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La crise grecque, une pécadille qui cache mal la catastrophe de la crise chinoise

13 septembre 2015, 18:16, par F. Kletz

Déjà, il y a 10 ans, on savait que la croissance à 2 chiffres était probablement un mythe, quelque chose de surévalué par les statistiques officielles chinoises. Étonnant tout de même que les spéculations aient pu se réaliser sur des doutes qui durent depuis si longtemps... On croirait que se joue là le scénario des spéculations à la Bourse de New York sur de soi-disant terrains à bâtir qui étaient encore des marécages bien loin d’être assainis, sans parler d’être viabilisés.

Vous vous souvenez ? ce fut en Floride autour de 1929... ou juste après.

Peut-on connaître la véritable croissance de la Chine ? (Aurel BGC)
Boursorama le 11/09/2015 à 17:41

La croissance chinoise n’est probablement pas de 7%, mais elle n’est sans doute pas non plus de seulement 2 ou 3% comme cela a pu être dit.

Depuis cet été, les investisseurs doutent des statistiques de croissance fournies par la Chine. Ces chiffres sont en effet à prendre avec distance, remarque Aurel BGC, qui insiste néanmoins sur les pièges que représentent d’autres indicateurs que l’on pourrait croire plus fiables.

On n’a pas fini de parler des incertitudes sur l’économie chinoise, même si les investisseurs ont été moins préoccupés par ce sujet cette semaine qu’au cours du mois d’août.

Revenant succinctement sur la panique du mois dernier observée sur les marchés, Christian Parisot, chef économiste d’Aurel BGC, résume : « le problème, c’est qu’il y a eu des multinationales de secteurs cycliques qui ont publié de mauvaises performances sur la Chine concernant leur activité du second trimestre. Ça a été un élément de surprise, alors que jusqu’ici on savait que la croissance allait se tasser, mais pas avec un ralentissement d’activité à deux chiffres ».

Il n’en a pas fallu plus pour que la communauté financière se mette brutalement à douter des chiffres de croissance affichés par les autorités chinoises.
Comment sont obtenues les statistiques officielles chinoises ?

Avant de critiquer les statistiques chinoises, encore faut-il savoir comment celles-ci sont calculées. Aurel BGC s’est penché en détails sur ce sujet.

« Les statistiques d’activité chinoises sont disponibles très rapidement, peu de temps après la fin de chaque année calendaire, et elles sont peu révisées par la suite », observe Christian Parisot. Ceci peut de prime abord éveiller le doute, alors que les économies occidentales ont souvent besoin de beaucoup de temps et de plusieurs révisions des chiffres annoncés pour aboutir aux estimations d’activité les plus fiables.

Pourtant, les relevés statistiques en Chine sont correctement organisés. « Il y a trois sources de statistiques en Chine : le Bureau national de statistiques (BNS), le ministère des finances et la Banque centrale », explique Christian Parisot. « Cela représente en réalité beaucoup de statistiques, car chaque division territoriale publie très régulièrement ses propres chiffres à l’échelle locale, qui sont ensuite agrégés ». Cette méthode n’est pas critiquable en elle-même, bien au contraire.

Néanmoins, « le problème, ce sont les fausses déclarations », explique Christian Parisot. « Les statistiques obtenues dépendent de la comptabilité privée. Or, certaines entreprises peuvent volontairement sous-estimer leur production pour payer moins d’impôts. D’autres, au contraire, peuvent gonfler leurs chiffres pour qu’ils semblent plus satisfaisants. Tout cela n’est pas assez contrôlé à cause du manque d’audit externe. Pour les grandes entreprises publiques, il y a aussi le problème des objectifs à tenir, ce qui peut les pousser à afficher en fin d’exercice des résultats en accord avec les objectifs définis par les autorités centrales, même si les chiffres sont faux ou pas encore certains ». Un constat préoccupant, même si « il ne faut pas exagérer, tout n’est pas faux non plus », remarque le chef économiste d’Aurel BGC.

Les problèmes mentionnés « se retrouvent bien sûr ailleurs qu’en Chine à différents degrés, simplement la marge d’erreur est plus élevée en Chine que dans beaucoup d’autres pays », ajoute-t-il.
Très difficile d’estimer la « véritable croissance »

Même si ce problème n’est pas une nouveauté, les doutes apparus cet été sur l’industrie chinoise ont poussé de nombreux commentateurs à affirmer que les chiffres réels de croissance seraient très inférieurs à ceux publiés par les autorités chinoises. Une surenchère a pu s’observer en termes de pessimisme dans les prévisions, certains allant jusqu’à parler d’une croissance réelle chinoise de 2 ou 3% au lieu des 7% officiels pour 2015, sans forcément justifier ces analyses de manière convaincante. D’autres sources, comme la société de gestion Edmond de Rothschild AM, estiment plutôt une croissance réelle de 6%, moins bonne qu’affiché, mais néanmoins du même ordre de grandeur.

Les indices PMI de Markit (pour l’industrie et les services), qui ont été très surveillés par les investisseurs cet été, et qui semblent désormais être considérés comme plus fiables que les chiffres chinois, ont pourtant aussi leurs torts. Ces données sont basées sur des enquêtes d’opinions auprès de directeurs d’achats, et ceux-ci peuvent être plus ou moins optimistes en fonction du discours ambiant. Christian Parisot rappelle ainsi que « ces données d’enquête sont très volatiles et peu prospectives ». Par exemple, la fiabilité des indices PMI de la France est souvent très critiquée.

Certains économistes ont essayé dernièrement de se baser sur d’autres types d’indicateurs pour estimer le développement de la Chine. Certains utilisent par exemple la consommation d’électricité du pays, dont les chiffres ne peuvent pas être « truqués ». Il se trouve qu’on observe en Chine une croissance relativement faible de la production électrique en rythme annuel. Argument imparable pour contester les statistiques officielles ? Non, explique Christian Parisot, qui affirme que la consommation électrique d’un pays n’est pas proportionnelle à son développement global (la consommation d’électricité est trop influencée par l’industrie par rapport aux services).

En somme, le principal problème en Chine vient du fait qu’« on a du mal à estimer la croissance des services », explique le chef économiste d’Aurel BGC. On sait que l’industrie ralentit, et cela est déjà difficile à estimer avec précision, mais on ne sait pas ce qu’il en est vraiment des services, qui ne donnent a priori pas de signe particulier de faiblesse. Par ailleurs, ces derniers représentent désormais presque 50% du PIB du pays, contre 40% pour l’industrie. Autant dire que le ralentissement de l’industrie ne veut pas forcément dire que l’activité chinoise ralentit fortement dans son ensemble, comme certains l’estiment.

Aucun indicateur ne permet en réalité de trancher le débat, et c’est précisément ce qui a inquiété soudainement les investisseurs cet été. Le sujet restera suivi avec grande attention dans les prochaines semaines.

X. Bargue (redaction@boursorama.fr)

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