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1649 : les révolutions de France et d’Angleterre

17 novembre 2015, 07:30

Ainsi la haine contre le ministre, appuyée de l’amour du bien public, menaçait la cour d’une révolution. La reine céda ; elle offrit de casser les intendants, et demanda seulement qu’on lui en laissât trois : elle fut refusée.
(20 août 1648) Pendant que ces troubles commençaient, le prince de Condé remporta la célèbre victoire de Lens, qui mettait le comble à sa gloire. Le roi, qui n’avait alors que dix ans, s’écria : " Le parlement sera bien fâché. " Ces paroles faisaient voir assez que la cour ne regardait alors le parlement de Paris que comme une assemblée de rebelles.
Le cardinal et ses courtisans ne lui donnaient pas un autre nom. Plus les parlementaires se plaignaient d’être traités de rebelles, plus ils faisaient de résistance.
La reine et le cardinal résolurent de faire enlever trois des plus opiniâtres magistrats du parlement, Novion Blancménil, président qu’on appelle à mortier, Charton, président d’une chambre des enquêtes, et Broussel, ancien conseiller-clerc de la grand’ chambre.
Ils n’étaient pas chefs de parti, mais les instruments des chefs. Charton, homme très borné était connu par le sobriquet de président Je dis ça, parce qu’il ouvrait et concluait toujours ses avis par ces mots. Broussel n’avait de recommandable que ses cheveux blancs, sa haine contre le ministère, et la réputation d’élever toujours la voix contre la cour sur quelque sujet que ce fût. Ses confrères en faisaient peu de cas, mais la populace l’idolâtrait.
Au lieu de les enlever sans éclat dans le silence de la nuit, le cardinal crut en imposer au peuple en les faisant arrêter en plein midi, tandis qu’on chantait le Te Deum à Notre-Dame pour la victoire de Lens, et que les suisses de la chambre apportaient dans l’église soixante et treize drapeaux pris sur les ennemis. Ce fut précisément ce qui causa la subversion du royaume. Charton s’esquiva ; on prit Blancménil sans peine ; il n’en fut pas de même de Broussel. Une vieille servante seule, en voyant jeter son maître dans un carrosse par Comminges, lieutenant des gardes du corps, ameute le peuple ; on entoure le carrosse ; on le brise ; les gardes françaises prêtent main-forte. Le prisonnier est conduit sur le chemin de Sedan. Son enlèvement, loin d’intimider le peuple, l’irrite et l’enhardit. On ferme les boutiques, on tend les grosses chaînes de fer qui étaient alors à l’entrée des rues principales ; on fait quelques barricades, quatre cent mille voix crient : " Liberté " et " Broussel ! "

Voltaire

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