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Chronologie syndicale des luttes ouvrières en France et dans le monde - Les raisons de la défaite -

6 mai 2021, 06:09, par lucifer

On pouvait lire en mai 2016 :

Que crèvent les bureaucraties syndicales et que vive l’auto-organisation ouvrière des comités !

26 avril 2016 : les salariés de la SNCF sont en grève à l’appel de plusieurs organisations syndicales pour protester contre la dégradation à venir de leurs conditions de travail d’exploitation, induite par l’ouverture à la concurrence du secteur ferroviaire.

La veille, des intermittents du spectacle avaient manifesté afin de protester contre la destruction programmée de leur régime d’assurance-chômage.

Jeudi 28 avril, ce sont, cette fois, les salariés du secteur public (et ceux de certaines boîtes privées) qui sont conviés – par une intersyndicale comprenant la CGT, FO, Solidaires et la FSU – à une grève et un défilé (bon enfant, si possible) contre la loi "Travaille !".

À contrecoeur, poussés par leur base et devancés par l’initiative personnelle de trois de leurs adhérents, les syndicats précités avaient déjà été contraints d’appeler à manifester le 9 mars. Puis à appeler à la grève le 31 mars et le 28 avril et à des manifestations (sans grève) le 9 avril.
Ces diverses mobilisations ont un point commun : loin de s’inscrire dans la durée, elles sont hâchées menu en tranches de 24 heures maximum. Il est donc sûr qu’aucune d’entre elles ne débouchera, en l’état, sur le retrait des mesures contestées (sans même parler de toutes les autres, qui mériteraient également d’être combattues).

Il en sera ainsi tant que le rythme des luttes et leurs modalités seront décidés, non pas par les travailleurs eux-mêmes, mais par "leurs" syndicats. Ces derniers mettent sciemment en oeuvre des stratégies d’éparpillement des luttes, de sabotage des grèves, de démoralisation voire d’intimidation des travailleurs, etc.

Ainsi, bien des salariés, dès lors qu’ils sont un tant soit peu combatifs, ont déjà fait l’expérience de ce genre de situations confinant à l’absurde : devoir insister auprès d’une union locale pour que celle-ci relaye un banal courriel d’appel à la grève provenant pourtant de son syndicat national (est-ce si difficile que ça, de cliquer sur "envoyer", vraiment ?) ; lire dans une prose syndicale que l’appel à la grève pour telle ou telle date n’est "pas ferme" (mais que signifie donc un appel mou à la grève ?) ; se voir reprocher de trop solliciter le syndicat (il y a pourtant pléthore de permanents syndicaux... sont-ils tous des emplois fictifs ?).

L’utilisation de ce genre de procédés dilatoires est assez ouvertement assumée par les syndicats, au point que leurs bureaucrates se payent le luxe de les présenter en temps réel à la presse bourgeoise. Ainsi, le bureaucrate en chef de la CGT-cheminots déclarait-il il y a quelques jours :
"Une manifestation nationale, sans grève, est aussi proposée le 10 mai (NDLR : qui, à part un permanent syndical, peut ne pas voir le problème à manifester sans faire grève un jour en pleine semaine ?) [...] Un mouvement plus ferme (NDLR : moins mou, moins tendre, donc ?) pourrait (NDLR : notez l’emploi du conditionnel) être envisagé si après ces séquences il n’y a pas de réponse concrète à notre demande d’ouverture de réelles négociations prenant en compte les propositions alternatives des organisations syndicales."1

En matière de crapulerie syndicale, ce bureaucrate cégétiste n’a, certes, rien à envier à ses homologues jaune vif de la CFDT et de l’UNSA. Ces derniers ont ainsi fait de la séparation des différentes luttes en cours une condition sine qua non de leur participation à la grève du 26 avril à la SNCF2. La cégète a accepté cette exigence. Quand, toute honte bue, le bureaucrate précité de la CGT ose évoquer le 26 avril comme "une nouvelle étape de la mobilisation"3, il faut donc évidemment traduire ainsi : "une nouvelle étape de la démobilisation".

Dans les ministères économiques et financiers4, où les taux de grévistes peuvent historiquement être élevés, l’actuelle tambouille syndicale est tout aussi indigeste. Pour les petits et grands bureaucrates, il semble surtout urgent d’en faire moins que le minimum (dont on dit pourtant souvent qu’il est "syndical") en terme d’information des agents... En vertu de quoi ceux-ci sont encore nombreux à ignorer que, s’ils souhaitent se mettre en grève, ils sont couverts par plusieurs préavis (CGT et Solidaires notamment) déposés mi-mars et courant – a minima – jusqu’à mi-mai. Ces préavis n’ont, il est vrai, guère été relayés par les permanents, ni même parfois par les syndicalistes-de-base (si chers à tous ces dinosaures trotskystes, qui croient encore à une possible gauchisation des syndicats comme d’autres croiraient au Père Noël). Il faut certainement en conclure que lesdits préavis de grève ne sont "pas fermes", voire carrément très tendres. Ici comme partout ailleurs, la riposte des travailleurs devra, elle, être saignante si elle se veut victorieuse... Saignante ET antisyndicale.

Pour aller plus loin :

Benjamin Péret & Grandizo Munis, Les syndicats contre la révolution (1952)

CORALE, Capitalisme, syndicalisme, même combat (1974)

James Schenkel, Bureaucrates et manipulateurs, du balai ! (1984)

Références :

[1] http://www.liberation.fr/france/2016/04/24/greve-a-la-sncf-mardi-les-previsions-de-trafic_1448350

[2] Ibid.

[3] http://www.ouest-france.fr/economie/transports/sncf/sncf-appel-la-greve-de-tous-les-syndicats-mardi-26-avril-4171276

[4] Pourtant stratégiquement intéressants en cela qu’ils chapeautent des administrations exerçant des missions essentielles pour tout État, à commencer par la collecte des taxes et impôts... pecunia nervus belli

https://garap.org/communiques/communique48.php

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