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Barta et la question Israël/Palestine

vendredi 3 novembre 2023, par Robert Paris

Barta et la question Israël/Palestine

Barta

12 janvier 1949

L’intervention militaire anglaise en Palestine

POURQUOI SE GENERALIZATIONS ?

Au moment où, prélude à la paix générale en Palestine, des conversations s’engageaient entre Israël et l’Egypte, les dirigeants impérialistes de Londres ont suscité le traditionnel incident pour justifier leur intervention armée. Cinq avions anglais ayant été abattus au-dessus du champ de bataille égypto-israélien, le cabinet de Londres en a aussitôt pris prétexte pour mettre en place son dispositif de bataille : mobilisation de la flotte, débarquement de troupes, campagne de presse.
On voit, une fois de plus, que La Fontaine n’a rien inventé dans sa fable Le Loup et l’Agneau. "Israël trouble ma sécurité", prétend Bevin qui voudrait que les avions de Sa Majesté soient considérés comme tabous même au-dessus d’un champ de bataille !
Mais le cynisme de l’intervention anglaise ne s’arrête pas là. L’Egypte a, en effet, refusé "l’aide" anglaise, préférant engager des négociations directes avec Israël. Impliqué dans un conflit qui ne pouvait profiter qu’à l’Angleterre, ce pays, à deux doigts d’une catastrophe intérieure (comme l’a montré l’assassinat de Nokrachy Pacha), préfère, semble-t-il, actuellement une "mauvaise paix" avec Israël à un "bon traité" avec l’Angleterre. Et c’est la bonne voie, car ce sont les troupes anglaises qui stationnent autour du Canal de Suez et c’est l’Angleterre, comme les journaux l’ont révélé, qui veut occuper le Néguev. Mais qu’à cela ne tienne ! L’Angleterre entend atteindre ses buts stratégiques coûte que coûte. Et si les Arabes ne veulent pas de son "aide", elle les aidera malgré eux.

Pourquoi, en effet, les Anglais se gêneraient-ils ? Les Hollandais ne viennent-ils pas de déclencher, sans l’ombre d’un prétexte et en violation de leurs propres engagements, la guerre contre les Républiques Indonésiennes ? La France ne guerroie-t-elle pas depuis plus de trois ans en Indochine ? Les Etats-Unis n’arment-ils pas partout leurs mercenaires et n’occupent-ils pas les principales positions militaires du monde, du Japon à l’Allemagne ? La Russie, sous la conduite des satrapes de Staline, n’est-elle pas redevenue une vaste prison des peuples ? L’O.N.U., comme feu la S.D.N., sert-elle à autre chose qu’à CAMOUFLER le brigandage des grandes puissances ?

La morale de tout ceci, c’est que dans un monde livré aux agissements de brigands militaristes, armés de pied en cap, l’indignation, à elle seule, ne sert de rien. Quand il s’agit des intérêts vitaux de ces grands brigands, l’opinion publique ne joue qu’un faible rôle. Ainsi, la grande majorité de la population française est contre la guerre d’Indochine. Mais cela ne change rien à la conduite de nos capitalistes et de nos gouvernants.

La lutte pour la paix exige autre chose que de bons sentiments, de bonnes paroles et des prêches pour de soi-disant gouvernements mondiaux. Pour arriver à un véritable gouvernement mondial et à la paix universelle, il faut que, dans chaque pays, la classe ouvrière, appuyée sur les masses populaires et leur servant de guide, balaie les capitalistes et leur Etat militariste. Faute de quoi, les désirs et les lamentations des populations laborieuses au sujet de la paix ressembleront fort aux bêlements de moutons qu’on se prépare à égorger !

Barta

6 mars 1957

ILS NE REGNERONT PAS TOUJOURS

Cédant a la pression conjuguée de l’O.N.U. et de l’"opinion mondiale" dont, comme chacun sait, le Département d’Etat américain est l’expression la plus légitime, ISRAEL retire ses troupes de Gaza et d’Akaba. Ce n’est malheureusement que le dernier épisode et non la fin de la lutte que les grandes, moyennes et petites puissances mènent dans cette partie du monde autour de tout ce qui touche à la production et au transport du pétrole. Car, nul ne l’ignore à présent, c’est une question de domination économique qui anima les conférences diplomatiques et non l’intérêt des peuples.
L’attitude de la diplomate américaine à l’égard d’Israël en est une nouvelle illustration. Elle ne fait qui suivre en cela le "diviser pour régner " qui a force de loi pour la politique coloniale anglaise.

Tout comme ils avaient dressés aux Indes, Musulmans contre Hindous, les hommes du Foreign Office avaient, en Palestine, fait de l’hostilité des Arabes contre les Juifs une bonne haine bien tenace, la ranimant artificiellement chaque fois qu’elle menaçait da faiblir. Ils avaient poussé au plus haut point l’art de mécontenter également, de la même mesure, les deux populations. Ils n’accordaient pas les mêmes droits aux uns et aux autres. Ils ne permettaient pas l’immigration massive réclamée par les Juifs mais la contingentaient, de façon à dresser continuellement les Arabes contre les nouveaux arrivants, A cette époque cette doctrine politique permettait à l’Angleterre d’économiser bien des troupes d’occupation en ne jouant, en somme, que le rôle d’arbitre impartial.

Mais, à la fin de la deuxième guerre mondiale, le Sionisme qui jusque là n’avait trouvé que peu d’échos est devenu le seul espoir pour les Juifs européens qui avaient pu réchapper des fours crématoires. L’intégration n’avait pas été possible pour eux, il ne leur restait que l’Etat Juif comme perspective. Et ce furent les départs massifs vers la Palestine, les convois clandestins forçant les barrages anglais ; ce fut l’époque de l’"Exodus" dont le nom est un symbole. Ces immigrés clandestins s’armèrent et s’attaquèrent à la fois aux Arabes et aux troupes anglaises. Ils vainquirent les deux. Cela, avec le soutien, sinon déterminant, du moins quasi-officiel, des États-Unis fort aises de contribuer à créer des ennuis à leur "allié" anglais dans cette partie du monde. Et c’est ainsi que naquit en 1948 l’Etat d’Israël. Depuis, les Juifs pris au piège de cet Etat artificiel n’ont cessé de vivre les armes à la main. L’Angleterre s’est servie d’eux lors du "coup de Suez" en les jetant contre l’Égypte.

Mais, la diplomatie américaine qui a repris à son compte les intérêts, les responsabilités et les méthodes de l’Angleterre, continuent à pratiquer le "diviser pour régner". Agrès avoir aidé à l’accouchement d’Israël, les U.S.A. soutiennent maintenant les Etats arabes contre lui.

Mais les peuples ne se dresseront pas éternellement les uns contre les autres au bénéfice de quelques commanditaires. Les haines nationales se retournent maintenant contre les colonialistes et les dirigeants du monde se trouvent dépassés par les forces qu’ils ont fait naître.

Barta

5 mai 1948

POURQUOI LE SANG COULE-T-IL EN PALESTINE ?

Depuis plus de deux semaines, les journaux commentent largement la guerre de Palestine, mais n’en éclairent pas le sens.

Alors que les Anglo-Américains soutiennent la Ligue arabe, l’opinion officielle en France s’est montrée plutôt favorable aux sionistes. De quel côté se trouve la "cause juste" ?
Pour les centaines de milliers de Juifs qui cherchent un "foyer" : c’est-à-dire la sécurité, l’Etat-nain de Palestine n’est pas une solution. Mais si les nationalistes juifs, en se basant sur les traditions de l’histoire, ont fait de ce morceau de terre l’objet de tous leurs espoirs, ce sont précisément les impérialistes anglais, les combattant aujourd’hui à mort, qui avaient dès 1917 (déclaration Balfour), promis aux sionistes cette terre se trouvant sous leur domination. Ils n’ont pas tardé à mentir à leurs promesses, car pour eux l’immigration juive, organisée au compte-goutte n’était qu’une machination destinée à introduire un nouvel élément de trouble et de division dans le monde arabe, suivant la formule "diviser pour régner". Cependant que des milliers de jeunes juifs donnaient le meilleur de leurs forces pour fertiliser cette terre, l’occupant anglais jouait, au mieux de ses propres intérêts, tantôt les Arabes contre les Juifs, tantôt contre les Arabes, les quelques Juifs qui avaient pu immigrer au prix des plus grands efforts.
Après la guerre de 1940, avec les milliers d’hommes et de femmes traqués et sans foyer, le problème palestinien prit une acuité encore plus grande. Devant les conflits croissant, la Grande-bretagne annonça brusquement son intention de se retirer de Palestine... mais y resta. Car cette "menace" de se retirer n’était en réalité, pour des raisons stratégiques, qu’un biais permettant l’immixtion des "Nations Unies", c’est-à-dire de l’Amérique. Celle-ci se déclara favorable au découpage de l’Etat palestinien en deux : un morceau pour les Juifs, l’autre pour les Arabes. Mais cette décision, qui aggrava les conflits judéo-arabes, n’eut même pas le temps d’être appliquée, que l’on vit brusquement les Etats-Unis faire des déclarations en faveur de la Ligue arabe. Washington veut renforcer ces derniers de façon à constituer, avec la Grèce, la Turquie et l’Iran, un bloc pour contenir ce qu’il est convenu d’appeler l’expansion soviétique, écrivait le 15 avril, le journal capitaliste français Le Monde.

Il est clair que "les grandes puissances" ne sont pas intervenues en médiateurs dans le conflit palestinien ; ce sont elles les véritables instigateurs des troubles : soutenant tantôt l’un tantôt l’autre, suivant les exigences du moment de leur politique extérieure, abusant tout à tour les peuples juif et arabe de leurs promesses (qu’elles ne tiennent jamais), attisant les haines et entretenant un foyer permanent de luttes intestines. N’est-ce pas ainsi qu’à travers toutes les manœuvres, la "décision" de l’Angleterre de se retirer de Palestine a abouti aujourd’hui à un débarquement en force de troupes et de tanks.

C’est aussi de ce même point de vue impérialiste, qui n’a rien d’idéaliste, que s’explique l’attitude de "défense" des Juifs par les capitalistes français : si les Anglo-Américains soutiennent les seigneurs arabes dans leur expansion nationaliste, n’est-ce pas là un danger qui peut donner le branle à tout le monde musulman, à cette Afrique du Nord où "l’ordre" est si péniblement maintenu ?

Cependant, face à cette guerre de Palestine qui constitue l’un des foyers de la 3ème guerre mondiale, jamais aucun des journaux capitalistes n’a relaté, et pour cause, que les peuples – le véritable peuple ouvrier et paysan – les peuples juif et arabe, ont montré qu’ils pouvaient s’entendre. Le mouvement de pacification est sorti du sein de la classe ouvrière. Les syndicats ouvriers juifs et arabes conclurent des ententes et organisèrent la fraternisation dans des grèves communes. Ce sont les impérialistes, entretenant leurs agents dans les deux camps nationalistes, qui ont fait assassiner dans la seule année 1947 (comme nous l’avions relaté dans La Voix, n° 21) 13 leaders des syndicats arabes travaillant pour le rapprochement entre les deux peuples.
Les impérialistes, aidés en cela par les agents nationalistes des deux camps, font tout ce qui est en leur pouvoir pour empêcher l’union entre les ouvriers et les paysans juifs et arabes.

Mais "c’est l’essence du mouvement ouvrier lui-même, pour défendre ses intérêts, de défendre aussi la fraternité entre les peuples. En luttant contre les excitateurs de guerre qui entretiennent la division entre les peuples, le mouvement ouvrier lutte pour la paix". (La Voix, n° 21).

Aussi, vis-à-vis de la guerre de Palestine, les ouvriers de tous les pays n’ont qu’une position à prendre : appuyer le mouvement d’union et de fraternité des ouvriers juifs et arabes contre l’impérialisme. Ils lutteront ainsi contre les provocateurs de guerre.

Barta

1er octobre 1947

LA LUTTE OUVRIERE ET L’UNION DES PEUPLES

Le problème palestinien est un des nombreux problèmes "insolubles" qui enveniment la situation internationale, au point que l’Angleterre, devant l’impossibilité de "concilier les thèses juive et arabe" (entre lesquelles, en réalité, elle n’a cessé d’entretenir la discorde), déclare vouloir "renoncer" à son mandat. Mais ce n’est là qu’une manoeuvre pour lui permettre de dégager ses responsabilités du chaos dans lequel elle a plongé le pays, comme elle l’a déjà fait pour l’Inde. Manoeuvre aussi pour justifier l’intervention de l’O.N.U., c’est-à-dire des Etats-Unis, dans cette partie du monde, en vue de la troisième guerre impérialiste mondiale contre l’U.R.S.S.

Quotidiennement, les journaux relatent les actes de terrorisme et les luttes sanglantes qui déchirent le pays. Mais tandis qu’ils insistent longuement sur les antagonismes irréductibles qui opposent nationalistes juifs et arabes, ce n’est qu’incidemment qu’on apprend, à propos de l’activité des nationalistes chauvins, qu’un chef syndicaliste arabe vient d’être abattu par ces derniers pour avoir travaillé au rapprochement entre ouvriers juifs et arabes (d’après Le Monde du 26-9). Il s’agit du treizième chef syndicaliste arabe assassiné, dans l’année, pour les mêmes raisons !

Rien qu’à l’importance de cette sanglante répression on peut mesurer l’ampleur du mouvement ouvrier et l’énergie qu’il déploie pour opposer à la guerre fratricide, entretenue par les exploiteurs, l’entente et la fraternité entre exploités. Et malgré cette répression, le mouvement ouvrier a déjà réussi à unir, dans d’importantes grèves communes, ouvriers juifs et arabes.

Le mouvement ouvrier arabe et juif sait que la seule opposition réelle à la guerre, la seule solution possible au problème palestinien, c’est l’union des ouvriers juifs et arabes contre l’impérialisme et contre tous leurs exploiteurs communs.

Le même exemple nous est donné aux Indes où Gandhi, jadis apôtre de la non-violence, prêche la "guerre sainte" contre le Pakistan, alors que le mouvement ouvrier, unissant dans la même lutte contre leurs exploiteurs, ouvriers hindous et musulmans, s’efforce d’apporter la paix entre les peuples.

C’est l’essence du mouvement ouvrier lui-même, pour défendre ses intérêts, de défendre aussi la fraternité entre les peuples. En luttant contre les excitateurs de guerre qui entretiennent la division entre les peuples, le mouvement ouvrier lutte pour la paix.

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