Accueil > ... > Forum 5066

Qui était Che Guevara ?

28 octobre 2010, 16:24, par extraits CCI

Cette guérilla n’est pas du tout l’expression d’une quelconque révolte paysanne, encore moins de la classe ouvrière. Elle est l’expression militaire d’une fraction de la bourgeoisie cubaine qui veut renverser une autre fraction pour prendre sa place. Il n’y a aucun "soulèvement populaire" dans la prise de pouvoir de la guérilla castriste. Elle se présente, comme souvent en Amérique latine, sous la forme de la substitution d’une clique militaire par une autre formation armée dans laquelle les couches exploitées et miséreuses de la population de l’île, enrôlées ou non par les combattants putschistes de la guérilla, ne jouent pas un rôle important, sinon d’acclamer les nouveaux maîtres du pouvoir. Face à la résistance plutôt faible de la soldatesque de Batista, Guevara apparaît comme un intrépide guérillero, dont la détermination et le charisme grandissant apparaissent rapidement susceptibles de faire de l’ombre à son maître Fidel. Après la victoire sur Batista, Fidel Castro va charger le Che de mettre en place les "tribunaux révolutionnaires", une mascarade sanglante dans la meilleure tradition du règlement des comptes entre fractions des différentes bourgeoisies nationales, en particulier en Amérique latine. Che Guevara prend son rôle vraiment à cœur, par conviction et avec zèle, en mettant en place une justice "populaire" où, en guise de défoulement collectif, on juge les anciens tortionnaires de Batista, mais aussi on prend du "tout venant" sur simple dénonciation. D’ailleurs, Guevara s’en revendiquera plus tard à l’ONU, en réponse à des représentants latino-américains, bonnes âmes "démocratiques" qui s’offusquent de ces méthodes, en disant : "Nous avons fusillé, nous fusillons et nous continuerons à fusiller tant que ce sera nécessaire". Ces pratiques n’ont rien à voir avec la défense maladroite d’une quelconque justice révolutionnaire. Ce sont là, répétons-le, les méthodes typiques d’une fraction de la bourgeoisie qui a pris le dessus sur une autre par la force des armes.

Alors, on peut toujours s’identifier en rêve au "héros" austère de la Sierra Maestra, au "guérillero héroïque" qui mourra quelques années plus tard dans la montagne bolivienne mais, dans le monde réel, il n’a en fait tenu qu’un rôle d’exécuteur de basses oeuvres dans la mise en place d’un régime qui n’a de communiste que le nom.
Che Guevara : internationaliste ?

Tu nous dis : "l’internationalisme du Che est hors de doute" et "Lors du second séminaire de solidarité afro-asiatique, le Che critique sans ambages les positions conservatrices et exploiteuses de l‘URSS" pour affirmer enfin "le Che sera amené fort logiquement à se départir du modèle social-impérialiste de l‘URSS".

Le régime nationaliste de Castro s’est vite enrobé du qualificatif "communiste", autrement dit, ce régime s’est rallié… au camp impérialiste régenté par l’URSS. Cuba étant située à quelques encablures des côtes américaines, ceci ne pouvait évidemment qu’inquiéter la tête du bloc de l’Ouest. Le processus de stalinisation de l’île, avec une présence importante de personnel civil, militaire et des services secrets des pays du bloc de l’Est, trouvera son point d’orgue en 1962 au moment de "la crise des missiles".

Dans ce processus, Che Guevara, maintenant ministre de l’Industrie (1960-61), pour souder la nouvelle alliance avec le "camp socialiste", est envoyé par Castro dans les pays de ce camp, où il se répand en discours dithyrambiques sur l’URSS : "ce pays qui aime si profondément la paix", "où règne la liberté de pensée", "la mère de la liberté"… Il célèbre tout autant "l’extraordinaire" Corée du Nord ou la Chine de Mao où "tout le monde est plein d’enthousiasme, tout le monde fait des heures supplémentaires" et ainsi de suite pour l’ensemble des pays de l’Est : "les réalisations des pays socialistes sont extraordinaires. Il n’y a pas de comparaison possible entre leurs systèmes de vie, leurs systèmes de développement et ceux des pays capitalistes". Un véritable VRP du modèle stalinien ! Nous reviendrons plus loin sur le "désamour" de Guevara avec l’URSS. Mais, contrairement à ce que tu affirmes, le Che n’a jamais émis le moindre doute de principe sur le système stalinien. Pour lui, l’URSS et son bloc étaient le camp "socialiste, progressiste" et sa propre lutte s’intégrait pleinement dans celle du bloc russe contre le bloc occidental. Le mot d’ordre lancé par Guevara "Créer un, deux, plusieurs Vietnams", n’est pas un mot d’ordre "internationaliste" mais bel et bien nationaliste et favorable au bloc russe ! Son critère réel n’est pas le changement social, mais la haine de l’autre tête de bloc, les États-Unis.

En effet, après la Seconde Guerre mondiale, le monde s’est trouvé divisé en deux blocs antagonistes, l’un régenté par la puissance américaine, l’autre par l’URSS. La "libération nationale" s’avéra alors une mystification idéologique parfaite pour justifier régulièrement l’embrigadement militaire des populations. Dans ces guerres, ni la classe ouvrière ni les autres classes exploitées n’avaient rien à gagner, servant de masse de manœuvre pour les différentes fractions de la classe dominante et de leurs parrains impérialistes. Le partage du monde en deux blocs impérialistes après les accords de Yalta a signifié que toute sortie d’un bloc ne pouvait signifier que la chute dans le bloc adverse. Et, justement, il n’y a pas de meilleur exemple que celui de Cuba : ce pays est passé de la dictature corrompue de Batista, sous la coupe directe de Washington, de ses services secrets et de toutes sortes des mafia, à la mainmise du bloc stalinien. L’histoire de Cuba est un concentré de l’histoire tragique des "luttes de libération nationale" pendant près d’un demi-siècle !

Alors, à la base, avant de dire quand et comment Guevara s’est prétendument plus ou moins "écarté" de l’URSS, il faut bien être clair sur la nature de l’URSS et de son bloc. Derrière la défense d’un Che Guevara révolutionnaire, il y a l’idée que l’URSS, peu ou prou, qu’on le veuille ou non, malgré ses défauts… était le "bloc socialiste, progressiste". C‘est là le plus grand mensonge du 20e siècle. Il y a bien eu une révolution prolétarienne en Russie, mais elle a été défaite. La forme stalinienne de la contre-révolution s’est donnée un mot d’ordre : la "construction du socialisme en un seul pays", mot d’ordre se situant à l’exact opposé du socle naturel et fondamental du marxisme. Pour le marxisme, "les prolétaires n’ont pas de patrie"3 ! C’est cet internationalisme, bien réel celui-là, qui a servi de boussole à la vague révolutionnaire mondiale qui a débuté en 1917 et à tous les révolutionnaires de l’époque, de Lénine et des bolcheviks à Rosa Luxemburg et aux Spartakistes4. L’adoption aberrante de cette "théorie" d’une "patrie socialiste" à défendre a eu pour corollaire le recours systématique à une méthode bourgeoise : la terreur et le capitalisme d’Etat, ce talon de fer, expression la plus totalitaire et la plus féroce de l’exploitation capitaliste ! CCI

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.