Accueil > 02 - Livre Deux : SCIENCES > Evolution ou révolution des espèces ? > Le stress crée l’espèce

Le stress crée l’espèce

lundi 8 septembre 2025, par Robert Paris

Le stress crée l’espèce

Le mécanisme de sélection naturelle darwinienne indique comment le tri se fait entre les différentes espèces mais ne donne pas de mode de fonctionnement de la formation d’espèces nouvelles.

Nous développons ici l’idée que ce sont les changements environnentaux brutaux qui créent des espèces nouvelles.

Des réponses moléculaires aux facteurs de stress

La résilience est la capacité de bien s’adapter face à l’adversité, à un traumatisme, à une tragédie, à des menaces ou à des sources de stress importantes. Le concept de résilience a été appliqué à un large éventail de systèmes allant des cellules aux organismes. Les facteurs environnementaux modulent de manière adaptative la résilience en intervenant sur les modifications épigénétiques transmises de manière transgénérationnelle. Notre but est de conceptualiser la nature dynamique des réponses moléculaires aux facteurs de stress et le rôle physiologique de la résilience dans le maintien ou la restauration d’une homéostasie normale.

https://www-ncbi-nlm-nih-gov.translate.goog/pmc/articles/PMC7824193/?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc

Les protéines de choc thermique ou HSP

https://fr.wikipedia.org/wiki/Prot%C3%A9ine_de_choc_thermique

Evolution de l’expression des protéines de choc thermique sous-tendant les réponses adaptatives au stress environnemental

https://pubmed-ncbi-nlm-nih-gov.translate.goog/29920826/

Les HSP sont des protéines synthétisées en réponse au stress thermique pour protéger les cellules

https://www-nature-com.translate.goog/articles/s41598-022-18985-0?error=cookies_not_supported&code=82e41aae-0791-46e8-8be3-cdeedeb7008a&_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc

Le changement brutal de température cause donc un effet de choc, appelé stress dans la biochimie moléculaire, entraînant la mise en place d’un nouvel équilibre. Le stress est un cycle biochimique qui interagit d’une part avec l’environnement et, d’autre part, avec le mécanisme d’inhibition des variations.

Le mécanisme de base de la conservation semble devoir être la stabilité de la molécule de la génétique, l’ADN, mais nous savons maintenant qu’elle-même subit sans cesse des changements, au sein même de l’espèce et même au sein du même individu. Le mécanisme de réplication de l’ADN, dit à l’identique, n’est pas si identique que cela et, s’il ne produit pas de changements brutaux, c’est parce que des protéines dites de surveillance du stress, ou HSP, sont chargées de supprimer les changements inadéquats.

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article5126

Le stress (agression notamment climatique) qui inhibe les inhibiteurs hsp ne fait qu’ouvrir la possibilité de création de nouveauté (qui existait déjà au sein du fonctionnement génétique). Nous avons affaire sans cesse à des négations dialectiques au sein de contradictions coexistant dans le système génétique. L’ADN est certainement la molécule la plus contradictoire puisque chacun des gènes actifs et inactivé par d’autres gènes. Le même ADN pourrait également permettre de produire d’autres espèces si le mécanisme de contrôle hsp n’éliminait pas systématiquement le non-soi. Dans tous les mécanismes du vivant, l’immunologue Ameisen rappelle que l’action est toujours négation de la négation, comme il l’affirme dans son ouvrage « La sculpture du vivant ».

Sans cesse, la tendance spontanée de l’être vivant consiste à produire des molécules qui ne sont pas adaptées à l’espèce. Il n’y a donc aucun étonnement à constater, dès que les mécanismes de protection sont occupés à la défense face à une agression extérieure (stress), que la nouveauté se met à être produite.

Le caractère étonnant (carrément miraculeux) de la production d’espèces nouvelles n’existe qu’à partir du moment où on considère l’espèce comme fixe, stable, naturellement définitive, fondée sur un ADN propre à l’espèce et ne pouvant produire qu’une seule espèce. Ce dogme ne correspond nullement à la réalité.

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article2964

Il existe un mécanisme biochimique, permettant au milieu extérieur (en cas de changement climatique important et brutal, d’agression chimique ou par rayonnement) de provoquer chez l’être vivant un stress, qui inhibe le mécanisme de conservation de l’espèce. C’est la découverte des biologistes Rutherford et Lindquist concernant la mouche drosophile. Ces deux biologistes américaines viennent de montrer qu’un stress intense peut provoquer chez cet animal des mutations héréditaires. Ces mutations entraînent des anomalies impressionnantes concernant la morphologie de l’animal, par exemple la dimension des pattes ou des ailes ou la pilosité. Publiée en décembre 1998, leur étude montre qu’un effet de choc produit de nouvelles espèces. Un choc qui casse l’ordre puis produit un nouvel ordre, voilà qui fait penser au chaos déterministe.

Ces deux chercheuses ont trouvé la cause de ces mutations de la mouche du vinaigre, la drosophile : un gène qui code une protéine appelée Hsp90. Comme l’indique le nom Hsp, « heat shock protein » c’est-à-dire protéine de choc thermique, cette protéine sert à protéger d’autres protéines des chocs thermiques extérieurs. Les chercheuses ont montré qu’en période de stress intense, la protection se relâche, favorisant des possibilités de biodiversité qui étaient inhibées jusque-là. En effet, Hsp90 aurait comme rôle, en temps normal, de s’assurer que les autres horloges ne sont pas décalées dans le temps. Du coup, il inhibe le potentiel de difformité que permet le fonctionnement des gènes et des protéines. Hsp agit de sorte que le développement mette de côté les petites modifications des protéines. Or les protéines qui sont ainsi protégées contre toute erreur de route sont justement celles liées à des processus de multiplication et de développement cellulaire. Avec la mutation du gène de protection puis celle de la protéine Hsp90, des mutations deviennent à nouveau possibles et peuvent se produire sans contrôle. Il n’y a plus qu’à imaginer qu’elles portent sur des cellules embryonnaires pour disposer pour la première fois d’un mécanisme génétique permettant de comprendre comment apparaît une nouvelle espèce. Les drosophiles mutantes qui sont parvenues à atteindre l’âge adulte ont été pour la plupart des nouvelles mouches viables. Non seulement la mutation est héréditaire mais elle se conserve en cas de croisement entre deux animaux ayant l’un Hsp mutant et l’autre un Hsp normal.

Ce processus suggère que de nombreuses espèces pourraient acquérir de la nouveauté dans un environnement qui changerait brutalement, par exemple sur le plan climatique. C’est une interprétation intéressante des bouffées de variabilité que l’on a constaté sans les expliquer jusque là. On a constaté en effet que de nombreuses espèces subissent en même temps des variations. Les protéines chaperon, type Hsp, qui inhibent les variations des autres protéines et constituent un mécanisme de type homéostasie ont été trouvées également chez les mammifères, les végétaux et les insectes. Quant à la protéine Hsp90, elle est la même pour toutes sortes d’êtres vivants, de la levure aux mammifères. C’est donc une hypothèse très tentante. C’est même la première fois qu’un mécanisme moléculaire postule à expliquer, en un tout petit nombre de mutations, des changements visibles et héréditaires de la morphologie.

Or, justement, une découverte a été faite au cours de l’année 1998 sur le mécanisme des mutations héréditaires : Chaline a étudié un poisson du Pacifique, près de la côte du Mexique, l’axolotl, dont l’évolution est inachevée et qui, normalement, reste à l’état larvaire, intermédiaire entre le poisson et l’animal terrestre. Il a démontré qu’un des produits biologiques d’un cycle de rétroaction, la thyroxine, est déterminant dans l’évolution de l’espèce avec une bifurcation, soit vers le poisson, soit vers l’animal terrestre. En effet, l’excès ou la carence de ce produit enclenche l’évolution de l’espèce. La concentration de ce produit biologique modifie l’équilibre rythmique des cycles de rétroaction biochimiques lesquels règlent la formation de l’animal. Or modifier l’un de ces cycles, c’est choisir une bifurcation dans un sens ou dans l’autre, soit vers le poisson soit vers l’animal terrestre. Et c’est enclencher un processus qui ne concerne pas que l’individu mais toute sa descendance car il met en jeu les gènes concernés. On dispose donc d’un exemple de retardement de l’horloge biologique et on sait comment il est relié à la génétique. On sait également qu’une action chimique permet d’intervenir sur le cycle qui commande cette horloge, en inoculant ce produit.

De ces diverses recherches il découle :

premièrement, que c’est au niveau de l’embryon qu’une espèce peut changer et que la comparaison des espèces ne doit pas partir des comparaisons d’adultes comme le faisait la phylogenèse, c’est-à-dire la recherche des lignées d’espèces (les phylums). Ce qui rapproche les différents animaux qui se succèdent dans l’évolution, et permet de concevoir le passage d’une forme à une autre, n’est pas l’état adulte mais embryonnaire. C’est un renversement complet de perspective dans la relation entre phylogenèse et ontogenèse (l’ontogenèse étant la succession des phases par lesquelles s’élabore un individu).

deuxièmement, qu’un changement morphologique d’espèce peut tout à fait se produire brutalement, avec une ou deux modifications sur l’ADN et non des millions, comme le supposait le néo-darwinisme.
Cela signifie que des espèces apparaissent brutalement et non sur des temps très longs comme le défend cette thèse. Il peut suffire d’un tout petit nombre de mutations sur des gênes, les gênes du développement, pour entraîner un changement dans l’horloge qui commande la fabrication embryonnaire de l’individu.

 troisièmement, ce sont des altérations du rythme et des vitesses du développement de l’individu qui changent d’une espèce à une autre. Cette propriété est due au type chaotique de ces horloges produites par l’auto-organisation de réactions biochimiques rétroactives.

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article49

Hsp90 est une classe de protéines chaperonnes jouant en temps normal un rôle de protection du bon repliement tridimensionnel des protéines animales ou végétales, notamment en condition de chocs thermiques (HSP signifie heat shock protein, 90 désignant sa masse moléculaire). On soupçonne que sa déficience ou son inhibition lors de certaines situations de stress entrainerait une recrudescence de mutations non-mendéliennes ou épigénétiques lorsque des espèces traversent des conditions difficiles. Cela est démontré chez la mouche drosophile.

Elle intervient également chez les mitochondries1. On lui connaît deux formes nommées ⍺ et β (même article).

Elle joue aussi un rôle favorisant pour les cellules mutantes qui sont à l’origine de tumeurs et cancers2.

Deux biologistes de l’université de Chicago, Suzanne Rutherford et Susan Lindquist ont exposé fin novembre 1998 l’hypothèse que l’HSP90 puisse jouer un grand rôle dans l’évolution. HSP90, lorsqu’elle aide au bon repliement des protéines, a un rôle de tampon, et aide à masquer les effets de mutations génétiques dormantes. En cas de déficience, lorsqu’elle est trop sollicitée, mais aussi en cas de suractivié, elle entraîne la protéine mal chaperonnée à exprimer ces mutations cachées, provoquant l’apparition d’un nouveau phénotype, sans modification initiale de l’ADN3,4,5.

L’HSP90 assure que les protéines accomplissent leur travail même en présence d’« erreurs ». Ces HSP « chaperonnent » les protéines synthétisées :

• soit non encore repliées, après l’intervention de la protéine Hsp70 ;

• soit dont le bon repliement est affecté par les conditions de stress.

Le changement du repliement d’une protéine change en effet son activité.

La production des HSP augmente lors de toute élévation brutale de la température. L’HSP 90 protège les protéines se dépliant à la suite de ce choc, en les empêchant de s’agréger.

L’HSP90 est en temps normal abondante dans le cytoplasme des cellules. « Elle interagit avec de multiples protéines de signalisation cellulaire qu’elle stabilise6. »

La mutation du gène codant l’HSP90 provoque chez la mouche drosophile les effets suivants, de façon anarchique :

• yeux disparaissant, ou changeant de forme, de taille, de couleur ;

• modification de la forme ou taille des ailes, des pattes ;

• pilosité différente... .

Les mouches mutantes résultantes restent presque toujours à la fois viables et fertiles. Elles produisent donc à la génération suivante une nouvelle génération mutante. Ces drosophiles de la seconde génération croisées avec des mouches disposant d’un gène codant une HSP90 saine et normale conservent la faculté de transmettre leurs caractéristiques à la troisième génération, caractéristiques qui deviennent donc indépendantes de cette protéine.

On a qui résistent aux Pseudomonias pathogènes déclenchent un programme de suicide cellulaire en sa présence. Mais certains pathovars de pseudomonas semblent en mesure d’inhiber ce programme.

Des chercheurs américaine ont récemment (2019) a montré que certaines souches de la bactérie Pseudomonas syringae peu se déguiser pour tromper par le système système immunitaire de la plante qu’elle infecte et y désarmer la protéine HSP90, une protéine connue pour être essentielle parmi les moyens de défense des végétaux et de animaux (elle aide à assembler et configurer des molécules qui détectent l’invasion de pathogènes et combattent l’infection.)7. Pour cela Pseudomonas syringae sécrète une « protéine de virulence » baptisée HopBF1 qui imite les molécules végétales qui se lient à HSP90. HSP90 peut ainsi être désactivée par HopBF1, au détriment de l’immunité de la plante qui alors cesse de combattre la bactérie (en temps normal elle le fait par suicide cellulaire là où les cellules sont infectées).

Selon les auteurs de cette étude, mieux connaitre les composés désactivant HopBF1 pourraient aider à contrôler les agents pathogènes des cultures7. De plus on sait aussi depuis le début des années 2000 que HSP90 favorise la croissance et la survie de beaucoup de types de cellules mutantes qui sont sources de tumoreurs ou cancers2, ce qui laisse espérer qu’on pourrait un jour utiliser HopBF1 pour bloquer la croissance de ces tumeurs7.

• 1 https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2008/06/medsci2008244p363/medsci2008244p363.html

• 2 Whitesell, L., & Lindquist, S. L. (2005)HSP90 and the chaperoning of cancer. [archive] | Nature Reviews Cancer, 5(10), 761.

• 3 (en) Rutherford SL et Lindquist S., « Hsp90 as a capacitor for morphological evolution. », Nature,‎ 26 novembre 1998 (DOI 10.1038/24550,)

• 4 Jane Gitschier, « A Flurry of Folding Problems : An Interview with Susan Lindquist [archive] », sur plos.org, PLOS Genetics, 12 mai 2011

• 5 Susan Lindquist, « Protein folding sculpting evolutionary change. [archive] », sur Pubmed, Cold Spring Harbor Symposia on Quantitative Biology 2009, 7 avril 2010

• 6 Michel Grob, La Recherche, juin 1999.

• 7 The masquerade that helps ruinous microbes to invade ; A bacterial protein in disguise works to squelch an infected host’s immune system [archive]. Brève publiée le 12 septembre par la revue Nature.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Hsp90

Les travaux publiés en décembre 1998 par les biologistes Rutherford et Lindquist sur la mouche drosophile ont mis en évidence qu’un stress intense peut provoquer chez cet animal des mutations héréditaires, agissant par exemple sur la dimension des pattes ou des ailes ou la pilosité, leur étude montre qu’un effet de choc produit de nouvelles espèces. La cause de ces mutations de la mouche du vinaigre, la drosophile : un gène qui code une protéine appelée Hsp90, Hsp ou « heat shock protein » c’est-à-dire protéine de choc thermique, cette protéine sert à protéger d’autres protéines des chocs thermiques extérieurs. En cas de stress intense, la protection se relâche, favorisant des possibilités de biodiversité qui étaient inhibées jusque-là. En effet, Hsp90 aurait comme rôle, en temps normal, de s’assurer que les autres horloges ne sont pas décalées dans le temps. Du coup, il inhibe le potentiel de difformité que permet le fonctionnement des gènes et des protéines. Hsp agit de sorte que le développement mette de côté les petites modifications des protéines. Or les protéines qui sont ainsi protégées contre toute erreur de route sont justement celles liées à des processus de multiplication et de développement cellulaire. Avec la mutation du gène de protection puis celle de la protéine Hsp90, des mutations deviennent à nouveau possibles et peuvent se produire sans contrôle. Il n’y a plus qu’à imaginer qu’elles portent sur des cellules embryonnaires pour disposer pour la première fois d’un mécanisme génétique permettant de comprendre comment apparaît une nouvelle espèce. Les drosophiles mutantes qui sont parvenues à atteindre l’âge adulte ont été pour la plupart des nouvelles mouches viables. Non seulement la mutation est héréditaire mais elle se conserve en cas de croisement entre deux animaux ayant l’un Hsp mutant et l’autre un Hsp normal. Ce processus suggère que de nombreuses espèces pourraient acquérir de la nouveauté dans un environnement qui changerait brutalement, par exemple sur le plan climatique.

C’est un contrôle épigénétique du développement. Cette interaction avec influence de la forme est une régulation topo-biologique, comme le dit Edelman. On est très loin de l’idée de programmation du type ordinateur qui avait été utilisée pour représenter l’ADN. Un programme informatique est quelque chose de figé et qui n’évolue pas. Le processus est programmé parce qu’il agit sous la dépendance de gènes. Pourtant il est fondé sur un processus aléatoire à un niveau différent, celui des interactions cellulaires et moléculaires. Avec la diversification, le même ADN, le même programme génétique peut produire des cellules diverses suivant les messages reçus des autres cellules. Donc l’histoire suivie par les cellules n’est pas strictement déterminée par les gènes.

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4322

« L’environnement extérieur est plus qu’un simple filtre – un simple goulet d’étranglement – à travers lequel sont sélectionnés ou éliminés les individus et les espèces. L’environnement extérieur peut exercer une influence directe sur la manière même dont les cellules et les corps utilisent leurs potentialités génétiques et donc sur les modalités de construction des embryons. A la fin de l’année 1998, deux biologistes de l’université de Chicago, Suzanne Rutherford et Susan Lindquist, révélaient que les modifications de l’environnement pouvaient avoir d’autres conséquences qui étaient jusque-là demeurées insoupçonnées. (…) Certaines variations de l’environnement – en particulier des variations brutales de température – entraînent une modification accidentelle de la forme originelle que les protéines ont adoptée. Lorsque tel est le cas, une forme particulière de chaperons – les protéines de choc thermique – se fixe à ces protéines soudain altérées, leur permettant de retrouver leur forme initiale. Ce sont des chaperons de réponse au stress – aux changements brusques des conditions environnantes.
Il est des chaperons qui exercent les deux types d’activité. Ils sont, normalement, fixés en permanence à certaines protéines cellulaires, leur permettant de maintenir la forme qu’ils leur ont permis initialement d’adopter. Mais lorsqu’une modification de température entraîne la dénaturation d’autres familles de protéines, les chaperons abandonnent leurs partenaires habituels, pour se fixer aux protéines altérées et rétablir leur forme. Ainsi se comporte HSP90 (HSP pour Heat Shock Protein, « protéine de choc thermique »). Et c’est sur ce chaperon qu’ont porté les travaux de Lindquist et de Rutherford.

Elles ont montré que lorsque des embryons de drosophiles sont soumis à un choc thermique, les nouveaux-nés présentent des modifications profondes de toute une série d’organes antennes, ailes, yeux, pattes. (…) L’apparition de cette nouveauté n’est pas liée à la survenue soudaine de modifications génétiques : elle est due à la révélation d’une diversité génétique préexistante, dont la manifestation était jusque-là réprimée en permanence.

Dans chaque sous-espèce de drosophile et, à un degré plus restreint, dans chaque individu d’une sous-espèce donnée, un même gène peut être présent sous la forme d’une copie légèrement différente. Et les protéines que fabrique chaque embryon à partir des informations contenues dans ces gènes sont donc de nature légèrement différente. Mais les chaperons HSP90, qui se fixent à ces protéines en permanence, ont pour effet de masquer cette diversité. Lorsque la température se modifie, les chaperons HSP90 quittent brusquement leurs partenaires, qui adoptent alors des conformations différentes, révélant soudain la réalité de leur diversité et entraînant des modifications dans les modalités de construction du corps des embryons. Devenus adultes, et la plupart féconds, ils donneront naissance, si la température continue à varier à d’autres embryons « nouveaux ».

Au bout de quelques générations – pour des raisons encore partiellement inconnues – les différences génétiques se seront, à leur tout, accentuées. (…) Ainsi, la survenue pendant quelques mois de modifications brutales de la température environnante a permis la naissance – et la pérennisation – de la nouveauté. (…) Et durant l’année 2002, Susan Lindquist et son équipe suggérait le caractère universel de ces notions, en montrant que les chaperons HSP90 jouaient un rôle semblable dans le royaume des plantes. (…) Il est probable que l’apparition de la nouveauté a été souvent rapide et brutale. Parce que des modifications brutales de l’environnement ont le pouvoir de révéler dans un corps en train de se construire une source – une potentialité – préexistante de nouveauté qui s’est progressivement accumulée au cours du temps et qui, jusque là continuellement réprimée, peut soudain, pour la première fois, se manifester. »

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article626

Un article passionnant de Rutherford et Lindquist (1998) sur la relation entre la protéine de stress Hsp90 et la stabilité du développement ouvre une nouvelle fenêtre sur cette question et suggère un mécanisme cellulaire possible qui pourrait lier ces problèmes. Le plus tentant est que ce mécanisme fonctionnerait dans des conditions de stress - des conditions déstabilisantes telles qu’elles auraient pu provoquer des changements évolutifs rapides, liant ainsi le développement aux conditions environnementales. Rutherford et Lindquist (1998) s’appuient sur des résultats antérieurs d’un certain nombre de laboratoires qui impliquent des membres de la famille des protéines de choc thermique Hsp90 dans un certain nombre de voies de signalisation. Hsp90 exerce ses effets en stabilisant les composants intrinsèquement instables de ces voies et en les maintenant prêts à être activés en réponse à des signaux appropriés. Beaucoup de ces protéines de signalisation sont des protéines kinases agissant dans des cascades de transduction de signal familières. Partant de l’hypothèse que certains éléments de la machinerie de repliement et de stabilisation des protéines cellulaires pourraient jouer un rôle dans la régulation des voies de signalisation (Rutherford et Zuker 1994), Rutherford et Lindquist (1998) ont entrepris une analyse des effets des niveaux altérés de l’activité Hsp90 sur le développement chez la mouche des fruits Drosophila melanogaster. Les résultats plutôt dramatiques de cette analyse sont brièvement discutés ici et certaines de leurs implications possibles explorées. Bien que Hsp90 ne semble pas être impliquée de manière omniprésente dans le repliement et l’assemblage de polypeptides naissants ou dans le maintien de la structure protéique, elle est nécessaire au fonctionnement normal d’un certain nombre de protéines spécifiques. Drosophila Hsp90 est une protéine essentielle, puisque les mutants homozygotes de Hsp83 (le gène de Drosophila codant pour Hsp90) meurent au cours du développement. Les hétérozygotes Hsp83 - des mouches avec un mutant et une copie de type sauvage de Hsp83 - sont viables et la plupart ne présentent aucune anomalie morphologique. Cependant, environ 1 à 5% de ces individus présentent des aberrations de développement affectant une variété de traits morphologiques (tels que des yeux déformés et une nervation des ailes altérée). Des anomalies similaires ont également été obtenues lorsque des lignées de drosophiles récemment établies à partir de populations sauvages, ou des mouches sauvages collectées sur le terrain, ont été rendues hétérozygotes pour une mutation Hsp83. Ces effets étaient sans ambiguïté dus à des niveaux réduits de Hsp90 et pouvaient être obtenus non seulement dans des stocks de mutants, mais également dans des stocks de type sauvage nourris avec un inhibiteur de Hsp90. La nature des anomalies dépendait du fond génétique. Lorsque des mutants Hsp83 ont été croisés avec une souche particulière, plusieurs des descendants ont fréquemment montré des défauts similaires, distincts de ceux obtenus lorsqu’ils ont été croisés avec d’autres souches. Une analyse génétique plus approfondie a établi qu’il existait plusieurs facteurs génétiques qui prédisposaient différents stocks de drosophile à différents défauts de développement lorsque la fonction Hsp90 était compromise. Les mouches affectées pouvaient être élevées pour ces défauts : lorsque des lignées établies à partir de mouches présentant un type particulier de défaut (nervations alaires épaissies ou yeux déformés) étaient soumises à une sélection pour ces caractères, elles montraient une augmentation de la proportion de mouches affectées et de la gravité de la maladie. les défauts. Remarquablement, après une sélection sur aussi peu que quatre générations, les traits sont devenus indépendants de la mutation Hsp83. Les résultats de Rutherford et Lindquist rappellent fortement les travaux vieux de plusieurs décennies de Waddington et d’autres sur la canalisation et l’assimilation génétique (par exemple, Waddington 1942). Waddington a introduit le concept de canalisation pour les propriétés homéostatiques du développement. Il a affirmé que dans des conditions normalement rencontrées, les mécanismes homéostatiques tamponneraient (et donc confineraient à un développement « canal » ou « canal ») les déviations dues aux fluctuations environnementales et à la variation génétique. Cependant, des conditions de stress, telles que des températures élevées, pourraient perturber la canalisation et conduire à des résultats anormaux. Une anomalie pourrait être sélectionnée et deviendrait avec le temps génétiquement fixée ; il apparaîtrait même en l’absence de stress. Dans le langage de Waddington, le phénotype anormal deviendrait « assimilé ». Il a interprété l’assimilation génétique comme étant le résultat de la sélection de combinaisons de gènes régulateurs déjà présents dans la population mère. Les travaux sur Hsp90 cadrent très bien avec les travaux plus anciens sur la canalisation et l’assimilation génétique, et fournissent une explication cellulaire et moléculaire plausible de ces phénomènes. Les populations de laboratoire ainsi que les populations sauvages de Drosophila semblent abriter une variation génétique à un certain nombre de loci nécessaires au développement normal. Dans des conditions dans lesquelles la fonction Hsp90 est normale, le développement serait tamponné contre les effets de la variation des gènes codant pour les membres des voies dépendantes de Hsp90, telles que la voie de signalisation sans sept (Cutforth et Rubin 1994). Cependant, lorsque les niveaux de Hsp90 sont diminués, le développement peut mal tourner chez les individus porteurs de combinaisons d’allèles variants de certains gènes. En raison de la diminution de l’activité du ou des composants stabilisés par Hsp90 de la voie, la force du signal d’une voie peut chuter en dessous du seuil requis pour un développement normal. Le système peut également générer des sorties excessivement élevées si Hsp90 est nécessaire pour la stabilisation de certains composants régulateurs négatifs de la voie. Une sélection plus poussée, dans laquelle seuls les individus affectés sont utilisés pour la reproduction à chaque génération, conduit à un enrichissement pour les allèles variants instables sur le plan du développement. Si la sélection est poussée assez loin – quatre générations suffisent dans l’étude de Rutherford et Lindquist – les effets cumulatifs des combinaisons d’allèles variants deviennent suffisamment forts pour se manifester même lorsque la fonction Hsp90 est normale. Les résultats de Rutherford et Lindquist suggèrent un certain nombre de pistes d’expérimentation. Des expériences immédiatement évidentes concernent l’élaboration du caractère de Hsp90 dans cette nouvelle incarnation. Les mécanismes par lesquels Hsp90 facilite l’action de ses différentes cibles sont encore loin d’être bien compris. Les détails sur les caractéristiques de ses protéines cibles qui sont reconnues par Hsp90, la nature des contacts qu’elle établit avec elles, les changements conformationnels qu’elles subissent lors de l’association et de la dissociation de Hsp90, et comment ces changements sont liés à leurs rôles de signalisation, aideront à clarifier juste ce que fait Hsp90. Liée à la recherche de cibles Hsp90 et de voies de signalisation dépendantes de Hsp90, se pose la question de savoir quels types de processus pourraient nécessiter la fonction Hsp90. Hsp90 peut-il agir pour réguler les effets de la variation génétique uniquement dans les processus de développement ? Il ne semble pas y avoir de raison a priori pour qu’il en soit ainsi. Considérant l’origine ancienne de la machinerie pour le repliement et le maintien de la structure des protéines, il se pourrait bien que Hsp90 et d’autres protéines de type chaperon aient également été exploitées pour la régulation des processus métaboliques. Les cibles connues de la régulation de Hsp90 ne sont pas entièrement limitées aux éléments des voies de signalisation complexes, mais incluent des membres de la superfamille des récepteurs d’hormones stéroïdiennes, qui agissent de manière relativement simple en tant que facteurs de transcription, ainsi que des protéines qui ne sont pas connues pour agir dans les voies de signalisation intracellulaires. , comme le canal chlorure CFTR et l’enzyme oxyde nitrique synthase (Mayer et Bukau 1999). Par ailleurs, une des kinases dont l’activité montre une sensibilité à Hsp90 est la protéine WEE1, un régulateur de la division cellulaire (Aligue et al 1994). Ainsi, il existe déjà des preuves que la signalisation dans des processus qui ne sont pas, à proprement parler, concernés par le développement, peut être dépendante de Hsp90. Hsp90 pourrait, par conséquent, grâce à son action tampon dans des conditions "normales", masque également la variation génétique dans ces voies. Bien que des traits altérés dans des caractéristiques telles que les capacités de dégradation et de biosynthèse puissent sembler moins dramatiques que les variations morphologiques observées avec une activité Hsp90 réduite, l’importance évolutive d’un "condensateur" pour la variation génétique affectant les propriétés métaboliques ne serait pas moindre. L’importance centrale de la découverte de Rutherford et Lindquist est son implication pour l’évolution. En masquant une variation génétique qui ne serait pas neutre si elle n’était pas masquée, et en rendant cette variation visible à la sélection naturelle dans des conditions de stress, Hsp90 pourrait fournir un mécanisme de "stockage" de la variation génétique. Le stress environnemental rendrait cette variation disponible précisément dans des conditions où la sélection a une marge d’action.
https://www.matierevolution.fr/spip.php?article7306

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par les responsables.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.