Accueil > 14 - Livre Quatorze : PROLETAIRES SANS FRONTIERES > 1er mai 1890 : le mouvement ouvrier polonais de Rosa Luxemburg est en avance (…)

1er mai 1890 : le mouvement ouvrier polonais de Rosa Luxemburg est en avance sur le mouvement ouvrier russe de Plékhanov et Lénine

vendredi 7 février 2025

Rosa Luxemburg, révolutionnaire polonaise naturalisée allemande en 1898 seulement, fut d’abord un produit du mouvement ouvrier révolutionnaire polonais. Ses oeuvres complètes s’ouvrent en 1892, elle a 21 ans, par deux brochures sur le 1er mai 1892 en Pologne (Varsovie, Lodz).

On peut affirmer sans grand risque que Luxemburg est déjà marxiste en 1892, elle est d’ailleurs déjà une réfugiée politique en Suisse, alors que Lénine étudiant passe encore son temps à discuter de Hegel autour des machines à café dans des bibliothèques, nous exagérons à peine !

Les oeuvres complètes de Lénine commencent en 1893, il a 23 ans. Les premières oeuvres marxistes de Plékhanov dataient de 1883, il avait 27 ans.

Ces dates illustrent l’avance qu’avait le mouvement ouvrier de la Pologne de Russie sur le mouvement proprement russe, bien qu’au niveau théorique les russes étaient en avance grâce à Plékhanov. Une première erreur pratique de Plékhanov fut donc de mépriser ce mouvement polonais de l’Empire russe, alors que Plékhanov et Luxemburg étaient quasiment voisins de pallier dès 1889 à Zürich !

Comparant le parti ouvrier polonais « Prolétariat » à l’organisation politique « Narodnaïa volia » russe, Frölich écrivait :

Dans sa connaissance de la réalité sociale et des conditions de la lutte émancipatrice, le parti « Prolétariat » était aussi en avance sur la « Narodnaïa volia » que l’évolution sociale de la Pologne était en avance sur celle de la Russie centrale.

Rosa Luxemburg, Chapitre 2.

Engels décrit le même phénomène dans sa Préface à l’édition polonaise (du Manifeste) de 1892 :

La nouvelle édition polonaise du Manifeste est donc une preuve du progrès décisif de l’industrie de la Pologne. Que ce progrès ait effectivement eu lieu durant les dix années qui se sont écoulées depuis que la dernière édition a vu le jour, nul doute ne saurait subsister. Le Royaume de Pologne, la Pologne du Congrès, s’est transformé en une vaste région industrielle de l’empire de Russie. Tandis que la grande industrie russe est dispersée dans maints endroits, une partie tout près du golfe de Finlande, une autre dans la région centrale (Moscou, Vladimir), la troisième sur les côtes de la mer Noire et de la mer d’Azov, etc., l’industrie polonaise se trouve concentrée sur une étendue relativement faible et éprouve aussi bien les avantages que les inconvénients de cette concentration.

L’histoire des premières manifestations du 1er mai à partir de 1890 est donc essentielle pour comprendre Rosa Luxemburg.

Lisons à ce propos un extrait d’un ouvrage sur le 1er mai :

*****

Premier mai An I

En Pologne

Qu’il puisse se dérouler des manifestations simultanée à Paris, Rome et Berlin ce 1er mai 1890 était somme toute prévisible. Plus impressionnantes sont les manifestations qui se produisent dans des pays où toute agitation était sévèrement réprimée. Le délégué russe à la Conférence de Paris, Plékhanov, n’avait pas voté la motion sur le 1er mai, excipant qu’une pareille manifestation était impossible à réaliser, pour le moment, en Russie.

Or si effectivement il ne se produit aucune grève en Russie en 1890 (...) , il se produit cependant des manifestations dans l’Empire russe, en Pologne. Voici ce qu’écrit un ouvrier de Varsovie membre du Comité au journal « Le Combat » :

Des établissements tels que la fabrique d’Ortwein ont dû arrêter le travail, aucun ouvrier n’ayant répondu à l’appel du matin. Le troisième et le cinquième atelier du chemin de fer de la ligne Varsovie-Vienne ont dû fermer pour la même raison. Pas un seul ouvrier ne s’est présenté à la fabrique métallurgique du Sanschi et les vastes ateliers d’u exploiteurs aux allures patriotiques et philanthropiques ont été clairsemés.

Les troupes avaient été consignées. De nombreuses patrouilles sillonnaient les rues. Dans les quartiers populaires et sur la place Saint-Alexandre, des groupes se formèrent ; la foule semblait fort excitée par ces continuelles altercations avec la police et les patrouilles, il y a eu plusieurs arrestations.

Mais le fait culminant de cette journée c’est l’apparition de nombreuses proclamations, sorties d’une imprimerie clandestine. Depuis cinq ans déjà la presse clandestine s’était tue, toutes les imprimeries socialistes ayant été découvertes. Du Premier Mais date l’avènement d’une nouvelle presse libre.

La proclamation dont je parle plus haut invitait les ouvriers à manifester leur solidarité internationale. Des proclamations en langue allemande parues dans la même imprimerie ont été distribuées aux ouvriers allemands, les invitant à se joindre à leurs frères polonais.

*****

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par les responsables.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.