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Quand Staline programmait l’assassinat de Trotsky au Mexique

15 décembre 2016, 07:30

Les crimes monstrueux commis par le régime stalinien l’ont été sous la bannière de « la lutte contre le trotskysme. » La campagne implacable de haine dirigée contre Trotsky était non seulement l’expression du désir obsessionnel de Staline de se venger de son inflexible adversaire politique. De façon plus significative, Trotsky représentait – dans l’histoire qu’il incarnait et le programme pour lequel il combattait – la négation socialiste et internationaliste consciente du régime bureaucratique nationaliste de Staline.

C’est un avis courant chez la plupart des universitaires contemporains que Trotsky ne représentait pas une menace pour le régime stalinien. Ces évaluations cyniques sont contredites par l’étude des archives personnelles de Staline. Bien qu’en exil et dépourvu de tout signe extérieur de pouvoir, le spectre de Trotsky hantait Staline. Le général Dmitri Volkogonov, biographe de Staline, a écrit que Staline avait une « armoire spéciale dans son étude » où il gardait « la quasi-totalité des ouvrages de Trotsky, fortement marqués avec soulignements et commentaires. Toute entrevue ou déclaration que Trotsky donnait à la presse occidentale était immédiatement traduite et donnée à Staline. » Décrivant la peur du dictateur de Trotsky, Volkogonov écrit :

L’idée que Trotsky parlait non seulement pour lui-même, mais pour tous ses partisans et les opposants silencieux à l’intérieur de l’URSS, était particulièrement douloureux pour Staline. Quand il lisait des œuvres de Trotsky, comme « L’école stalinienne de la falsification », « Une lettre ouverte aux membres du Parti bolchevik », ou « Le thermidor stalinien », le Leader perdait presque son sang-froid.

Pour Staline, la menace posée par Trotsky ne se limitait pas à l’opposition cachée et potentielle en Union soviétique. C’était la lutte de Trotsky pour la Quatrième internationale – c’est à dire, pour rétablir l’internationalisme socialiste en tant que le programme de la classe ouvrière dans tous les pays – qui était vue par Staline comme la menace la plus dangereuse pour la politique nationaliste poursuivie par le Kremlin dans l’intérêt de la bureaucratie dirigeante.

L’assassinat de Trotsky en août 1940 a été préparé pendant de nombreuses années grâce à l’infiltration du mouvement trotskyste international en Europe et aux États-Unis par des agents du GPU. Dans la phase initiale de leur activité, les agents staliniens ont cherché à perturber, à travers le factionnalisme et les intrigues, les activités des petites organisations trotskystes qui faisaient partie de l’Opposition de gauche internationale (le prédécesseur de la Quatrième Internationale).

Parmi les premiers et les plus importants de ces agents il y avait les frères Sobolovecius – connus sous le nom de Senin et Well – qui ont créé des ravages au sein de la section allemande de l’Opposition de gauche, nuisant ainsi à son efficacité politique dans les deux années cruciales qui ont précédé l’arrivée de Hitler au pouvoir en 1933. À la suite de la catastrophe politique en Allemagne, Senin et Well continueront à jouer un rôle central et meurtrier dans les opérations du GPU contre le mouvement trotskyste, à la fois en Europe et aux États-Unis.

De tous les agents du GPU, le plus notoire fut Mark Zborowski, un émigré polonais qui s’est infiltré dans le mouvement trotskyste en France. Avec l’aide indéfectible de sa collaboratrice, Lola Dallin (qui s’est une fois décrite comme son « frère siamois »), Zborowski, dont le nom de parti était « Étienne », a réussi à s’insinuer dans la direction de la Quatrième Internationale. Il est devenu l’adjoint politique omniprésent de Léon Sedov, le fils aîné de Trotsky et le dirigeant de la Quatrième Internationale en Europe. Avec les informations fournies par Zborowski-Etienne, le GPU fut capable de voler en novembre 1936, une précieuse partie des archives de Trotsky qui avait été secrètement stocké dans un centre de recherche à Paris. Mais suite au premier procès de Moscou, au cours duquel Trotsky et Sedov furent condamnés à mort par contumace, le Kremlin exigea que ses agents trouvent les moyens d’appliquer les sentences.

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