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Haïti : rien n’est réglé

4 avril 2010, 09:19, par Robert Paris

En Haïti, les sinistrés du stade bientôt expulsés

Le plus grand stade d’Haïti accueille 1500 familles, rescapées du séisme. Le gouvernement veut les évacuer pour réhabiliter la structure et reprendre le championnat au plus vite. Sans proposer, pour le moment, de solution de relogement aux sinistrés.
A Port-au-Prince, on dénombre quelques 400 camps de réfugiés.

A Port-au-Prince, on dénombre quelques 400 camps de réfugiés.

Sylvio Cator était, dans les années 40, une star haïtienne du saut en longueur. Il a donné son nom au plus grand stade du pays (15 000 places), à Port-au-Prince.

Dès le 12 janvier au soir, quelques heures après le séisme qui a dévasté la ville, des centaines de sans-abri ont élu domicile sur la pelouse synthétique et sur le parking qui encercle le bâtiment, dont la structure a tenu malgré quelques inquiétantes fissures.

Aujourd’hui, 1500 familles, soit environ 6000 personnes, vivent là. Ceux qui n’ont pas récupéré de tente auprès des ONG se contentent de bâches en plastique, de bouts de tôle, de draps ou de rideaux pour s’abriter. Des ONG ont installé un réservoir d’eau dans l’un des buts, ainsi que quelques latrines et des douches. Parfois, elles distribuent de la nourriture.

Des enfants jouent au cerf-volant et à la corde à sauter – l’école devrait reprendre le 5 avril, sans certitude - pendant que les femmes cuisinent au pied des gradins. Ici, les gens se sentent en sécurité : les lumières du stade restent allumées jusqu’à 22 heures et les tribunes font écran au brouhaha et aux violences de la rue.

Cette vie précaire va disparaitre dans les jours ou les semaines qui viennent. Jeudi dernier, les habitants du stade ont appris que la Fédération haïtienne de football, appuyée par la Fifa et le gouvernement, a demandé leur évacuation. "Il faut que le championnat reprenne, il faut remettre les jeunes au sport !", a justifié Evans Lescouflair, ministre de la Jeunesse et des Sports, interrogé par Metro.

Thierry Regenass, directeur de la division des associations nationales de la Fifa, ne dit pas autre chose : "Les Haïtiens sont fous de foot, c’est même l’une des choses qui fonctionnent le mieux dans le pays (bien que le pays ne soit pas qualifié pour la coupe du monde, ndlr). Le foot apporte de l’espoir et de la joie et permet aux Haïtiens de se changer les idées".

La Fifa a débloqué 3,25 millions de dollars pour financer la reconstruction et la réhabilitation des structures sportives endommagées par le séisme, dont le stade Sylvio Cator. Problème : où vont aller ses occupants, alors même que l’espace à Port-au-Prince est saturé ? "On réfléchit à une solution de relogement", indique le ministre, évasif.

Pour Amal, 36 ans, "c’est bien de jouer au foot, ça calme les nerfs. Mais où je vais aller ? Sous les décombres de ma maison ?" Et d’ajouter, agacé et désespéré : "avant d’évacuer les gens, le gouvernement devrait commencer par reconstruire des logements. Si la police est appelée pour nous déloger, il risque d’y avoir des émeutes".

Zacary vit avec sa femme et ses quatre enfants sur la pelouse, dans une tente minuscule. Il dort sur une planche en bois posée sur des briques. Il refuse de quitter cet abri sans solution d’hébergement acceptable. "Nous sommes des sinistrés. C’est vrai, notre place n’est pas au stade. Mais nous ne pouvons pas partir tant que l’Etat ne nous aura pas trouvé un autre endroit avec un accès à l’eau et à l’électricité. Je suis prêt à mourir plutôt que de sortir d’ici pour aller nulle part", affirme-t-il, déterminé.

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