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Tout a une fin, même le capitalisme

samedi 6 août 2022, par Khider Mesloub

La gestion sécuritaire de la pandémie : répétition générale de l’économie de guerre

De toute évidence, chaque État, depuis l’apparition de la pandémie, s’applique à blinder son pouvoir par l’instauration de mesures sécuritaires attentatoires à la liberté, décrétées sous prétexte de gestion de la crise sanitaire. Les dirigeants se sont amplement servis de l’opportune pandémie, politiquement instrumentalisée, pour aggraver les lois antisociales et durcir la dictature « ordinaire » étatique, renforcée par la militarisation de la société. Depuis 2020, les peuples du monde entier assistent, impuissants, à l’exécution d’un véritable « pronunciamiento sanitaro-sécuritaire » permanent.

Sans nul doute, l’internement des citoyens innocents en bonne santé, décrété au nom de la prétendue protection des personnes âgées et vulnérables (par ailleurs censément majoritairement vaccinées), à notre époque hautement technologique, censée être équipée d’infrastructures médicales de pointe, s’intègre dans le projet de la militarisation de la société, participe de la caporalisation des mentalités, autrement dit de l’assujettissement de l’ensemble de la population à l’économie de guerre fondée sur les restrictions politiques et privations alimentaires afin de favoriser le réarmement des États impérialistes, animés par une politique belliciste et une inclination à la confrontation militaire généralisée.

En réalité, depuis l’apparition de la pandémie de Covid-19, sous couvert de guerre virologique les classes dominantes mènent une guerre de classe aux classes populaires et aux prolétaires, mais surtout aux classes moyennes et petites bourgeoises, précipitées brutalement dans la paupérisation et la prolétarisation. Une fois cette guerre de classe, menée avec succès, achevée ; une fois la militarisation de la société et la caporalisation des esprits accomplies ; autrement dit, une fois le danger de sédition et d’insurrection circonscrit à l’intérieur des frontières, les dominants pourront envoyer aisément leurs populations asservies en dehors des frontières pour se battre sur les lignes de front, pour le grand bénéfice du capital.

Incontestablement, le monde est en voie d’« Ukrainasation », autrement dit chaque État impérialiste recèle quelque Poutine (Zelensky – Biden – Macron) va-t-en-guerre tapi dans les palais dorés présidentiels pour déclencher, attiser ou entretenir la guerre ; et une population conditionnée par l’idéologie militariste actionnée par quelque Poutine (Zelensky – Biden – Macron) pour, au nom de la défense de la patrie ou de la démocratie bourgeoise, se transformer en chair à canon.
Avec l’aggravation de la crise, accentuant l’exacerbation de la concurrence entre chaque capital national et blocs géostratégiques, la guerre généralisée constitue l’unique solution pour les puissances impérialistes rivales. Car la guerre impérialiste est une donnée permanente du capital et de l’impérialisme.

Militarisation de la société et caporalisation des esprits

Cette précipitation vers la guerre impérialiste généralisée se confirme par la décision de la Suède et de la Finlande, pays traditionnellement « neutres », de rejoindre l’OTAN, accentuant l’encerclement de la Russie, que Poutine voulait, pourtant, desserrer par l’invasion de l’Ukraine. Elle se confirme également par la décision de la majorité des États d’accroître substantiellement leurs dépenses militaires, de relancer leur industrie d’armement pour les pays producteurs d’armes. Elle se confirme, pareillement, par la résurgence des alliances politiques et militaires, induisant l’exacerbation des polarisations impérialistes. Elle se confirme par l’instauration de l’austérité économique, matérialisée par des politiques antisociales décrétées par les gouvernements, la flambée de l’inflation (véritable impôt payé par tous les travailleurs), par la recrudescence de la propagande politico-idéologique, illustrée par l’exhortation aux populations d’accepter des sacrifices, à consentir de réduire leur consommation pour soutenir l’effort de guerre.

Au reste, la pandémie de covid-19, politiquement instrumentalisée à des fins contre-insurrectionnelles par la militarisation de la société, avait servi également de prétexte pour impulser la première phase de l’orientation de la production vers l’économie de guerre, matérialisée par l’imposition de la production exclusive des biens dits essentiels, autrement dit indispensables à la défense nationale dans la perspective de la préparation à la guerre généralisée. En effet, la gestion sécuritaire de la pandémie constitua la répétition générale de l’économie de guerre. Ce fut la préfiguration de la militarisation de la société et de la caporalisation des mentalités. Au cours de la prétendue crise sanitaire, les États ont jeté les premières bases de la centralisation étatique de la production, de l’organisation et de la planification de l’économie pour l’orienter vers la fabrication exclusive des biens dits essentiels indispensables à l’instauration d’une économie de guerre. « Nous allons durablement devoir nous organiser dans une économie de guerre », vient de le rappeler sur un ton martial le président français, Macron.

Ce faisant, dans le prolongement de la crise sanitaire, orchestrée par les États capitalistes, durant laquelle l’économie fut délibérément mise à l’arrêt ou, plutôt, réorientée vers la production des biens essentiels, entraînant une désorganisation de la production mondiale et un infléchissement vers la « relocalisation », la guerre en Ukraine accentue et accélère ce processus de « démondialisation » et de découplage des économies induit par l’économie de guerre et le militarisme. En effet, avec l’exacerbation des tensions commerciales et militaires, le monde s’achemine vers la fragmentation de la mondialisation avec la constitution de blocs de pays aux fondements idéologiques irréconciliables, dont les échanges commerciaux seront fortement réduits, voire rompus.

Nul doute, la guerre entre l’Ukraine et la Russie s’inscrit dans un conflit plus ample qui oppose, au vrai, la première puissance américaine à son concurrent économique actuel, la Chine (pays condamné par la faute des États-Unis bellicistes à devenir le prochain théâtre des opérations militaires).

À cet égard, depuis l’apparition de la pandémie politiquement instrumentalisée, et, surtout, de la guerre entre l’Ukraine et la Russie, au sein du bloc atlantiste, on aura remarqué le battage médiatique réservé au narratif chauviniste relatif à la politique de relocalisation prônée par la bourgeoisie et son État. Tous les médias encensent cet agenda de rapatriement des entreprises, précédemment délocalisées, au bercail national.

Que révèle ce programme de relocalisation des entreprises multinationales vers la « mère patrie », prôné par les pays atlantistes ?

La première raison est d’ordre socioéconomique. À force de contractions salariales réelles, de pressions sur la productivité du travail salarié, d’intensification des cadences de travail, le capital des pays atlantistes est parvenu à égaler les dramatiques conditions d’exploitation de la force de travail des pays émergents et sous-développés. Assurément, conscient de la dégradation des conditions sociales et salariales de « ses » prolétaires autochtones, le capital occidental a commencé à mettre en adéquation le futur mode de vie des prolétaires désormais impécunieux, par l’élimination des secteurs dits non-essentiels. En effet, soumis à de telles misérables conditions de vie et de travail, le prolétaire « occidental », du fait de son impécuniosité et épuisement professionnel, n’aura plus ni les moyens financiers ni le temps de s’offrir des loisirs et des vacances, pour reconstituer sa force de travail surexploitée.
La seconde raison pour laquelle les pays atlantistes œuvrent à la relocalisation des entreprises est d’ordre impérialiste. Dans l’actuel contexte des préparatifs de guerre mondiale, comme l’avait déclaré lucidement Donald Trump devant l’assemblée parlementaire de l’OTAN : « un pays débiteur importateur – donc client dépendant – ne peut entrer en guerre contre un pays créditeur – exportateur – et fournisseur de biens stratégiques essentiels » (il visait la Chine et, indirectement, la Russie).

Actuellement, la guerre entre les pays pour l’approvisionnement des marchés occidentaux, dépendants des fournisseurs manufacturiers chinois, a pris des proportions alarmantes, sans oublier leur dépendance vis-à-vis des matières énergétiques russes, du pétrole arabe, des matières premières et provisions des pays du Sud. La dernière dépendance relevée par les pays occidentaux, paralysant de nombreuses entreprises, concerne les composants électroniques fabriqués exclusivement en Asie (les États-Unis et les pays atlantistes, notamment européens, ne produisent que 10% des semi-conducteurs sur leurs territoires).
Aussi, pour se conformer aux recommandations de Trump qui préconisait, comme on l’a rapporté plus haut, l’indépendance économique avant de mener une guerre contre un pays fournisseur, les pays occidentaux ont commencé, sous couvert de la crise sanitaire de la Covid, à mettre en application ce programme d’économie auto-suffisante matérialisée par la « relocalisation » de la production manufacturière établie jusqu’à présent majoritairement en Chine, la réorganisation de la politique d’approvisionnement en matière des énergies fossiles.
Au vrai, les récentes pénuries des produits manufacturés et énergétiques constatées en Occident ont été délibérément accentuées (planifiées depuis le début de la crise sanitaire) pour acculer les pays atlantistes, c’est-à-dire le capital occidental, à réorganiser leur approvisionnement indépendamment des pays de l’Alliance de Shanghai et de la Russie, afin de pouvoir poursuivre leurs préparatifs de guerre en toute indépendance. Mais, également, pour justifier la hausse des prix que les prolétaires devront supporter, induisant la baisse de leur pouvoir d’achat. Donc la dégradation de leurs conditions sociales, l’affaiblissement de leur résistance, facilitant ainsi leur soumission et leur enrôlement dans la future guerre généralisée en préparation. Un prolétariat affamé et atomisé devient plus aisément corvéable et exploitable, plus perméable à l’endoctrinement idéologique nationaliste belliqueux, et, par extension, à l’enrôlement militaire dans les imminentes guerres en préparation.
Une chose est sûre, en dépit de l’adoption de toutes ces mesures drastiques pour juguler la crise, celle-ci ne cesse de s’approfondir, obérant toutes les possibilités de reprise économique. Nombre d’études admettent que la reprise économique mondiale va ralentir, voire s’infléchir. Le monde assiste, impuissant, au glissement inéluctable de l’économie internationale vers la récession.

Du fait des multiples déséquilibres, notamment en raison du changement soudain de la consommation de services vers les biens (c’est le résultat voulu, comme on l’a souligné plus haut, de la restructuration des secteurs dits non-essentiels opérée au cours de la crise sanitaire 2020-2022), l’économie internationale ne devrait pas rattraper son niveau d’avant la pandémie de Covid-19 avant un certain temps…pour, plus gravement, replonger car nous avons affaire à une crise systémique du capitalisme. En effet, depuis deux ans, on assiste au creusement des déséquilibres dans chaque économie nationale, matérialisé par une consommation favorisant les produits manufacturés plutôt que les services (délibérément pénalisés par les confinements et couvre-feux, le pass-sanitaire), sur fond du déportement vers le commerce électronique (l’e-commerce au détriment du commerce de proximité). Selon une étude publiée par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, l’écart de croissance entre le commerce de marchandises et de services ne cesse de s’élargir. « Le premier a bondi de 22 % au troisième trimestre 2021, en rythme annuel, tandis que le second a progressé de 6 %. Les échanges de marchandises, d’une valeur de 5 600 milliards de dollars au troisième trimestre 2021, ont atteint un niveau record ».

Tensions commerciales et escalade guerrière

Depuis le début de la pandémie, à plus forte raison depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, du fait des multiples mesures restrictives et des successifs confinements imposés par les gouvernements, et en raison de l’hyperinflation induisant une érosion du pouvoir d’achat, l’activité dans les services subit une très forte baisse, notamment dans les secteurs de la culture (arts, spectacles et activités récréatives, en proie à une très forte baisse de fréquentation), les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, avec un recul particulièrement prononcé dans l’hébergement. Sans oublier le secteur du tourisme.

Pour autant, face à ces attaques frontales menées contre les conditions de vie et de travail, le prolétariat ne demeure pas inerte. Il riposte. En effet, face aux attaques portées contre ses conditions de vie, de consommateur, de citoyen et de travailleur, la classe prolétarienne se rebelle. Nous avons eu droit à un aperçu, une sorte de répétition générale, des mouvements de révolte surgis spontanément pour résister contre les mesures antisociales décrétées par les gouvernants : les carrés rouges au Québec, les Piketos en Amérique latine, les Gilets jaunes en Europe, etc. Plus récemment, en Guadeloupe, Martinique, Maroc, Sri Lanka.

Quoi qu’il en soit, dans cette période marquée par l’exacerbation des tensions commerciales et l’escalade guerrière, la militarisation de la société et la caporalisation des mentalités, l’Alliance des pays qui parvient le plus efficacement à embrigader son prolétariat, à briser le plus rapidement la résistance de sa classe ouvrière, de sa petite bourgeoisie en voie de prolétarisation et de sa moyenne bourgeoisie en pleine paupérisation, triomphera de ses concurrents, et se positionnera ainsi en nouveau leadership de la nouvelle refonte mondiale capitaliste despotique.

À moins que le prolétariat mondial, dans un sursaut historique, parvienne à déjouer l’agenda socialement régressif, autant policièrement répressif que militairement agressif, du grand capital financier par une révolution sociale émancipatrice.

Une chose est sûre : quoique la bourgeoisie tente de dissimuler, par sa propagande officielle, l’effondrement de son mode de production capitaliste moribond derrière le paravent de la crise sanitaire et de la guerre en Ukraine, les populations mondiales ne sont pas dupes. Elles sont conscientes de vivre la fin de régime capitaliste, le crépuscule du règne de la bourgeoisie et de sa civilisation consumériste. La débâcle de son système est générale : aux plans économique, social, institutionnel, scientifique, médical, sanitaire, philosophique, moral, culturel, etc.

Aucune réforme salvatrice ne peut éviter l’effondrement du capitalisme. Il est désormais en sursis.

Ironie de l’histoire, le système capitaliste, fondé sur l’accumulation de capital extrait du secteur privé, ne survit qu’à l’aide de fonds publics siphonnés des budgets de l’État et des grandes institutions bancaires, notamment les banques centrales.

En tout état de cause, même si le capitalisme joue les prolongations, maintenu de force par l’arbitre étatique à coups de subventions et financements publics, sans le ballon du profit, ni la participation des consommateurs qui ont déserté les gradins de la production du fait la fermeture d’entreprises et du chômage endémique, le match historique du système est achevé.

L’Histoire a sifflé sa fin.

Lénine a déclaré « le capitalisme est une horreur sans fin ». Notre époque, marquée par la résurgence de la paupérisation, la famine, du chômage endémique, des fléaux morbides, et, surtout, de la guerre généralisée, lui donne raison. Le capitalisme est ontologiquement pathogène, belligène, mortifère, génocidaire.

La dramatique situation actuelle marquée par la flambée des fléaux pathologiques (notamment la propagation des virus, des maladies psychiatriques et des morbidités multiples), par l’aggravation de la crise multidimensionnelle systémique, la prolifération des guerres et des exodes, constitue une condamnation sans appel du capitalisme. Au reste, depuis un siècle, c’est-à-dire la Première Guerre mondiale, il n’a survécu au-delà de sa mission historique que grâce à la falsification de ses lois (endettement, crédit, subventions, planches à billets), au durcissement autoritaire de son pouvoir étatique, illustré par l’instauration de modes de gouvernance fondés sur le fascisme, le nazisme, le stalinisme, la démocratie financière despotique bâtie en Occident décadent.

Le capitalisme est rentré dans sa crise terminale. Parce qu’il est incapable de poursuivre son développement normal, d’assurer sa valorisation, il lui faut instaurer des tyrannies (sous couvert de pandémie) et recourir à la guerre généralisée (sous couvert de défense de la démocratie ou de la patrie). S’il y a tyrannie sanitaire pandémique et escalade guerrière matérialisée par l’économie de guerre et le militarisme, c’est parce que le capitalisme mondialisé ne peut plus continuer de fonctionner dans la « félicité consommatrice » fondée sur le crédit intarissable des années consuméristes des quatre dernières décennies. Après l’ivresse de la consommation éthylique, les peuples, sous l’effet de la virulence de la crise économique mondiale provoquée par la baisse vertigineuse du taux de profit, se réveillent avec la gueule de bois, cette intoxication capitalistique qui provoque des nausées par sa seule existence.

Quand une formation sociale et économique amorce son déclin, cela signifie que la révolution sociale est à l’ordre du jour.

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