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Lénine a été empoisonné par Staline....

15 juillet 2014, 07:57, par R.P.

En avril 1925, je fus relevé du poste de commissaire à la Guerre. Mon successeur, Frounzé, était un vieux révolutionnaire qui avait passé de nombreuses années aux travaux forcés en Sibérie. Il n’était pas destiné à occuper longtemps ce poste, seulement sept mois. En novembre 1925, il mourut sous le bistouri d’un chirurgien. Durant les mois précédents, il avait manifesté trop d’indépendance dans la défense de l’armée contre la surveillance de la Guépéou ; c’est le crime pour lequel, douze ans plus tard, Toukhatchevsky fut fusillé. Bajanov a suggéré que Frounzé était au centre d’une conspiration militaire ; c’est une sottise fantastique. Dans le conflit qui dressait Zinoviev et Kaménev contre Staline, Frounzé était contre Staline. L’opposition du nouveau commissaire à la Guerre était pleine d’énormes risques pour le dictateur. Vorochilov, docile et d’esprit borné, lui semblait devoir être un instrument bien plus sûr. Des rumeurs se répandirent dans le Parti que la disparition de Frounzé était nécessaire à Staline : d’où sa mort soudaine.

Sur la base des données dont on peut disposer, les choses se seraient passées de la sorte : Frounzé souffrait d’ulcères à l’estomac ; mais, comme ses médecins personnels étaient convaincus que son cœur ne supporterait pas les effets du chloroforme, Frounzé était résolument hostile à une opération. Staline chargea alors un médecin du Comité central, c’est-à-dire un homme à lui, de réunir des médecins pour une consultation, lesquels conclurent naturellement à l’intervention chirurgicale ; le Bureau politique confirma cette décision. Frounzé dut se soumettre, c’est-à-dire aller mourir sous le narcotique.

Les circonstances de la mort de Frounzé eurent un écho dans la littérature. [Boris Pilniak : Histoire de la lune non éteinte. Staline ordonna la confiscation immédiate de la revue, et son auteur connut la défaveur officielle. Pilniak dut, plus tard, reconnaître publiquement son « erreur ». En outre Staline considéra nécessaire de faire publier des documents propres à établir indirectement son innocence. Il est difficile de dire ce qui se passa exactement, mais le fait même de la suspicion est significatif. Il montre qu’à la fin de 1925 le pouvoir de Staline était déjà si grand qu’il pouvait compter sur un groupe de médecins dociles disposant de chloroforme et d’un bistouri de chirurgien. Pourtant, à cette époque, à peine un Russe sur cent connaissait son nom. - rapporté par Léon Trotsky

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