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05- Politique des blocs, fausses révolutions et faux socialismes

SOULEVEMENT OUVRIER
CONTRE LE REGIME FAUSSEMENT SOCIALISTE DE POLOGNE
(à Poznan en 1956)

Le soulèvement de Poznań en 1956 est connu en Pologne sous l’appellation de „juin de Poznań” (polonais : Poznański Czerwiec). C’est la première révolte du peuple polonais contre le régime stalinien de la République "Populaire" de Pologne.
Partie d’une grève des travailleurs, elle se transforme en un affrontement avec l’armée polonaise. Les manifestations débutent le 28 juin 1956 à Poznań, aux usines Cegielski et se dirigent vers le centre ville. Une centaine de milliers de personnes s’étant rassemblées à proximité de l’immeuble de la Sécurité d’État (UB), les autorités chargent le général soviéto-polonais Stanisław Poplavski d’étouffer la manifestation avec 10 000 hommes de l’Armée Populaire de Pologne (LWP) et du Corps de Sécurité Intérieure (KBW), et l’appui de 400 tanks,. Au cours de cette opération, la troupe ouvre le feu sur les manifestants civils.

Avant 1989 : rien de communiste, ni démocratique, ni populaire

Ex-régimes communistes ? Rien n’est plus faux que cette caractérisation.

Les « Démocraties Populaires », comme on les a appelées, ont été mises en place à la suite de la deuxième guerre mondiale après leur occupation par l’armée russe, accompagnée d’abord de la bénédiction de l’impérialisme américain. Aucune révolution ouvrière, et même aucune intervention indépendante des masses n’a participé à leur construction. Leur classe ouvrière était la première à y être muselée. Elle n’y bénéficiait même pas du droit syndical et encore moins de droits politiques, le parti unique et le syndicat unique n’ayant de parti et de syndicat que le nom. Nombre d’anciens dirigeants syndicalistes, communistes et socialistes soupçonnés de velléités de militantisme indépendant furent jugés et fusillés pour « nationalisme ». Ces régimes firent en revanche longtemps la part belle aux anciennes classes dirigeantes, propriétaires terriens, noblesse et bourgeoisie. Les anciennes administrations, forces armées et policières furent maintenues autant que possible. L’armée soviétique n’avait nullement l’intention de bouleverser l’ordre politique et social.

Des régimes sortis des engrenages de la guerre froide

Loin d’être les nouveaux avant-postes de la révolution, ces États réactionnaires mais pro-russes résultaient donc d’un entente entre bureaucratie stalinienne et bourgeoisie occidentale face à la menace révolutionnaire de l’après guerre mondiale, selon le partage des tâches et des zones convenu à Yalta entre Staline, Roosevelt et Churchill. C’est en 1947 que cette belle entente contre la classe ouvrière s’est défaite et que l’accord entre gardes-chiourmes a fait place à la « guerre froide ». Le prolétariat n’étant plus directement menaçant, les États-Unis reprirent l’offensive diplomatique.

Avec le plan Marshall, les USA décidèrent d’offrir aux classes dirigeantes de l’Europe leur protection en même temps qu’une aide matérielle. La Russie riposta en faisant tomber le rideau de fer, mettant sous sa coupe exclusive des régimes qui, sinon, auraient rejoint le marché mondial impérialiste. L’URSS constitua son « glacis » : cela ne signifiait nullement un tournant vers le socialisme, et surtout pas une amélioration du sort de la classe ouvrière. Les répressions violentes contre les travailleurs de Tchécoslovaquie et d’Allemagne de l’Est en 1953, de Hongrie ou de Pologne en 1956 devaient amplement le montrer.

Par la suite, l’impérialisme continua d’exercer une pression permanente sur la Russie et sur ces pays dans le cadre de la politique des blocs, sans d’ailleurs chercher vraiment à les récupérer. Les relations économiques et financières de l’Est avec les pays impérialistes amenèrent les Démocraties Populaires sous-développées à dépendre de plus en plus des prêts des banques occidentales. Elles furent frappées elles aussi par la crise de la dette. [1] Seule la pression russe, et non la volonté de la population (que ces régimes dictatoriaux se gardaient bien de consulter), les empêchèrent de revenir vers l’Europe occidentale.

Cette « ruée vers l’Ouest » restait pourtant le projet fondamental des classes privilégiées, et les dirigeants de l’Est essayèrent à plusieurs reprises de la faciliter. C’était aussi l’objectif que beaucoup d’opposants politiques parvinrent à donner aux mouvements sociaux. Pour autant, il n’y avait pas non plus de fatalité que la chute des régimes de l’Est ne mène à une révolution prolétarienne, comme l’ont montré la révolution ouvrière hongroise ou les mouvements prolétariens en Pologne en 1956 comme dans les années 70-80 (l’immense grève des chantiers navals de Gdansk, qui vit l’émergence du syndicat Solidarnosc, fut un coup sévère porté au régime polonais).

La fin de l’URSS libère... les bourgeoisies de l’Est

La voie vers le marché capitaliste était ouverte dès lors que la bureaucratie russe a relâché son étreinte pour se vendre elle-même à l’Ouest. La politique de Gorbatchev avait à peine donné son feu vert pour cette orientation que tous les pays de l’Est basculèrent sans résistance sérieuse, à l’initiative de la petite bourgeoisie et d’une fraction des dirigeants. La chute du mur de Berlin a symbolisé cet effondrement rapide, facile, apparemment très étonnant pour qui avait vécu l’époque des blocs ou le blocus de Berlin, qui semblait gros de menaces de guerre.

L’image que le passage des pays de l’Est au marché impérialiste a donnée au monde n’en a pas moins été celle d’une libération. Celle de la chute du mur de Berlin ou celle de l’effondrement de la dictature de Ceaucescu sur la Roumanie restent sous la forme de vastes manifestations de joie populaire. Mais si ces sentiments des populations étaient bien réels, le renversement de ces régimes par la volonté du peuple révolté en 1989, lui, est une mise en scène qui vaut bien le mensonge du choix des peuples de tomber sous la coupe stalinienne en 1944. Les décisions se sont prises ailleurs.