Accueil > 10 - Livre Dix : SYNDICALISME ET AUTO-ORGANISATION DES TRAVAILLEURS > Les syndicats américains cautionnent le capitalisme aux dépens des salariés

Les syndicats américains cautionnent le capitalisme aux dépens des salariés

samedi 13 juin 2009

Alors que l’accord de "désendettement" entre General Motors et Obama porte sur un nombre accru de suppressions d’emplois, sur de multiples sacrifices pour les salariés : sur l’emploi, sur la retraite, sur la couverture sociale…, le syndicat, l’Union of Auto Workers devient le principal actionnaire de GM et de Chrysler.

General Motors et le syndicat United Auto Workers (UAW) sont parvenus à un accord au sujet à la fois de modifications à apporter aux contrats de travail et de la restructuration d’une dette de 20 milliards de dollars que le constructeur doit au fonds d’assurance-maladie pour ses retraités, annonce UAW.

Le constructeur américain a obtenu, jeudi 21 mai, de nouvelles concessions syndicales, extrêmement importantes pour sa restructuration. L’UAW, le puissant syndicat automobile, a en effet conclu un accord de principe avec le Trésor américain et General Motors (GM) sur des modifications à la convention d’entreprise signée en 2007. Celles-ci concernent surtout les conditions de rémunération des adhérents à l’UAW ainsi que le fonds Veba, qui gère la couverture médicale. Aucun détail n’a été donné dans l’attente d’une ratification des salariés de GM adhérents à l’UAW. Selon la presse, l’accord avec l’UAW permettrait de réduire de 1 milliard de dollars (717 millions d’euros) par an ses coûts salariaux, grâce à de nouvelles baisses de salaire et de prestations sociales. Concernant Veba, GM pourrait réduire de 20 milliards à 10 milliards de dollars le solde qu’il doit encore lui verser. Ce financement se ferait pour moitié en actions.

La section locale 22 de l’UAW (Union of Automobile Workers), le tout-puissant syndicat, à l’usine GM d’Hamtramck, au nord de Detroit fait penser à une salle des fêtes désertée depuis longtemps. George McGregor, son président, reçoit affablement le visiteur dans son bureau à l’automne dernier, dans un calme déroutant. Et pour cause, les ouvriers sont chez eux. Après plusieurs semaines de chômage technique, l’usine où sont d’habitude assemblées des Cadillac et des Buick programme désormais ses arrêts de travail en termes de mois. L’automobile américaine est alors en passe de terminer la pire année de son histoire, avec des ventes en chute de 25 %.

Alarmant ? « Vous savez, GM sera toujours GM, réagissait il y a six mois le syndicaliste, placide. Vous connaissez l’expression “too big to fail”, trop gros pour échouer ? Ce qui compte surtout pour nous c’est de négocier de bons packages de départ. Même si c’est plus difficile qu’auparavant. » Alors que le navire était en train de sombrer, le syndicat continuait à défendre ses intérêts, tel l’orchestre du Titanic.

Fort de son pouvoir historique, l’UAW n’a accepté que tardivement des concessions. Le syndicat est créé à Detroit en 1935 par l’American Federation of Labor (AFL). Il signe son premier accord avec la direction de General Motors après une grande grève de 44 jours en 1937. Il entre la même année chez Chrysler puis quatre ans plus tard chez Ford. À l’américaine, l’UAW, syndicat d’industrie unique, défend les ouvriers de la branche et incarne un réel contre-pouvoir.

Dans les années 1960, son patron est régulièrement consulté par les présidents Kennedy et Johnson, y compris sur des sujets de société sans rapport avec l’automobile. À son pic, à la fin des années 1970, l’UAW rassemble 1,5 million d’adhérents. Ils sont trois fois moins aujourd’hui (et autant de membres retraités).

Mais jusqu’à l’explosion de la crise, l’UAW campe sur ses avantages acquis du temps de la splendeur, où ce qui était bon pour GM était bon pour le pays et vice versa selon le patron de l’époque du constructeur. Salaires très confortables (plus de 100 000 dollars par an avec les heures supplémentaires), emploi à vie, couverture santé, retraite au bout de trente ans, chômage technique payé 95 % du salaire, il fait bon travailler chez GM.

Ces derniers mois, l’UAW a accepté nombre de concessions. Baisses de salaires, reprise à sa charge de l’assurance-maladie des salariés de GM. Chez Chrysler, il s’est engagé à ne pas recourir à la grève jusqu’en 2015. En échange, il est devenu premier actionnaire du constructeur, avec 68 % du capital. Chez GM, il sera le second après l’État, avec 17,5 % des parts d’une entreprise dont la taille aura été divisée par deux.

Depuis 2005, GM cumule plus de 66 milliards de dollars de pertes. Le groupe a depuis cette date supprimé 30 000 postes chez ses ouvriers (à 74 000) et 4000 chez ses cols blancs (à 32 000).

L’américain General Motors, premier groupe automobile mondial, a annoncé mardi la suppression de 10% de ses effectifs en Amérique du nord et en Europe dès l’an prochain et la suppression progressive de la marque Oldsmobile. General Motors va supprimer au moins 5.000 emplois dans les 12 à 18 prochains mois en Europe (84.000 employés), où le groupe est présent notamment à travers les marques Opel et Vauxhall. Sur la base des chiffres communiqués par le groupe dans ses derniers résultats, les licenciements et les suppressions d’emplois en Amérique du nord (212.000 employés) porteraient au total sur plus de 21.000 personnes.

Richard Wagonner, pdg de General Motors, a annoncé une forte réduction de la production des usines en Europe comme aux Etats-Unis où une usine de fabrication de moteurs sera fermée. "Les capacités de production en Europe seront réduites de plus de 400.000 véhicules par an d’ici 2004", a annoncé Richard Wagonner. Quelques minutes avant cette annonce, le groupe avait annoncé à Luton (Grande-Bretagne) la fermeture d’une usine Vauxhall avec le licenciement de 2.000 personnes. Pour les Etats-Unis, la restructuration porte sur la suppression "sur plusieurs années" de la marque Oldsmobile. "C’est une décision qui ne va pas sans émotion", a déclaré Richard Wagonner, lors d’une conférence de presse.

Pour financer ce plan de restructuration, le groupe General Motors va passer une provision pour charges de 1,5 à 2,5 milliards de dollars avant impôt. Cette provision permettra d’assurer les coûts de la disparition de la marque Oldsmobile mais aussi de financer le plan social d’environ 4.000 salariés dans quatre usines américaines. Le réajustement aux Etats-Unis est également nécessaire avec le ralentissement du marché et la perte de vitesse de General Motors qui perd des parts de marché depuis quelques années. Le groupe va également aménager des usines d’assemblage de voitures pour fabriquer des "trucks", soit des catégories de véhicules comme les 4X4 ou les pick-up très en vogue aux Etats-Unis. L’usine d’Oklahoma (centre) sera ainsi dédiée à la production de véhicules de loisirs et la production de la berline Chevrolet Malibu sera transférée en juin 2001 à l’usine de Lansing (Michigan, nord-est). L’usine de fabrication de moteurs de Lansing sera fermée en septembre 2001 et le niveau de production des usines d’assemblage de Wilmington (Delaware, nord-est) et de Spring Hill (Tennessee, centre-est) sera nettement réduit.

Le numéro un américain s’est déclaré en faillite lundi et va se restructurer drastiquement pendant deux ou trois mois. Il passe aux mains de la Maison-Blanche, qui en contrôlera 60%.

L’incroyable a fini par se produire. General Motors, qui fut le premier constructeur mondial pendant soixante-dix-sept ans, a annoncé lundi son dépôt de bilan. Il s’agit de la plus grosse faillite industrielle qu’ait jamais connue le pays, et la quatrième plus importante tous secteurs confondus, après celles des banques Lehman Brothers et Washington Mutual en septembre dernier et celle du groupe de télécommunication WorldCom en 2002.
Le gouvernement américain s’est fixé pour objectif de faire sortir GM de son redressement judiciaire dans un délai de deux à trois mois, pendant lequel le groupe va mener une restructuration draconienne. Le plan élaboré est « viable et réaliste », et « donnera à cette entreprise américaine emblématique la chance de se redresser », a déclaré lundi Barack Obama. Au terme de cette période, l’État fédéral américain détiendra 60 % du capital du « nouveau GM » (une société qui reprendra les actifs sains du groupe) en échange d’un apport de 30 milliards de dollars supplémentaires, ce qui porte le total des aides publiques à 50 milliards de dollars en incluant les sommes déjà versées.

Au pays de la libre entreprise, le premier constructeur américain passe donc sous contrôle de l’État. Un effondrement de GM aurait causé des « dégâts énormes » à l’économie, s’est justifié le président américain. L’État canadien et le gouvernement de l’Ontario - où sont installées de nombreuses usines GM - apporteront une aide de 9,5 milliards de dollars et obtiendront 12,5 % du capital. Les créanciers obligataires recevront 10 %. Le solde (17,5 %) reviendra au fonds géré par le syndicat UAW, chargé de financer la couverture médicale des retraités. Grands perdants, les actionnaires historiques du groupe voient s’évaporer l’intégralité de leur mise.

Le dépôt de bilan de GM ne faisait plus aucun doute depuis la semaine dernière. Le numéro un américain, à qui le gouvernement avait fixé jusqu’à lundi pour présenter un plan de redressement crédible, n’y était pas parvenu. Placé sous le chapitre 11 de la loi sur les faillites américaines, GM va continuer à fonctionner normalement. Il s’agit pour le groupe de s’inspirer de l’exemple de Chrysler, le plus petit des Big Three, qui est sur le point de sortir de sa procédure de faillite après y être entré, il y a seulement un mois. La restructuration de GM, qui emploie quatre fois plus de personnes dans le monde, risque cependant d’être plus complexe.
Ces derniers jours, la Maison-Blanche et le géant de Detroit ont cependant tout fait pour arracher in extremis des accords qui devraient permettre d’accélérer la sortie de faillite. Une majorité de créanciers obligataires ont accepté samedi d’échanger leurs 27 milliards de dette contre des actions du groupe une fois restructuré. GM est aussi parvenu ce week-end à régler la cession de sa filiale européenne Opel, qui sera reprise par l’équipementier canadien Magna associé à ses partenaires russes, la banque Sberbank et le constructeur GAZ.

Un nouveau GM désendetté et compétitif ?

L’objectif affiché est de faire naître un GM allégé d’une grande partie de sa dette - qui atteint selon le document déposé au tribunal des faillites la somme colossale de 173 milliards de dollars - et plus compétitif. Il s’agit de permettre au groupe d’être rentable sur un marché américain désormais réduit à 10 millions de voitures (contre 16 millions en 2007). Pour y parvenir, le futur GM sera plus petit et plus économe. Délesté de l’Europe, le groupe se concentrera aux États-Unis sur quatre marques (Chevrolet, Cadillac, Buick et GMC). Grâce à un accord avec le syndicat UAW, ses coûts salariaux lui permettront de lutter à armes égales avec les japonais présents aux États-Unis. Le groupe va également adapter la taille de son outil de production à ses volumes en fermant quatorze usines d’ici à 2012. L’une d’elles rouvrira toutefois pour assembler une petite voiture. Les effectifs ouvriers passeront de 62 000 personnes en 2008 à 38 000 en 2011 et le nombre de concessionnaires sera réduit de plus de 40 %.

La participation majoritaire de l’État dans GM constitue une nouvelle intervention publique spectaculaire dans le secteur privé, après les aides accordées aux banques ou sa prise de contrôle du groupe d’assurance AIG. En réponse aux interrogations, Barack Obama a indiqué que l’objectif de la Maison-Blanche était « de remettre GM sur pied, de nous tenir à l’écart et de nous désengager rapidement ».

General Motors a déjà obtenu l’accord du syndicat UAW pour réduire considérablement ses coûts au détriment des travailleurs.

En moyenne, ils vont perdre près de la moitié de ce qu’ils touchaient sous forme de salaires et d’acquis sociaux. Les retraités vont devoir payer beaucoup plus pour pouvoir se soigner car le syndicat a accepté que la moitié des 20 milliards de dollars que GM doit au fonds d’assurance médicale des retraités soit remplacée par des actions de l’entreprise.

Les travailleurs, pressés depuis des mois par le gouvernement, les médias, les patrons et le syndicat lui-même, soumis au chantage à la faillite, se sont résignés à voter pour l’accord en question.

Mais malgré toutes les concessions imposées aux travailleurs, le gouvernement Obama a décidé que General Motors devait déposer son bilan et qu’il lui accordait pour l’aider 30 milliards de dollars supplémentaires. Et GM a immédiatement annoncé qu’il fermerait 14 usines aux États-Unis, supprimant quelque 20 000 emplois, sans compter les 2 600 concessionnaires dont GM veut aussi se débarrasser.

La mise en dépôt de bilan va servir à aggraver encore les attaques contre les travailleurs. Le haut cadre qui chapeaute le service financier de GM a d’ailleurs déclaré que le dépôt de bilan « offrait une occasion unique pour rétablir un bilan sain ». C’est effectivement la manœuvre largement pratiquée aux États-unis par les entreprises qui veulent se débarrasser de leurs obligations envers les travailleurs afin de rétablir et d’augmenter leurs profits. D’ailleurs Obama a lui-même reconnu que « la mauvaise passe n’était pas terminée » et que « des jours difficiles allaient venir ». Les attaques contre les salaires, les conditions de travail, les conditions de vie des retraités, vont se poursuivre. Le fonds de pension des retraités de GM est dans le rouge de 12 à 13 milliards de dollars et les pensions de retraite vont diminuer. Ce sont 500 000 retraités qui vont voir leur niveau de vie baisser dramatiquement. Quant à l’argent public, il coule à flots, argent que les travailleurs devront encore rembourser en tant que contribuables !

Mais le syndicat, lui, s’est engagé à ne pas déclencher de grève d’ici 2015, il détiendra lui-même 17,5 % de l’entreprise et aura droit à un siège au conseil d’administration. Plus que jamais, les dirigeants syndicaux vont collaborer avec la direction pour l’aider à faire des profits sur le dos des travailleurs. C’est dire qu’il faudra bien que ces derniers passent outre à la pression de la bureaucratie syndicale s’ils veulent se défendre.

Messages

  • "Il y a un aspect commun dans le développement ou, plus exactement, dans la dégénérescence des organisations syndicales modernes dans le monde entier : c’est leur rapprochement et leur intégration au pouvoir d’Etat.

    Ce processus est également caractéristique pour les syndicats neutres, sociaux-démocrates, communistes et anarchistes. Ce fait seul indique que la tendance à s’intégrer à l’Etat n’est pas inhérente à telle ou telle doctrine, mais résulte des conditions sociales communes pour tous les syndicats."

    Léon Trotsky

    dans "Les syndicats à l’époque de décadence impérialiste"

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.