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Pourquoi l’impérialisme français a lâché Bozizé, son dictateur du Centrafrique, son homme de paille ?

lundi 29 avril 2013, par Robert Paris

Pourquoi l’impérialisme français a lâché Bozizé, son dictateur du Centrafrique, son homme de paille ?

L’opposition armée nommée Séléka est arrivée au pouvoir, renversant l’ancien dictateur parce que l’armée française, accourue en masse, a refusé de le soutenir militairement malgré l’envoi d’un contingent militaire français dans la capitale. L’impérialisme français n’a ni cherché à préserver la population centrafricaine des exactions des bandes armées arrivées au pouvoir, ni d’empêcher un nouveau coup d’état. On pourrait se dire : vous voyez là que la France n’intervient plus pour décider qui doit gouverner en Afrique. Mais en fait cela signifie que la France a lâché son pantin Bozizé parce que ce dernier avait changé d’alliances et prétendait désormais rouler pour les nouvelles grandes puissances comme Chine et Afrique du sud... Loin de se préoccuper que les populations allaient subir les exactions de bandes armées, la France a laissé faire devant ses yeux le coup des bandes armées et, depuis, elle laisse aussi faire les exactions contre la population…

La chute du dictateur du Centrafrique, mis en place par la France et son camp (Tchad, Congo Brazzaville, Angola), puis lâché par elle, car accusé de choisir le camp adverse (Chine, Afrique du sud). La chute du dictateur Bozizé du Centrafrique démontre que la mafia de la françafrique est toujours bien là…

François Bozizé s’était emparé du pouvoir par un coup d’État en 2003. Il avait réussi, avec l’aide directe et active de militaires français (deux avions de chasse de l’armée française survolaient Bangui pour filmer les positions des loyalistes pour le compte de Bozizé) et de miliciens tchadiens (c’est-à-dire de soldats africains travaillant pour la France et dont une bonne partie vont rester avec lui après son installation au pouvoir pour assurer sa sécurité), un nouveau coup d’État et renverse le président Patassé. Le général Bozizé chasse alors les rebelles congolais, qu’il accuse d’être auteurs de méfaits et crimes innombrables, notamment autour et dans Bangui.

À la suite d’accords, seule la candidature de l’ancien président Ange-Félix Patassé a été définitivement rejetée par la commission élue. Des accords de paix signés à Libreville le 11 janvier 2013 avaient débouché sur la formation d’un gouvernement d’union nationale composé du camp Bozizé, de l’opposition et de la rébellion. Mais arguant du non respect des accords par le clan Bozizé, les rebelles ont déclenché à nouveau les hostilités le 22 mars et déclaré vouloir mettre en place un gouvernement de transition s’ils prenaient Bangui. Le 24 mars 2013, les rebelles centrafricains de la coalition Séléka prennent le palais présidentiel de Bangui, au terme d’une offensive éclair lancée pour renverser le président François Bozizé, qu’ils n’ont pas trouvé dans la capitale. Pillages et exécutions sommaires sont signalés ça et là.

Au début de l’année 2013, lors de la prise de contrôle de la majorité de la Centrafrique par les rebelles, le président français François Hollande avait refusé son soutien à Bozizé.

Pourquoi la France qui a porté le président-putschiste au pouvoir n’intervint pas pour le sauver ?

Il s’avère que la Chine entretient depuis quelques temps des relations très privilégiées avec la RCA ; il y a peu, Bozizé a décidé d’accorder à la Chine le permis d’exploration et d’exploitation du pétrole, objet du litige entre son pouvoir et l’homme d’affaire américain patron de RSM Petroleum, Jack Grynberg.

En fait la Chine se retrouve sur presque tous les tableaux dans ce pays ; c’est toujours elle qui pourvoie le régime en armes en échange de diamants ; la Chine a aussi fortement soutenu la campagne de Bozizé. Et lorsqu’on sait que les Chinois sont déjà dans l’exploitation du pétrole au Soudan et au Tchad, allié de la RCA et dont les troupes d’élites sécurisaient plusieurs dizaines de véhicules de techniciens de la China National Petroleum Corporation et officiels Chinois en Centrafrique, on comprend très vite les enjeux géostratégiques qui se profilent dans le coin.

À partir de 2008, c’est une alliance stratégique qui s’est nouée entre Pretoria et Bangui. L’ANC voulait chasser les Français de l’un de leurs bastions d’Afrique centrale ; et François Bozizé, sortir de l’étreinte étouffante de son « ami » tchadien Idriss Déby Itno. D’ailleurs, dans sa garde présidentielle, François Bozizé a remplacé progressivement les Tchadiens par des Sud-Africains.

Bozizé, en tentant d’offrir à la Chine et à l’Afrique du Sud un rang respectable parmi les partenaires économiques du Centrafrique rompait ses alliances…

Le Centrafrique est depuis son indépendance un partenaire économique privilégié de la France, son ex-puissance coloniale, François Bozizé, qui doit à l’indulgence française sa prise de pouvoir contre le régime de Patassé en 2003, a semblé oublier ingratement de saluer la mamelle qui l’a si longtemps nourri quand il a résolument ouvert les carnets de commande du pays aux Chinois et aux Sud-Africains.

C’est dans ce pays qu’un certain Président Giscard d’Estaing avait ses safaris et ses passions pour les diamants. C’est aussi le pays qu’un certain David Dacko, premier président du pays à son indépendance en août 1960, retrouve comme chef d’Etat à bord d’un avion DC 10 de l’armée française en 1979, en même temps qu’il étudie les phrases du discours que les barbouzes des services secrets hexagonaux lui ont préparé. C’est cette terre, où passée par pertes et profits, près de 70% de la population vit encore en dessous du seuil de pauvreté en 2012, que le Général Kolingba, chef d’Etat major de Dacko, met dans son escarcelle en renversant son mentor.

Derrière l’attitude fausse de la « non intervention », le gouvernement français travaille incontestablement main dans la main avec le gouvernement américain pour déterminer l’issue de la crise en République centrafricaine.

La France a été intimement impliquée dans chaque changement de gouvernement de son ancienne colonie depuis 1960. Bozizé avait reçu une formation militaire française avant de devenir à 32 ans le plus jeune général de Centrafrique sous l’empereur auto-proclamé, Jean-Bedel Bokassa. Paris avait armé et financé Bokassa pendant qu’il était au pouvoir entre 1966 et 1979, avant de le remplacer par un coup d’Etat initié par l’invasion d’une centaine de forces spéciales française.

Après avoir passé des années en exil en France, Bozizé avait tenté plusieurs coups d’Etat militaires avant de prendre finalement le pouvoir en 2003. Le gouvernement français avait alors fourni un soutien crucial, dont des forces militaires spéciales françaises dirigeant les opérations et lançant les frappes aériennes contre les rebelles des guérillas en 2006. Si Paris refuse à présent de venir en aide à Bozizé cela laisse supposer que l’impérialisme français veut soit voir au pouvoir des forces anti gouvernementales soit voir survenir un autre changement au gouvernement de Bangui.

Si Hollande a reçu le dictateur Sassou-Nguesso à Paris alors que le peuple y subit une atroce dictature dans laquelle le revenu de 70% des Congolais est d’un dollar par jour des enquêtes en France l’accusent de détournements de fonds à hauteur de centaines de millions d’euros, c’est parce qu’en commun avec le dictateur du Tchad, celui du Congo-Brazzaville se préoccupait du changement d’orientation de Bozizé au Centrafrique qui avait décidé d’accepter l’argent de l’Afrique du sud et avait, du coup, changé ses alliances internationales, basculant du camp occidental dans celui des BRICS lié à la Chine.

Le parti communiste chinois et le parti KNK de Bozizé ont fait cause commune. Des cérémonies réunissaient exclusivement l’Ambassade de Chine et le parti KNK. Des cadres, si l’on peut s’exprimer ainsi, hommes et femmes, ont effectué des navettes en grand nombre, entre Bangui et Pékin. Pour la Chine, la coopération s’est établie entre Bozizé et son parti le KNK et le parti communiste chinois. Et la Chine avait obtenu le pétrole de Bozizé qui se trouve à Birao.

Inversement, les dirigeants pro-français du coup d’Etat en Centrafrique ont jeté au rebut les accords pétroliers avec la Chine.
Et les plus de 500 soldats français déployés à Bangui, en République Centrafricaine, ont soutenu le nouveau régime dirigé par Michel Djotodia, chef de la coalition rebelle Séléka qui a évincé dernièrement le président de la RCA, François Bozizé.

Si la nouvelle coalition armée se comporte de manière violente et antidémocratique, la France lui trouve des qualités : elle prévoit de dissoudre le parlement et suspendre la constitution de 2004, de gouverner par la dictature militaire, s’autorise à légiférer par ordonnances pour au moins trois ans, elle pille, elle vole et elle viole mais Djotodia a déjà annoncé vouloir revoir les contrats miniers et pétroliers conclus entre la RCA et la Chine et signés par le gouvernement Bozizé, pour voir « si les choses ont été mal faites et essayer d’y mettre de l’ordre. » De plus, Djotodia a déclaré qu’il inviterait en RCA la France, son ancienne puissance coloniale, aux côtés des Etats-Unis, afin de former à nouveau l’armée officielle qui a été vaincue par la Séléka le week-end dernier.

Effectivement, Djotodia planifie de remettre les ressources clé de l’économie centrafricaine à l’impérialisme français.

La situation à laquelle la population de la RCA est confrontée reste catastrophique. La plus grande partie de Bangui manque d’eau et d’électricité et l’unique hôpital en état de fonctionner admet encore 30 blessés par jour. Les Nations unies rapportent que des pénuries alimentaires qui affectent des dizaines de milliers de personnes s’étendent sur tout le pays et que le prix des produits de première nécessité comme le manioc et le riz ont triplé.

D’ores et déjà l’espérance de vie en RCA est d’à peine plus de 40 ans. Seuls 40 pour cent de la population savent lire et écrire et le taux de personnes atteintes du Sida monte en flèche.

La prise de contrôle de Bangui par les rebelles de la Séléka, avec le soutien de la France et des Etats-Unis, représente la toute dernière étape d’une recolonisation qui est cours en Afrique de la part des puissances impérialistes qui sont arrivées sur le devant de la scène grâce à la guerre en Libye. Ceci témoigne du caractère réactionnaire de la politique fondée sur l’ethnie de certaines factions bourgeoises et petites bourgeoises en Afrique et qui sont en permanence manipulées par les puissances impérialistes dans un contexte d’appauvrissement des travailleurs et des masses rurales.

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