Quand la « Civilisation grecque » n’était pas… grecque !
11 février 2022, 22:43
Je suis tombé un peu par hasard sur cette page et je ne fais qu’y passer mais je ne peux pas m’empêcher de répondre à la thèse qu’elle développe et qui ne me paraît pas sérieuse. Elle est fondée sur une série de contre-sens.
Par exemple « Le théâtre minoen (aucune origine grecque) a largement précédé le théâtre grec » : qu’est-ce qui permet de l’affirmer ? Sûrement pas la photo. On a retrouvé une esplanade avec des gradins mais rien ne prouve que se soit un théâtre. On y assistait peut-être à des combats de coqs ou des exécutions capitales. Plus vraisemblablement à des cérémonies religieuses comme en Grèce à l’origine puisque le théâtre est issu de telles cérémonies en l’honneur de Dionysos. Et même si s’en était un, en quoi cela diminuerait-il la valeur des chefs d’oeuvre d’Eschyle ou de Sophocle qui sont la véritable raison pour laquelle on admire le théâtre grec.
« Les Grecs n’ont pas inventé l’astronomie » : non mais Ératosthène a évalué avec précision la circonférence de la Terre en mesurant l’amplitude d’un arc de méridien entre Syène et Alexandrie par simple calcul trigonométrique ainsi que l’inclinaison de l’écliptique sur l’équateur. D’une manière générale, les civilisations antérieures ont borné leur science à de simples observations (pour des prévisions astrologiques en ce qui concerne les astres) et des procédés opératoires strictement utilitaires. Seuls les Grecs dans l’Antiquité ont su pratiquer une science spéculative c’est-à-dire une science réelle.
« Mycènes, cité de Grèce avant les envahisseurs "Grecs" qui ont tout emprunté à la civilisation mycénienne qui les avait précédés ». Faux ! Les Mycéniens étaient des grecs qui s’exprimaient en grec comme l’a montré le déchiffrement du linéaire B . On peut cependant dire qu’eux-mêmes ont imité la civilisation des Minoens.
« Troie, violemment écrasée par les Grecs » : il reste à prouver que les Troyens eux-mêmes n’en étaient pas. Le nom d’un de leurs rois retrouvé dans les archives Hittites était Alaksandu, c’est-à-dire Alexandre, un nom complètement grec, le même qui désignait Paris, le fils de Priam, dans l’Iliade qui ne montre par ailleurs aucune différence de civilisation entre Achéens et Troyens. Les autres peuples d’Anatolie dominant à cette époque étaient au moins indo-européens. Et les civilisations qui ne l’étaient pas à l’époque étaient-elles plus douces ?
« Les déesses des civilisations matriarcales néolithiques et bronze ancien de la mer Egée s’opposent au patriarcat des guerriers envahisseurs grecs. » C’est la théorie caricaturale de l’archéologue féministe Marija Gimbutas qui est aujourd’hui complètement abandonnée. Rien ne prouve que les sociétés néolithiques étaient matriarcales. Elles adoraient une ou plusieurs déesses (en tant que mère, c’est-à-dire génératrice des êtres vivants, végétaux et animaux, qui assuraient leur subsistance, ce qui n’est pas vraiment la perspective féministe actuelle de la place qui revient à la femme), mais il n’y a rien à dire de plus concernant l’organisation sociale. Ce n’est pas parce que Marseille est dominée par Notre-Dame de la garde, que les habitants y vivent selon un système matriarcal ni que le christianisme fait de Marie l’équivalent du Christ et de Dieu le père.
Je vais m’arrêter, même s’il serait facile de continuer, et conclure en disant que ce n’est pas nier les civilisations antérieures que de reconnaître la valeur de celle des Grecs. j’ai parlé d’Eschyle, Sophocle et Ératosthène mais il y aurait tant d’autres à citer. La démocratie était réelle dans leurs cités (et même supérieure à la nôtre puisque les citoyens votaient directement) quand d’autres peuples ne connaissaient que l’arbitraire de rois absolus. La Crète minoenne que l’on présente volontiers comme pacifique parce qu’on n’y retrouve pas de murailles autour des villes et des palais, laisse plutôt penser qu’il n’y en avait pas besoin parce que la société y était totalitaire. Il faut se garder de juger trop vite et même de juger tout court. Chaque civilisation a sa part plus ou moins grande de réussite et sa part d’ombre. L’Histoire est ce qu’elle est, elle doit être étudiée sans jugements de valeur anachroniques ni d’oppositions seulement utiles à des enjeux actuels.
Je suis tombé un peu par hasard sur cette page et je ne fais qu’y passer mais je ne peux pas m’empêcher de répondre à la thèse qu’elle développe et qui ne me paraît pas sérieuse. Elle est fondée sur une série de contre-sens.
Par exemple « Le théâtre minoen (aucune origine grecque) a largement précédé le théâtre grec » : qu’est-ce qui permet de l’affirmer ? Sûrement pas la photo. On a retrouvé une esplanade avec des gradins mais rien ne prouve que se soit un théâtre. On y assistait peut-être à des combats de coqs ou des exécutions capitales. Plus vraisemblablement à des cérémonies religieuses comme en Grèce à l’origine puisque le théâtre est issu de telles cérémonies en l’honneur de Dionysos. Et même si s’en était un, en quoi cela diminuerait-il la valeur des chefs d’oeuvre d’Eschyle ou de Sophocle qui sont la véritable raison pour laquelle on admire le théâtre grec.
« Les Grecs n’ont pas inventé l’astronomie » : non mais Ératosthène a évalué avec précision la circonférence de la Terre en mesurant l’amplitude d’un arc de méridien entre Syène et Alexandrie par simple calcul trigonométrique ainsi que l’inclinaison de l’écliptique sur l’équateur. D’une manière générale, les civilisations antérieures ont borné leur science à de simples observations (pour des prévisions astrologiques en ce qui concerne les astres) et des procédés opératoires strictement utilitaires. Seuls les Grecs dans l’Antiquité ont su pratiquer une science spéculative c’est-à-dire une science réelle.
« Mycènes, cité de Grèce avant les envahisseurs "Grecs" qui ont tout emprunté à la civilisation mycénienne qui les avait précédés ». Faux ! Les Mycéniens étaient des grecs qui s’exprimaient en grec comme l’a montré le déchiffrement du linéaire B . On peut cependant dire qu’eux-mêmes ont imité la civilisation des Minoens.
« Troie, violemment écrasée par les Grecs » : il reste à prouver que les Troyens eux-mêmes n’en étaient pas. Le nom d’un de leurs rois retrouvé dans les archives Hittites était Alaksandu, c’est-à-dire Alexandre, un nom complètement grec, le même qui désignait Paris, le fils de Priam, dans l’Iliade qui ne montre par ailleurs aucune différence de civilisation entre Achéens et Troyens. Les autres peuples d’Anatolie dominant à cette époque étaient au moins indo-européens. Et les civilisations qui ne l’étaient pas à l’époque étaient-elles plus douces ?
« Les déesses des civilisations matriarcales néolithiques et bronze ancien de la mer Egée s’opposent au patriarcat des guerriers envahisseurs grecs. » C’est la théorie caricaturale de l’archéologue féministe Marija Gimbutas qui est aujourd’hui complètement abandonnée. Rien ne prouve que les sociétés néolithiques étaient matriarcales. Elles adoraient une ou plusieurs déesses (en tant que mère, c’est-à-dire génératrice des êtres vivants, végétaux et animaux, qui assuraient leur subsistance, ce qui n’est pas vraiment la perspective féministe actuelle de la place qui revient à la femme), mais il n’y a rien à dire de plus concernant l’organisation sociale. Ce n’est pas parce que Marseille est dominée par Notre-Dame de la garde, que les habitants y vivent selon un système matriarcal ni que le christianisme fait de Marie l’équivalent du Christ et de Dieu le père.
Je vais m’arrêter, même s’il serait facile de continuer, et conclure en disant que ce n’est pas nier les civilisations antérieures que de reconnaître la valeur de celle des Grecs. j’ai parlé d’Eschyle, Sophocle et Ératosthène mais il y aurait tant d’autres à citer. La démocratie était réelle dans leurs cités (et même supérieure à la nôtre puisque les citoyens votaient directement) quand d’autres peuples ne connaissaient que l’arbitraire de rois absolus. La Crète minoenne que l’on présente volontiers comme pacifique parce qu’on n’y retrouve pas de murailles autour des villes et des palais, laisse plutôt penser qu’il n’y en avait pas besoin parce que la société y était totalitaire. Il faut se garder de juger trop vite et même de juger tout court. Chaque civilisation a sa part plus ou moins grande de réussite et sa part d’ombre. L’Histoire est ce qu’elle est, elle doit être étudiée sans jugements de valeur anachroniques ni d’oppositions seulement utiles à des enjeux actuels.