pas liés au sol, mais au seigneur, et celui-ci les emmenait avec lui quand il changeait de séjour. Li K’ien ayant quitté vers 190 193 son domaine de K’iu ye (dans le Chan tong actuel) à cause des troubles, pour aller s’installer à Tch’eng che (dans le Chan tong actuel, au sud de la même sous préfecture K’iu ye), qui lui paraissait plus tranquille, y emmena plusieurs milliers de familles d’« hôtes », c’est à dire de clients et de salariés de sa famille. Et quand, un quart de siècle environ après, son fils Tien devint marquis de Tou t’ing, ces trois mille familles furent de nouveau déplacés, et transférées dans son fief, près de Ye (dans le Ho nan actuel) : elles comptaient treize mille personnes. D’aussi longs déplacements devaient être rares, car transporter tant de monde coûtait cher et était fort difficile ; mais on voit à tout instant des patrons déplacer quelques dizaines de familles de leurs clients. Au début de la dynastie Tsin, dans la seconde moitié du IIIe siècle, l’empereur Wou ayant reconstitué l’unité impériale et rétabli la paix, s’efforça par tous les moyens de faire sortir les paysans de cette dépendance : en 265, il rendit la liberté à tous les engagés qui faisaient partie de l’armée, pou kiu, et la mesure fut prise encore une fois en 277. En 280, s’attaquant directement à la clientèle des grandes familles, il en fixe l’importance d’après le rang du patron : les « hôtes du vêtement et de la nourriture » ne devaient pas dépasser trois pour le plus haut dignitaire et un pour les petits fonctionnaires ; « les hôtes cultivateurs », de quinze familles pour les fonctionnaires du premier et du second rang à une famille pour ceux du neuvième rang. Ces mesures n’eurent qu’un succès limité : les paysans répugnaient à abandonner la position à laquelle ils étaient habitués, malgré ses inconvénients. Néanmoins, la population libre doubla lentement en une quinzaine d’années. Mais bientôt la guerre civile et les invasions barbares montrèrent que le gouvernement central était incapable d’assurer la sécurité des campagnes et les petites gens durent rentrer dans cette clientèle dont quelques uns avaient été libérés un instant. Cette fois ce fut définitif ; sans devenir esclaves ou serfs, ils rentraient dans la clientèle des grands et formaient peu à peu une classe intermédiaire entre les hommes libres, lang, leang, et les esclaves, nou pei : celle des clients, pou k’iu et des « familles diverses », tsa hou, que connaît encore le Code des T’ang et dont il détermine la situation juridique. Ceux qui échappaient à la « protection » furent presque tous de grands propriétaires avec des domaines très étendus. »

Les progrès des techniques et des sciences sont multiples : la boussole, le gouvernail, la représentation de la Terre par le globe, le papier sont nées à cette époque (dynastie Han) en Chine…

• Agriculture : sous les Han occidentaux, les socs d’araire en fonte, apparus sous les royaumes combattants, devinrent largement disponibles. La traction animale se développe. Les systèmes d’irrigation sont étendus dès le règne de Gaozu, et le système de rotation des cultures amélioré.
• La première représentation connue d’un gouvernail est un modèle de bateau découvert dans une tombe chinoise du 1er siècle av. J.-C.

• Améliorant les techniques élaborées sous les Han occidentaux, Cai Lun détermine en 105 le processus de fabrication d’un papier performant, le premier au monde.

• Zhang Heng invente le sismographe (- 132) et l’odomètre et conçoit le premier globe céleste rotatif chinois.

• En -104, est promulgué le calendrier Taichu, premier véritable calendrier chinois.

• Progrès médicaux sous les Han orientaux avec Zhang Zhongjing et Hua Tuo, à qui l’on doit entre autres la première anesthésie générale. Sous les Han occidentaux, les socs d’araire en fonte, apparus sous les royaumes combattants, se répandent. La traction animale se développe grâce au harnachement de garrot, plus efficace que le collier à sangle de gorge. Les systèmes d’irrigation sont étendus dès le règne de Gaozu, et le système de rotation des cultures amélioré. La première représentation connue d’un gouvernail est un modèle de bateau découvert dans une tombe chinoise du 1er siècle av. J.-C. En -104, est promulgué le calendrier taichu, premier véritable calendrier chinois. En mathématiques, les Chinois inventent, vers le IIe siècle av. J.-C., la numération à bâtons. Il s’agit d’une notation positionnelle à base 10 comportant dix-huit symboles, avec un vide pour représenter le zéro, c’est-à-dire la dizaine, centaine, etc. dans ce système de numérotation (comme nous le faisons, à la suite des Indiens et des Arabes). En raison de son usage très approprié au calcul, beaucoup de mathématiciens chinois de l’époque adoptèrent cette numération pour leurs travaux.

La médecine progresse sous les Han orientaux avec Zhang Zhongjing et Hua Tuo, à qui l’on doit en particulier la première anesthésie générale.

À la même époque, dans le Zhejiang, la porcelaine apparait, elle n’est pas une invention en tant que telle mais plutôt une amélioration progressive des techniques du feu et de l’usage du kaolin. Le secret de sa fabrication ne sera percé qu’au XVIIe siècle en Europe. L’astronomie chinoise s’est développée sur plusieurs siècles et s’est longtemps montrée en avance sur celle du monde occidental. Un très grand nombre d’observations antérieures à la fin du Moyen Âge sont sans comparaison avec ce qui se faisait dans le monde occidental. Une des finalités du développement de l’astronomie était de nature divinatoire. Les premières observations de comètes, d’éclipses solaires et de supernovæ furent faites en Chine.

En physique, les travaux sur le magnétisme permirent aux Chinois de mesurer avec précision la déclinaison d’une boussole.

En médecine, l’acupuncture et l’usage des plantes médicinales fut précoce et développé. Les alchimistes taoïstes ont été des pionniers. Shennong est réputé avoir goûté de nombreuses substances pour tester leurs vertus médicinales, suite à quoi il a écrit une des premières pharmacopées incluant 365 remèdes issus de minéraux, plantes, animaux.

Les Chinois inventèrent de nombreux systèmes techniques, comme la brouette, l’horloge mécanique etc.

Cependant, loin d’être un progrès continu, l’état social de la Chine était explosif du fait des exactions des grands seigneurs féodaux. L’état de nomadisme dans lequel étaient jetés les paysans expropriés, le paupérisme croissant de la paysannerie, maintenaient le pays dans un état d’anarchie permanent. Bandit devient synonyme de rebelle et dans cet état de décomposition du système impérial, chaque aventurier pouvait être sûr de recruter une armée et se poser en prétendant à l’empire. Après la prise de la capitale de l’empire Tchang-ngang (23 de notre ère) et la mort de Wang-Mang qui, fidèle en son origine surnaturelle, s’obstinait à implorer le Ciel pour éloigner les armées rivales, les candidats à la succession noyèrent l’insurrection dans le sang. L’empire des Han postérieur (25-220 de notre ère), après une courte période d’essor économique et culturel, connut le même processus de décomposition. La concentration et le regroupement des terres entre les mains des propriétaires fonciers prirent des proportions inouïes. Les paysans asservis cultivaient la terre pour des « maisons puissantes » qui possédaient des centaines de milliers de « mou ». La ruine de la paysannerie était telle qu’une partie des lettrés eux-mêmes demandaient la limitation de la propriété foncière. C’est dans cette atmosphère de décomposition du pouvoir impérial qu’éclata la grande insurrection populaire des Turbans Jaunes qui, par son inspiration taoïste, devait donner aux revendications paysannes un caractère de radicalisme révolutionnaire inconnu jusqu’alors. Elle dura près d’un quart de siècle et ne fut réprimée qu’au prix d’efforts incessants de la part du gouvernement central. Parallèlement éclata, dans l’ouest de la Chine, l’insurrection des Cinq Boisseaux de Riz ; elle devait donner naissance à un État d’un type nouveau fondé sur des principes moraux communautaires.

Vers le début de l’ère chrétienne, la concentration des terres, l’accroissement des impôts, le luxe et la corruption de la Cour impériale provoquèrent une série de révoltes populaires qui, après les réformes sociales d’un usurpateur, Wang-Mang, aboutit à un soulèvement armé général. C’est la révolte des Sourcils Rouges (18 après notre ère). Elle n’est le début et le signal d’une révolte sociale générale… Ce premier échec de la perspective de révolution sociale entraînera un recul idéologique (idéologie du renoncement au monde matériel) marqué par le développement du bouddhisme (débuts en 65 après Jésus Christ). Cependant le bouddhisme est dans la lignée des nouvelles idéologies bourgeoises. Le bouddhisme, avec son esprit de prosélytisme, encourageait notamment le commerce maritime que le brahmanisme réprouvait ; selon Manou, l’individu qui va sur la mer est exclu des banquets funéraires.

En 184 après Jésus Christ, la révolution bourgeoise semble prête à prendre le pouvoir sur toute la Chine au travers de la lutte des Turbans Jaunes. Au printemps de l’an 184, Zhang Jiao, fondateur de la secte taoïste Taïping (« grande paix » qui régnera quand les Han seront éliminés), soulève le peuple chinois contre la dynastie Han, jugée décadente et corrompue. Les partisans de Zhang arborent sur leur front un foulard jaune (huángjīn) en signe de ralliement, ce qui donna son nom à la révolte Huáng jīn zhī luàn des turbans jaunes. Les chefs féodaux, dans un dernier sursaut violent, parviennent cependant à l’écraser dans le sang.

Assiégés, les Han lancent un appel à l’aide et ordonnent une campagne contre les Turbans jaunes qui se comptent par centaines de milliers. De puissants et célèbres généraux répondent à cet appel. Les Turbans Jaunes vont se dissoudre avec la mort de leur chef. Le commandant des forces impériales, He Jin, mate le reste de la rébellion. Zhang Bao et Zhang Liang sont eux aussi tués au combat. Des insurrections sporadiques persisterons néanmoins jusqu’en 192. L’échec de la tentative de renversement de la féodalité et d’avènement de la bourgeoisie chinoise dans sa tentative d’arriver au pouvoir, avec l’écrasement de la révolution des Turbans jaunes au 2ème siècle avant J.-C, sonne le glas de la supériorité (économique, social et culturelle) de la Chine, les féodaux ayant détruit le pays pour conserver leur mainmise sociale.

En 184, révolution des Turbans jaunes qui marque la fin de l’empire des Hans. Au printemps de l’an 184, Zhang Jiao, fondateur de la secte taoïste Taiping (« grande paix » qui régnera quand les Han seront éliminés), soulève le peuple chinois contre la dynastie Han, jugée décadente et corrompue. Les partisans de Zhang arborent sur leur front un foulard jaune (huángjīn) en signe de ralliement, ce qui donna son nom à la révolte des turbans jaunes. Assiégés, les Han lancent un appel à l’aide et ordonnent une campagne contre les Turbans jaunes qui se comptent par centaines de milliers. De puissants et célèbres généraux, tels que Yuan Shao, Cao Cao, Sun Jian et Ma Teng répondent à cet appel. De son côté, le général Lu Zhi recrute des volontaires. Parmi eux, Liu Bei, Guan Yu et Zhang Fei qui, selon l’Histoire des Trois royaumes, se jurent fraternité et s’en vont combattre les Turbans jaunes. Ils viennent en aide au général Dong Zhuo. Les frères de Zhang Jiao, Bao et Liang, sont battus par Cao Cao et Sun Jian. Le destin a voulu que Zhang Jiao meure la même année de maladie, ironie du sort pour celui qui s’appelait « le grand guérisseur ». Les Turbans Jaunes vont se dissoudre avec la mort de leur chef. Le commandant des forces impériales, He Jin, mate le reste de la rébellion. Zhang Bao et Zhang Liang sont eux aussi tués au combat. Des insurrections sporadiques persisteront néanmoins jusqu’en 192. Ce soulèvement est un des facteurs de la chute des Han.

De violentes révoltes marquèrent la fin de la dynastie des Han postérieurs. En 190, le palais de Luoyang fut pillé et incendié, les trésors et les œuvres d’art que les Han accumulaient depuis 200 ans furent détruits. La dynastie fut définitivement emportée par l’insurrection des Turbans Jaunes, qui fut un soulèvement paysan d’une très grande ampleur mené par le prophète taoïste Zhang Jiao. Ce soulèvement était dirigé contre toutes les institutions administratives et gouvernemental ; contre l’Empire Han qu’ils jugeaient corrompu. Pour réprimer le mouvement, les chefs de guerre procédèrent à la formation d’armées autonomes qui ne répondaient qu’à leurs chefs et non plus à l’empereur. Des généraux s’illustrèrent, dont Cao Cao (115-220), désireux de profiter de l’instabilité du pouvoir pour se tailler une part du royaume. À ce moment, même si le dernier empereur des Han n’avait pas encore été déposé, les chefs militaires détenaient la réalité du pouvoir. Ce fut à la fin du IIe siècle que les empereurs Han perdirent toute autorité. À la cour à Luoyang, les dirigeants se disputèrent le pouvoir jusqu’à ce que Cao Cao s’y rende à la tête de ses troupes afin de se proclamer Protecteur du trône. La Chine se fragmenta alors en unités politiques rivales dont les conflits plongèrent le pays dans une anarchie durable. Ici débuta la période des Trois Royaumes, et le commencement de nombreuses années d’instabilité politique.

Etienne Balazs dans « La bureaucratie céleste » :

« La crise sociale et la philosophie politique à la fin des Han « (...) Nous sommes au milieu du 2ème siècle. L’immense empire des Han jouit depuis de longues années d’une paix relative, la population a presque doublé depuis la restauration, aux environs de l’ère chrétienne et les richesses s’accumulent. Mais l’accumulation même de la richesse et la différenciation des professions qui marquent le passage d’une économie naturelle vers une économie d’échange ont comme rançon une plus grande inégalité dans la distribution des revenus et le renversement des rapports sociaux traditionnels. Le signe le plus évident de ce déséquilibre est l’affaiblissement du pouvoir impérial. (...) La pointe de la pyramide hiérarchique commence à s’ébrécher, et une lutte serrée s’engage pour l’exercice du pouvoir réel. (...) Tandis que l’avant-scène retentit des querelles des diverses fractions de la classe dirigeante, toute occupée à se tailler la plus grande part des revenus et sourde aux avertissements des philosophes, le peuple des campagnes se prépare à se soulever contre l’exploitation intolérable des grands propriétaires et les exactions vexatoires des mandarins. La population agricole, c’est-à-dire la presque totalité de la nation, vivait dans une misère indicible. Le paysan libre était en train de disparaître. Constamment menacé sur son lopin par la famine, les impôts, les corvées et pressuré par de multiples demandes des fonctionnaires mal payés, ou encore menacé d’expropriation par quelque grand seigneur désireux d’agrandir son domaine, il était condamné tôt ou tard à aller rejoindre les rangs du prolétariat agricole. (...) Cette énorme masse des meurt la faim et des cul-terreux vit dans une sourde fermentation, travaillée depuis une dizaine d’années par les émissaires d’une nouvelle foi : la « Voie de la Grande Paix » taiping dao. (...) Ils ne se contentent plus d’annoncer à leurs adeptes la venue d’une nouvelle ère, celle de la prospérité, de l’âge d’or de l’égalité, car c’est le véritable sens de l’expression Taiping (...) ils les organisent en de véritables phalanstères, des communautés rustiques (...). Et ils mettent sur pied une étonnante organisation militaire en trente-six divisions qui, mises en branle le jour de l’an 184, occuperont le pays en une marche foudroyante. (...) Les turbans jaunes – c’est le nom le plus connu de la secte à cause du jaune qu’ils portent en tant que couleur symbolique de la terre - vont mettre à feu et à sang toute la Chine du Nord. De deux foyers, les régions les plus peuplées du bas Fleuve Jaune et du Sichuan, la révolte se propage comme une traînée de poudre et gagne toute la Chine (...). Les premiers actes, et combien significatifs, de cette énorme jacquerie mi-sociale mi religieuse seront de prendre d’assaut les préfectures et sous-préfectures, de tuer ou de chasser les fonctionnaires, d’en nommer d’autres, de lever des impôts et de réparer les chemins. (...) La répression est féroce, elle fait, au cours de la seule année 184, un demi million de victimes. (...) Le pays est bouleversé de fond en comble par le combat entre troupes impériales et Turbans Jaunes, battus sur un point pour se retrouver plus nombreux sur un autre. C’est l’exode des riches et des lettrés vers un coin tranquille, la fuite éperdue des vagabonds et des réfugiés : des masses humaines se déplacent dans toutes les directions. (...) Les dirigeants se ressaisissent et organisent des expéditions punitives. (...) C’est l’heure des militaires, la lutte de tous contre chacun (...) jeu sanglant de l’élimination des concurrents dans la course effrénée au pouvoir. Cette lutte durera encore pendant une génération et transformera la Chine d’un puissant empire en un vaste cimetière. »

Le pays le plus riche du monde s’est transformé dans le plus grand cimetière du monde mais la féodalité a durablement vaincu la bourgeoisie.

Cela n’empêche pas des tentatives de moins grande ampleur…

De 617 à 623, une guerre civile se développe en Chine. La tyrannie de Yang Ti est renversée par une révolte populaire, dirigée par Li-Huan T’ang qui, aidé par son fils Tai Tsong, conquiert progressivement le pouvoir royal.

En 756, échec d’une révolte populaire contre l’Empereur en Chine.

En 764, nouvel échec d’une révolte générale en Chine.

Le IXe siècle fut jalonné de révoltes paysannes réprimées dans le sang ; au cours de la plus importante, qui dura six ans (874-880), eut lieu la prise de Canton, avec le massacre de cent vingt mille étrangers. La capitale fut sauvée in extremis grâce à l’aide des Turcs, mais la dynastie des Tang devait néanmoins sombrer en 907 dans le désordre général. La Chine allait connaître alors un nouveau morcellement (période des Cinq Dynasties) jusqu’à l’arrivée des Song.

Une révolte paysanne, d’abord victorieuse, est écrasée en Chine, vers 861.

De 874 à 883, les paysans se soulèvent contre la classe dominante. Ils conquièrent de larges fractions du territoire, y compris la capitale. Ils partagent les biens entre les pauvres. Mais, ils sont finalement écrasés par les armées de l’Empereur.

En 874, une immense révolte paysanne, dirigée par Wang Sien-tche (marchand de sel), secoue le Hebei et le Shandong. Le gouvernement impérial débordé, arme des milliers de paysans des provinces voisines pour écraser la jacquerie mais ceux-ci se joignent bientôt au soulèvement dont la puissance est telle que le commerce cesse, que le pouvoir politique commence à se disloquer... En 875, Houang Tchao (riche contrebandier du sel) rejoint les insurgés avec sa forte bande de paysans et d’anciens contrebandiers. En 878, il prend le commandement de tous les insurgés après la mort au combat de Wang Sien-tche.

Au lieu de commencer à construire un autre pouvoir politique, il écume la Chine, de province en province, s’en prenant à tout ce qui symbolise l’éclatement de la société traditionnelle chinoise (développement des villes, du commerce, d’une couche sociale enrichie, d’étrangers...). Faute de dirigeants politiques, il s’agit plus d’une jacquerie que d’une révolution.

Sous les dynasties des Sui et des Tang, l’économie fut très prospère, les échanges avec l’étranger fréquents, les réussites dans les domaines scientifique, technique et culturel brillantes. La calligraphie, la peinture et la sculpture s’épanouirent. Les poèmes des Tang marquent l’apogée de la poésie chinoise avec les noms de Li Bai et Du Fu. La prose connut un grand succès, et Han Yu et Liu Zongyuan en furent des représentants remarquables. La dynastie des Tang est la plus puissante des dynasties chinoises, et la Chine est à cette époque un des pays les plus prospères dans le monde.

Le féodalisme des seigneurs de la guerre, honnis par les paysans, les artisans et les bourgeois, va se maintenir, imposant à la Chine des massacres et des destructions sans fin, ponctionnant toutes les richesses, empêchant la Chine de jouer le rôle dirigeant du monde qui semblait se profiler...

A plusieurs reprises, la société chinoise a considérablement reculé parce que le régime a préféré le massacre que le risque de révolution sociale. (voir le chapitre « Les révolutions de l’Antiquité », les événements de la révolution des Turbans Jaunes.)

Par exemple, sous la dynastie des Tchéou, selon Maspéro, on disait « Quand le mur d’une ville dépasse trois mille pieds de long (environ 600 mètres ), c’est un danger pour l’État. »

La bourgeoisie chinoise avait un développement économique qui dépassait de loin celui des bourgeoisies européennes et se heurtait à la puissance des régimes de l’empire du Milieu. Le slogan favori des empereurs chinois n’était-il pas « ne pas laisser s’installer le chaos » ? Et, s’ils n’ont jamais réussi, ni par la muraille de Chine ni autrement, à se protéger des attaques extérieures, ils ont parfaitement réussi en maintenant toujours un fort pouvoir central, à renvoyer la bourgeoisie chinoise dans les filets, maintenant ainsi l’ordre féodal. Le roi Gengis Khan ne déclarait-il pas qu’en entrant dans une ville, il tuait mille bourgeois et avait ainsi la paix pour mille ans ? C’est donc la force de l’Etat chinois, et non la force de la bourgeoisie européenne – la bourgeoisie était bien plus riche et entreprenante -, qui explique le retard pris par la Chine sur l’Europe. La classe dirigeante européenne, féodale, avait besoin pour maintenir un pouvoir central, de s’appuyer sur l’essor économique des villes et sur la bourgeoisie, développant ainsi ses propres fossoyeurs.

Dès lors, l’éveil des bourgeoisies occidentales va leur permettre de refaire leur retard, de conquérir le pouvoir en Europe de l’Ouest et d’en tirer une domination mondiale, en intervenant notamment en Chine par des guerres successives (guerres dites de l’opium notamment) pour que l’Empire du Milieu n’émerge pas...

Sous les coups des impérialismes occidentaux, l’empire du Milieu, la première puissance économique mondiale au quinzième siècle, avec un PIB représentant 25% du PIB mondial, a fini par ne plus représenter que 4,5% de ce PIB mondial en 1950.

Source :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2895

Quand la Chine dominait l’Océan Indien :

http://aejjrsite.free.fr/goodmorning/gm144/gm144_QuandLaChineDominaitOceanIndien.pdf

La route de la soie, là où la mondialisation a commencé :

https://www.lesechos.fr/2013/08/la-route-de-la-soie-la-ou-la-mondialisation-a-commence-1098718

Quand la Chine dominait le monde :

http://archives.lesechos.fr/archives/2008/Enjeux/00249-075-ENJ.htm

Capitalismes et capitalistes en Chine des origines à nos jours :

https://journals.openedition.org/perspectiveschinoises/4953

Histoire et Institutions de la Chine ancienne :

https://www.google.fr/books/edition/Histoire_et_institutions_de_la_Chine_anc/id1YDwAAQBAJ?hl=fr&gbpv=1&dq=bourgeoisie+de+la+chine+antique&pg=PT53&printsec=frontcover

Dès les temps préhistoriques, la Chine commerce avec les populations scytho-sibériennes :

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k48146024/f23.item.r=chine%20antique%20le%20grand%20commerce

« Ils faisaient le commerce en grand comme Mou de Touan kan, qui, avant d’étudier sous Tseu hia, était le plus grand courtier du pays de Tsin. Ils allaient vendre le sel du Ts’i dans tous les États voisins, transportaient les grains, la soie, les bœufs, les chevaux, « attendant le moment opportun pour faire le transport des denrées, et cherchant à obtenir un intérêt de un pour dix », allant même par la batellerie du Fleuve Jaune à la rencontre des caravanes venues d’Occident jusqu’au marché de Long si, près de l’actuel Ning hia fou. Tel était ce marchand de bœufs du Tcheng qui, rencontrant l’armée du Ts’in, sauva par ruse son pays d’une attaque inatten¬due ; ou cet autre, originaire du Tsin, qui, en 588, avait projeté de délivrer Ying de Tche, un général du Tsin prisonnier au pays de Tchou depuis huit ans, en l’enlevant dans un de ses ballots de marchandises ; ou encore Li de Fan, qui, après avoir été vingt ans ministre du roi de Yue quitta ce pays et fit deux fois fortune par le commerce. Ou bien ils s’associaient à de grands seigneurs que leurs charges retenaient à la cour, pour l’exploitation de leurs domaines. Enfin, certains étaient réduits à vivre d’expédients, comme ce parasite d’une anecdote de Mencius qui s’en allait chaque jour à la recherche des enterrements pour prendre part aux repas funéraires. »

http://classiques.uqac.ca/classiques/maspero_henri/C01_la_chine_antique/chine_antique.html

Voici ce que fut l’empire de Hoang ti, l’empire féodal chinois à ses débuts… Commerce par troc ou échange, facilité par certaines valeurs à cours forcé officiel, dont les principales furent, une espèce de cauris (coquillage), des pièces de tissus ayant une largeur et une longueur fixe, et du cuivre en petits lingots d’un poids déterminé.

http://classiques.uqac.ca/classiques/wieger_leon/C12_la_chine_a_travers_les_ages/chine_ages.html

La Chine classique, principale civilisation de l’histoire humaine sur deux millénaires :

http://www.gauchemip.org/spip.php?article3480

Le premier grand commerce international utilisait la monnaie des coquillages cauris il y a plus de 4000 ans :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article6041

Des villes antiques :

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2020/11/shimao-lantique-cite-chinoise-redecouverte-par-les-archeologues

Chronologie de l’empire chinois de 221 av. J.-C. à 1911 :

https://www.lhistoire.fr/carte/l%E2%80%99empire-chinois-de-221-av-j-c-%C3%A0-1911

La route de la soie :

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/les-origines-fascinantes-de-la-route-de-la-soie

L’origine chinoise de la soie :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_soie

Les villes dans la Chine antique et médiévale :

https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1970_num_25_4_422324

Les grands courants de la pensée économique chinoise dans l’antiquité :

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k98169126.texteImage

Histoire de la Chine :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Chine

Économie de la Chine sous la dynastie Han

https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_de_la_Chine_sous_la_dynastie_Han

Révolutions de la Chine antique :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article223

Trois grandes révoltes parcourent toute la Chine :

Révolution 17- 25 après J.-C. :

https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volte_des_Sourcils_Rouges

Révolution 184-205 après J.-C. :

https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9bellion_des_Turbans_jaunes

Révolution 755-763 après J.-C. :

https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volte_d%27An_Lushan

Révolution 875-884 après J.-C. :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Huang_Chao

Lire encore sur la Chine antique :

http://classiques.uqac.ca/classiques/chine_ancienne/chine_index.html

Les révolutions paysannes de Chine :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2520

La révolution bourgeoise nationale chinoise de 1911

http://www.gauchemip.org/spip.php?article17695

Les problèmes de la bourgeoisie chinoise en 1917-1923 :

https://www.persee.fr/doc/rhmc_0048-8003_1969_num_16_2_3204

La bourgeoisie chinoise de 1911 à 1937 :

https://www.persee.fr/doc/xxs_0294-1759_1986_num_12_1_1527_t1_0101_0000_1

Les mouvements révolutionnaires chinois de 1919 à 1927

http://www.gauchemip.org/spip.php?article6585

Histoire de la Chine 1911-1949 :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1024

Chine 1927, le stalinisme livre le prolétariat à la répression sanglante :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1123

La révolution chinoise de 1925-1927 :

http://www.matierevolution.fr/spip.php?article3761

Bilan de la révolution chinoise :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1419

La prétendue « armée paysanne » de Mao et ses « territoires libérés » :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article589

La nature du "communisme" chinois de Mao Tze Toung :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article454

Dossier sur la Chine ancienne et moderne :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2682

Luttes de classe en Chine :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4503

Quand l’impérialisme français attaquait la Chine :

https://www.matierevolution.org/spip.php?article3571

La Chine ébranle le monde... ?

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2145

La Chine de la prise de pouvoir de Mao à l’exploitation ouvrière capitaliste, toujours sous l’égide d’un parti officiellement "communiste" :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?breve131

La révolution de Mao ou la guerre (et la prise de pouvoir) d’une armée dite rouge mais anti-ouvrière :

http://www.matierevolution.fr/spip.php?article1291

Démystification du maoïsme :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article651

Le pouvoir chinois contre la classe ouvrière (1949-1989) :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article77

La Chine, de Tiananmen à nos jours :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article92

La bourgeoisie chinoise en 2010 :

http://archives.lesechos.fr/archives/2010/Enjeux/00269-026-ENJ.htm

A bas le goulag en Chine :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article294

Une victoire économique et politique de la Chine :

http://www.matierevolution.fr/spip.php?article3627

La Chine, dirigée par un parti stalinien dictatorial, se retrouve en tête du monde capitaliste et remet en question la direction des impérialismes !!!

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4198

Où va l’impérialisme chinois :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1700

L’encerclement de la Chine et de la Russie, une politique de l’impérialisme américain et de ses alliés pour préparer une issue guerrière à l’effondrement du système :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2342

Un débat dans l’extrême gauche : Russie et Chine sont-elles des nouvelles puissances impérialistes ?

https://www.matierevolution.fr/spip.php?breve819

Dans la montée guerrière entre les pays occidentaux (USA, Canada et Europe), australien et japonais d’un côté, la Russie, la Chine, l’Iran, la Corée du nord et la Syrie de l’autre, pourquoi nous, travailleurs, ne devons surtout pas prendre parti pour l’un des deux camps impérialistes :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3226

La Chine domine désormais un monde capitaliste en déliquescence :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?breve1118

Une Chine hégémonique ?

https://www.lefigaro.fr/vox/monde/que-manque-t-il-a-la-chine-pour-que-sa-puissance-devienne-hegemonique-20210205

Les luttes de classe se développent en Chine :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3417

Grèves ouvrières en Chine :

https://www.google.fr/search?hl=fr&q=gr%C3%A8ves+ouvri%C3%A8res+en+chine+site:http://www.matierevolution.fr+OR+site:http://www.matierevolution.org&spell=1&sa=X&ved=2ahUKEwidv9my0q3zAhUGrxoKHYrtB_8QBSgAegQIARA7&biw=1112&bih=858&dpr=1

Chine, le capitalisme d’Etat se fissure :

https://www.matierevolution.org/spip.php?article2282

En Chine, il n’y aura pas d’atterrissage en douceur...

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2158

La crise économique en Chine peut-elle faire plonger l’économie mondiale :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4715

La classe dirigeante du pays capitaliste le plus dynamique du monde et qui se prétend communiste a peur de la révolution prolétarienne

De violentes manifestations :

https://www.lexpress.fr/actualite/monde/asie/violentes-manifestations-en-chine_1002495.html

La colère monte en Chine…

 à cause du covid

https://www.rtbf.be/info/dossier/fact-checking-covid-19/detail_oui-ces-videos-montrent-bien-des-emeutes-en-chine-a-cause-du-coronavirus?id=10470091

Et aussi :

https://fr.theepochtimes.com/des-emeutes-eclatent-en-chine-alors-que-les-gens-tentent-de-quitter-la-province-de-hubei-touchee-par-le-virus1309129-1309129.html

 contre le géant national de l’immobilier Evergrande
https://www.capital.fr/entreprises-marches/evergrande-la-colere-monte-en-chine-contre-le-geant-national-de-limmobilier-1414353

 contre le régime chinois

https://www.lecho.be/economie-politique/international/asie/coronavirus-la-colere-monte-contre-le-regime-chinois/10206978.html

 contre les « disparitions » de journalistes ou d’opposants
https://www.levif.be/actualite/international/coronavirus-un-journaliste-disparait-a-wuhan-la-colere-monte-au-sein-de-la-population/article-news-1250143.html?cookie_check=1631703966

 contre la mort d’un jeune dans une usine

https://berthoalain.com/2021/03/16/mort-dun-jeune-dans-une-usine-chinoise-emeute-a-sanyang-15-mars-2021/

Révoltes et protestations violentes se multiplient

https://www.20minutes.fr/societe/2749979-20200328-coronavirus-oui-echauffourees-bien-lieu-pont-chine

Cela fait plus de dix ans que la Chne apprend à gérer les émeutes

https://berthoalain.com/2010/01/15/la-chine-veut-former-ses-cadres-a-la-gestion-des-emeutes-janvier-2010/

Voir ici

https://8e-etage.fr/2014/12/16/la-chine-devoile-son-canon-anti-emeute-rayons-de-chaleur/

Et encore

https://www.lefigaro.fr/vox/monde/lu-shaye-la-chine-ne-dialogue-pas-avec-l-emeute-20190902

Voir aussi

https://berthoalain.com/2010/04/27/violente-resistance-au-barrage-de-pubugou-dans-le-sichuan-avril-2010/

Voir encore
https://berthoalain.com/2010/07/15/affrontement-dans-la-region-autonome-du-guangxi-zhuang-juillet-2010/

La Chine est au bord de l’explosion sociale et politique…

https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/12/30/covid-19-dans-le-monde-sinopharm-annonce-un-vaccin-efficace-a-79-les-contaminations-a-wuhan-dix-fois-superieures-au-bilan-officiel_6064821_3244.html

https://www.courrier-picard.fr/id79678/article/2020-04-07/coronavirus-commment-la-planete-plonge-dans-un-scenario-catastrophe-en-quelques

https://politiqueinternationale.com/revue/n97/article/quand-la-chine-explosera

Quelques exemples de la révolte sociale en Chine

https://www.labourstart.org/news/country.php?country=China&langcode=en&src=china/

Et aussi

https://www.labourstart.org/news/country.php?country=China&langcode=fr

Chine : nouvelle crise économique en vue

https://www.matierevolution.fr/spip.php?breve1118#forum52555

Chute des marchés chinois

https://investir.lesechos.fr/marches/actualites/la-chute-des-marches-chinois-freine-le-cac-40-record-pour-dassault-systemes-worldline-plonge-1973513.php

https://www.lerevenu.com/placements/economie/chine-le-ralentissement-economique-se-confirme-20210723
https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/automobile/chine-la-baisse-des-exportations-menace-de-plonger-le-pays-en-recession-890040.html

La faillite du plus grand promoteur de Chine menace toute l’économie chinoise

https://fr.euronews.com/2021/09/14/la-faillite-du-plus-grand-promoteur-de-chine-menace-toute-l-economie

L’activité économique est au plus bas

https://www.lesechos.fr/monde/chine/chine-lactivite-manufacturiere-au-plus-bas-depuis-le-debut-de-la-pandemie-de-covid-1341946

En Chine, ce qui commence, ce n’est pas seulement la catastrophe du coronavirus mais aussi le soulèvement populaire contre le régime de dictature faussement intitulée communiste :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article5780

La colère du peuple travailleur de Wuhan éclate :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article5820

L’affrontement Chine-USA, cause des menaces mondiales ou nouveau moyen de les masquer :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article5364

Pour conclure :

Faut-il accuser de l’échec de la bourgeoisie chinoise un « despotisme asiatique » ou un « mode de production asiatique » ?

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3478

La civilisation chinoise n’a pas été créée par l’Etat, par le pouvoir central, le royaume ni l’empire :

http://www.matierevolution.fr/spip.php?article2694

« La Chine est le seul cas historique où la zone géographique, la race, la nation et l’État ont coïncidé de la préhistoire à nos jours, pendant plusieurs millénaires. Il n’existe pas, en fait, d’autre exemple d’un édifice étatique qui, malgré de profonds bouleversements internes et des invasions de peuples étrangers, ait conservé la base territoriale, nationale et raciale sur laquelle il s’était élevé à l’origine. La nation chinoise n’a jamais changé de demeure au cours de son existence plurimillénaire ; les dynasties étrangères — mongoles et mandchoues — ne réussirent qu’à s’emparer d’une manière transitoire des sommets de l’État. Chaque fois, l’immense océan physiologique de la nation a englouti ses hôtes gênants, qui disparurent sans réussir à altérer les traits distinctifs — physiques et culturels — du peuple envahi. Aujourd’hui il est prouvé, contrairement à ce que l’on croyait auparavant, que les Chinois n’entrèrent pas en conquérants dans le bassin inférieur du Fleuve Jaune, mais qu’ils y habitaient depuis la préhistoire. Ainsi on peut dire que l’histoire nationale des Chinois est le prolongement géologique de l’Extrême-Orient. On est vraiment impressionné par l’extraordinaire vitalité d’une nation qui, en se tournant vers son passé, peut voir ses origines se confondre avec celles du territoire qu’elle habite depuis des millénaires. Certes, ce géant, mû par des forces judicieusement organisées, finit par s’assoupir, s’arrêtant, pour des siècles et des siècles, juste avant le point où la race et la nation commencent à être irrémédiablement déchirées par les classes en conflit, et où l’histoire connaît une accélération sans pareille. Aux yeux de Marx et d’Engels, il eût suffi d’un choc venu de l’impérialisme extérieur pour provoquer le point de rupture. En théorie, en effet, on pouvait espérer que, comme 1’« usurpateur Napoléon » en Espagne, les impérialismes anglais et occidentaux se heurteraient en Chine à un État bel et bien mort, mais que l’immense, société active et productrice serait pleine de vie et de santé, recélant, dans toutes ces parties, une force de résistance et une énergie débordantes. Est-il besoin de dire que la forme de production asiatique ne s’opposait pas en soi à l’évolution vers des formes modernes, bourgeoise ou socialiste. L’histoire démontre, qu’il existe, au contraire, un gigantesque potentiel créateur au sein de la nation chinoise, que la révolution industrielle devra transformer en puissantes réalisations historiques. »

Marx/Engels sur la Chine :

https://www.marxists.org/francais/marx/works/00/chine/chine.pdf

Un esprit des plus profonds, mais quelque peu fantasque, après avoir consacré toute son existence à la découverte des lois régissant l’évolution de l’humanité, tenait la loi de l’unité des contraires pour l’un des mystères dominant la nature. À ses yeux, le bon vieux proverbe selon lequel « les extrêmes se touchent » représentait la vérité suprême et efficace dans tous les domaines de la vie, un axiome auquel le philosophe ne pouvait pas davantage renoncer que l’astronome aux lois de Kepler ou à la grande découverte de Newton.

Que ce fameux principe soit universel ou non, on peut en trouver une illustration frappante dans l’effet que la révolution chinoise semble être appelée à exercer sur le monde civilisé. Il peut paraître très étrange et paradoxal d’affirmer que le prochain soulèvement des peuples européens en faveur de la liberté républicaine et d’ un gouvernement bon marché dépendra probablement plus de ce qui se déroule dans le Céleste Empire — au pôle opposé de l’Europe — que de toute autre cause politique actuelle. En tout cas, il en dépend plus que des menaces de la Russie et de la perspective qui en découle d’un conflit européen généralisé. En fait, il n’y a là rien de paradoxal, et c’est ce que ne peut manquer de reconnaître celui qui considère de plus près les circonstances de cet état de choses.

Quelles que soient les causes qui aient pu déterminer les révoltes chroniques de ces dix dernières années en Chine, révoltes qui confluent aujourd’hui vers un bouleversement gigantesque, et quelle que puisse être la forme qu’il revête — religieuse, dynastique ou nationale — il ne fait de doute pour personne que la cause de son déclenchement en est que les canons anglais ont imposé à la Chine la drogue soporifique que l’on appelle l’opium . En fait, il n’y a là rien de paradoxal, et c’est ce que ne peut manquer de reconnaître celui qui considère de plus près les circonstances de cet état de choses. Devant les armes britanniques, l’autorité de la dynastie mandchoue

Céleste Empire a disparu ; le barbare isolement hermétique vis-à- vis du monde civilisé est rompu ; une brèche est ouverte pour des rapports d’échange qui se sont développés rapidement grâce aux séductions de 1’or de la Californie et de l’Australie. En même temps, la monnaie d’argent, sang vital de 1’ Empire, s’écoule vers les Indes orientales britanniques. Jusqu’en 1830, la balance commerciale a été continuellement favorable aux Chinois, un flux ininterrompu d’argent se déversant en Chine à partir des Indes, de l’Angleterre et des États-Unis. Mais depuis 1833 et plus encore depuis 1840, l’exportation d’argent vers les Indes a pris de telles proportions que le Céleste Empire s’en trouve exsangue. D’où les décrets rigoureux de 1’Empereur contre le commerce de l’opium, auxquels répond une résistance plus ferme encore.

Mais, outre cette conséquence économique directe, la corruption surgie autour de la contrebande de l’opium a totalement ruiné le prestige traditionnel des fonctionnaires de l’Empire dans les provinces méridionales. Tout comme on se plaisait traditionnellement à considérer l’Empereur comme le père de toute la Chine, on voyait dans ses fonctionnaires les gardiens des liens unissant le père à ses provinces respectives. Or cette autorité patriarcale — le seul lien moral embrassant la gigantesque machine de l’État — a été progressivement minée par la corruption des fonctionnaires qui ont amassé des fortunes considérables de connivence avec les trafiquants d’opium. Les provinces méridionales, où précisément la révolte a éclaté, en sont les plus touchées. Est-il besoin d’ajouter qu’à mesure que l’opium étend son pouvoir sur les Chinois, l’Empereur et sa suite de mandarins pédants sont, pour leur part, dépossédés de leur pouvoir ? Il semble que l’histoire doive d’abord enivrer tout un peuple avant qu’elle puisse le tirer de sa torpeur, millénaire. Après avoir été pour ainsi dire nulle dans le passé, l’importation de cotonnades anglaises et, à un degré moindre, de lainages anglais a augmenté rapidement après 1833 — année où le monopole du commerce avec la Chine est passé de la Compagnie des Indes orientales au commerce privé 138 - et plus rapidement encore après 1840, année où d’autres nations, notamment la nôtre 139, ont obtenu à leur tour de participer au commerce avec la Chine. Cette pénétration de marchandises étrangères a eu les mêmes effets sur l’artisanat indigène que jadis en Asie Mineure, en Perse et aux Indes. En Chine, ce sont surtout les fileurs et les tisserands qui ont souffert de la concurrence étrangère et par réaction toute la communauté s’en trouva bouleversée. Le tribut à payer à l’Angleterre après la guerre malheureuse de 1840 , l’énorme consommation improductive de l’opium, l’hémorragie des métaux précieux par suite du commerce de 1’opium, l’action dévastatrice de la concurrence étrangère sur la production indigène et l’état de démoralisation de l’administration publique, ont eu un effet double : les impôts traditionnels se firent plus lourds et plus oppressifs, et de nouveaux vinrent s’ajouter aux anciens. Ainsi, dans un décret daté de Pékin le 5 janvier 1853, 1’Empereur a donné l’ordre aux vice-rois et aux gouverneurs des provinces méridionales du Wouchang et de l’Hanyang de différer et de remettre les impôts et, surtout, de ne jamais encaisser plus que le montant prescrit, car, dit le décret, « comment la population pauvre pourrait- elle le supporter ? » Et l’Empereur de poursuivre : « Et ainsi peut-être, dans une période de misère et de pénurie générales, on épargnera à mon peuple les poursuites et les tortures des collecteurs d’impôts. » Nous nous souvenons avoir entendu un tel langage et vu appliquer de semblables concessions en Autriche, la Chine de 1’Allemagne, en 1848. Tous ces facteurs dissolvants agirent simultanément sur les finances, les mœurs traditionnels, 1’industrie et la structure politique de la Chine et atteignirent leur paroxysme sous le feu des canons anglais qui ruinèrent l’autorité de l’Empereur et établirent par la force violente le contact entre le Céleste Empire et le monde terrestre. L’isolement total était la condition nécessaire à la préservation de la vieille Chine. Aujourd’hui que cet isolement a brutalement cessé par l’action de 1’Angleterre, la dissolution de la vieille Chine est tout aussi certaine que celle d’une momie soigneusement conservée dans un sarcophage hermétiquement clos que l’on expose au grand air. Maintenant que l’Angleterre a déchaîné la révolution en Chine, nous devons nous demander quelle réaction cette révolution va entraîner dans ce pays et, d’ici quelque temps, en Angleterre et, de là, en Europe. La réponse n’est pas difficile. L’attention de nos lecteurs a souvent été retenue par la croissance sans précédent de 1’industrie manufacturière britannique depuis 1850.

Cependant, au milieu de cette prospérité étonnante, il n’est pas difficile d’observer d’ores et déjà des symptômes très nets de l’approche d’une crise industrielle. Malgré la Californie et 1’Australie, malgré une émigration massive sans précédent, il est inévitable qu’à un certain point, mis à part tout incident particulier, le moment arrive où l’extension des marchés ne pourra plus tenir le pas avec le développement des manufactures anglaises, et ce déséquilibre produira une nouvelle crise avec la même nécessité qu’il le fit dans le passé.

Mais si, par dessus le marché, l’un des débouchés les plus vastes vient subitement à se fermer, la crise s’en trouvera inévitablement accélérée. Or, au point où en sont les choses, le soulèvement chinois doit précisément produire cet effet sur l’Angleterre. La nécessité d’ouvrir des marchés nouveaux ou d’élargir les anciens, a été l’une des causes principales de la réduction des tarifs anglais du thé 142La valeur des exportations annuelles du Royaume-Uni vers la Chine s’élevait seulement à 600 000 £ en 1834, avant l’abolition du monopole commercial de la Compagnie des Indes Orientales. Or, en 1836, il atteignait déjà 1 336 388 £, et il se montait à quelque 3 000 000 £ en 1852. La quantité de thé importé de Chine atteignait à peine 16 167 331 livres , car on escompte qu’une plus forte importation de cet article s’accompagnerait d’une plus forte exportation de produits industriels en Chine. La dernière récolte de thé en Chine dépassera d’au moins 2 000 000 de livres celle de l’année dernière, comme les listes d’exportation de Shanghai le montrent d’ores et déjà. Cet excédent s’explique par deux raisons. D’une part, le marché était très déprimé vers la fin de 1851, et un excédent considérable d’invendu est proposé à 1’exportation de en 1793, mais en 1845 elle s’élevait déjà à 50 714 657 livres et en 1846 à 57 584 561 livres ; aujourd’hui, elle se monte à 60 000 000 livres.

La dernière récolte de thé en Chine dépassera d’au moins 2 000 000 de livres celle de l’année dernière, comme les listes d’exportation de Shanghai le montrent d’ores et déjà. Cet excédent s’explique par deux raisons. D’une part, le marché était très déprimé vers la fin de 1851, et
un excédent considérable d’invendu est proposé à 1’exportation de l’année 1852. D’autre part, les nouvelles parvenues en Chine à propos des modifications de tarifs de douane britanniques sur le thé ont fait affluer tout le thé disponible, à des prix sensiblement accrus, sur un marché avide de l’absorber. Mais en ce qui concerne la prochaine récolte, la perspective est toute différente. C’est ce qui ressort des extraits suivants de la correspondance d’une grande firme de thé londonienne : « La plus grande consternation régnerait à Shanghai. La valeur de l’or a augmenté de 25% du fait qu’on le recherche avidement pour le thésauriser ; l’argent a disparu au point qu’on n’en trouve plus pour payer les droits chinois sur les navires britanniques qui arrivent dans les ports ; c’est pourquoi monsieur le Consul Alcock a dû se déclarer garant auprès des autorités chinoises pour le paiement de ces sommes contre des traites de la Compagnie des Indes orientales, ou d’autres cautions et valeurs reconnues. La pénurie de métaux précieux est l’un des facteurs les plus négatifs en ce qui concerne les perspectives d’avenir immédiates du commerce, d’autant que leur raréfaction survient précisément à un moment où leur usage est le plus nécessaire afin de permettre aux acheteurs de thé et de soie de procéder dans l’arrière-pays à leurs achats pour lesquels une partie considérable doit être payée d’avance en or et en argent, en sorte que les producteurs puissent poursuivre leur travail... « A cette période de l’année, il est d’usage de commencer les tractations pour le thé nouveau. Or comme il n’est question actuellement que des moyens de protéger les personnes et les biens, toutes les affaires restent en suspens... Si l’on ne prend pas les mesures pour s’assurer les feuilles de thé en avril et mai, la prime récolte qui donne toutes les espèces les plus fines du thé noir et vert, sera perdue aussi certainement que le blé qui serait encore sur pied à Noël. » Dans ces conditions, les moyens d’assurer la récolte de thé ne seront certainement pas fournis par les escadres anglaises, américaines ou françaises stationnées dans les mers de Chine. Au contraire, en intervenant, ces dernières peuvent facilement créer des complications qui amèneront la rupture de toute relation commerciale entre les régions de l’intérieur, productrices de thé, et les ports maritimes d’exportation. Ainsi, on peut s’attendre à une montée des prix pour la présente récolte, et la spéculation a déjà commencé à Londres. Or, pour la prochaine récolte, on peut être assuré d’un important déficit. Mais il y a plus, tout en étant disposés — comme tous les peuples en période de convulsions révolutionnaires — à vendre précipitamment aux étrangers tous les produits encombrants qu’ils ont sur les bras, les Chinois vont commencer à thésauriser — comme ont coutume de le faire les Orientaux — dans l’attente anxieuse de grands bouleversements, n’acceptant que des espèces sonnantes et trébuchantes en échange de leur thé et de leur soie. L’Angleterre doit donc s’attendre à une hausse de prix de l’un de ses premiers articles de consommation, à une fuite des métaux précieux, et à une forte réduction de l’important marché de ses cotonnades et lainages. L’Economist lui-même, pourtant toujours optimiste et prêt à exorciser tout ce qui menace la paix des âmes de la communauté marchande, est obligé de confesser : « Il ne faut plus se flatter de trouver pour nos exportations en Chine un marché aussi étendu que par le passé... Il est plus que probable que notre commerce d’exportation vers la Chine doive en pâtir et que les articles produits à Manchester et Glasgow soient moins demandés. » N’oublions pas que la hausse de prix d’un article aussi indispensable que le thé et la contraction d’un marché aussi important que la Chine vont coïncider avec des récoltes déficitaires en Europe occidentale et, donc, avec une augmentation de prix de la viande, du blé et autres denrées agricoles. Par réaction, le marché des articles manufacturés se contractera, chaque hausse de prix des produits de première nécessité entraînant, à l’extérieur comme à l’intérieur, une diminution correspondante de la demande de produits manufacturés. Dans toutes les parties de la Grande-Bretagne, on déplore un déficit pour les diverses récoltes. L’Economist écrit à ce propos :

« Dans le Sud de l’Angleterre, « non seulement de nombreuses terres resteront en friche jusqu’à ce qu’il soit trop tard pour un quelconque emblavage, mais encore sur une grande partie des terres la récolte pourrit sur pied ou est en très mauvais état pour la culture de céréales ». Sur les terres humides ou pauvres, destinées au blé, tout indique que la récolte sera mauvaise : « D’ores et déjà, il est trop tard pour planter la betterave fourragère. Or, on en a planté fort peu, cependant que le temps pour préparer la terre pour le turneps passe rapidement, sans qu’aucune préparation adéquate pour un produit aussi important n’ait été entreprise... Les semailles de 1’avoine ont été fortement perturbées par la pluie et la neige. L’avoine précoce est rare, et 1’avoine tardive ne donne que rarement d’abondantes récoltes. Dans de nombreux districts, le bétail d’élevage a enregistré des pertes sensibles. Le prix des denrées agricoles autres que les céréales, est supérieur de 20 à 30 et même 50% à celui de l’an dernier. Sur le continent, le prix des céréales a monté dans des proportions encore plus fortes qu’en Angleterre. En Belgique et en Hollande, le seigle a
augmenté d’un plein 100%. Le blé et les autres céréales suivent de près. » Dans ces conditions et étant donné que 1’industrie britannique a déjà parcouru la majeure partie de son cycle économique normal, on peut prévoir avec certitude que la révolution chinoise va faire jaillir l’étincelle dans la poudrière surchargée de l’actuel système industriel, et provoquera l’explosion de la crise générale depuis longtemps mûre. Ce serait en vérité un spectacle curieux que celui de la Chine exportant le désordre dans le monde occidental, au moment même où les puissances occidentales, avec la flotte de guerre britannique, française et américaine, rivalisent de zèle pour instaurer l’ordre à Changhaï, Nankin et l’embouchure du Grand Canal. Celle-ci après avoir gagné l’Angleterre, sera suivie à brève échéance de révolutions politiques sur le continent.

Ce serait en vérité un spectacle curieux que celui de la Chine exportant le désordre dans le monde occidental, au moment même où les puissances occidentales, avec la flotte de guerre britannique, française et américaine, rivalisent de zèle pour instaurer l’ordre à Changhaï,
Nankin et l’embouchure du Grand Canal.

Ces Puissances, faisant trafic d’ordre et promptes à soutenir la chancelante dynastie mandchoue, ont-elles donc oublié que la xénophobie et l’exclusion des étrangers hors de l’Empire — jadis simple effet de la situation géographique et ethnographique de la Chine — sont devenus un principe politique précisément depuis la conquête du pays par les Tartares Mandchous ? Il n’est pas douteux que les violentes dissensions entre les nations européennes concurrentes ont donné une forte impulsion à la politique isolationniste, adoptée dans les dernières années du XVIIe siècle par les Mandchous. Mais ce qui y contribua au moins autant, c’est le fait que la nouvelle dynastie craignait que les étrangers ne stimulent le mécontentement existant dans de larges couches de la population chinoise durant le premier demi-siècle de la domination tartare. Pour toutes ces raisons, les étrangers se virent interdire toute communication avec les Chinois, sauf par Canton, ville située à grande distance de Pékin et des districts producteurs de thé, et leur commerce fut restreint au négoce avec les marchands Hong, auxquels le gouvernement a octroyé expressément le privilège de commercer avec l’extérieur, excluant de la sorte le reste de ses sujets de tout contact avec les odieux intrus. Quoi qu’il en soit, une immixtion des gouvernements occidentaux dans ce contexte précis ne ferait que rendre la révolution encore plus violente, et aggraver l’engorgement du commerce.

En même temps, il convient d’observer que le gouvernement britannique tire, en Inde, un bon septième de ses revenus de la vente de l’opium aux Chinois, tandis qu’une fraction considérable de la demande indienne de produits manufacturés britanniques dépend de la production de cet opium en Inde. Que les Chinois renoncent à 1’usage de l’opium est aussi peu probable que de voir les Allemands s’abstenir de fumer leur tabac. Mais comme le nouvel Empereur semble favorable à la culture du pavot et à la préparation de l’opium en Chine même.

Depuis le début du XVIIIe siècle, il n’y a pas eu en Europe de révolution sérieuse qui ne fût pas précédée d’une crise commerciale et financière. Ceci ne s’applique pas moins à la révolution de 1789 qu’à celle de 1848. Il est vrai qu’on observe des symptômes de conflits chaque jour plus menaçants entre les autorités et leurs sujets, l’État et la société, les différentes classes ; qui plus est, les conflits entre puissances existantes sont tout près d’atteindre le point où l’épée doit être
tirée et où l’on recourt à l’ultima ratio des princes. Dans les capitales européennes, chaque jour apporte des dépêches grosses d’un conflit général, effacées par les dépêches du lendemain, apportant la garantie de la paix pour huit ou dix jours. Quoi qu’il en soit, nous pouvons être assurés que si grave que puisse devenir le conflit entre les puissances européennes, si menaçant que puisse paraître l’horizon diplomatique et quelque action que puisse tenter telle ou telle fraction dynamique d’une nation donnée, la rage des princes et la colère populaire sont également aveulies par le souffle de la prospérité. Il est peu probable que des guerres ou des révolutions mettent l’Europe aux prises, si elles ne résultent pas d’une crise générale, commerciale et industrielle, dont le signal — comme toujours — doit être donné par 1’Angleterre, le représentant de l’industrie européenne sur le marché mondial.

Point n’est besoin d’insister sur les conséquences politiques qu’une telle crise pourrait produire de nos jours — avec la vertigineuse expansion des fabriques en Angleterre et la décomposition totale de ses partis officiels , avec 1’énorme machinerie de l’État français transformée en une seule et immense agence de spéculation et d’escroquerie des fonds publics, avec l’Autriche à la veille de la banqueroute, avec les méfaits accumulés partout qui crient vengeance au peuple, avec les intérêts en conflit au sein des puissances réactionnaires elles-mêmes, avec les rêves russes de conquête qui apparaissent une fois de plus au grand jour. »

Source :
https://www.marxists.org/francais/marx/works/00/chine/chine.pdf

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